381 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 mars 1790.] M. Barnave, rapporteur. Plusieurs membres demandent que l’instruction soit mise en délibération, article par article ; cela est impossible : l’instruction fait un tout dont aucune partie ne peut être séparée. On parait vouloir ne point envoyer d’instruction, et regarder ie décret comme suffisant. Je réponds que le décret ordonne que l’instruction sera rédigée et envoyée. On objecte que le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif ne peuvent pas être établis par les colonies ; mais il y a, dans les colonies, des moyens provisoires d’exécution ; il faut qu’il y en ait de définitifs : il faut donc faire des modifications à l'état actuel ; il faut donc consulter les colonies sur le pouvoir exécutif. M. de Gouy demande qu’on fasse enregistrer les lettres-patentes au conseilsupérieur du Gap. En France, l’instruction sur les convocations pour cette assemblée, n’a pas été enregistrée dans les tribunaux, si ce n’est dans ceux qui devaient exécuter. L’enregistrement à Saint-Domingue est donc inutile. Je conviendrai, sur les articles 17 et 18, qn’on pourrait s’exprimer plus clairemeut, en disant : « examinant les formes dans Lesquelles le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif doivent être établis, etc. » (On ferme la discussion.) M. le comte de Reynaud propose en amendement que les assemblées coloniales soient autorisées à envoyer les lettres de convocation. L’Assemblée décidé qu’il n’y a pas Heu à délibérer, M. de Cocherel propose de faire tenir la première assemblée de la rolonie de Saint-Domingue à Saint-Marc, et non à Léogane, Saint-Marc étant un lieu plus central. M. de Cocherel insiste beaucoup sur cette demande, qui est combattue. L’Assemblée décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer. M. de Cocherel. Vous travaillez à perdre vos colonies. Je suis bien aise de vous dire que, malgré vous, on s’assemblera à Saint-Marc, où l’assemblée coloniale est déjà formée. M. le marquis de Gouy d’Arsy. Une lettre, dont on n’a pas voulu entendre la lecture, nous charge de déclarer qu’aucun ordre venant du ministère, signé ou contresigné La Luzerne, ne sera ouvert. M. le duc d’ Aiguillon. Prendre en considération cette déclaration, ce serait décider que M. de La Luzerne n’aura plus les colonies dans son département, et assurément cette décision ne nous appartient pas. 11 n’y a pas lieu à délibérer. M. le marquis de Foucault. 11 n’y a pas même lieu à délibérer sur la question préalable. M. lècomtede Reynaud. 11 est indispensable de faire enregistrer au conseil supérieur du Gap. Je demande qu’on délibère sur cet amendement. L’Assemblée décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer. La question principale mise aux voix, l’instruction et le projet de décret qui la suit sont adoptés avec les changements que présentera M.Barnave, rapporteur du comité colonial, à la séance du lendemain. M. le Président ajourne l’Assemblée à demain, héuré ordinaire. La séance est levée à 4 heures. ANNEXE à la séance de V Assembléenationale du 28marsll%. Second rapport du comité féodal par M. Tronchet, membre du comité . ( Droits seigneuriaux déc lavés rachetables (1). (Imprimé par ordre de l’Assemblée nationale) (2). Objet général du décret à faire . Messieurs, le travail que vous avez prescrit à votre comité, a dû avoir pour objet les développements à donner pour développer et faciliter l’application des principes que vous avez posés dans les articles 1, 3, 4 et 6 de votre décret des 4, 6, 7 et 1 1 août 1789. Le décret que vous avez rendu le 15 mars dernier a eu pour objet le développement des deux premières parties de l’article premier du décret général; le travail que nous vous présentons aujourd’hui, a pour objet la dernière partie de e t article, qui porte, à l’égard des droits et devoirs féodaux ou censuels déclarés rachetables : « Le prix et le mode du rachat seront fixés par l’Assemblée nationale. Ceux desdits droits, qui ne sont point supprimés par ce décret, continueront néanmoins à être perçus jusqu’au remboursement. » Difficultés du travail et insuffisance des secours. Nous n’hésitons point à vous le dire, c’était ici la partie la plus difficile de notre travail. Les épines et les ronces étaient fermées sous nos pas dans ce champ inculte que vous nous avez donné à défricher. Si quelques usages anciens se présentaient à nous sur un cas, et une opération, qui semblait avoir beaucoup d’analogie avec celui-ci, nous n’y apercevions que des variétés infinies, des règles sans base, des lois ou des juriprudences sans principe fixe; tout nous indiquait la nécessité de créer et d’élever un édifice tout nouveau. Le zèle et le courage ne pouvaient pas suppléer l’insuffisance de nos forces; nous vous avons appelés à notre secours, ainsi que le public. Un premier ouvrage imprimé et distribué avec votre permission, a jeté de premières idées, moins comme un projet formé, que comme une indication des difficultés que présentait l’opération. Nous avons