[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 septembre 1791.] 145 borne à déclarer à ia nation que son intérêt l’invite à suspendre pendant*$0 années l’exercice de son pouvoir de révision, mais décrète formellement, qu’il ne pourra être fait aucune motion tendant à reviser la Constitution, ni être pris aucune délibération à cet égard, dans la législature subséquente et la suivante. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. VERNIER. Séance du vendredi 2 septembre 1791 (1). La séance est ouverte à neuf heures du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du mercredi 31 août, qui est adopté. M. Bouche remet sur le bureau un mémoire des procureurs au ci-devant bailliage de Versailles, tendant à obtenir des indemnités à cause de la suppression de leurs offices ; il en demande le renvoi au comité de judicature. (L’Assemblée, consultée, déérète qu’elle passe à l’ordre du jour sur cette proposition.) M. Pierre Dedelay ( ci-devant Delley-d’Agier). Vous voyez, Messieurs, la difficulté d’établir promptement te nouveau mode de l’os-siette des contributions directes. Je demande que celles qui se perçoivent encore sur l’ancien pied continuent à se percevoir de la même manièie pendant les 6 premiers mois de la législature. (Cette proposition est renvoyée au comité des contributions.) Un membre demande que le comité d’imposition soit chargé de proposer ses vues sur les dégrèvements à accorder aux départements dont les récoites ont été les plus mauvaises. (Cette proposition est mise aux voix et adoptée.) M. le Président annonce qu’il vient de recevoir un mémoire relatif à l’éducation nationale. (L’Assemblée, consulté J, ordonne le renvoi de ce travail au comité de Constitution.) Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une lettre de la garde nationale du bataillon de Seine-et-Oise à l’ Assemblée nationale, ainsi conçue : « Messieurs, « La garde nationale de Versailles formant plusieurs compagnies de volontaires qui composent le bataillon du département de Seine-et-Oise, nous ont députés vers vous pour déposer dans votre sein , leurs inquiétudes et leurs alarmes : appelés par vos décrets au secours de la patrie, ils se sont empressés de s’enrôler sous les drapeaux de la liberté. Les commissaires proposés à leurs formations y avaient concouru avec ardeur. Déjà un bataillon est prêt à marcher; mais, Messieurs, vous n’avez prescrit aucune règle pour leur réception. Plusieurs d’entre eux (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. lre Série. T. XXX. n’avaient pas la faculté de pourvoir à leur équipement et à leur habillement ; ils avaient offert une retenue sur leur solde, et cet offre paraissait être acceptée. Bientôt après, la revue des inspecteurs et le départ sont annoncés ; bientôt aussi le commandant général , M. d’Affry , annonce qu’il ne peut recevoir ce bataillon que quand il sera équipé. « Ne nous aurait-on assemblés que pour nous désunir? Faites, Messieurs, cesser nos inquiétudes : dites-nous, avec franchise, si notre service est encore utile à la patrie ou si nous devons retourner dans nos foyers. Servir et secourir la patrie est notre suprême bonheur; il n’est aucun sacrifice qui nous coûte pour lui prouver notre entière soumission aux lois émanées de votre sagesse. « Décrétez, Messieurs, cette retenue que nous vous offrons avec zèle. Le directoire du département pourrait, d’après vos ordres, fournir à cet équipement. Secondez, Messieurs, notre empressement et notre zèle. Quel que soit le poste que vous nous assigniez, nous y volerons avec courage. Hâtez notre départ; déjouez les ennemis du bien public qui, pour nous décourager, annoncent hautement que vous ne nous avez assemblés que pour nous licencier. La cause de la liberté est celle du monde entier. Nous combattrons les satel lites et les tyrans, s’ils osent se montrer, nous les vaincrons ou nous mourrons. Nous mourrons en hommes libres, pour le maintien de votre ouvrage; nous mourrons pour la Constitution, que nous