22 [Assemblée nationale.] l’obéissance qui vous est due, à la fidélité que nous avons jurée à la nation , à la loi, au roi » . Adresses des gardes nationales de plusieurs villes, bourgs et communautés de Dauphiné, représentant 18,500 hommes armés ; ils ont prêté le serment dans la forme suivante : « Nous, citoyens français, habitant les Alpes, réunis sur les rives delà Drôme, unis par l’amour du bien général et de la liberté, jurons en présence du père des hommes, jurons sur l’autel de la patrie, sur nos consciences, sur nos armes, et sur ce qui nous est Je plus cher, de former, dès ce moment, entre nous et tous les bons Français, une chaîne d’union et de fraternité propre à soutenir les lois émanées de l’Assemblée nationale, à faire respecter l in violubili té des membres qui la composent, et à voler au secours de tous ies Français qui combattraient pour la liberté. « Nous jurons de rester fidèles à notre bon roi, et de lui donner en toute occasion des preuves de l’amour que la vertu inspire à tous les Français. « Pénétrés de respect pour les dignes représentants de la nation, et d’admiration pour leurs nobles travaux, nous leur vouons une reconnaissance sans bornes, et jurons d’exposer pour eux nos fortunes et nos vies. « Nous jurons de veiller, tant individuellement que collectivement, à tout ce qui tient à l’ordre public, de favoriser le transport des subsistances, et de faire respecter ies personnes et ies propriétés. « Nous jurons de nous rendre au premier avis partout où le bien public nous appellera; nous abjurons toute distinction de province; et là où les Français sont unis par l’amour de la liberté, le respect pour la loi, et la fidélité pour un monarque ami de ses sujets, nous reconnaîtrons nos frères, nos amis, nos concitoyens. » 11 a été fait lecture d’une adresse des maire et officiers municipaux de la ville de Grenoble; l’Assemblée nationale en a ordonné l’impression ainsi qu’il suit : « Nosseigneurs, « La commune de cette ville, dont l’ancienne administration avait enchaîné tous les sentiments, consacre les premiers jours de la liberté quijui est rendue à vous en témoigner sa reconnaissance. G’est par l’organe des magistrats que vos sages décreis lui ont permis d’élire, qu’elle peut, Nosseigneurs, vous offrir aujourd’hui l’hommage de ses vœux et de son adhésion. Déjà les diverses corporations avaient, dans des adresses particulières, exprimé leur respect et leur soumission pour les lois émanées de l’Assemblée nationale; et d’autres citoyens, que le patriotisme avait également réunis, s’étaient empressés de suivre un exemple que, sans doute, ils auraient donné, si chacun n’eût alors disputé de zèle. Maintenant c’est la ville entière qui, par l’acclamation la plus universelle, au milieu de la joie que vient de produire la première élection de ses représentants, applaudit aux efforts de l’auguste Assemblée dont les résolutions préparent à la France une prospérité qui sera son ouvrage. « Quels litres, Nosseigneurs, n’avez-vous pas acquis sur la reconnaissance de la nation ! Quel spectacle à la fois touchant et sublime nous offrent aujourd’hui vos travaux immortels 1 Une constitution digne d’un peuple libre, digne surtout de ces génies célèbres qui en ont d’abord [4 mars 1790.] médité l’ensemble, s’élève sur les ruines du despotisme, et sapant les abus accumulés avec les siècles, y substitue les droits de l’homme, de la nature et de la raison. En vain ies ennemis de la Révolution , qu’un vil égoïsme avait soulevés, semaient des obstacles sur votre route; en marchant d’un pas ferme dans la carrière, en vous environnant d’un peuple généreux que vous appeliez à la liberté, vous avez, Nosseigneurs, remis à leur place tous les pouvoirs intermédiaires qui avaient usurpé celui de la nation, et vous avez frappé de mort les erreurs et les préjugés qui éternisaient nos maux politiques. « La calomnie vous accusait du crime de vouloir attenter aux droits du monarque, et i’Assemblèe nationale n’a répondu à ces vaines clameurs qu’en affermissant les marches du trône, où ne s’assiéront plus que des rois citoyens. « Mais cetie heureuse révolution commandait aussi de grands sacrifices; elle exigeait impérieusement