invité tous ceux qui voudraient nous aider de leurs lumières, à noua prêter leur secours, et nous n’en avons reçu aucun. Je dis que nous n’en avons reçu aucun : en effet, si j’excepte quelques mémoires particuliers, qui s’accordaient à peu près avec les bases générales que nous avions indiquées, votre comité n'a pu regarder comme un secours utile un assez grand nombre de plans, dont plusieurs ont même été rendus publics par leur impression, mais qui ont paru à votre comité s’éloigner également du texte et de l’esprit de votre décret, et supposer à votre comité une mission toute différente de celle que vous lui aviez confiée. Un tableau rapide de ces divers plans suffira pour vous faire connaître les motifs qui ne nous ont point permis de nous en occuper. (1) Ce rapport n’a pai été inséré au Moniteur. (2) Voir le premier rapport fait au nom du comité féodal, par M, Merlin, dêppté de Douai, Archives parlementaires, t. XI, p. 498 et suivantes. 388 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 mars 1790. Divers projets qui avaient été présentés. Ici, un auteur anonyme propose que la nation remette gratuitement toutes les redevances féodales ou censuelles aux vassaux et censitaires mouvants immédiatement des domaines de la couronne, c’est-à-dire, de la nation, et suppose qu’au moyen de cette décharge première, tous les propriétaires de fief, dans tous les degrés de l’ancienne féodalité, doivent être obligés d’affranchir gratuitement leurs vassaux et censitaires. Il n’aurait appartenu qu’à votre comité des finances de juger si la nation était en état de faire ce premier présent; mais il pouvait appartenir à votre comité féodal de juger que le plan renfermait des injustices et des inégalités palpables, et blessait toutes les règles de la justice distributive. Je n’entreprendrai point de vous retracer ici les réflexions qui peuvent développer cette vérité; elles ont été consignées dans un ouvrage qui a été mis sous vos yeux , d’après l’avis unanime de votre comité. Les inconvénients de ce premier plan avaient été aperçus par l’auteur d’un second, qui, en modifiant le premier, n’en corrigeait point toutes les injustices, qui faisait toujours faire à l’Etat un sacrifice dont il ne nous appartenait pas de juger la possibilité; et enfin, laissait encore subsister toutes les difficultés que présente la détermination d’un mode et d’un taux de rachat, puisqu’il n’éteignait que partiellement les droits et devoirs rachetables dans la main des propriétaires du fief. Bientôt ce même auteur a présenté et rendu public un nouveau plan, dont la seule exposition pourra vous mettre à portée de juger s’il devait entrer dans le genre de travail que vous nous avez prescrit : « supprimer et abolir sans indemnité tous les droits féodaux et censuels dépendant : 1° des domaines de la couronne ; 2° des domaines engagés et des apanages ; 3° des domaines de tous les gens de mainmorte, ecclésiastiques ou laïcs : suspendre, dès à présent, toute perception des droits féodaux et censuels dépendant des fiefs qui forment les propriétés des particuliers, jusqu’à ce que la nation, par les départements et les districts, en ait fait l’évaluation. L’intérêt d’une chose non liquidée se paierait néanmoins à 5 0/0, jusqu’au remboursement; enfin, ce remboursement se ferait sur le produit de la vente des biens du clergé, à la déduction du bénéfice que chaque propriétaire du fief aurait reçu de la remise des droits supprimés dans les fiels dont ils relèvent. » Il ne nous appartenait pas de juger si c’était là l’emploi que vous aviez projeté de faire de la vente des biens du clergé, et notre seule incompétence a dû nous interdire toute autre démarche que celle de vous faire connaître ce plan. La même réflexion s’applique à deux autres plans qui s’accordent à faire rembourser par la nation les droits féodaux et censuels rachetables, et qui ne diffèrent qu’en ce que l’un des deux est plus circonstancié dans ses détails. Par cette raison, nous ne vous parlerons que de celui-ci. L’auteur transfère à la nation elle-même la mouvance universelle de tous les fonds du royaume, en lui donnant tous les profits de cette mouvance. A la vérité, il adoucit les charges sous un point de vue, en ce qu’il ne fixe qu’au vingtième les droits casuels; mais il veut que tous les fonds quelconques, même allodiaux, soient assujettis à ce droit, et qu’il se paie à toutes les mutations quelconques. Quant à la manière de rembourser les propriétaires de fiefs, il les paie, en partie, en leur imputant le bénéfice qu’ils retireront de la suppression des dîmes ecclésiastiques. Il se flatte même que cette compensation acquittera, en grande partie, le remboursement. Il fait ensuite racheter les dîmes par les non-propriétaires de fiefs, et emploie d’abord ce rachat à rembourser les droits seigneuriaux; et ce qui pourra rester dû, il le paie en contrats à 4 0/0, remboursables sur le produit des droits transférés à la nation. Enfin, l’auteur entreprend de prouver par des calculs que ce plan, qu’il appelle