198 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE stricte de la loi du 29 août, et même à en agrandir les dispositions pénales. Après avoir mûrement pesé ces motifs, et les avoir rapprochés, tant de ceux déduits en opposition par les entrepreneurs de voitures libres que des circonstances dans lesquelles se trouve la République, votre comité a considéré d’abord que les messageries nationales ne peuvent plus aujourd’hui suffire au service journalier ; que partout l’encombrement des comestibles, marchandises et effets destinés, tant aux besoins des départements, des armées de terre et de mer, et des administrations, qu’aux opérations commerciales, se fait sentir de la manière la plus fâcheuse; que quantité de ces objets précieux, comme denrées de toute nature, croupissent et se perdent dans les ports et les magasins de l’Etat et de commerce, faute de moyens pour être évacués et transportés à temps; que la navigation intérieure, affaiblie elle-même par le concours de plusieurs causes impérieuses, notamment par le service de la marine nationale, ne peut suppléer à l’insuffisance des transports par terre; qu’il s’ensuit une stagnation générale dont les effets progressifs se montrent plus alarmants de jour en jour; ce qui oblige de recourir à des réquisitions multipliées à l’infini, qui, tourmentant et fatigant l’industrie et la culture, menacent de les paralyser entièrement. Cet état de choses constaté par votre comité, il n’a pu apprendre sans une vive inquiétude que la disproportion évidente qui existe entre les relations intérieures et les ressources pour y satisfaire occasionne des retards souvent de plusieurs décades, pour le service des personnes et des choses, lorsqu’il serait du plus haut intérêt d’en accélérer la circulation dans un degré de vitesse proportionné à la nature et à l’étendue des besoins, ainsi qu’à la rapidité du mouvement révolutionnaire. Il a reconnu que, loin de pouvoir nuire, sous aucun rapport, aux messageries nationales, qui, malgré leur activité non interrompue, ne suffisent pas pour remplir, par leurs propres forces, le but de leur institution, les entrepreneurs de voitures se trouvent, dans les circonstances présentes, les auxiliaires naturels de cette administration, et que, si la faculté d’exercer ce genre d’industrie leur était interdite, les bureaux des messageries n’en éprouveraient que plus d’encombrement, le commerce plus d’entraves, et le gouvernement plus de lenteur et de dépenses. En conséquence, il s’est convaincu que le bien du service public et les intérêts généraux du commerce commandent, en ce moment plus particulièrement que dans tous autres, non seulement de garantir aux entrepreneurs de voitures fibres l’exercice de leur profession, mais encore de les encourager. C’est d’après ces considérations puissantes, et pour aider d’autant à rendre à la circulation intérieure le ressort et l’activité que comportent les circonstances, que votre comité vous propose le décret suivant (64) : (64) Moniteur, XXII, 254-255 ; Débats, n° 754, 376-378. Le comité des Transports, postes et messageries, présente un projet de décret que la Convention adopte en ces termes : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des Transports, postes et messageries, sur les réclamations d’entrepreneurs de voitures particulières pour le service public, lesquels sont inquiétés dans l’exercice de leur industrie, par suite de quelques dispositions de la loi du 29 août 1790 (vieux style), relative aux postes et messageries : Voulant faciliter et accélérer, par tous les moyens possibles, le transport le plus prompt des personnes, comestibles, effets et marchandises dans toute l’étendue de la République, et généralement rendre à la circulation intérieure tout le ressort et l’activité que les circonstances commandent et peuvent permettre; Décrète ce qui suit : Article premier. - La partie de l’art. II de la troisième section de la loi du 29 août 1790 (vieux style), qui défend à tout particulier ou compagnie, autres que les fermiers-généraux des messageries, coches et voitures d’eau d’annoncer des départs à jours et heures fixes, ni d’établir des relais, non plus que de se charger de reprendre et conduire des voyageurs qui arriveroient en voitures suspendues, si ce n’est d’après un intervalle du jour au lendemain, entre l’époque de l’arrivée desdits voyageurs et celle de leur départ, est rapportée ainsi que l’art. III de la même section en son entier. Art. II. - En conséquence, tout particulier est autorisé à conduire ou faire conduire librement les voyageurs, ballots, paquets, marchandises, ainsi et de la manière que les voyageurs, expéditionnaires et voituriers conviendront entr’eux, sans qu’ils puissent être troublés ni inquiétés pour quelque motif et sous quelque prétexte que ce soit. Art. III. - Les entrepreneurs des voitures libres ne pourront se prévaloir des autres dispositions des différentes lois relatives aux messageries nationales. Art. IV. - Toute procédure commencée, tout jugement rendu et non exécuté contre des entrepreneurs de messageries particulières, pour contravention aux articles de la loi du 29 août 1790, ci-dessus rapportés, seront annullés (65). (65) P.-V., XLVII, 196-197. C 321, pl. 1336, p. 3, Bodin, rapporteur. Moniteur, XXII, 255; Débats, n° 754, 378-379; Ann. R.F., n° 25; Gazette Fr., n” 1019 ; F. de la Républ., n° 26; J. Fr., n° 751; J. Mont., n° 7; J. Paris, n* 26; J. Perlet, n° 753; J. Univ., n° 1787; Mess. Soir, n” 789; M.U., XLIV, 395; Rép., n° 26.