SÉANCE DU 19 THERMIDOR AN II (6 AOÛT 1794) - Nos 19-21 241 Il y avait une foule de patriotes incarcérés par les ordres du tyran et de ses complices, qui craignaient la vertu; mais il y a un autre abus que je crois devoir dénoncer à la justice de la Convention. Souvent, pour étouffer la voix de l’homme qu’on emprisonnait injustement, on le mettait au secret; combien n’y en a-t-il pas qui gémissent là sans avoir été même interrogés ! La loi dit qu’un détenu sera interrogé dans les 24 heures. Je sais bien qu’il est de grandes circonstances où ce délai n’est pas suffisant, où l’on ne peut pas interroger tous les coupables dans les 24 heures : on ne le pourrait pas dans ce moment pour les complices de la conjuration de Robespierre, mais je demande que l’assemblée décrète qu’un détenu ne pourra pas rester au secret, et sans être interrogé, plus de 3 jours (1). 19 Un membre [VILLETARD], au nom des comités de l’examen des marchés et des finances, fait un rapport sur la compagnie Masson et d’Espagnac, et propose le décret suivant, qui est adopté : La Convention nationale, ouï le rapport de ses comités des finances, et de l’examen des marchés, réunis, décrète ce qui suit : I. Les registres de la compagnie connue sous les noms de Masson et d’Espagnac, ci-devant chargée de l’entreprise des charrois et convois militaires, seront remis à la trésorerie nationale, pour être par elle compulsés et comparés aux comptes, titres et pièces produits par les créanciers de ladite compagnie, et pour que l’apurement et la liquidation desdits comptes décrétés le 13 ventôse, puissent être mis incessamment à fin, IL A cet effet, les scellés apposés sur les papiers de ladite compagnie seront levés, pour les registres en être distraits, et être rétablis aussitôt après que l’examen ordonné par la présente loi aura eu lieu, le tout à la diligence de l’agent du trésor public (2). 20 Un membre [MONMAYOU] dénonce un attentat horrible commis dans le département du Lot dans la nuit du 9 au 10 thermidor. Des déserteurs espagnols ont assassiné deux défenseurs de la patrie en route pour rejoindre l’armée. Il demande que la (1) Moniteur (réimpr.), XXI, 413; Débats, n° 685, 336; C. univ., n° 949; Mess. Soir, n° 717; J. Sablier (soir), n° 1 483; Ann. pair., DLXXXIII; Rêp., n° 230; J. Fr., n° 681; Audit, nat., n° 682; Ann. R.F., n° 249; J.S. -Culottes, n° 538; J. Perlet, n° 683; F.S.P., n° 398; M.U., XLII, 319; C. Eg„ n° 718; J. Mont., n° 99. (2) P.-V., XLIII, 70. Décret n° 10 284. Rapporteur: Ville-tard. M.U., XLII, 330; J. Fr., n° 682; J. S. -Culottes, n° 539; J. Perlet, n° 684; F.S.P., n° 399; Moniteur (réimpr.), XXI, 435-436. Convention nationale autorise expressément le tribunal criminel de ce département à juger cette affaire aussitôt que les prévenus seront traduits dans la maison de justice, et qu’en conséquence il soit autorisé à convoquer alors et de suite un juré pour prononcer promptement sur l’accusation, et que le jugement soit exécuté sans recours au tribunal de cassation. La Convention nationale renvoie cette proposition au comité de législation pour faire un rapport demain (1). Lorsqu’un homme est prisonnier de guerre, dit un autre membre, il est sous la sauvegarde des lois, et obligé de se conformer au régime établi dans le pays où il se trouve; s’il viole les lois, s’il commet des assassinats, il doit être traité comme les coupables ordinaires, et il n’est pas nécessaire que l’on prenne à son égard d’autres mesures que celles que l’on a coutume de prendre contre les assassins. On vous a dénoncé des prisonniers et des déserteurs qui ont assassiné des républicains. Je demande que leurs crimes soient promptement punis, et que la motion de Monmayou soit adoptée (2). 