superbe , donnera à la nation un revenu de 93 millions. Indépendamment de notre incompétence, ce plan s’écartait trop essentiellement de celui que votre décret nous indiquait ; il tient à des points constitutionnels que vous n’avez point encore définitivement décrétés; et nous n’avons pas pu nous occuper d’un plan dont l’exécution n’aurait pas pu appartenir à nos fonctions. Si vos principes et les circonstances pouvaient vous permettre d’adopter l’un des plans dont je viens de vous donner une idée sommaire, votre comité ne regretterait point J.’inutilité des travaux auxquels il s’est livré pour remplir la mission spéciale que vous lui avez donnée : il s’applaudirait même de n’avoir point à soumettre à votre jugement les fautes et les imperfections inséparables d’un travail qui présentait tant de difficultés. Vous ne les connaîtrez bien ces difficultés, Messieurs, qu’en nous suivant dans les détails. Je crains de fatiguer votre attention par une discussion un peu longue ; mais peut-être jugerez-vous Messieurs, qu’elle était indispensable, lorsque vous aurez connu la multitude des questions que notre travail embrassait, et les difficultés que plusieurs d’entre elles présentent. Je me hâte de les mettre sous vos yeux. Principes préliminaires. La première question qui s’est présentée à votre comité, est celle de savoir par qui le rachat devait être fait. Doit-il être fait en masse de tous les droits féodaux et censuels dus à un même fief, soit par les communautés, soit par les vassaux ou censitaires réunis? Ou n’avez-vous entendu accorder qu’à chaque redevable individuellement la faculté de racheter et libérer son fonds à sa volonté? La première méthode serait peut-être la plus propre à accélérer le rachat; elle serait certainement la plus avantageuse aux propriétaires de fiefs, auxquels des rachats partiels, et qui souvent seront fort modiques, ne peuvent être que fort onéreux. Mais votre comité a pensé que le texte et l’esprit de votre décret résistaient à ce mode de rachat. En déclarant certains droits et devoirs rachetables, vous n’avez fait autre chose que convertir en charges purement réelles les droits seigneuriaux, et les assimiler à toutes les charges foncières, que vous avez également déclarées rachetables. Il n’y a donc aucune différence à faire entre le rachat de ces diverses charges, qui n’ont plus qu’un seul et même caractère. ' C’est sans doute chaque redevable auquel vous avez ordonné de continuer le paiement des droits jusqu’au remboursement : c’est donc chaque re- (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 mars 1790). 389 devable que vous avez considéré dans le rachat, comme dans la prestation des charges. Vous n’avez pas ordonné le rachat des droits dont il s’agit; vous les avez simplement déclarés rnchetables. Ce n’est donc qu'une faculté que vous avez accordée à chaque redevable, et non une obligation que vous lui avez imposée. Auriez-vous pu, Messieurs, imposer aux redevables cette obligation? Tous n’ont pas les mêmes facultés de le faire; tous ne croiront pas avoir le même intérêt à Je faire, ni à le faire dans un moment plutôt que dans un autre. C’est un avantage que vous avez voulu accorder aux propriétaires soumis au régime féodal, comme aux propriétaires de fonds chargés de rentes foncières. Vous avez donc dû leur laisser la faculté de le faire à volonté. Ordonner que les communautés feront ce rachat en masse et pour un territoire, leur permettre même de le faire, ce serait détruire la simple faculté que votre décret laisse à chaque redevable, puisqu’il faudrait que chacun contribuât, par imposition ou autrement, au paiement, soit de la somme générale qui aurait été liquidée par le rachat des droits d’un certain territoire, soit de la rente à laquelle on consentirait d’assujettir chaque redevable au prorata de sa contribution. Quels embarras, d’ailleurs, dans l’exécution d’une pareille opération ! Comment parvenir à liquider la contribution de chaque redevable? Les fiefs et les fonds censuels sont soumis à des droits différents. Souvent, dans une même seigneurie, les charges des fonds censuels sont plus ou moins fortes. Toutes les seigneuries n’ont point une directe territoriale. Il y a une quantité de fiefs qui n’ont que des directes volantes, et répandues sur divers territoires : le même territoire est souvent divisé en une multitude de petits fiefs. L’opération d’un rachat en masse par les communautés, qui a paru plaire à quelques personnes, qui serait plus avantageux aux propriétaires des fiefs, et qui aurait encore l’avantage d’accélérer les rachats, a donc paru à votre comité aussi difficile dans l’exécution, que contraire à la faculté que votre décret réserve, et que vous avez dû réserver à chaque redevable. Si le rachat n’est qu’une faculté individuelle accordée à chaque redevable, il est évident qu’elle doit s’étendre au droit de ne racheter que tel ou tel fonds, lors même que le propriétaire en possède plusieurs sous une même seigneurie, pourvu que les divers fonds ne dérivent pas du