420 lAssemblee nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 12 août 1791. 1 (Ce décret est mis aux voix et adopté.) Un de MM. les secrétaires annonce que les membres du comité des monnaies, ainsi que les membres de l’Assemblée désignés au cours de la séance pour leur être adjoints, s’assembleront ce soir à six heures.. M. Merlin. Je demande que l’Assemblée prenne des mesures pour que le comité monétaire finisse enfin ses presque interminables travaux ; je demande qu’il soit chargé de nous présenter demain le mode d’exécution de votre décret sur la fonte des cloches. Rien n’est plus pressant, et j’invoque les suffrages de tous les bons citoyens ; rien n’est plus pressant que de travailler à nous détourner du précipice où la coalition des financiers et des ennemis de la Révolution veut nous jeter. M. Belïais-Courménil. L’exécution de vos décrets n’est pas du ressort de votre comité, mais bien du ministre. Au lieu de renvoyer au comité, il est bien plus court d’appeler le ministre dans l’Assembiée, pour qu’il rende compte de l’état où en sont les choses. Plusieurs membres demandent que M. Merlin rédige sa motion. MM. Prieur, Roussillon et Garat (aîné) reprochent les lenteurs de la fabrication de la petite monnaie au comité des monnaies et à la commission monétaire nommée par le pouvoir exécutif. Un membre dit que les expériences qu’on ne cesse de proposer jetteront dans des frais incalculables et entraîneront des délais funestes dans la circonstance. Un membre expose qu’il est nécessaire d’avoir un rapport de la part du comité qui donne des explications claires et précises sur cet objet. M. de Cernon, au nom du comité des finances. Je viens vous proposer, Messieurs, un projet de décret qui donnera satisfaction aux diverses observations qui viennent d’être présentées ; il est relatif à la répartition de la petite monnaie actuellement existante dans toutes les Monnaies du royaume et de celle qui sera incessamment fabriquée. Voici ce projet de décret : « L’Assemblée nationale décrète : « Art. 1er. La distribution des monnaies en espèces de cuivre et celle qui proviendra de la fonte des cloches, sera faite par les hôtels des monnaies entre les départements indiqués pour chacune de ces monnaies, dans les proportions réglées par l’état annexé au présent décret. En conséquence, le directeur de chaque hôtel des monnaies sera tenu d’envoyer, à la réception du présent décret, au directoire de département avec lequel il sera en correspondance, un bordereau certifié de lui, qui énoncera la somme fabriquée actuellement existante en monnaie de cuivre dont la distribution pourra être faite sur-le-champ. « Art. 2. Le directeur dé chaque hôtel des monnaies continuera d’adresser au directoire de département, le dernier jour de chaque semaine, Un état de ce qui sera fabriqué dans le cours de chaque semaine, tant en monnaie de cuivre qu’en métal provenant delà fonte des cloches. « Art. 3. Chaque directoire de département connaîtra, d’après ses bordereaux respectifs, et d’après la proportion dans laquelle il devra participer, suivant l’état annexé au présent décret, à la fabrication déjà existante et à celle qui existera chaque semaine, le montant des sommes dont il aura la disposition; et il pourra faire transporter ses espèces. » M. Rewbell. J’observe que si on avait à dessein cherché une route très longue pour faire la répartition de la monnaie, on n’aurait pas pu en prendre une plus longue que celle que prend votre comité des monnaies. En effet, que veut dire cette correspondance des directoires des départements avec les hôielsdes monnaies? On fait chercher par chaque directoire de département la monnaie aux hôtels des monnaies ; mais le directoire de département n’a pas même un receveur, il n’a pas d’assignats à recevoir; ce sont les receveurs de district qui ont les assignats ; et par conséquent les hôtels des monnaies devraient plutôt correspondre avec les directoires de district qui ont des recettes et des répartitions à faire. Il est donc évident, Messieurs, qu'on devrait vous présenter un mode plus expéditif de répartition de la menue monnaie que celui que l’on vous présente, car les directoires de département doivent correspondre avec les directoires de district qui doivent avoir le maniement primitif. M. de Cernon, rapporteur. Il était naturel de prendre pour l’émission delà monnaie la marche ordinaire de l’administration, et cette marche a paru fort sage; l’Assemblée l’a toujours adoptée. Lorsqu’on envoie des assignats de 5 livres, c’est au chef-lieu du département qu’on les adresse ; le chef-lieu