[24 juillet 1791.J [Assemblée nationale. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. connaître les personnes qui ne doivent point avoir part aux pensions. Plusieurs membres : Aux voix l’amendement de M. Camus! M. Tuant de I�a Bouverle. Il y a des personnes qui ont mangé leurs appointements, ee n’est pas eux que vous punissez, c’est leur famille. Je demande la question préalable sur l’amendement de M. Canius. (L’Assemblée consultée décrète qu’il y a lieu à délibérer sur l’amendement de M. Camus.) En conséquence, l’amendement de M. Camu; est mis aux voix dans les termes suivants pour former le dernier article du décret : Art. 18. « La présente loi n’aura pas d’effet à l’égard de ceux qui, depuis 5 ans, ont joui de places ou emplois dont les produits, calculés d’après les bases de l’article 12 du présent décret, s’élevaient au-dessus de 4,000 livres, et ils ne pourront obtenir de pensions que dans les cas prévus, et d’après les conditions exigées par la loi du 23 août dernier. » (Adopté.) M. Palasue de Champeaux, rapporteur, dmne ensuite lecture de l'article 1er qui, avec la suppression du mot secrétaires , est mis aux voix dans les termes suivants : Art. 1er. « Tous employés commissionnés dans les fermes et régies générales, à la caisse des recettes générales des finances, à la recette générale du clergé, dans les devoirs de Bretagne, l’équivalent de Languedoc, les 4 membres belgiques, les postes, la police de Paris; dans les bureaux de l’économat, les administrations des pays d’Etats, à la perception des octrois et autres droits qui se levaient principalement au profit de l’Etat; les directeurs, contrôleurs et vérificateurs des vingtièmes; les commis attachés aux intendances, ou qui étaient passés desdites intendances aux administrations provinciales, tous lesquels se trouvent précédemment supprimés par les décrets rendus, auront droit aux pensions, secours et gratifications qui seront déterminés ci-après, suivant ta durée de leurs services. » (Adopté.) (La suite de la discussion est renvoyée à la séance de demain.) L’ordre du jour est la discussion du projet de décret du comité militaire sur la discipline militaire (I). M. Emmery, rapporteur. Messieurs, je viens soumettre à votre discussion le projet de décret dont je vous ai déjà donné lecture, concernant la discipline de l’armée. En exécution d’un arrêté d’hier, le comité militaire s’est assemblé pour discuter de nouveau ce projet : beaucoup de membres de l’Assemblée se sont rendus à sa séance, et tous sont convenus que le projet, à l’exception toutefois de l’article 6 que nous supprimons, devait rester tel que je vous l’ai présenté. Je vais en lire le premier article : « L’Assemblée nationale, instruite que plusieurs régiments de l’armée sont dépourvus d’un grand nombre de leurs officiers, dont les uns ont (1) Voyez ci-dessus ce projet de décret, séance du 21 juillet 1791, page 469. 585 été destitués illégalement par les soldats, tandis que d’autres ont abandonné d’eux-mêmes le poste où l’honneur leur faisait un devoir de mourir pour le maintien de la discipline; fortement décidée à la rétablir dans toute sa vigueur; considérant que, par la nature de l’engagement que les militaires contractent envers la nation, le sacrifice de leur vie n’est ni le seul, ni même le plus grand qu’elle soit en droit d’exiger d’eux, mais qu’ils lui doivent celui d’une portion considérable de leur indépendance, à laquelle ils renoncent momentanément pour mieux assurer la liberté de leurs concitoyens, qu’ainsi l'honneur d’un brave et loyal soldat ne peut pas être plus gravement compromis par une lâcheté, qu’il ne le serait par un acte d’insubordination ou de licence; voulant que désormais de semblables actes soient punis irrémissiblement dans toutes les classes du militaire; et que, pour ôter tout prétexte d’excuse, les fautes et délits de ce genre, qui seraient commis à l’avenir, ne puissent être confondus avec ceux dont il est possible de rejeter le blâme sur les circonstances dont nous sortons; après avoir entendu le rapport de son comité militaire, a décrété ce qui suit : « Art. 1er. Les officiers qui, depuis l’époque du 1er mai dernier, ont abandonné volontairement leurs corps ou leurs drapeaux sans avoir donné leur démission, et qui sont ensuite passés à l’étranger, seront incessamment