ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |25 août 1790.1 [Assemblée nationale.) 261 aux ecclésiastiques, c’est une raison commune à tous les fonctionnaires publics; c’est le principe que les fonctions publiques doivent être séparées. On ne doit point en réunir plusieurs dans les mêmes mains : 1° parce que celui qui est chargé par la société de quelque emploi, doit avoir tout le temps et toute la liberté nécessaire pour s’y livrer tout entier : 2° parce qu’un citoyen qui réunirait plusieurs fonctions publiques, serait trop puissant et trop redoutable à la liberté publique : je demande que l’on consacre ce principe comme constitutionnel et que l’exclusion que l’on propose ici contre les ecclésiastiques qui, par cette qualité même, sont des fonction-nait es publics, soit décrétée comme une conséquence de ce principe. M. l’abbé Thibault. Je suis en général de l’avis des préopinants; mais comme je ne vois pas que les ecclésiastiques qui sont sans fonctions aient de l’influence, je crois qu’ils rentrent dans la classe des autres citoyens et qu’ils ne doivent pas être exclus. J’en fais l’amendement formel. M. Thouret, rapporteur . Les anciens canons défendent aux ecclésiastiques de se mêler des affaires contentieuses. Il est inconvenant qu’ils connaissent des affaires litigieuses. Il y a en outre une raison de fait qui s’y oppose également; c’est que chaque tribunal déjà peu nombreux serait privé, dans les affaires criminelles, des ecclésiastiques qui seraient entrés dans sa formation. M. Fréteau. Rien n’est plus sage que l’article qui vous est proposé par le comité de Constitution. Lorsque le tribunal était très nombreux, les ecclésiastiques pouvaient y être admis facilement, parce que d’autres juges prenaient leur place dans la Tournelle : aujourd’hui cela est impossible; mais autant il me paraîtrait incompatible qu’un arrêt de mort passât par la bouche d’un ecclésiastique, autant je trouve injuste de l’empêcher d’être juge de paix. Je soutiens que personne n’est plus propre à remplir cette fonction pacifique. M. l’abbé Gouttes. Je demande lu question préalable sur les amendements. Un mot suffit pour la motiver. C’est ,que si un pasteur peut être juge de paix, la partie qu’il sera obligé de condamner lui en voudra du mal. (La question préalable est mise aux voix et prononcée.) (L’article additionnelle proposé par le comité est adopté sans changement.) M. Thouret, rapporteur. La discussion qui vient d’avoir Leu sur le premier article supplémentaire, me fait présumer que les articles supplémentaires que j’ai encore à vous proposer rempliraient toute la séance; je propose donc à l’Assemblée de remettre à une autre fois la suite de ces articles et de passer immédiatement à ce que nous avons de plus instant, c’est-à-dire à V organisation des tribunaux de Paris. M. le Président met cette proposition aux voix. Elle est adoptée. M. Thouret, rapporteur. Messieurs, il est dans l’ordre de votre travail de régénérer la justice dans cette capitale, comme dans le reste du royaume. Le département de Paris est un tout indivis quant à l’ordre judiciaire, puisque vous avez décrété que les deux districts de Saint-Denis et de Bourg-la-Reine seraient seulement administratifs. Voici les dispositions que votre comité a jugé convenable de vous proposer, après s’être concerté avec les députés de la ville de Paris (1). « Art. 1er. Il y aura dans chacune des 48 sections de la ville de Paris, et dans chacun des cantons des districts de Saint-Denis et Bourg-la-Reine, un juge de paix et des prud’hommes assesseurs du juge de paix. « Art. 2. Il sera établi, pour la ville et le département de Paris, six tribunaux dont les arrondissements seront déterminés. « Art. 3. Chacun de ces tribunaux sera composé de cinq juges, auprès desquels il y aura un commissaire du roi. « Art. 4. Il sera nommé, pour chacun de ces tribunaux, quatre suppléants, dont deux, au moins, seront pris dans la ville de Paris ou tenus de l’habiter. « Art. 5. Le tableau qui servira pour déterminer le choix d’uu tribunal d’appel, aux termes de l’article 4 du titre V du décret du 16 de ce mois, sur l'organisation judiciaire, sera composé, pour chacun des six tribunaux ci-dessus, des cinq autres tribunaux et deux tribunaux de district, les plus voisins, pris hors le département de Paris. « Art. 6. L’Assemblée nationale délègue provisoirement au procureur de la commune de Paris les fonctions de procureur-syndic, à l’effet. de convoquer les assemblées primaires tant dans les cantonsdes districtsdeSaint-Denis et du Bourg-la-Reine, que dans les sections de la ville de Paris. « Art. 7. Ces assemblées se formeront et procéderont conformément aux dispositions de la section première du decret du 22 décembre dernier, relatives à ta tenue des assemblées primaires. « Art. 8. Elles éliront les juges de paix et les prud'hommes assesseurs en la forme prescrite par l’article 3 du décret du 16 de ce mois sur l’organisation judiciaire. « Art. 9. Elles nommeront aussi un électeur à raison de cent citoyens actifs présents ou non présents à l’Assemblée, mais ayant droit d’y voter, et se conformeront, pour cette nomination, aux articles 17, 18, 19, et 20 de la section première du décret du 22 septembre dernier. « Art. 10. Aussitôt que les électeurs seront nommés, le procureur de la commune de Paris, faisant les fonctions de procureur-syndic, convoquera, dans l’arrondissement de chaque tribunal, les électeurs dépendant de ces arrondissements, pour procéder à l’élection des juges au scrutin individuel et à la pluralité absolue des suffrages. « Art. 11. Toutes les dispositions contenues dans le décret du 16 de ce mois, sur l’organisation judiciaire, auxquelles il n’est pas dérogé par le présent décret, sont communes à la ville et au département de Paris. » M. Martineau. Messieurs, vous avez établi des juges de paix dans chaque district; cette institution est infiniment sage; mais est-il bien nécessaire qu’il y ait 48 juges de paix dans Paris î (1) Voyez aux Annexes de la séance, p. 268, le plan proposé par M. Talon, sur l’organisation judiciaire de Paris.