du département en fait la répartition et les adresse aux directoires de district. En effet, le département n’admiuistre pas les deniers ; mais il ordonne l’administration des deniers. De même on a pensé que c'était au directoire de département que la monnaie devait être adressée, pour qu’il la remplace par des assignats, pris dans la caisse du receveur, et à l’instant même il en fait la répartition aux caisses des districts : cela n’entraînera aucune lenteur. M. Salle. M. Rewbell a déjà trouvé la marche proposée par le comité beaucoup trop longue. Je crois que les sols coulés peuvent passer immédiatement des mains de l’artiste dans les mains de celui qui doit en faire la distribution. J’observe que toutes les fois que le comité des finances trouve l’occasion de nous jeter entre les mains des financiers, il ne la manque pas. (Murmures.) Nous venons d’en faire une très funeste expérience; nos assignats de 5 livres, nos gros sous viennent d'être, sous nos yeux, à Paris, livrés à la borde financière, pour en faire la distribution au peuple. Cependant, Messieurs, le peuple a partout des mandataires nommés par lui-même. Le peuple eu a surtout à Paris: Eh bien! on ne veut pas de ces mandataires, on veut des financiers, on jette toujours notre monnaie entre les griffes de la finance, abîme le plus infernal que je connaisse. Je demande donc que les sous coulés passent immédiatement des mains de l’artiste entre les mains de celui qui doit en faire la distribution; je demande qu’il soit ajouté que le ministre des [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 août 1791.] f 21 contributions publiques enverra immédiatement les matrices des pièces de 15 sous dans les hôtels des monnaies de Strasbourg, de Metz et de Lille, et que les pièces fabriquées qui en proviendront serviront immédiatement au payement des troupes. Par ce moyen, vous déjouerez les accapareurs de petite monnaie. M. Rabaud-Satnt-Etîenne. J’admets la pro-osition du préopinant sur la manière de distri-uer les pièces de 15 sols qui doivent être incessamment fabriquées; c’est assurémeutun moyen infaillible pour empêcher les accaparements; mais je profite, Messieurs, de cette occasion pour inviter l’Assemblée à ne pas se laisser entraîner par les invectives graves qu’on ne cesse de répandre contre les comités. On se plaint à vous de la vente des petis assignats; la cause en est dans vos décrets. Par un premier décret, vous aviez dit que les petis assignats de 5 livres ne seraient mis en émission que concurremment avec la monnaie de cuivre, et lorsqu’il y aurait pour 2 ou 3 millions de petits assignats fabriqués. Ensuite, au lieu de vous en tenir à ce premier mode, de les mettre en émission concurremment avec les gros sols, vous avez décrété qu’on ne les donnerait qu’en payement, et par appoint aux fonctionnaires publics; mais ce mode d’émission n’était pas assez abondant pour que le public en eût en quantité suffisante. Or, comme il est d’expérience que la monnaie quelconque augmente de valeur en proportion de sa rareté, le petit assignat, devenu rare, a nécessairement augmenté de prix. On vous a dit hier qu’une des causes de cette rareté des petits assignats était la disposition que s’étaient permis d’en faire quelques commis de payeurs : ce n’est pas là le mot précis. Une des véritables causes, c’est qu’au lieu de commencer par distribuer ces assignats dans les provinces, on a commencé par les distribuer dans Paris, et nous tous, députés des départements, recevons une foule de lettres de nos commettants qui nous demandent des petits assignats. Quant à la monnaie de cuivre, il faut attribuer le retard de la fabrication au manque de matière. J’observe à cette occasion qu’il n’y a que la Monnaie de Rouen qui en ait fabriqué une grande quantité, parce qu’elle est près de la manufacture de Rornilly, qui a fourni avec le plus grand zèle, au point que le département est approvisionné et que l’Hôtel des monnaies continue sa fabrication. Enfin, quant à la monnaie coulée, j’observe que c’est à tort que l’on s’est plaint du retard de la fabrication de cette monnaie ; car, comme elle est confiée à des entrepreneurs qui ont intérêt à la faire, s’ils avaient pu aller plus vite jusqu’à présent, ils n’auraient pas manqué de le faire. Je finis en demandant qu’on n’inculpe pas les comités sans raison ni fondement, ce qui ne produit aucun bien et ne fait que jeter du trouble et de la défaveur dans leurs travaux. M. Fréteau-Saint-Jast. Je me rappelle qu’il n’y a pas eu de décret pour révoquer celui qui avait ordonné la fonte et le coulage des cloches. Je