poursuivis comme transfuges par les commissaires auditeurs des guerres, et jugés par les cours martiales. Il en sera de même à l’égard des officiers qui, ayant donné leur démission, sont ensui e passés à l’étranger, si, dans le délai d’un nuis à compter du jour de la publication du pré-cut décret, ils ne sont pas rentrés dans le royaume. « M. de Dortan. Je demande qu’il soit dit dans l’article que les officiers qui rentreront en France dans le délai prescrit seront mis sous la sauvegarde spéciale de la loi et que les corps administratifs sont déclarés responsables des violences qui pourraient être exercées contre eux. (Mur-mures.) Plusieurs membres : Pourquoi cela ? M. de Dortan. On exige que ma demande soit appuyée de motifs; puisqu’il faut que je le dise, c’est que je connais beaucoup de ces émigrés qui ne sont sortis que parce qu’ils avaient le couteau sous la gorge, dans leur corps, et que leur tête était mise à prix chez eux. Je demande également que le délai d’un mois accordé par l’article soit porté à 6 semaines. M. Prieur. J’ai une observation à faire sur l’article. Elle porte sur ces mots : « depuis l’é. o-que du 1er mai dernier ». J’observe que mon intention n’est pas de donner un effet rétroactif à la peine proposée par l’article, mais je d - mande à M. le rapporteur s’il y a une loi contre des officiers qui avaieut quitté leurs corps avant le 1er mai. M. le rapporteur nous propose de considérer comme transfuges tous ceux qui, depuis le 1er mai, ont quitté leur drapeaux. Il paraît que le comité militaire n’a pas considéré sous le même aspect ceux qui étaient partis auparavant. M. d’Estonrmel. Dans l’article soumis à la délibération, il y a deux objets très différents et qui doivent être discutés séparément. Le premier objet 586 lAssemblée nalionalo,] concerne les officiers qui ont abandonné volontai-rement leurs corps ou leurs drapeaux sans avoir donné leur démission et qui sont ensuite passés à l'étranger; le second a trait aux officiers qui, ayant donné leur démission, sont ensuite passés à* 1 étranger et qui, dans le délai d’un mois, à compter de la publication du décret, ne seraient pas rentrés dans le royaume : le comité vous propose de faire poursuivre indistinctement ces deux catégories d’individus comme transfuges et de les faire juger par les cours martiales. Or, sur la première disposition de l’article, qui de vous, Messieurs, ne sait pas qu’il y a une grande partie de ces officiers, surtout ceux qui étaient dans les places frontières, qui n’ont quitté le service que parce qu’il ne leur était pas possible de rester à leur corps? {Murmures.) Un membre : Ils n’avaient qu’à se retirer simplement chez eux. M. d’Estourmel. Je crois aisément que cette exposition frappe l'Assemblée et lui imprime un mouv ment de murmures : et certes, il serait bien à désirer que ces officiers qui se trouvaient dans les places frontières eussent préféré de rentnr dans leurs foyers à passer dans les pays étrangers; mais, Messieurs, n’avons-nous pas adopté vi--à-vis d’eux une première disposition que la nécessiié nous a commandée? Quand les ofliciers du régiment de Viennois, quand les officiers du régiment ci-devant Golonel-Géneral, qui étaient à Dunkerque, sont passés chez l’etranger, qu’a fait l’Assemblée? Elle a décrété qu’il serait provisoirement pourvu, par le commandant général de la division, au remplacement des emplois vacants: en conséquence, M. cl i 1 Rochumbeau a nommé, dans le département du Nord, aux places qui étaient vacantes. Ici, Messieurs, n’est-ce pas assez pour ces olliciers d’êlre privés de 1 ur emploi ( Murmures à gauche .), pourun pii mier mouvement ( Murmures à gauche .), surtout à une époque où le départ du roi a pu le-, égarer? ( Murmures à gauche.) Quant aux officiers passes à l’étranger après avoir donné leur démission, quel caractère auront pour lors les auditeurs de-guerres pour les j ger, puisqu’ils ne tiennent plus à j’étnt militaire, car, enfin, quand on a abandonné ses drapeaux après avoir donné sa démission, on n’est plus justiciable militairement, on l’est civilement. Je demande! ais que l’on établît que ceux des officiers, qui, étant passés citez l’étranger sans avoir donné leur démission, ne s ront point rentrés dans le mois, seront, à partir de la notilica-tion du présent décret, renvoyés par-devant les auditeurs