la répartition de tous les impôts, i’a-bolilion de tous les privilèges, rauéantissement des droits féodaux, reste de l’e>clavage et de la tyrannie. En prouvant, Nosseigneurs, que le titre de citoyen n'appartenait qu’à ceux qui l’avaient acheté,' qui l’achetaient encore en acquittant la dette publique, vous avez soumis tous les sujets de ce vaste Empire au plus imprescriptible de leurs devoirs, celui de supporter les charges de l’Etat qui les nourrit et les protège. « La religion qui, dans le principe, s’honora toujours de ses privations, moins occupée de ses jouissances que des grands intérêts qui lui sont confiés, ne verra plus que le seul objet de sa sublime institution, et reprendra l’esprit de son divin auteur. « A tant de biens produits en si peu de temps par les héros du patriotisme, il ne manquait plus que d’en assurer, d’en perpétuer l’existence. Il est enlin venu, ce jour mémorable, ce jour que l’histoire va consacrer dans les fastes de la nation, ce jour où le successeur de Louis Xll et de Henri IV, après l’examen le plus réfléchi de la - constitution qu’il avait approuvée, a renouvelé la promesse auguste d’en maintenir l’exécution. Il a formé avec son peuple le contrat le plus solennel ; et, par cette union de tous les pouvoirs, qui commande l’obéissance, le respect et la soumission, il a détruit tous les obtacles, il a vaincu toutes les résistances qui s’opposaient encore à la révolution. « La France, Nosseigneurs, retentit des actions de grâces dont vous avez donné le premier exemple. Pères de la patrie, recevez celles de tout un peuple qui vous doit le bonheur dont il va jouir. Toutes les communes de ce royaume, dont l’ad-; minisiration retrace aujourd’hui le beau siècle de Charlemagne, unies par les liens de la fraternité, du patriotisme et de la concorde, ont prêté le serment de vous être fidèles, et de mourir plutôt que de le violer. » Nous sommes avec un très profond respect, « Nosseigneurs, « Vos très humbles et très obéissants serviteurs, « Les maire, officiers municipaux et conseil , général de la commune de la ville de Greno-, ble. » ' Cette lecture achevée, il est prononcé à la barré plusieurs discours de députés extraordinaires de différentes villes du royaume, qui, en présentant ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 23 [Assemblée nationale.] ARCHIVÉS PARLEMENTAIRES. [4 mars 1790.] la plus parfaite adhésion aux décrets de l’Assemblée, et offrant divers dons patriotiques, ont les uns prêté et renouvelé le serment civique, les autres déclaré qu’il n’était pas besoin qu’ils annonçassent qu’eux et leurs concitoyens l’avaient prêté. Suit la liste de ces discours : Discours de M. Taverne de Montdhiver, ancien mousquetaire, bourguemestre honoraire, et l’un des majors de la garde nationale de Dunkerque. Discours de M. Faulcon, député suppléant du Poitou, et de M. Jouineau des Loges, notable de la commune de Poitiers, tous deux députés de cette dernière ville. Discours prononcé au nom des citoyens de la ville de Meulan. Discours prononcé au nom des citoyens de la ville de Montmirel en Brie. Discours prononcé au nom des citoyens de la ville de Nontron en Périgord. Discours prononcé au nom des citoyens de la ville du Gliâteau-du-Loir. Discours prononcé au nom des citoyens de la ville de Cherbourg. Discours prononcé au nom du bataillon de Saint-Martin-des-Champs de la garde nationale de Paris. Discours de M. Allets, auteur de l’almanach militaire national de Paris, qui offre son ouvrage en don patriotique. M. le Président fait à tous ces discours une réponse par laquelle il exprime aux personnes qui les ont prononcés, la satisfaction de l’Assemblée nationale ; il les invite à assister à la séance. M. te Président. Plusieurs objets sont à l’ordre du jour. L’Assemblée entend-elle donner la priorité à l'affaire concernant le parlement de Bordeaux ? Cette priorité est accordée. M. le comte Mathieu de Montmorency, membre et organe du comité des rapports , commence par donner lecture des pièces suivantes : Réquisitoire de M. Dudon, procureur général du roi et arrêt de la COUR de parlement concernant les attroupements gui se sont formés et les ravages qui ont été commis dans