[Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 juillet 1791.] 771 du conseil général d’Autun, du conseil général de la commune de Valence, et de la société des amis de la Constitution de Saint-Malo, qui expriment à l’Assemblée la satisl'action de leurs concitoyens au sujet des décrets des 15 et 16 de ce mois et leur attachement inviolable à la Constitution et aux lois. Un membre fait part à l’Assemblée d’un arrêté du directoire du département des Ardennes qui, pour remédier à la rareté du numéraire, a établi, dans sou sein, sous sa surveillance et responsabilité, un bureau auquel seront reçus au pair les assignats contre des billets de 10 sols à 40 sols, et les mêmes billets échangés au pair contre des assignais. (L'Assemblée décrète qu’il sera fait une mention honorable de cet arreté dans son procès-verbal.) M. Boussioii fait part à l’Assemblée de deux demandes administratives du département de Lot-et-Garonne : La première, relative aux endroits où les tribunaux de district doivent et peuvent faire afficher les lois qui leur sont envoyées; La seconde, avant pour objet la suppression d’un bureau de" marque des étoffes et toiles, établi à Agen. (L’Assemblée renvoie la première de ces pétitions au comité de Constitution et la seconde aux comités de commerce et d’agriculture et des finances réunis.) M. Ramel-Hogaret, secrétaire. Voici, Messieurs, une pétition de plusieurs citoyens de la ville de Clermont-Ferrand : « Messieurs, « Vous avez, l’année dernière, promis à la nation, par votre décret sur les corps administratifs, de convoquer le nouveau Corps législatif à une époque très rapprochée. Le comité de Constitution a annoncé depuis peu à l’Assemblée que le 14 juillet la Constitution serait finie. Enfin, après avoir fixé définitivement au 5 juillet la convocation des assemblées électorales, vous les avez suspendues. 3 fois l’espoir de la nation a été déçu. Elle ignore le terme où son sort sera fixé; et maintenant des factieux menacent la patrie de renverser l’édifice de la liberté. Il est temps, Messieurs, que le peuple exerce sa souveraineté et vous fasse connaître sa volonté; et comme les dangers de la patrie sont pressants, il est de notre devoir de vous déclarer, Messieurs, que, si dans une quinzaine votre décret qui suspend les assemblées électorales n’est pas révoqué, nous emploierons les moyens que la loi donne à un peuple souverain et libre pour parvenir à cette convocation. « Nous sommes, Messieurs, les citoyens de Clermont-Ferrand « Suivent les signatures .» Cette lecture prouvera que l’Assemblée publie tout ce qui lui est adressé. Les mêmes citoyens libres ont le lendemain nommé un député pour présenter cette pétition à l’Assemblée. Le député s’est adressé à M. ie Président ; voici la délibération du vendredi 19 juillet 1791 à cet égard : c Les citoyens de Clermont-Ferrand, consternés du décret rendu par l’Assemblée nationale le 16 du présent mois de juillet, mais persuadés qu’un respect aveugle pour la loi est le seul moyen de préserver la France de l’anarchie et de maintenir la liberté, déclarent qu’en obéissant provisoirement à ce décret, ils ne cesseront d’en demander la révocation. Ils font ici leurs remerciements à MM. Pétion, Robespierre, Grégoire, Va-dier, Buz d, Camus et autres députés à l’Assemblée nationale, qui ont constamment soutenu les bons principes. Ils remercient pareillement la société des amis de la Constitution séant aux Jacobins, et les autres sociétés fraternelles, pour le patriotisme qu’elles ont manifesté dans cette circonstance. Ils ont député Jean-Hinri Bancal-Des-essart pour réitérer leurs remerciments et demander la révocation de ce décret; suivre l’effet de la pétition faite à l’Assemblée nationale par les citoyens de Clermont-Ferrand, le 14 de ce mois; demander et obtenir la convocation prochaine des assemblées électorales, et faire tout ce que son patriotisme lui inspirera pour le maintien de la liberté, et les droits sacrés et aliénables de la nation française. v Fait à Clermont-Ferrand, etc. » M. Gaultier -Bianzat. Comme je ne dois point souffrir qu’un pays dans lequel je connais de très honnêtes gens soit calomnié par l’écrit que l’on vient d’entendre, je vous ferai quelques observations. D’abord, il est à ma connaissance que l’intrigant qui a provoqué cette adresse est ici, qu’il désire beaucoup être entendu. Je ne m’y oppose pas, car je crois qu’en l’entendant lui-même, vous verrez plus particulièrement la vérité de ce que je dis, c’est-à-dire qu’il est véritablement un intrigant. Si vous ne voulez pas l’entendre, alors je prendrai la parole pour énoncer des faits qui