271 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [6 décembre 1790.] « Déclare vendre à la municipalité de Rungis les biens compris dans ledit état, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 dudit mois de mai, et pour le prix de 183,589 livres 5 den., payable de la manière déterminée par le même décret. » DOUZIÈME DÉCRET. « L’Assemblée nationale, sur le rapport, qui lui a été fait par son comité de l’aliénation des domaines nationaux, de la soumission faite par les commissaires de la commune de Paris, le 26 juin dernier, pour, en conséquence de son décret du 17 mars précédent, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont l’état est annexé à la minute du procès-verbal de ce jour, ensemble des estimations faites desdits biens les 26, 27, 28, 30, 31 août; 1er et 2 septembre; 20, 24, 25, 26, 27, 28, 29 et 30 octobre; 3, 4, 5, 6, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 15, 16, 17, 18, 22, 23,24 et 25 novembre derniers, en conformité de l’instruction décrétée le 31 mai dernier; « Déclare vendre à la commune de Paris les biens compris dans ledit état, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai dernier, et pour le prix de 3,109,540 liv. 5 sous 5 den., payable de la manière déterminée par le même décret. » M. de La Itochefoucault, au nom dit, comité d'aliénation , fait part à l’Assemblée de plusieurs ventes faites par la municipalité d’Orléans : il résulte que les biens se vendent au denier 30 du prix des baux, et qu’évalués 1 92,500 livres, ils ont monté, par l’adjudication, à 351,675 livres. M. ïe Président. L’ordre du jour est le rapport des comités réunis, militaire , des rapports et des recherches, sur l'affaire de Nancy (1). M. Brûlart ( ci-devant de Genlis, marquis de Sillery), membre du comité des rapports , monte à la tribune et s’exprime en ces termes : Messieurs, l’opinion publique n’est point encore fixée sur les causes du fatal événement qui vient de se passer à Nancy ; dans ces temps malheureux de divisions et de discordes civiles, chaque parti rejette sur celui qui lui est opposé les désastres qui arrivent, et nous en avons un exemple frappant dans la circonstance fâcheuse où nous nous trouvons. C’est au milieu de cette obscurité politique que vos comités ont cru devoir s’occuper des moyens de découvrir les principales causes de cet événement; c’est ce crime national qu’il faut dévoiler. Nous ne nous sommes point abusé sur les difficultés que nous devions rencontrer, étant chargé de vous faire un pareil rapport; de grands malheurs en ont été les suites; beaucoup de fautes ont été commises, et il n’y a point de classes de citoyens auxquelles nous ne puissions faire quelques reproches. Nous avons encore à redouter les opinions qui se sont formées d’après les récits plus ou moins exagérés des différents partis; mais vos comités vous doivent la vérité tout entière; ils sentent redoubler leur courage à proportion des difficultés qu’ils ont à vaincre, et iis rempliront la tâche laborieuse qu’ils ont entreprise. Nous aurons à gémir longtemps des suites fu-(1) Ce rapport est très incomplet au Moniteur. nestes, des erreurs dans lesquelles les citoyens ont été entraînés; cependant en politiques, nous devons les regarder comme une leçon terrible pour tous les citoyens du royaume; qu’ils apprennent du moins, en voyant les malheurs de Nancy, les dangers de résister aux lois sages que vous venez d’établir; qu’ils calculent combien il est dangereux de se livrer sans réflexions à l’impétuosité des passions : et qu’ils se pénètrent enfin de cette grande vérité, que chaque citoyen, dans l’emploi qu’il exerce dans la société, doit concourir individuellement au bonheur et à la tranquillité générale, et qu’il devient coupable quand il en détruit l’harmonie. Les ministres de la religion, les magistrats, les citoyens, les officiers, les soldats, chacun dans les emplois qu’ils exercent, ont une influence incalculable sur le sort des autres citoyens, et nous allons bientôt, vous en présenter un exemple frappant. Le plus grand incendie peut quelquefois provenir d’une étincelle, qu’un souffle salutaire aurait arrêté. Que les deux partis qui divisent maintenant la France, jettent les yeux sur les grandes destinées de cet Empire, si l’union renaît parmi eux ; et qu’ils frémissent en voyant les suites de nos discordes. Le sang a déjà coulé, la nation est irritée : Citoyens! réfléchissez qu’au pointoù noussommes arrivés, aucune puissance, aucun moyen ne peut déranger l’ordre immuable que la nation vient d’établir elle-même. Qu’il serait insensé au parti qui s’oppose à la volonté générale, d’espérer, recouvrir déchaînés la nation généreuse qui vient de s’en dégager, et qu’à l’époque où nous en sommes il faut nous vaincre ou obéir. Nous allons commencer le funeste récit que nous avons à vous faire. Représentants de Ja nation, pesez-en dans votre sagesse toutes les circonstances; ne perdez pas de vue que ce sont nos frères qui se sont égarés, et que c’est la nation entière qui, dans ce moment, est leur juge. Vous avez sous les yeux le rapport de MM. les commissaires du roi. Cette pièce authentique doit être notre guide dans celui que nous avons à vous faire. La suite des événements y est racontée avec une scrupuleuse exactitude. L’analyse de ce mémoire nous a paru nécessaire, nous devons rapprocher tous les faits, les combiner ensemble; et démêler s’il se peut la vérité, au milieu de cette foule d’événements qui se succèdent avec tant de rapidité; cependant, avant de les suivre dans leur intéressant travail, nous devons remettre sous les yeux de l’Assemblée les différentes époques où elle a été instruite des progrès de l’insurrection de Nancy. L’Assembiée nationale avait prononcé un décret le 6 août dernier, dont le but était de rappeler à l’ordre et à l’obéissance quelques régiments qui s’en étaient écartés. Ce décret fut envoyé à Nancy, et malgré les lois qu’il prescrit, la garnison de cette ville se permit quelques actes d’insubordination, et des démarches qui y étaient absolument contraires. Le 16 août, on lut à l’Assemblée une lettre de M. Dénoué; il vous faisait un détail effrayant des troubles, de la révolte des régiments, de la dilapidation delà caisse militaire ; elle annonçait des projets funestes ; les soldais armés parcouraient les rues le sabre à la main, et les meilleurs citoyens fuyaient la ville pour se soustraire au malheur inévitable qui la menaçait. Une lettre si alarmante parut exagérée, à quelques députés du même département ; ils avaient des lettres dans lesquelles les détails étaient