certaines provinces du ressort de la Cour (1). Du 20 février 1790. — Ce jour, le procureur général du roi est entré et a dit: Messieurs, qu’il est douloureux pour nous d’être forcé de faire diversion à des témoignages apparents de félicité publique, pour fixer vos regards sur les fléaux et les calamités sans nombre qui affligent et dévastent une partie de votre ressort ! Tout ce que le roi avait préparé pour le bonheur de ses sujets ; cette réunion des députés de chaque, bailliage, que vous aviez sollicitée vous-mêmes pour être les représentants de la nation, pour travailler à la réformation des abus et pour assurer le bonheur de l’Etat; tous ces moyens, si heureusement conçus et si sagement combinés, n’ont produit jusqu’à présent que des maux qu’il serait difficile d’énumérer. La liberté, (1) Ces documents sont incomplets au Moniteur. ce sentiment si naturel à l’homme, n’a été pour plusieurs qu’un principe de séduction, qui leur a fait méconnaître leurs véritables intérêts, tandis que d'autres en ont fait un cri de ralliement auquel se sont rassemblés les hommes les moins dignes d’en jouir. Ainsi se sont formées ces hordes meurtrières qui ravagent le Limousin, le Périgord, l’Agénois, et une partie du Condomois. Ces provinces sont dans ce moment inondées du sang de leurs habitants; ce n’est de toutes parts que meurtres, incendies; ce sont des ravages de toutes espèces, et des cruautés dont il serait aussi long que pénible de vous faire le tableau. Mais qui pourra concevoir quel est l’empire de ce prestige destructeur qui, dans tant de provinces, et dans le même temps, a séduit les habitants des campagnes au point de leur faire abandonner la culture des terres pour former des attroupements séditieux, et qui tournant pour ainsi dire, leur fureur contre eux-mêmes, les a portes à d étruire par le pillage, les dépôts de leur subsistance actuelle, à intercepter la circulation des grains, et à nous inspirer encore des alarmes sur la récolte à venir? La dévastation des châteaux n'a point assouvi leur rage; ils ont osé commettre les mêmes horreurs dans les églises, et on nous assure que, dans leur fureur, l’autel n’a pas échappé à leurs mains sacrilèges. Voilà, Messieurs, les premiers fruits d’une liberté publiée avant la loi qui devait en prescrire les bornes, et dont la mesure a été livrée à l’arbitraire de ceux qui avaient tant d’intérêt à n’en connaître aucune. Mais non, Messieurs, la loi existe encore, et il est honorable pour vous qui en êtes ministres, comme pour nous qui en sommes l’organe, de donner aux juges de votre ressort l’exemple de ce courage qui ne connaît que le devoir, de les rassurer sur leurs tribunaux, et de leur inspirer la force de poursuivre ces brigandages avec toute la sévérité des ordonnances. Eh ! que craindraient-ils en effet ? La justice et la loi trouveront assez d’appuis dans ces citoyens dont nous vous peignons les malheurs et les alarmes ; car il en est dans les campagnes même où la contagion a fait le plus de progrès, il en est, disons-nous, qui savent, ainsi que les milices des villes, qu’ils sont armés contre les séditieux, contre les brigands, contre les ennemis du bien public, pour le maintien de l’autorité royale et de l’empire des lois , pour le retour de l’ordre et de la police générale, sur lesquels repose le bonheur public. Ainsi les détracteurs de la magistrature, inquiets ou jaloux de l’arrêt que vous allez rendre, se hâteraient vainement d’en publier l’insuffisance pour en atténuer les effets ; ils ne nous accuseront pas d’avoir vu tant de maux avec indifférence ; ils n’abuseront plus de la crédulité des peuples ; et dût cet acte de votre justice souveraine être le dernier, ce peuple y reconnaîtra peut-être encore ceux dont ii a pleuré la captivité, ceux qu’il a si souvent et si justement appelés ses défenseurs et ses pères. Atant, requérons être ordonné qu’à la diligence de nos substituts dans les sièges royaux, et des procureurs d’offices dans les juridictions seigneuriales, chacun en droit soi, il sera informé des faits mentionnés dans le présent réquisitoire, pour le procès être fait et parfait aux auteurs, fauteurs et participes desdits délits, suivant la rigueur des