21 Un membre demande la parole pour réclamer contre l’opinion que lui ont prêtée certains journaux sur les colons détenus. La liberté de la presse, s’écrie-t-on de toutes parts; si vous avez des plaintes à former, adressez-vous aux tribunaux (3). [Le membre [MARTEL ? (4)] qui proposa hier de mettre en liberté les colons de l’hôtel Massiac, se plaint de ce que son opinion a été dénaturée dans le journal d’Etienne Feuillant [le Journal de France \ (Violents murmures). Une foule de membres s’écrient qu’il est temps de rendre à la presse la liberté qui lui appartient, et qui a été si longtemps anéantie. D’autres observent que ceux qui ont à se plaindre des journalistes peuvent s’adresser à eux, s’il n’y a qu’erreur; et, s’il y a délit ou malveillance, porter leurs réclamations devant les tribunaux. La Convention passe à l’ordre du jour (5)]. [Vifs applaudissements]. (1) P.-V., XLIII, 71. Décret n? 10 279. Minute de la main de Mommayou, rapporteur. Moniteur (réimpr.), XXI, 413; Audit, nat., n° 682; J. Mont., n° 99; J. Perlet, n° 683. (2) J. Sablier (du soir), n° 1 483; J. Fr., n° 681; C. univ., n° 949; Mess. Soir, n° 717; Débats, n° 685, 335; Ann. R.F., n° 249; J.S. -Culottes, n° 538; Rép., n° 230; F.S.P., n° 398; M.U., XLII, 318. (3) P.-V., XLIII, 71. (4) Voir séance du 18 thermidor, n° 56. (5) J. Perlet, n° 683; J.S. -Culottes, n° 538; J. Fr., n° 681; Ann. pair., DLXXXIII; J. Mont., n° 99; Moniteur (réimpr.), XXI, 413; F.S.P., n° 398; Mess. Soir, n° 717; C. Eg., n° 718; M.U., XLII, 319. 1* SÉANCE DU 19 THERMIDOR AN II (6 AOÛT 1794) - Nos 19-21 241 Il y avait une foule de patriotes incarcérés par les ordres du tyran et de ses complices, qui craignaient la vertu; mais il y a un autre abus que je crois devoir dénoncer à la justice de la Convention. Souvent, pour étouffer la voix de l’homme qu’on emprisonnait injustement, on le mettait au secret; combien n’y en a-t-il pas qui gémissent là sans avoir été même interrogés ! La loi dit qu’un détenu sera interrogé dans les 24 heures. Je sais bien qu’il est de grandes circonstances où ce délai n’est pas suffisant, où l’on ne peut pas interroger tous les coupables dans les 24 heures : on ne le pourrait pas dans ce moment pour les complices de la conjuration de Robespierre, mais je demande que l’assemblée décrète qu’un détenu ne pourra pas rester au secret, et sans être interrogé, plus de 3 jours (1). 19 Un membre [VILLETARD], au nom des comités de l’examen des marchés et des finances, fait un rapport sur la compagnie Masson et d’Espagnac, et propose le décret suivant, qui est adopté : La Convention nationale, ouï le rapport de ses comités des finances, et de l’examen des marchés, réunis, décrète ce qui suit : I. Les registres de la compagnie connue sous les noms de Masson et d’Espagnac, ci-devant chargée de l’entreprise des charrois et convois militaires, seront remis à la trésorerie nationale, pour être par elle compulsés et comparés aux comptes, titres et pièces produits par les créanciers de ladite compagnie, et pour que l’apurement et la liquidation desdits comptes décrétés le 13 ventôse, puissent être mis incessamment à fin, IL A cet effet, les scellés apposés sur les papiers de ladite compagnie seront levés, pour les registres en être distraits, et être rétablis aussitôt après que l’examen ordonné par la présente loi aura eu lieu, le tout à la diligence de l’agent du trésor public (2). 