SÉANCE DU 10 VENDÉMIAIRE AN III (1er OCTOBRE 1794) - N° 20 201 d’approvisionner nos armées, on mette tout en réquisition, et qu’il soit fait par des agens infidèles commerce des mêmes marchandises achetées la veille ; cet exemple seroit pernicieux, il aviliroit l’honneur national, et augmenteroit la cupidité à laquelle ne sont que trop sujets les hommes. Qù’aucune commission ne fasse donc ni préhensions ni réquisitions que pour les armées, et même point du tout, s’il étoit possible que le commerce fournisse. Rendez à Paris les deux assemblées de section par décade, qui sont à peine suffisantes pour les objets journaliers. Rendez-lui sa municipalité. Législateurs, vous ne souffrirez pas que la commune de Paris soit la seule privée de ses magistrats. Rendez-lui ses administrations, dont les citoyens qui les composeront, élus par le peuple, qui seul a le droit de les nommer, ayant sa confiance, puissent recevoir sa sollicitude et l’aider, par leurs lumières, au rétablissement du commerce que vous désirez. Rendez-les-leur avant l’hiver. Vous voyez combien le charbon, l’huile, le bois, le savon et tous les comestibles sont rares depuis que les réquisitions ont lieu. Et que serions-nous dans la durée de l’hiver, si vous ne vous hâtiez d’y porter remède? Ce que nous vous demandons pour nous, faites-le pour nos frères des départemens : ils le désirent comme nous. Que des lois sévères atteignent ceux qui voudroient nuire à l’intérêt général, de quelque manière qu’ils s’y prennent. Surtout que rien n’autorise l’exportation de comestibles de la République : cette loi est alarmante, immorale et dangereuse, tant que tout agriculteur n’a pas l’assurance de sa subsistance et de ses semences chez lui, lorsque les circonstances le permettent et que les lois pa-roissent les lui assurer. Mettez les droits de l’homme à l’ordre du jour; ils sont, après la nature, votre ouvrage. Vous les avez jurés, vous avez provoqué pour eux le serment de tous les Français. Les Français n’ont pas juré la liberté pour en jouir, ainsi que le disoient les prêtres du fanatisme, comme de la terre promise (c’est-à-dire, après leur mort) : hâtez-vous de les leur rendre, les droits du peuple ne s’ajournent pas. Ils l’ont fait avec vous ce serment, et ils le soutiendront : rien ne les fera changer de résolution : et comme ces sentimens sont ceux de la Convention nationale, nous venons vous assurer que tous les citoyens composant la société séante à la salle électorale sont décidés à servir de rempart à la représentation nationale, comme de maintenir les droits imprescriptibles et inaliénables de l’homme, et enfin de s’opposer de tous les moyens que leur donneront les principes, la raison et la justice, inséparables l’un de l’autre, à l’établissement de la tyrannie, sous quelque forme qu’elle se présente. La société a aussi arrêté que cette adresse seroit imprimée, affichée, envoyée dans les quarante-huit sections de Paris, par des commissaires qui seroient choisis, moitié dans les citoyens composant les tribunes, et l’autre moitié parmi les membres de la société, avec invitation aux sections d’y adhérer ; arrêté en outre qu’il en seroit envoyé deux exemplaires aux sociétés populaires de Paris (37). LE PRÉSIDENT : Citoyens, vous demandez une commune pour Paris, et le droit de nommer vous-mêmes vos magistrats; vous étendez cette demande à vos frères des départements; ignorez-vous donc que le gouvernement révolutionnaire existe, et que la Convention nationale a juré de le maintenir jusqu’à la paix? La Convention respecte le droit de pétition, mais elle sait aussi respecter ses serments. On applaudit (38). [Le président répond aux pétitionnaires que l’Assemblée ne cessera de porter son attention sur le commerce et les moyens de lui rendre toute la vie dont il a besoin. Quand à la demande faite par les pétitionnaires, de faire nommer une municipalité par les assemblées primaires : Avez-vous oublié, leur dit le président, que le gouvernement révolutionnaire existe?...] (39) 20 Le représentant du peuple Brival dépose sur le bureau quarante jettons représentant des emblèmes de la féodalité; plus, trois médailles portant la figure des deux tyrans de la France, et trois cachets armoiriés, le tout en argent, et pesant ensemble deux marcs trois onces dix-huit grains, à lui remis par le comité révolutionnaire d’Orléans, pour en faire l’hommage à la Convention nationale. Mention honorable, et renvoi des objets déposés à la Trésorerie nationale (40). [Extrait du registre des délibérations du comité révolutionnaire d’Orléans, département du Loiret, du 4ème jour s.