même contrat d’inféodation ou d’accensement, et ne soient pas tenus sous une charge indivisible. Si le hasard a réuni dans la main d’un seul propriétaire, ce qui a été originairement concédé à deux ou trois, ce qui demain peut être séparé en plusieurs mains, cet événement ne change pas la nature du contrat. Le propriétaire des deux ac-censements différents doit pouvoir ce que pouvaient les deux premiers preneurs, séparément. Mais le propriétaire d’un fonds soumis à des prestations annuelles, et aux droits casuels de vente ou autres, pourra-t-il diviser son rachat, rembourser les redevances annuelles, sans racheter les droits casuels? Votre comité n’a pas cru que le droit de faculté pût s’étendre jusque-là. Les conditions sous lesquelles un propriétaire de fonds l’a concédé, sont indivisibles, et forment par leur réunion le prix de la concession. Si des motifs d’intérêt public peuvent permettre à J’acquéreur de se racheter, et de libérer son fonds des charges dont le bailleur l’a grevé, ce ne peut jamais être qu’en assurant au bailleur une indemnité entière de tous les droits qu’il s’était réservés, droits qui forment dans sa main une propriété d’autant plus sacrée, qu’elle est antérieure à celle du preneur. La rétention de la directe est la loi indivisible sous laquelle le propriétaire de fief en a inféodé ou accensé une partie. Ce serait attaquer le contrat dans sa substance, de permettre au preneur de le diviser, de ne rembourser que la charge certaine et annuelle, en laissant courir au bailleur l’incertitude de la charge casuelle. Le même principe a conduit votre comité à penser que les rentes solidaires, dont était chargé un fonds possédé par plusieurs cotenanciers, ne pourraient pas être rachetées partiellement par chaque codétenteur. La concession primitive n’a formé qu’un contrat indivisible. Si elle a été faite a plusieurs conjointement, la solidité a été une condition conservatoire des droits réservés. Si la concession n’a été faite qu’à un seul, la multiplication postérieure des propriétaires est un fait étranger au bailleur, qui n’a pas pu altérer et changer sa condition. On objecte que la solidarité des tenures est une vexation de la féodalité. Mais on n’a point fait attention que la forme de l’obligation solidaire est un de ces genres de Contrats que tous les peuples, que toutes les lois ont reconnu et autorisé, parce qu’il a sa base dans le droit naturel, qui permet à toute partie contractante, d’assurer d’une manière plus terme l’exécution de sa convention. Est-ce donc dans les principes de la féodalité que le vendeur ou le prêteur ont trouvé la précaution d’assurer leur remboursement par l’obligation personnelle, solidaire de plusieurs coobligés? Ce genre de contrat n’a-t-il pas existé depuis qu’il existe des contrats, 4000 ans avant l’invention de la féodalité? Ne trouve-t-on pas dans le simple bail à rente foncière, le même exemple de la solidité de la redevance, lorsque le fonds se trouve divisé entre plusieurs copropriétaires? Y a-t-on réfléchi lorsque l’on a dit que les rentes foncières ne sont qu’une suite du système féodal, qui en a donné le type, qu’elles n’eussent jamais existé sans lui? Les Romains ne connaissaient pas le régime féodal, et leurs lois nous donnent l’exemple de baux à rente, sous le nom d’emphy-téoses perpétuelles, et, pour le dire en passant, elles nous donnent même l’exemple d’un contrat non féodal, qui soumet le possesseur à un droit de mutation. Votre comité a pesé, avec la plus mûre attention, la question de la divisibilité du rachat des redevances solidaires, et son avis a été qu’elle ne pouvait pas être admise sans blesser les premières règles de la justice, sans détruire la substance même du contrat. Votre comité n’a pas cru cependant devoir porter la rigueur de ce principe, jusqu’à obliger le codétenteur solidaire, à racheter les droits casuels sur la totalité du fonds, comme il l’oblige à racheter la redevance annuelle solidaire. La raison en est, que la prestation des droits casuels opérés par la mutation n’était point indivisible. De même que le propriétaire de la directe pouvait exiger ces droits divisément sur chaque portion, lorsqu’il y survenait une mutation, il est juste que chaque codétenteur puisse racheter divisément le droit éventuel dont il était seul grevé. Ainsi, le codétenteur d’un fonds soumis à une directe solidaire, sera tenu de racheter la totalité des redevances solidaires, mais il ne sera obligé 390 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 mars 1790-1 de racheter les droits casuels, qu’au prorata de sa portion; et il sera subrogé aux droits du créancier, quant à la redevance qu’il aura rachetée, à la charge de ne pouvoir répéter contre ses cotenanciers que leur portion de la rente, la solidité étant nécessairement détruite par cette opération. Distinction des personnes qui ont , ou non , la capacité de contracter de gré à gré. Après avoir examiné la question générale de savoir si le rachat devait être fait individuellement, et les questions