20 Un membre [MONMAYOU] dénonce un attentat horrible commis dans le département du Lot dans la nuit du 9 au 10 thermidor. Des déserteurs espagnols ont assassiné deux défenseurs de la patrie en route pour rejoindre l’armée. Il demande que la (1) Moniteur (réimpr.), XXI, 413; Débats, n° 685, 336; C. univ., n° 949; Mess. Soir, n° 717; J. Sablier (soir), n° 1 483; Ann. pair., DLXXXIII; Rêp., n° 230; J. Fr., n° 681; Audit, nat., n° 682; Ann. R.F., n° 249; J.S. -Culottes, n° 538; J. Perlet, n° 683; F.S.P., n° 398; M.U., XLII, 319; C. Eg„ n° 718; J. Mont., n° 99. (2) P.-V., XLIII, 70. Décret n° 10 284. Rapporteur: Ville-tard. M.U., XLII, 330; J. Fr., n° 682; J. S. -Culottes, n° 539; J. Perlet, n° 684; F.S.P., n° 399; Moniteur (réimpr.), XXI, 435-436. Convention nationale autorise expressément le tribunal criminel de ce département à juger cette affaire aussitôt que les prévenus seront traduits dans la maison de justice, et qu’en conséquence il soit autorisé à convoquer alors et de suite un juré pour prononcer promptement sur l’accusation, et que le jugement soit exécuté sans recours au tribunal de cassation. La Convention nationale renvoie cette proposition au comité de législation pour faire un rapport demain (1). Lorsqu’un homme est prisonnier de guerre, dit un autre membre, il est sous la sauvegarde des lois, et obligé de se conformer au régime établi dans le pays où il se trouve; s’il viole les lois, s’il commet des assassinats, il doit être traité comme les coupables ordinaires, et il n’est pas nécessaire que l’on prenne à son égard d’autres mesures que celles que l’on a coutume de prendre contre les assassins. On vous a dénoncé des prisonniers et des déserteurs qui ont assassiné des républicains. Je demande que leurs crimes soient promptement punis, et que la motion de Monmayou soit adoptée (2). 21 Un membre demande la parole pour réclamer contre l’opinion que lui ont prêtée certains journaux sur les colons détenus. La liberté de la presse, s’écrie-t-on de toutes parts; si vous avez des plaintes à former, adressez-vous aux tribunaux (3). [Le membre [MARTEL ? (4)] qui proposa hier de mettre en liberté les colons de l’hôtel Massiac, se plaint de ce que son opinion a été dénaturée dans le journal d’Etienne Feuillant [le Journal de France \ (Violents murmures). Une foule de membres s’écrient qu’il est temps de rendre à la presse la liberté qui lui appartient, et qui a été si longtemps anéantie. D’autres observent que ceux qui ont à se plaindre des journalistes peuvent s’adresser à eux, s’il n’y a qu’erreur; et, s’il y a délit ou malveillance, porter leurs réclamations devant les tribunaux. La Convention passe à l’ordre du jour (5)]. [Vifs applaudissements]. (1) P.-V., XLIII, 71. Décret n? 10 279. Minute de la main de Mommayou, rapporteur. Moniteur (réimpr.), XXI, 413; Audit, nat., n° 682; J. Mont., n° 99; J. Perlet, n° 683. (2) J. Sablier (du soir), n° 1 483; J. Fr., n° 681; C. univ., n° 949; Mess. Soir, n° 717; Débats, n° 685, 335; Ann. R.F., n° 249; J.S. -Culottes, n° 538; Rép., n° 230; F.S.P., n° 398; M.U., XLII, 318. (3) P.-V., XLIII, 71. (4) Voir séance du 18 thermidor, n° 56. (5) J. Perlet, n° 683; J.S. -Culottes, n° 538; J. Fr., n° 681; Ann. pair., DLXXXIII; J. Mont., n° 99; Moniteur (réimpr.), XXI, 413; F.S.P., n° 398; Mess. Soir, n° 717; C. Eg., n° 718; M.U., XLII, 319. 1*