des guerres. Quant â la seconde pmtie de l’aiticle, j’avoue que je ne la comprends pas; les officiers qui ont donné leur démission ont rempli vis-à-vis de la nation ce qu’ils lui devaient, puisqu’ils ont déclaré, par leur démissio n’être plus partie intégrante du militai s e ; iis ont passé à l’étrang-r; dès lors, ils se sont soumis à toutes les peines prononcées contie les émigrants, et puisque cette peine est celle du payement d’une contribuiiun trois fois plus forte, je ne conçois pas comment vous pouvez faire une loi particulière pour les ofliciers qui sont dans le cas de cette disposition; je demande done la question préalable sur la seconde partie de l’article. M. de Croix. J’appuie l’observation du préopinant etj" demande à M. le rapporteur de nous dire où est la loi qui dit que l’officier qui passera 124 juillet 1791. J à l’étranger dans un temps de paix et quittera son régiment sera poursuivi comme criminel. Je demande qu’on n’inflige pas une nouvelle peine à des gens qui ont déjà énrouvé de grands malheurs, car il eu est beaucoup qui ont été calomniés. M. Chabrond. Je crois que l’objet de l’Assemblée est d’arriver au rétablissement de la paix et du bon ordre de la troupe de ligne. Or, pour y parvenir, je crois qu’il faut oublier le passé. {Murmures. — Oui! oui!) Je crois que la bonne manière d’achever la Révolution, c’est d’oublier tout ce qui a été la suite des différentes erreurs dont plusieurs citoyens ont été les victimes. Le comité nous propose de retrancher l’article 6 du projet et je crois en effet qu’il est indispensable de passer l’éponge sur les reproches qu’on pourrait avoir à faire aux soldats : Tous les renseignements nous font croire que tous leurs méfaits ont eu leur source dans l’erreur du patriotisme. Il est possible que quelques officiers très estimables aient été forcés de -m retirer. Il y a d’ailleurs une très grande différence à faire entre des officiers qui ont quitté leur corps à cause de l’insubordinati m momentanée des soldats, à cause de l’impos-ibilité de s’y maintenir, mais qui se sont retirés paisiblement chez eux, et les officie s qui sont passés en pays éi ranger. Mais, à l’égard de ceux-ci, je ne crois pas qu’il faille, comme on vous le propose, la déférer à des cours martiales; je crois que ces hommes ont commis un délit civil. Vous avez fuit une loi qui regarde les émigrants, tant ceux qui servaient dans votre armée en qualité d'officers, que les ciioyens qui n’étaient a-sujetlis à aucun service. Il faut donc laisser les officiers transfuges sous l’empire de cette loi. S’il y a quelque chose de plus à leur imputer; s’ils ont formé des complots ou participé à des projets d’attaque contre le royaume; alors, vous avez des tribunaux civils pour 1 ur faire leur procès. Voilà, je croi-, manière dont on doit agir vis-à-vis des ofliciers. Mai tenant, à legard ues plac s qui ne sont plus occupées dans les corps, je ne crois pas que l’on puisse, par une loi actuelle, leur infliger une peine qui n’avait pas été établie par les anciennes ordonnances, parce qu’ils n’avaient à obéir qu’aux anciennes ordonnances. Si les anciennes ordonnances veulent que, par les procédés qu’on leur reproche, ils perdent leur place, il est juste qu’on les en déclare déchus, et alors il est inutile de prononcer de nouveau: il faut simplement donner à la loi Sun exécution. Je le répète : il faut enfin finir la Révolution, il faut enfin donner la paix au royaume et ramener tous les citoyens à la concorde et à l’union. Or, le plus sûr moyen d’y parvtnir, c’e-t d’uublier le passé. Vous ne pouvez avoir deux poids et deux mesures; vous devez la même just ce à tous. Le comité a consenti à rayer de son pr jet une disposition pour les soldats qui a paru trop rigoureuse à quelques personnes ; il en a laissé sub-s ster une extrêmement sévère contre les officiers : vous ne pouvtz l’adopter sans encourir le reproche de l’impartialité et de l’injusdce. Dans ce temps de révolution, les uns ont marché dans la voie droite, d’autres out pris des voies obliques ; mais il doit arriver un moment où nous nous rencontrerons tous, où nous aurons tous un but commun, la paix p = biiqne. N’est-il pas évident que les ofliciers que vous allez poursuivre pour avoir quitté leurs régiments donneront, pour ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [U juillet 1791.] pièces jushlicatives, les rejroches qu’ils ont à faire aux soldats, et que, par une suite nécessaire des procédures, il faudrait punir des régimenis entiers; que de là une foule de désordres naîtraient dans l’armée; que les haines et les passions s’aigriraient; que les dénonciations se multiplieraient, et que la discipline ne se rétablirait pas? Je demande donc que, tout en oubliant le passé, on prenne une résolution ferme de maintenir à l’avenir l’exécution des lois. Pour les officiers qui ont abandonné leur poste, je me réfère au renvoi au comité pour qu’il nous en fasse son rapport, afin que l’on prononce selon les lois qui ont existé jusqu’à ce jour; je désirerais aus-i qu’on chargeât le comité militaire de proposer à l’Assemblée un décret contenant amnistie absolue et generale, de manière que tous les désordres, que tous les maux qui ont affligé l’armée jusqu’à ce jour ne reparaissent plus. D’après toutes ces observations, je crois qu’il est in ii-pens ible de ne pas délibérer sur les huit premiers articles proposés par le comité et je demande que Ja discussion se porte immédiatement sur les articles 9 et suivants du projet qui ont pour objet la subordination et la discipline pour l’avenir. M. Fréteau-Salnt-Just. Je necrois pas, ainsi que l’a dit le préopinant, que l’on puisse renvoyer devant la cour martiale des officiers qui ne sont plus militaires, et ne sont passés à l’étraager qu’après leur démission ; en conséquence je demande le retranchement de la deuxième partie de l’article. H a été envoyé au comité diplomatique, par le ministre des affaires étrangères, des lettres de Cologne qui établissent que beaucoup des officiel s émigrés sont dans l’f tendon de rentrer, si l’Assemblée nationale veut bien p endre des raesur s qui garantissent leur sûreté. Une de ces mesures de sûreté, c’est la loi par laquelle vous venez de réprimer les abus de la pœ-se et des proclamations incendiaires. Si l'Assemblée veut donc bien leur garantir la sûreté personnelle duo à tout citoyen, ils oublieront tout le passé. (Rires.) Ils oublieront tout ce qui a pu élever, dans leurs cœurs, des ressentim mis, et même des craintes et des inquiétudes, et ils répareront, par leur couduite, tout ce qui a pu répandre des soupçons contre eux. Je trouve donc qu’il serait de la plus grande injustice de poursuivre, devant les tribunaux de cour martiale, le simple fait du pas-age chez l’étranger, après la démission de l’emploi fait, qui peut être justifié par laot de motifs. M. Bureaux de Pnsy. Je demande à parler contre la proposition d’une amnistie générale. Il faut renoncer à toute discipline militaire ; il faut consentir à n’avoir plus d’armée si vous pouvez tolérer que les inférieurs puissent chasser et repousser lom d’eux des supérieurs qui sont f its pour les commander, a ors même que ces derniers seraient coupables. (Murmures.) On a cru que, d’après vos derniers décr< ts, les soldats qui useraient de violence contre leurs chefs, entreraient en jouissance des emplois de ces chefs; et que leurs fautes mêmes seraient le salaire de ces mêmes fautes. Je ne veux pas atténuer les torts que peuvent avoir les chefs, mais je ne veux pas que vous favorisiez par l’impunité des actes effrayants d’insubordination. m M. Martineau. Je connais le projet de loi que le comité militaire vous propose. Cette loi ne peut être juste qu’autant que tons les officiers qui sont passés à l’éiranger seraient, sans exception, dans le cas d’être poursuivis comme transfuges; mais s’il en e-t un seul qui ne soit pas coupable de ce délit, la loi, dans sa généralité, est infiniment injuste. Ch, je demanda si de t us ceux soi t passés à l’étmnger, il n’en e-t pas plu-ieurs, si, au moins, il n’est pas possible qu’il y en ait un, qui y soit passé forcément, pour se soustraire à la mort qui le menaçait. . . M. Emmery. Je vais ron Ire comnte des motifs qui ont déterminé le comité militaire à insister -ur le projet nu’il vous présente. On ne peut, de benne foi, confondre le fait d’un officier qui, dans les circonstances où noussomnms, non pas dans un état de guerre, mats dans un état d’inquiétude, occ siottné par des attroupements d’officiers déserteurs, dé-erte son poste, sans congé, sans démission, pour se réunir à ces rebelles, on ne peut pas, dis-je, confoudre ce délit avec la