me rappelle que sur une observation de M. Biauzat, l’Assemblée parut rester, au moins momentanément, et jusqu’à l’époque du nouveau rapport qui lui serait fait, indécise sur l’opportunité de cette fabrication de cloches et de leur coulage en monnaie. J'espère que le comité effacera l’impression qu’a produite l'objection de M. Biauzat; et j’observe que l’amendement de M. Salle au projet du comité des finances ne peut pas être adopté dans ce moment plus que le décret lui-même, parce qu’on sent de quelle importance il est de ne pas permettre la confusion de monnaie qui coûtera 2 sous la livre avec la monnaie qui en coûtera 24. M. Salle. Je réponds à M. Fréteau que quelque soit la matière que l’on emploie pour contrefaire celle des cloches, leur résultat ne sera jamais pareil. La couleur sera absolument différente. Hier, un membre de l’Assemblée nationale nous a assuré qu’il avait suivi, auprès de très habiles métallurgistes, les opérations qu’on pouvait faire pour trouver les moyens de contrefaire les sols, et qu’il en était résulté qu’on pourrait bien approcher de l’imitation de la matière des cloches, mais que pour cela il fallait employer des matières qui coûteraient 16 sols la livre, et que ce serait assez difficile. M. de Crillon, jeune. Je dois faire part à l’Assemblée d’une conversation que j’ai eue hier avec M. Tarbé. Je lui ai demandé si les expériences pour la fonte des cloches avançaient ; il m’a dit qu’hier on faisait des expériences décisives ; il m'a ajouté que l’on présumait presque avec certitude qu’en ajoutant du cuivre avec le métal des cloches dans la proportion, je crois, de tiers ou de moitié, il résulterait de ce mélange que ce métal deviendrait infiniment propre à faire de labonne monnaie, dont il était impossible de contrefaire la couleur, et qu’on �pourrait aisément reconnaître celle des contrefacteurs. D’après cela, je pense comme M. Fréteau, qu’il y aurait de l’imprudence à ce que l’Assemblée nationale décrétât une proposition qui tendrait à inonder le royaume d’une monnaie de mauvais aloi. M. Millet de Murean. Le véritable retard apporté dans la fabrication est le retard du poinçon. Quant au fait allégué par M. Fréteau, je vois avec peine qu’on a mis ce fait en avant pour jeter de la défaveur sur le métal des cloches et pour donner, par conséquent, de la défaveur à la monnaie de cuivre, qui ne peut subsister dans le commerce. Quant à l’amendement de M. Salle, il peut être juste; mais à quoi teud-il? Il tend aux moyens d'exécution. Vous avez ordonné qu’il vous serait fait un rapport sur les moyens d’exécution ; c’est alors que cet amendement doit trouver place, et je demande qu’il soit renvové au comité à cet effet. M. Rewbell. Je demande le renvoi pour tout le décret. M. le Président. Voici la rédaction de la motion de M. Merlin : « L’Assemblée décrète que le ministre des contributions publiques fera incessamment exécuter le décret qui ordonne le coulage des cloches du département de Paris en petite monnaie, et charge le comité monétaire de lui présenter ses vues, tant sur les moyens d’exécution dans le département de Paris, que sur ceux d’étendre la disposition dudit décret dans tout le royaume. » 42® [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [| août 1791.] Plusieurs membres ? L*e renvoi à demain ! M. Oelavigae. Messieurs, je vais vous dire ce que vous ue savez pas. (Rires ironiques à droite.) Ce fut par le décret du 18 juin que vous ordonnâtes au comité des monnaies de s occuper et de vous rendre compte, sous trois jours, de l’avantage ou de l’inconvénient qu’il peut y avoir dans le coulage des cloches pour faire de la monnaie, Le 18 était un vendredi. Le samedi, le comité ne s’assembla pas : le dim-mche, le comité s’assembla et resta jusqu’à 10 heures du soir à entendre la lecture d’un mémoire de M. de Virions. A chaque objection de ce mémoire, on disait ; « Il v a réponse à cela « ; mais comme il était trop tard, on ne discuta rien, Tout le monde sait ce qui arriva le 21 juin. La permanence de la séance a empêché Je comité des monnaies de s’assembler, et c'est le 26 juin que, sans aucune objection, sans aucune discussion du comité, M. Millet de Mureau nous a fait adopter son décret. Je n’ai garde de vous engager à rétracter ce décret ; mais comme cet objet mérite une sérieuse attention, je demande ue les six commissaires, qui sont adjoints par écret d’hier au comité des monnaies, s’y transportent, et que demain le comité vous présente définitivement un projet de décret pour lever toute incertitude. (L’Assemblée, consultée, renvoie ces différentes observations au comité des monnaies, pour en faire Je rapport à la séance de demain.) M. le Président annonce l’ordre du jour de la séance de ce scir, (La séance est levée à deux heures et demie.) ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. ALEXANDRE DE BEAUHARNAIS. Séance du mardi 2 août 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures du soir. Un de MM. les seorêtaires fait lecture du procès-verbal de la séance du samedi 30 juillet au soir, qui est adopté, M. Delavigne, secrétaire , fait lecture des différentes adresses suivantes qui toutes expriment les sentiments les plus ardents de civisme et de patriotisme, de respect et de soumission aux lois et les témoignages réitérés d’adhésion aux décrets de l’Assemblée, notamment à ceux des 15 et 16 juillet derniers relatifs aux événements du 21 juin : Adresses des administrateurs composant les directoires des départements du Finistère, du Morbihan , de la Côte-d'Or, de la Vendée , du Jura et du Pas-de-Calais. « La loi est notre cri de ralliement, disent les administrateurs du Finistère ; les législateurs sont nos guides. La nation avait manifesté son vœu pour un régime monarchique, le seul qui convienne à 25 millions d’homme6 répandus sur une surface immense. Vous avez fondé la Constitution sur cette base essentielle; une poignée de factieux (1) Gatte séance est incomplète au Moniteur. a voulu mettre sa volonté à la place de celle d’un grand peuple, la force s’est déployée et la faction a été terrassée. » Grâces vous soient rendues, courageux législateurs ; environnés du vœu national, marches à travers les clameurs séditieuses vers le terme de vos travaux; les bénédictions des bons citoyens vous accompagneront jusqu’au bout de la carrière et comptez toujours les habitants du Finistère au nombre des vrais Français inviolablement attachés à la Constitution que vous avez faite. » Adresses des administrateurs composant les directoires des districts de Corbeil , Vannes, Mâcon , Bourbon-Lancy . « Sages représentants, disent les administrateurs du district de Corbeil , vous touchez au terme de vos longs travaux. Sans doute que votre courage, qui s’est toujours mesuré aux dangers qui vous ont sans cesse environnés, vous donnera de nouvelles forces pour subjuguer, par les armes de la raison, ces factions nouvelles qui nous agitent, et en nous rappelant vos glorieux triomphes aux époques des 5 août, 2 novembre 1789, 21 juin et 15 juillet derniers, et tant d’autres qui vous étaient préparés par le temps qui ne rétrograde jamais, et par les lumières de la plus saine philosophie, « Couronnez le bel ouvrage de notre Constitution par des actes de grandeur, de justiqe et de générosité. Alors, forts de l’opinion des vrais amis de la liberté, allez enfin vous reposer au port. Si Solon, après avoir donné des lois à la Grèce, feignit pour un temps de fuir ses concitoyens, c’était pour méditer dans le calme et dans la retraite les effets du nouveau mouvement qu'il venait de donner à la chose publique. 11 savait, ce grand législateur, que quelque sublimes que puissent être les ouvrages ée? hommes, ils ne sont pas ceux de la diyinité. * « Nous adhérons, disent les administrateurs du district de Mâcon, fie tout notre coeur, avec tous nos concitoyens dont nous nous rendons garants, à votre décret du 16 juillet; nous gémissons sur les convulsions qui ont agité la capitale à l’époque où il s’agissait d’affermir la Constitution. Tous les Français patriotes, réunis par le même sentiment autour du sanctuaire des lois, ne doivent jamais oublier que la moindre scission entre eux peut entretenir les plus funestes effets. Ici tous les sentiments, toutes les volontés sont pour l’exécution de la loi... « Notre jeunesse se porte avec un empressement rare aux enrôlements dans les volontaires nationaux. La seule paroisse de Besse-la-Yille, sur 22 jeunes gens, en fournit 19. Cette brave jeunesse, contente de servir la patrie et du salaire qui lui est accordé par le décret, a refusé la haute-payeque la communauté voulaitluj faire, La ville de Mâcon a plus de 100 soumissionnaires, Gluny,36 ; Prety, 42 ; Arc, 10 ; et ainsi des autres villes et bourgs. » Adresses des officiers municipaux des villes de Péronne, Nantes, Longchamp, Sarreguemines , Ba-gnères, Sedan et Cluny. « Les officiers municipaux de Nantes supplient l’Assemblée de ne pas se faire remplacer sans achever la Constitution ; ils sollicitent aussi un plan d’éducation national. « Les officiers municipaux de Longchamp, de Sarreguemines et de Bagnères font hommage à l’Assemblée des proGès-verbaux du serment fédéra-