accessoires qui en dérivent, votre comité a porté son attention sur la qualité des personnes qui seraient dans le cas d’offrir ou de recevoir le rachat, et sur les précautions que cette considération pourrait nécessiter. Quoique vous vous proposiez, Messieurs, de déterminer un mode et un taux du rachat, il n’est pas douteux que ces règles n’auront pour objet que de soumettre la volonté de ceux qui ne pourraient pas se concilier de gré à gré. Vous devez espérer beaucoup de ces arrangements volontaires, nous ne pouvons trop y inviter et les propriétaires des droits et les redevables. C’est le moyen le plus efficace d’accélérer la révolution que vous désirez, et de trancher toutes les difficultés. Nous ne pouvons même trop répéter aux propriétaires des droits, que leur véritable intérêt est de faciliter le rachat par des abonnements même au-dessous des bases que vous fixerez, parce que leur véritable intérêt est de se procurer, le plus promptement possible, une masse de fonds qui puisse substituer un revenu certain à un revenu casuel, et une jouissance actuelle, à une jouissance future. La nécessité de prévenir les procès doit faire prescrire des règles, mais les calculs de l’intérêt personnel seront toujours le moyen le plus efficace pour accélérer l’opération du rachat. Mais les règles que vous allez établir pourraient devenir un prétexte de réclamations, et une source de divisions et de procès entre ceux qui auraient traité de gré à gré. Votre comité a pensé qu’il fallait fermer la porte à ces regrets, en proscrivant la restitution pour cause de lésion contre ces sortes de traités entre les majeurs. Cette loi serait tiès favorable, quand elle n’aurait pour objet que de couper la racine aux procès : mais elle sera encore fondée sur les principes les plus certains du droit. D’un côté, en ce qui concerne les droits casuels et éventuels, le rachat est évidemment un contrat aléatoire, contre lequel les lois refusent toute restitution, à cause de l’incalculabilité de la valeur précise de ia chose achetée et vendue. D’un autre côté, ceux qui, ayant sous leurs yeux les bases données par la loi, auront préféré le forfait volontaire, ne pourront s’imputer qu’à eux-mêmes la lésion dont ils se plaindraient. Mais il est des personnes dont la propriété est sous la protection immédiate de la loi, dont il serait dangereux d’abandonner les droits à l’arbitraire de leurs administrateurs. Il est des fiefs dont les possesseurs n’ont qu’une possession ou propriété résoluble. 11 a fallu prendre des précautions pour la conservation des biens des mineurs, des substitutions, des femmes mariées dans les pays où leurs dots sont inaliénables, même de leur consentement; pour la conservation des droits dépendant des fiefs appartenant aux communautés laïques ou ecclésiastiques, des fiefs tenus en apanage, ou sous la condition de la réversion. Ce sera l’objet de plusieurs articles doni il paraît inutile, quant à présent, de vous présenter les détails. Il suffît ici qe vous observer que le comité a cherché à concilier la liberté du redevable avec la protection que la loi doit à certaines personnes, et surtout à la dot des femmes qui n’ont pu prendre, en se mariant, aucune précaution contre un événement qu’elles n’ont pas dû prévoir. Mode et taux du rachat . Après avoir élagué ces préliminaires, qui lui ont paru indispensables, et dont quelques-uns devaient devenir la base de ses opérations, votre comité a pénétré dans l’intérieur de la carrière que vous lui avez ouverte. Il a dû distinguer deux sortes de droits rache-tables, parce que, quoique le rachat en soit indivisible, leur nature conduit à y appliquer des opérations différentes. Le rachat à exécuter sur chaque fonds individuellement, présente, en général, deux opérations : évaluer le produit annuel du droit, y appliquer un capital à un taux quelconque. 1° Pour les redevances fixes et annuelles. La première opération ne présente pas de grandes difficultés, quant à ces droits qui forment une redevance et charge annuelle. Il ne s’agissait à l’égard des celles de ces redevances, qui ne portent point avec elles une évaluation certaine, que de tarir la source des procès et des frais qui auraient pu devenir également ruineux aux deux parties. L’évaluation des redevances en grains doit se faire, suivant l’usage, sur la formation d’une année commune, d’après le relevé du registre des gros fruits. Il y a des menues denrées qui n’entrent point ordinairement dans les registres des marches; il en est de même des journées d’hommes, de chevaux et de voitures, dues pour les corvées réelles. Votre comité vous propose de charger chaque district de former un tableau estimatif et un tarif pour l’évaluation de eus sortes de prédation. L’évaluation annuelle des ehamparts, terrages, agriers, et autres redevances qui consistent dans une portion des fruits récoltés, et qui varient comme les récoltes et suivant la nature des fonds, cette évaluation présente plus de difficultés. Ici l’expertise paraît presque toujours indispensable, puisqu’il