conduite du citoyen, que les menaces *jt les violences ont forcé de quitter son corps. L’un quitte son poste et abandonne la pairie pour la trahir dans un moment où elle demande son secours; l’auf e n’est qu’un émigré. (La partie droite murmure.) J’ai teste que le comité militaire, réuni plusieurs fois avec des officiers généraux, avec différents membres de l’Assemblée, a été 'Unanimement d’accord avec eux sur les dispositions qu’il vous présenta Que diriez -vous donc si, au un, ment où le danger deviendrait encore plus imminent, une troupe d’officiers, car ils sont _s rtis par des mouvements combinés, si, dis-je, une troupe d’officiers, au moment d’entrer eu campagne, quittaient vos drapeaux pour se réunir aux ennemis? Et pouvez-vous vous dissimuler les motifs de la coalition de ces officiers qui, au moment de l’arrestation du roi, sont liasses à la fois dans un camp étranger, après avoir vainement tenté d’embaucher les soldais? Les officiers ne sont pas engagés, dit-on. Je crois que, pour un officier, une naro'e d’honneur vaut bien l’engagement du soldât. Dans des circonstances moins critiques, LouisXIV a fait condamner aux ga'ères, à perpétuité, des officiers qui étaient ainsi passés à l’ét'anger, et ce n’était pas en temps de guerre; ils étaient, après la guerre, dans des quartiers d’hiver. Quant à ce qui concerne le s soldats, nous avons excepté de l'amnistie 3 crimes : l’embauchage, la désertion et la trahison. Or, peut-on se dissimuler que les olfieiers, passés en pays étranger, et pour lesquelson demande uneamnistie, ont la plupart tenté de débaucher les soldats, et qu’ils ont tous commis la trahison de quitter leur poste au moment où on les y appelait, et de se munir à des hommes qui préparent évidemment des hostilités contre la France? Quoi! vous punirez des peines les plus sévères la trahison des soldats, et vous ne punirez pas lesirans-fu-tes qui s’étaient engagés par leur parole d’honneur à défendre leur patrie, et avaient prêté le serment d’obéir à ses lois! Mais, nous dit M. Martineau, s’il est un seul des officiers émigrés qui ait été séduit par la violence à la nécessité de quitter son corps, et de s’éloigner de sa patrie, ia loi daus sa généralité est injuste. Mais, Mes-ieurs, nous ne vous proposons pas de punir comme transfuges tous les officiers qui, sans avoir donné leur démission, sont passés eu pays 588 [Assemblée nationale.] étranger; nous vous proposons seulement de les faire poursuivre comme tels; ce délit sera le titre delà plainte. Si les officiers de Colonel-Général, par exemple, qui sont passés en corps chez l’é-iranger, en enlevant les drapeaux, et en engageant les soldats à les suivre, ne sont pas des transfuges, s’ils ont des excuses légitimes à fournir, il les fourniront, et ils seront absous. Je passe à la seconde partie de l’article, et j’observe qu’à l’égard des officiers passés en pays étranger après avoir donné leur démission, on ne les poursuivra pas s’ils rentrent dans le délai d’un mois ou de 6 semaines; on charge même spécialement les corps administratifs de veiller à leur sûreté. Ce n’est pas leur évasion, leur émigration que l’on punira, s’ils ne rentrent pas dans le délai prescrit, c’est l’intention persévérante de rester unis aux ennemis de la France, et de témoigner des desseins hostiles, malgré l’invitation qui leur est faite, et malgré la garantie de sûreté qui leur est donnée. (Applaudissements.) Je demande donc que l’article soit décrété avec la clause proposée par M. de Dortan, qui charge les corps administratifs de veiller spécialement à leur égard à l’exécution des lois concernant la sûreté des individus. J’adopte également le délai de 6 semaines proposé par le même opinant. M. d’Ambly. Je demande qu’on assure la propriété chez moi; on a été pour tuer mon petit-fils. (Murmures.) (L’Assemblée, consultée, adopte les 2 amende-dements de M. de Dortan et décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur les autres amendements.) M. Emmery, rapporteur. Voici la nouvelle rédact on de l’article. Art. 1er. « Les officiers qui, depuis l’époque du 1er mai dernier, ont abandonné volontairement leurs corps ou leurs drapeaux sans avoir donné leur démission, et qui sont ensuite passés à l’étranger, seront incessamment poursuivis comme transfuges par les commissaires auditeurs des guerres, et