attestent que tout ce qu’il y a d’honnêtes citoyens dans le pays ont improuvé cette conduite. Je demande que l’Assemblée explique , si elle veut entendre le député de Clermont. Voix diverses : Oui 1 oui! — Non! non! M. Delavïgne. Le particulier dont on parle est un nommé Bancal-Desessart, ci-devant notaire à Paris. Cet homme ne doit pas être admis à la barre, par la nature même de son pouvoir qui tend à vous proposer la révocation d’un décret et à vous intimer les dispositions les plus précises de la part de ses prétendus commettants. Il est chargé d’employer tous les pouvoirs de ce prétendu souverain pour vous forcer à faire sa volonté. {Applaudissements.) Je m’y oppose. M. GauUïer-Biauzat. L’Assemblée ne paraissant pas disposée à entendre M. Bancal-Desessart, je m’en vais vous faire part de ce que je sais. Il est intéresant pour mon pays que la vérité soit connue. Il m’a été envoyé, par le département du Puy-de-Dôme, une adresse faite conjointement avec le conseil général de la municipalité et les officiers municipaux, le directoire du district et l’évêque de Clermont. Avant de vous lire cette adresse, je vous préviendrai que les intrigants qui ont fabriqué celle que vous avez déjà entendue ont parmi eux le commandant de la garde nationale, le premier et le second juge du district, de telle sorte que l’on n’a pu prendre d’abord des moyens énergiques pour réprimer ces intrigants. Voici l’adresse : « Messieurs, j « Les circonstances nous imposent l’obligation I de renouveler à l’Assemblée nationale Fassu-J rance de notre soumission à ses décrets et le lAssemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |2S juillet 1 191. J 772 serment d’en maintenir l’exécution. Invariablement attachés à la monarchie, amis de cette Constitution qui fait dépendre de la délégation du peuple le mouvement du corps politique, libres jusqu’à la mort, nous voilà tels que nous sommes et tels que nous serons toujours. « Loin de nous les idées dangereuses des systèmes. Nous n’avons d’autre ambition que d’arriver au terme vers lequel vous faites de si véritables efforts. Sans la stabilité des principes, point d’ordre social. Il n’est donc point de Français qui ne doive en ce moment se rallier autour de vous, et s’unir à vos travaux. Nous saurons nous préserver de cette inquiétude qui, dans quelques parties de l’Empire, aurait pu égarer de bons citoyens et dans leur erreur leur faire prendre pour la liberté le monstre qui se masque de ses traits. « Fait à la salle du département du Puy-de-Dôme, le 23 juillet. » Tous les administrateurs des directoires de ce département ont signé. Cependant, Messieurs, les intrigants de la société dite des amis de la Constitution, qui se trouvant électeurs avaient travaillé et construit leur échafaudage, pour parvenir à la nomination , s’apercevant que, par le retard, les différentes pièces tombaient, et craignant de n’être pas nommes, ont cru devoir se donner tous les mouvements possibles pour se rendre plus ostensibles à ce département. En conséquence, ils ont envoyé des émissaires dans toutes les municipalités, pour les inviter à adhérer à la délibération qu’ils ont prise, et dont vous avez entendu lecture. 8 ont adhéré; 3 ont expressément rejeté, entre autres la ville de Riom. Le silence des autres prouve qu’elles n’ont pas encore adhéré. Vous devez induire de là et de la circonstance que, sur plus de 600 municipalités, on n’a pu en tromper que 8; que le peuple du département du Puy-de-Dôme, dont ce certain M. ûesessart se dit député, n’a point du tout l’intention que ce monsieur voulait expliquer. Moi qui connais mon pays, je puis vous assurer qu’ils sont tous bien déterminés à soutenir la Constitution jusqu’à la mort. (Applaudissements.) Mais, Messieurs, j’ai quelque chose à demander. Comme mon pays est travaillé par les intrigues, et qu’il peut arriver des malheurs, car il y en a eu, je demande que l’adresse dont on vous a fait lecture, soit envoyée au comité des recherches, parce que je ne crois pas que vous puissiez approuver qu’un commandant de garde nationale, qu’un président et un autre juge de district, que des fonctionnaires publics puissent se permettre impunément les impertinences qui sont dans cette adres se. ( Applaudissements .) Au reste, ne soyez pas surpris du nombre des signatures. Quand j’ai voulu les lire, j’ai été tout étonné, Messieurs, d’y trouver des femmes et des enfants. On a envoyé cette adresse au collège pour la signer, on a demandé à la municipalité la permission de faire battre la caisse pour appeler tous les citoyens à la signature ; la municipalité s’y est formellement 