faut, préalablement, évaluer le produit de l’année commune d’un fonds, avant de pouvoir évaluer le produit commun du champarl. Mais nous présentons aux parties intéressées un moyen de se soustraire aux frais de l’expertise. Le redevable pourra faire l’offre d’une somme déter* minée pour l’évaluation de l'année commune, et celui qui supportera les frais de l’expertise devra s’imputer à lui-même l’injustice de son offre, ou de son refus. A l’égard des banalités non supprimées sans indemnité, votre comité a pensé que le rachat n’en devait être fait que sur le pied de la diminution que le four, le moulin, le pressoir, ou autre usine, pouvait éprouver dans sou produit total, ar suite de la suppression du droit de contrainte. ette évaluation pouvant dépendre de plusieurs combinaisons locales, le comité a cru qu’elle devait être remise à une estimation par experts, [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2g mars 1790,] 38* lorsque la communauté d’habitants, qui est actuellement soumise à une banalité, déclarerait vouloir s’en affranchir. Quel doit être le denier auquel se rachètera le produit annuel ? Après avoir fixé les réglés de l’évaluation du produit des redevances annuelles, il restait à fixer le capital : cette question se subdivise en deux. Le rachat des droits seigneuriaux ne doit-il se faire qu’au denier vingt, ou doit-il être fait à un denier supérieur, et même au denier courant du prix des fonds dans le territoire? Pans cette dernière hypothèse, quel sera le taux ? peut-il être uniforme pour tout le royaume? Sur la première partie de la question, le comité n’a point hésité à penser que le rachat devait être fait à un taux supérieur au denier vingt, et même en général, et sauf quelques exceptions, au même denier à peu près que celui du prix courant des fonds. Voici les motifs sur lesquels il s’est fondé. La question peut être envisagée sous deux rapports : dans l’intérêt du propriétaire des droits rachetables, et dans celui du redevable de ces droits. Les droits fonciers que le bailleur d’un fonds s’est réservés en l’aliénant, sont une portion de la propriété. C’est ce genre de propriété que les lois et les jurisconsultes expriment par le terme d e propriété directe , qu’ils mettent en opposition avec celui de propriété utile , par lequel ils désignent le droit du preneur pour le cas du simple bail à renté foncière, comme pour celui de l’inféodation ou de l’accensement, doDt le caractère propre est celui d’un bail à rente foncière. Les droits que le bailleur s’est réservés, si l’on en excepte les cens et rentes en argent, participent à tons les caractères et les avantages de la propriété du preneur ; ils sont susceptibles de la même augmentation progressive de valeur, que le fonds qui en est chargé reçoit de l’augmentation du prix des denrées. Un simple capital au denier vingt, du produit annuel présent, de ces droits, ne pourrait donc pas former le juste prix du rachat. Le propriétaire ne pourrait tirer de ce capital un revenu égal au revenu aetuel, qu’en le plaçant en constitution; et un pareil placement ne remplacerait pas un revenu et une propriété susceptibles de la même augmentation progressive que les fonds-Ce n’est point ici une aliénation volontaire que fait le propriétaire, c’est une aliénation forcée que la loi ordonne par une vue d’iatérêt public. L’article 17 de votre Déclaration des droits de l’homme porte que celui qui est privé de sa propriété par une nécessité publique, ne peut l’être que par une juste indemnité. Ainsi, quand il serait vrai que dans quelques provinces on fût dans l’usage de vendre les rentes foncières ou les droits de directe seigneuriale, à un denier inférieur à celui des fondg, ce pe serait pas une raison de restreindre à ce taux celui qui ne veut pas s’exposer volootairement à cette perte, et qui ne cède sa propriété que pour obéir à l’intérêt public. Il faut à celui-ci une indemnité juste et pleine ; elle ne peut l’être qu’autant qu’elle peut le mettre à portée de substituer, à la propriété qu’elle cède, une propriété susceptible du même avantage. §1 cette opération est juste à l’égard du propriétaire des droits, elle ne présente aucune injustice relativement au redevable. Le preneur qui n’a acquis son fonds que sous la condition d’une charge foncière, susceptible de la même augmentation que le revenu du fonds, ne possède véritablement qu’une portion de ce fonds. S’il produit 2,000 livres de revenu sous une charge annuelle de 500 livres , le preneur n’est propriétaire que de 1,500 livres de revenu ; il ne le vendra que 45,000 livres, si le prix des fonds est au denier 30. À quoi donc se réduit la faculté qui lui est accordée? C’est à la pure faculté d’acheter une propriété qu’il n’avait pas. Peut-il avoir le droit d’acheter une propriété moins que le prix auquel il pourra la vendre le lendemain ? On objecte, avec un certain fondement, que les droits seigneuriaux sontd’une difficile perception, que le produit en est considérablement diminué par les frais de régie, et