-c. an II] (41) Un membre observe qu’il existe, au comité de surveillance la quantité de quarante jettons représentant des emblèmes de la féodalité, écrit sur l’une des faces ces mots « mairie de M. Hu-dault, 1774. Aurélia », trois médailles portant la figure des deux derniers tyrans de la France, et trois cachets armoiriés, le tout d’argent pesant ensemble deux marcs trois onces dix huit grains suivant le certificat du C. Juilien, orfèvre, qui ont été raportés au comité lors de la levée des scellés apposés sur les effets de quelques individus détenus en la maison d’arrêt des Minimes ; que les effets retraçant la figure des tyrans que la nation française par son énergie a terrassé et les figures de la féodalité qu’elle a également détruitte en reconquérant (37) Débats, n" 740, 132-134; Moniteur, XXII, 127; Ann. Patr., n° 639. (38) Moniteur, XXII, 128. (39) Débats, n” 740, 134. (40) P.V., XLVI, 209. (41) C 321, pl. 1340, p. 17. _ e. R. KJSTOI«£ ' -A R F VOL FRANÇAIS! 202 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE la liberté que les malheurs des tems luy avoient fait perdre, il demande que ces effets à figure et emblèmes, objets de la hayne des Français, soient confisqués au proffit de la république, que le représentant du peuple Brival en mission dans ce département auquel ils seront remis par le secrétaire greffier du comité, soit invité d’en faire hommage à la Convention nationale qui s’empressera sans doutte d’en ordonner l’envoi à la monnoye. Touttes ces propositions ayant été adoptées, le comité a arrêté que les effets d’argenterie précités seront remis par le citoyen secrétaire greffier du comité, au citoyen Brival représentant du peuple en mission à Orléans. Le comité invite le représentant du peuple à en faire hommage à la Convention nationale. Ch. Renaut, président, et dix autres signatures. 21 La société populaire de la commune de Thin-le-Moutier, district de Libre-Ville [Charleville], département des Ardennes, félicite la Convention nationale sur ses infatigables travaux. Cette société se glorifie de ce qu’il n’y a eu jusqu’à présent personne de suspect dans la commune de Thin, et de ce qu’aucun individu n’y a été mis en arrestation : elle annonce qu’elle a déjà fait don de quantité de chemises, guêtres et autres effets à l’usage des défenseurs de la patrie; qu’elle vient d’expédier quatre cents fagots, bois de bourdenne : plus, trois cents livres de salpêtre, et qu’elle s’occupe journellement à faire des cendres pour de la potasse. Elle ajoute à ces dons une somme de cinq cents quatre-vingt-huit livres, pour les défenseurs de la patrie qui auront le mieux mérité d’elle; elle demande que la ci-devant église du lieu soit définitivement consacrée aux séances de la société, et à l’assemblée des citoyens pour entendre la lecture des lois ; et à être autorisée à changer le cimetière qui se trouve dans le centre de la commune et entouré de maisons, en prenant pour cet objet un terrain communal situé hors la commune. Mention honorable, et renvoi des demandes au comité des Finances, section des domaines (42). 22 Une adresse du citoyen Gloppe, pour et au nom de la citoyenne Chateignier, tendante à obtenir un secours, est renvoyée (42) P.-V., XLVI, 209-210. au comité des Secours, pour en faire un prompt rapport (43). 23 Le citoyen Delorme fait hommage à la Convention nationale d’une gravure représentant le triomphe de l’immortel auteur du contrat social. Mention honorable, et renvoi au comité d’instruction publique (44). 24 La citoyenne Agnès-Josephine Cousin, veuve de Joseph Leclair, lieutenant des canonniers soldés de Landrecies, tué le 10 floréal dernier à sa batterie, sur le rempart, en défendant la place, vient réclamer la pension et le secours provisoire auxquels elle a droit de prétendre pour elle et ses enfans. Renvoyé au comité des Finances, pour la pension, et à celui des Secours, pour faire demain un rapport sur le secours provisoire à accorder (45). 25 Un membre du comité des Décrets fait des observations sur celui rendu le 7 vendémiaire, concernant le représentant du peuple Marey, qui avoit été porté sur la liste des émigrés, par les administrateurs de la Côte-d’Or; il propose une nouvelle rédaction du décret, et elle est adoptée en ces termes : La Convention nationale décrète que le nom du citoyen Marey, l’un de ses membres, député par le département de la Côte-d’Or, sera rayé de la liste des émigrés, imprimée, distribuée, ainsi que de toutes autres. Le présent décret sera inséré à la suite de ladite liste (46). 26 Et, sur la motion d’un membre, la Convention nationale renvoie au comité de Législation l’examen de la conduite des ad-(43) P.-V., XLVI, 210. (44) P.-V., XLVI, 210. (45) P.-V., XLVI, 210. (46) P.-V., XLVI, 210-211. Décret attribué à Monnel par C* II 21, p. 4. J. Paris, n° 11.