'refusée. Enfin, ils ont cru devoir prend! e le parti de faire une affiche, qu’ils ont répandue à toutes les portes de la ville. Alors tous les curieux y allaient et ceux qui savaient signer, signaient. Quant à ceux qui ne savaient pas signer, on signait pour eux. Je ne souffrirai pas que 8 municipalités séditieuses troublent mon pays. J’en demanderai la punition, et pour que cela soit fait d’une manière bien juste, bien équitable, je veux un rapport du comité des recherches. Remarquez, Messieurs, que l’intrigant principal, nommé Chazot, commandant de la garde nationale, a toute la garde nationale dans sa main, et qu’au premier moment il peut renouveler les mouvements qui ont eu lieu au mois de mai 1790, lorsqu’il est allé, lui, avec le juge du tribunal de district, enfoncer les portes d’une maison, prendre le particulier, le forcer à donner sa correspondance, décacheter des lettres et les faire imprimer. M. d’André. Si quelques particuliers, comme je n’en doute pas, ont profité des circonstances pour égarer quelques personnes, s’ils se sont permis des manœuvres criminelles, c’estaux administrateurs de département, c’est aux tribuoauxdu lieu, c’est à l’administration ordinaire à les poursuivre. Pour l’adresse actuelle, il faut examiner ce qu’elle porte, avant de savoir s’il est convenable d’en poursuivre les ailleurs. D’abord les délibérants votent des remerciements à quelques personnes de l’Assemblée : ce n’est certainement pas là un délit, et le député de Clermont peut s’acquitter hors d’ici de sa mission. Ensuite on délibère de demander la révocation du décret du 25 juin. Messieurs, le vœu générai du royaume s’est assez manifesté pour que l’opinion particulière de 4 ou 500 personnes, parmi lesquelles les députés du pays vous affirment qu’il y a des femmes, et surtout beaucoup d’enfants, pour que l’opinion dis-je de 4 à 500 individus de cette espèce ne puisse pas donner la moindre inquiétude à l’Assemblée nationale. En troisième lieu, on demande la révocation du décret qui suspend les élections. Messieurs, en général, onn’a que trop remarqué que ce sont les personnes qui aspirent à occuper des places dans la prochaine législature, et surtout les personnes qui veulent faire de la nouvelle législature une Convention, afin de remuer de nouveau à leur gré toutes les lois qui existent, afin de profiter de cette Convention pour bouleverser tout dans l’Etat et introduire l’anarchie, et pour alors se créer des places à leur gré; on a, dis-je, trop remarqué que ce sont des gens de cette espèce qui sollicitent cette révocation, pour que l’Assemblée s’y arrête. Ces gens sont connus : la nation rend justice à vos sentiments; la nation sait bien aussi que nous voulons nous délivrer du terrible fardeau que nous portons, et que ce n’est que pour son salut et pour la rendre heureuse, que ce n’est que pour terminer la Constitution et la lui livrer tout entière, que ce n’est qu’afin d’éviter de nouvelles secousses, et les chocs inévitables d’une nouvelle commotion, que nous avons retenu le pouvoir que la nation nous confie. Messieurs, la révision va être faite; le comité de Constitution finit aujourd’hui, et peut-être demain la révision vous sera présentée. Nous nous en occuperons sans relâche, sans discontinuité, lorsqu’elle sera imprimée. Je vous proposerai peut-être moi-même une mesure qui tendra à accélérer votre délibération. Les époques se presseront rapidement ; nous convoquerons bientôt les électeurs ; nous déjouerons les intrigues des factieux; nous leur prouverons que nous désirons rentrer dans la classe des citoyens, et présenter notre conduite tout entière à la critique et au jugement du peuple, s’il le fallait. Ainsi je demande que, sans s’arrêter à ces réclamations qui ne sont que le fruit [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES» [28 juillet 1791.] 773 de l’intrigue et de la faction, on passe à l’ordre du jour. {Applaudissements .) M.le Président. Que ceux qui veulent passer à l’ordre du jour ...... M. Gaisiticr-Bliatizat. Monsieur le Président, mais permettez donc... {Bruit.) La motion de M. d'André prouve qu’il n’a pas .aperçu la délicatesse des circonstances où se trouve la ville de Clermont. Voyez quels sont les coupables? Les deux premiers juges du tribunal, le commandant de la garde nationale. Les corps administratifs n’ont pas osé faire de proclamation, parce qu’ils ne sont pas assez renforcés contre l'autorité des factieux. Si, dans l’état actuel des choses, vous laissez à l’ordre du jour, ces l'aclieux diront, j’en suis certain, qu’ils ont obtenu gain de cause; et alors, Messieurs, les corps administratifs