surtout par ceux de terriers. On peut répondre : 1° Que ce qu’il en coûte au propriétaire des droits n’augmente pas la valeur de la propriété du redevable ; 2° Que beaucoup de propriétaires de fiefs ont fait les frais des terriers, dont la durée est perpétuelle quand ils ont été rédigés et quand ils sont suivis avec soin; 3* Qu’il n’est point de propriété foncière qui ne soit sujette à des non-valeurs, lesquelles peuvent compenser celles attachées aux droits seigneuriaux. Telles senties raisons pour et contre, d’après lesquelles l’avis de votre comité a été, qu’en général, le rachat des droits seigneuriaux devrait être fait au denier courant des fonds, sauf un8 faible déduction qui pourrait y être faite en considération des frais et non-valeurs dont leur perception était susceptible. Mais à quel denier fixera-t-on ce taux du rachat? Sera-t-il uniforme, lorsqu’il est notoire que Je denier du prix des fonds n’est pas uniforme dans tout le royaume, et qu'il varie infiniment par une suite de mille combinaisons locales? Il semble, Messieurs, que cette seconde question pourrait se résoudre par un expédient qui paraîtrait très simple au premier coup d’œil : ce serait de renvoyer a chaque assemblée administrative de département l’indication du prix courant des fonds de son territoire; mais le parti présente des inconvénients qui n’ont point permis à votre comité de vous le proposer Je réserve à vous les développer lorsque je passerai à l’exposition des questions relatives au mode et au taux du rachat des fonds casuels, Je me borne en «e moment à vous indiquer le résultat auquel votre comité a cru pouvoir se fixer sur le capital du rachat des redevances fixes et annuelles. Taux du rachat particulier aux redevances fixes et annuelles. Il a pensé, à l’égard dès redevances annuelles en grains, denrées et portions des fruits de la récolte, c’est-à-dire de ces sortes de redevance qui sont sucseptibles du même accroissement que les fonds, que le rachat en devait être fixé au denier 25, comme un prix moyen entre les divers deniers auxquels les fonds §e vendent dans le royaume, Ce taux n’aura lieu que pour les redevances de la nature de celles que je viens d’indiquer. A l’égard des redevances en argent, le rachat ne s’en fera qu’au denier 20, puisque ce genre de revenu n’est point susceptible d’augmentation, Quant aux corvées réelles, le comité a cru y 392 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 mars 1790.] devoir appliquer Ile même capital, attendu que leur valeur est moins susceptible d’augmentation. Il a aussi réduit au même denier 20 le taux du rachat des banalités, en considération des frais que leur exploitation exige. 2° Mode et taux du rachat des droits casuels. — Eléments fondamentaux de ce rachat. Vous voici parvenus, Messieurs, à la plus grande de toutes les difficultés que présente l’opération du rachat des droits seigneuriaux. C’est sans doute un capital quelconque, qui doit payer ce genre de propriété que le bailleur s'est réservé, en imposant au fonds, qu’il a concédé, la charge éventuelle de payer un droit dans certains cas, à certaines mutations. Mais comment déterminer un capital, sans un rapport avec l’idée d’un revenu annuel ? Et comment attacher l’idée d’un revenu, ou d’une charge annuelle à un droit purement éventuel? A la vérité ces droits, considérés en masse dans la main du propriétaire, pourraient être susceptibles d’une réduction à une année commune de revenu, d’après les baux, les cueillerets et autres renseignements; mais, outre que ces secours ne se rencontraient guère que dans les fiefs un peu importants, s’il est vrai que vous ayez décrété, et que vous n’ayez pu décréter qu’un rachat individuel, il est impossible de s’arrêter à cette base. „ Si, d’après cette réflexion, nous revenons à l’évaluation de cette charge annuelle, sur un fonds pris séparément, il est évident que nous ne pouvons nous fonder que sur des probabilités tirées, non de ce qui est arrivé sur ce fonds particulier, dans une certaine révolution d’années, mais de ce qui doit présumablement arriver d’après le cours le plus ordinaire. C’est ici, je le répète, un contrat purement aléatoire entre deux parties, dont l’une rachète son fonds du poids d’une charge éventuelle, et l’autre reçoit le prix d’un bénéfice futur, mais incertain. Ce serait aux parties intéressées, qu’il faudrait naturellement abandonner le calcul d’une pareille spéculation, et nous osons espérer que le plus grand nombre des parties intéressées trancheront ces difficultés presque insurmontables par des forfaits de gré à gré; mais l’esprit d’intérêt ne divise que trop souvent les hommes; il faut des règles pour ceux qui ne pourraient pas se concilier. La loi, pour établir ces règles, doit se mettre à la place des parties, et faire pour elles le forfait, en s’appuyant sur les combinaisons qui détermineraient deux personnes justes et raisonnables. La seule qui nous ait paru avoir ce caractère, est celle de supposer aux droits casuels une échute, dans une certaine