avons juré de défendre aux dépens de notre vie. » ( Applaudissements .) M. d’André. Les comités diplomatique, militaire et des rapports, se réunirent il y a quelques jours. Il fut question de cet objet-là, on discuta ïe point de savoir si, moyennant une retenue de 3 ou 4 sous par jour, il ne serait pas possible de faire les avances d’habits et d’équipements nécessaires à ceux qui n’auraient pas d’autres moyens de se les procurer. Plusieurs membres des comités furent de cet avis ; quant à moi, je pense que cela serait très utile. Je ne sais pourquoi on n’a pas adopté ces objets à l’Assemblée nationale; je demande que les comités militaire et des rapports, auxquels cet objet sera renvoyé, soient tenus de faire le rapport demain. S’il y a des inconvénients, nous les examinerons et nous les discuterons; s’il n’y en a point, il est nécessaire que l’Assemblée prenne une mesure à cet égard, atin de pouvoir presser le départ des gardes nationales. On a déjà fait une observation à laquelle on n’a pas encore répondu ; on se plaint de ce que les gardes nationales de Paris qui sont partis sont encore àVerberie; or, je dis à l’Assemblée qu’elles sont où elles doivent être. Vous avez décrété, et très justement, outre les 3 corps d’armée pour les frontières, un corps de réserve de 15,000 hommes de gardes nationales, qui serait porté entre Senlis, Compiègne et Soissons. Vous avez désigné les départements qui doivent fournir les corps de réserve. Le département de Paris est de ce nombre; ainsi, si nous avons à nous plaindre des gardes nationales, ce n’est pas que les gardes nationales de Paris soient à Verberie, mais c’est que les 15,000 hommes n’y sont pas. J’ai dit cela afin quon ne s’inquiétât pas. (L’Assemblée, consultée, ordonne le renvoi de l’adresse de la garde nationale du bataillon de Seine-et-Oise aux comités militaire et des rap-10 146 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 septembre 1791. ports, auxquels elle enjoint d’en rendre compte demain.) M. Roussillon. Il y a 2 jours, Monsieur le Président, que des membres de celte Assemblée remplissent la doucle fonction de députés à l'Assemblée nationale et d’électeurs aux assemblées électorales. Je ne pense pas que l’Assemblée nationale veuille invoquer son décret du mois de mat 1790. D’après ce décret, il est bien décidé que les membres-de l’Assemblée nationale ne pourront remplir d’autres fonctions qu’autant qu’ils en seront chargés par une commission spéciale de l'Assemblée. Cependant, Messieurs, le corps électoral de Paris réunit plusieurs membres de cette Assemblée. Plusieurs membres : Il faut les nommer. M. Roussillon. J’ai cru qu’il était de mon devoir de faire connaître à l’Assemblée nationale cet oubli qui était fait. Il est important que tous les Français sachent que les membres de l’Assemblée seront les premiers soumis à exécuter vos décrets; si ceux qui disent être les meilleurs patriotes ne montrent pas l’exemple de la soumission à vos décrets, que deviendront-ils dans les départements ? Ce qui m’a déterminé le plus à demander à l’Assemblée nationale d’inviter les membres à se renfermer dans les fonctions de députés, c’est un discours prononcé par un de ses membres, qui a été imprimé et distribué. Ce discours est au nom d’un député électeur. II prend cette double qualité, et ce discours doit être envoyé aux 82 départements, qui apprendront par là que les membres de cette Assemblée ne sont pas soumis à vos décrets. Je crois qu’il est important de détruire l’effet qu’il pourrait produire dans les départements et, en conséquence, je demande que, lorsque l’Assemblée sera plus complète, M. le Président veuille bien rappeler aux membres de l’Assemblée, que nul ne peut remplir d’autres fonctions que celle de député. Plusieurs membres : Le décret ! M. Roussillon. On demande le décret : le voici; il est du 14 mai 1790. M. Gaultier-Riauzat. Il s'est élevé dans cette Assemblée la question de savoir si des membres de l’Assemblée pouvaient cumuler les fonctions