seront s au s force. Je suis intéressé à empêcher la ruine de cette ville, c’est ma patrie. Sauvez mes enfants! (Mp-plaudissements.) Si vous voulez protéger ma patrie, manifestez que vous soutiendrez les corps administratifs. Si vous ne le manifestez pas, ils sont perdus. Plusieurs membres : Le renvoi au comité! (L’Assemblée consultée décrète que la délibération et la pétition des citoyens de la ville de Clermont-Ferrand seront, ainsi que les adresses des citoyens de plusieurs villes et bourgs qui y sont jointes, renvoyées au comité des rapports et des recherches.) Une députation du directoire du département de Seine-et-Oise et de la municipalité de Versailles est admise à la barre. L'orateur de la députation s’exprime ainsi : « Messieurs, « Le département de Seine-et-Oise et la municipalité de Versailles viennent réitérer leur profession de foi politique et offrir aux représentants de la nation l’hommage qui est dû à la sagesse de leurs décrets, et spécialement à celui du 15 de ce mois. Ils viennent vous féliciter, Messieurs, du triomphe que votre courage vous a fait obtenir contre les efforts des malveillants. Oui, Messieurs, vous avez prescrit un terme à la Révolution, afin que la Constitution n’en eût point. « Puisse la Charte constitutionnelle que vous prépaie/, Messieurs, mettre le sceau à la gloire du peuple dont elle est inséparable ; qu’elle détermine, qu’elle circonscrive d’une manière fortement prononcée les droits et les devoirs de chacun; qu’elle imposesdenceà tous les factieux; qu’elle commande impérieusement le salut de la France et la tranquillité de l’Europe. Elle fixera l’opinion des siècles et la reconnaissance de nos derniers neveux. » ( Applaudissements .) M. le Président répond : « Messieurs, « Vous fûtes témoins des premiers travaux de l’Assemblée nationale; vous maniiestâtes les premiers votre indignation des efforts que firent les ennemis de la liberté naissante. Constants dans votre attachement aux bons principes, vous venez en donner une nouvelle preuve; en désapprouvant tout ce que des factieux pourraient se permettre pour porter atteinte à la Constitution. L’Assemblée nationale reçoit avec satisfaction cet hommage, et vous invite à sa séance. » M. le Président fait donner lecture d’une lettre des administrateurs du district de Versailles qui, en témoignant leurs regrets de ne pouvoir porter à l’Assemblée nationale l’hommage de leur respect et de leur admiration, au milieu des travaux qui les occupent, lui présentent h ur soumission d’une somme de 600 livres pour l’entretien de 2 gardes nationales sur les frontières. Une députation de la société des amis de la Constitution et de la garde nationale de Saint-Girons ( département de l’Ariège) est admise à la barre. L’orateur de la députation s’exprime ainsi : « Défenseurs intrépides des droits du peuple libre, vous venez de vous élever au-dessus de l’humanité; toute la France, disons mieux, toute l’Europe applaudit à votre héroïsme, et vos ladies détracteurs eux-mêmes se trouvent tout à la fois, et malgré eux, frappés de terreur et d’admiration. Au milieu de cet enthousiasme universel, les amis, les défenseurs de la Constitution se coûtenteraient-ils de vous admirer en silence? Non : ils vous doivent un nouvel hommage et -de nouveaux serments. Recevez donc, hommes sublimes, ceux d’une société patriote et d’une garde citoyenne établies dans une ville frontière, qui, pour être éloignée du centre des lumières et du civisme, n’en a pas moins ressenti toute l’influence. « L’évasion d’un roi parjure, mais trompé... » MM. de Bois-ttonvray et deBodiebrunc. A l’ordre! Monsieur. {Bruit.) Plusieurs membres : Il a raison ! {Applaudissements.) L'orateur de la députation «... semble avoir doublé nos forces en augmentant notre courage ..... »j M. «te MoastEosies*. Monsieur le Président, s’il est permis d’interrompre unliomme à la tribune, à bien plus forte raison il peut l’être à la barre. Personne ne doit souffrir que le roi soit insulté dans l’Assemblée. Vous devez consulter l’Assemblée pour savoir si un ho mine qui l’insulte à la barre doit être entendu. Un membre : Allons donc! c’est une vérité : Ecoutez-la. M. de Slontlosier. Si on vous disait toutes les vôtres, vous ne les entendriez pas. Un membre : Nous les avons entendues. M. de Montlosier. Je vous les dirai quand vous voudrez. M. ILofÜeia! {montrant M. de Montlosier). Il faut envoyer cet homme-là à l’Abbaye. (L’Assemblée décide que l’orateur de la dépu-tat'on continuera son discours. {Vifs applaudissements.) L’orateur de la députation , (continuant son discours.) « A peine là nouvelle de cette trame odieuse