jugés par les cours martiales. Il en sera de même à l’égard des officiers qui, ayant donné leur démission, sont ensuite passés à l’étranger, si, dans le délai de 6 semaines à compter du jour de la publication du présent décret, ils ne sont pas rentrés dans le royaume, où les corps administratifs et les municipalités veilleront à ce que les lois protectrices de la sûreté des personnes et des biens soient spécialement observées à leur égard. » M. de Croix. Je demande la questionpréalable sur l’article. (Murmures.) (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il y a lieu à délibérer sur l’article 1er, qui est ensuite mis aux voix et adupté dans sa nouvelle rédaction.) M. Emmery, rapporteur. Voici l’article 2 : Art. 2. « Les officiers qui, sans être passés à l’étranger, ont abandonné volontairement leur corps ou leurs drapeaux, sans permission ni congé, seront censés avoir renoncé pour toujours au service, et ne pourront prétendre à aucun remplacement ni avancement. » (Adopté.) 124 juillet 1791.J M. Emmery, rapporteur. Voici les articles 3, 4 et 5 : Art. 3. « A l’égard des officiers qui ont été forcés de quitter leur corps en conséquence des soupçons élevés contre eux, mais non légalement vérifiés, toutes dénonciations in üviduelles que voudront faire à leur charge aucun des sous-officiers ou soldats de leurs régiments seront reçues par les commissaires auditeurs des guerres, qui en rendront plainte, et poursuivront devant la cour martiale le jugement des officiers ainsi dénoncés. « Art. 4. Ceux desdils officiers contre lesquels il n’y aura pas de dénonciation faite, dans la quinzaine de la publication du présent décret, au commissaire auditeur ayant aujourd'hui la police du corps, ou contre lesquels le premier juré n’aura pas trouvé qu’il y ait lieu à accusation, ou qui seront absous par le jugement définitif des cours martiales, reprendront leurs places, ou, s’ils l’aiment mieux, seront pourvus de places équivalentes dans d’autres corps, pourvu que ces officiers n’aient pas refusé le serment prescrit par le décret du 22 juin dernier; et dans le cas où ils n’auraient pas été à portée de le prêter à leur régiment, qu’ils le fassent parvenir, sous quinzaine, au ministre de la guerre et à la municipalité du lieu de leur domicile. » « Art. 5. Les dénonciateurs qui n’auronl pas administré des preuves suffisantes pour établir le mérite de leurs dénonciations seront punis comme calomniateurs. La moindre peine qu’ils pourront encourir sera celle d’être cassés et déclarés incapables de porter les armes pour le service de la patrie. » Je vais vous exposer les motifs de ces articles. Beaucoup d’officiers ont été renvoyés, non seulement illégalement, mais injustement par les soldats. Je crois qu’il faut laisser à ces officiers, contre lesquels il s’est élevé des soupçons bien ou mal fondés, répandus par l’ambition de ceux qui en voulaient à leurs places, les moyens de rentrer avec honneur dans leur corps; mais il en est beaucoup sans doute qui ne voudraient pas y rentrer, craignant les préventions qui ont occasionné les premiers désagréments qu’ils y avaient essuyés; et même il est certain qu’ils éprouveraient les mêmes désagréments dans des nouveaux, s’ils y étaient suivis des mêmes soupçons. Il faut donc que ces soupçons soient purgés; et ils ne peuvent l’être que par un jugement. Si, dans l’espace de 15 jours, il ne se trouve pas de dénonciateurs, ils seront reconnus irréprochables: s’il s’en présente, ils auront la ressource du premier jury qui, dans le cas où le fait serait faux, déclarerait qu’il n’y a pas lieu à accusation. Enfin, si ce premier jury déclare qu’il y a lieu à accusation, ils peuvent être réintégrés en vertu d’un jugement d’une cour martiale. Nous avons ajouté que les calomniateurs subiraient la peine du talion. Il est juste, en effet, de punir ceux qui dénonceraient leurs chefs dans la seule vue de les supplanter. M. Prieur. Je vois dans ces articles un grand mal, que je vais indiquer; un autre propos ra le remède. Pourquoi beaucoup d’officiers ont-ils été expulsés de leur régiment? On peut le dire tout haut, puisque vous le savez : c’est parce que les soldats étaient attachés à la Révolution, et que les officiers s’étaient rendus odieux par leur aristocratie. (Murmures.) Ce n’est pas dans de mau-ARLH1VES PARLEMENTAIRES.