de député à l’Assemblée nationale et d’autres fonctions publiques, c’est à l’occasion de plusieurs de nos membres nommés... M. Goupilleau. Je demande que l’on se renferme dans la question du décret. M. Gaultier-Riauaat. Vous avez jugé, il y a quelque temps, que les membres de la législature pourraient remplir plusieurs fouctions politiques, relativement aux membres de cette Assemblée nommés au département de Paris ; je pense d’après cela, que vous ne pouvez pas les punir d’être électeurs. M. Darnaudat. Je ne conçois pas comment un membre de cette Assemblée peut s’élever contre un décret aussi formel, etjedemandeque M. Roussillon veuille bien nommer les membres qui y ont contrevenu ; s’il ne le fait pas c’est moi qui les nommerai {Applaudissements) \ et pour lui en épargner la peine je nomme MM. üelavigne et Dubois de Brancé... Plusieurs membres : Et M. Gouy d’Arsy. M. Darnaudat. En conséquence, je prie Monsieur le Président de vouloir bien interdire à ces 2 membres, de la part de l’Assemblée, l’entrée des assemblées électorales. M. Roussillon. Si votre décret n’a pas été exécuté à Paris, il a été connu et respecté dans les départements; nous en avons l’exempte dans M. Gouy d’Arsy. M. Gouy est électeur à Beauvais; il s’est présenté pour remplir la double fonction d’électeur et de député : M. Gouy, électeur, a été renvoyé. {Applaudissements.) Gomme il est important, Messieurs, de ne pas laisser à nos députés la liberté de jouir de cette influence qu’ils pourraient avoir dans les élections, je crois qu’il est important d’ordonner l’exécution du décret du 14 mai et de le rappeler en particulier à tous les membres qui sont dans le cas de M. Gouy. M. Darnaudat. Il faut leur faire signifier le décret tout de suite et les envoyer chercher ( Applaudissements .), car, dans ce moment peut-être ils votent dans l’assemblée électorale. (La motion de M. Darnaudat est mise aux voix et adoptée.) M. Goupilleau. Je demande, en outre, que l’As-blée charge le ministre de l’Intérieur, de rappeler à l’assemblée électorale de Paris le décret qui en interdit l’entrée aux députés de l’Assemblée nationale et la prie de s’y conformer. (Cette motion est mise aux voix et adoptée.) M. Camus. Il a été fait hier l’élection d’une personne qui est assez connue par son patriotisme, c’est M. Garran de Coulon. Il pourrait se faire que quelqu’un craignant le patriotisme de cet excellent citoyen, veuille le laisser dans l’incertitude s’il sera élu, car, si dans l’assemblée électorale, on dit nous voulons faire une nouvelle élection parce que nous voulons être sûrs que M. Garran de Boulon sera élu, on dira : ça ne se peut pas; car l’Assemblée nationale n’apas déclaré son élection nulle. Ainsi, on ne peut pas procéder à une nouvelle élection, et l’on empêchera ainsi le député d’être nommé. A peine la législature sera-t-elle assemblée, qu’on diras l’élection de M. Garran de Coulon est nulle, et il faut le renvoyer de la législature, parce qu’aux termes du décret de tel jour, il se trouvait parmi les électeurs un député qui ne pouvait cumuler les deux fonctions. M. d’André. Je dis que, quelque désir que j’aie aussi de conserver M. Coulon, dont le patriotisme et la probité sont généralement connus, nous ne pouvons pas prononcer sur ce que M. Camus nous dit, parce que nous ne savons pas officiellement que M. Coulon est élu ou n’est pas élu. Nous ignorons absolument cela ; et si l’Assemblée voulait s’ingérer de casser une élection quelconque, vous seriez exposés à recevoir des réclamations de toutes les assemblées électorales du royaume, et c’est à la prochaine législature qu’appartient le droit de vérifier le pouvoir. Si l’élection de M. Coulon est nulle, il y a des moyens pour la faire annuler, non pas par vous qui ne pouvez pas en connaître, mais par ceux à qui la loi a confié ce droit et ce pouvoir. Ainsi nous n’avons qu’une chose à faire, c’est l’exécution de nos décrets précédents et l’exécution d’un autre décret, parce qu’il regarde deux membres de