révolution d’années ; de diviser le montant de J’échute par le nombre des années, et de regarderie quotient qui en résultera, comme l’évaluation au produit annuel pour le propriétaire, et de la charge annuelle pour le redevable. Mais les difficultés renaissent sous nos pas à mesure que nous paraissons les écarter. Les droits seigneuriaux casuels varient à l’infini sur toute la surface du royaume, soit quant à leur quotité, soit quant aux actes et aux cas ui les produisent; ici, les fonds sont soumis à eux différentes espèces de droits selon le genre des mutations; là, ils ne sont soumis aux droits que pour un genre de mutation ; ailleurs, il n’y a qu’une même espèce de droits pour les divers genres de mutations. Ce n’est pas tout. Quelle base prendre pour fixer l’époque de la révolution, des échutes des divers droits ? S’il ne s’agissait que de mutations de mort, on pourrait prendre pour tout une même époque, parce que la durée des générations est à peu près la même partout, et ce calcul à peu près de même; mais, il est d’autres genres de mutation, telles que les échanges, baux a rentes, donations, legs, qui donnent ouverture au même droit de mutation. Mais la révolution des ventes est bien plus difficile à déterminer. La fréquence de ces sortes de mutations dépend de mille causes différentes, qui agissent plus ou moins, suivant les divers pays. L’abondance du numéraire, la proximité des grandes villes, l'agrément et les avantages du pays, la facilité du débouché des denrées, la plus ou moins grande division des propriétés, le plus ou moins d’importance des droits seigneuriaux, en un mot, toutes les causes qui rendent le commerce des fonds plus ou moins actif : voilà toutes les considérations qui doivent entrer dans la combinaison des motifs qui peuvent étendre ou restreindre l’époque de la révolution des mutations par vente. Mode qui paraîtrait cadrer plus parfaitement avec ces éléments. Ces réflexions, qui se présentent naturellement, avaient fait d’abord incliner votre comité vers un premier mode, lequel paraissait réunir toutes les combinaisons qui doivent servir d’éléments au taux du rachat. Ce mode est celui qui existait dans plusieurs coutumes, et dans plusieurs parlements du royaume, pour l’indemnité due par les gens de mainmorte, qui acquéraient des fonds soumis au régime féodal, et que l’on appliquait même au cas où, par suite de l’érection d’une terre en duché-pairie, elle sortait de la mouvance d’un fief particulier. Ce mode consistait à évaluer la directe, à une portion... de la valeur du fonds, telle que le tiers, le quart, le cinquième, ou sixième; car ce taux n’était point uniforme dans les diverses coutumes, et dans les parlements qui l’avaient admis : Votre comité n’aurait pas cru devoir admettre aucun de ces taux, par deux raisons : t* Aucun ne lui a paru culculé sur des bases raisonnables; 2° Les réflexions que je vous ai ci-dessus présentées, démontrent qu’il est impossible d’admettre un taux uniforme pour tout le royaume. 11 aurait donc été question, en admettant le mode en lui-même, d’en renvoyer l’exécution aux assemblées administratives des départements, c’est-à-dire que chacune d’elles aurait indiqué la portion du fonds, telle que le tiers, le quart, le cinquième, le sixième, ou autre à laquelle elle aurait estimé devoir évaluer le rachat des fonds de son territoire, ou même des divers districts différents, si elle l’avait jugé convenable. Ces avis auraient été formés dans chaque assemblée administrative d’après des bases et des principes généraux, qui auraient été indiqués dans une istruction. Les avis formés auraient été envoyés à l’Assemblée nationale pour y être décrétés, dans le cas où il n’y aurait eu aucune réclamation, ou jugées en cas de réclamation . 393 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 mars 1790.] Ce plan paraissait présenter un grand avantage, et facile à exécuter. L’avantage aurait consisté en ce que les évaluations auraient porté sur des bases plus propres à maintenir un juste équilibre entre l’intérêt du propriétaire et celui du redevable des droits rachetables. Toute évaluation des droits casuels porte nécessairement sur ces deux bases fondamentales : 1° un revenu annuel probable pour la répartition d’une échu te dans un certain nombre d'années; 2° un capital à un denier au moins approchant du prix courant des fonds. L’une et l’autre base dépend, comme je vous l’ai observé, de combinaisons purement locales, et ces combinaisons ne peuvent être mieux connues que par les propriétaires et habitants des pays auxquels elles sont propres. Chaque département aurait donc fait son évaluation sur les combinaisons qui lui étaient propres, et à l’aide d’une instruction générale. Ces bases une fois arrêtées dans un département, la réduction du taux du rachat se faisait par une théorie de calcul infiniment simple. Il ne s’agissait que de prendre hypothétiquement un fonds évalué au denier reconnu pour être le rix commun des fonds d’un même territoire. n aurait ensuite calculé les droits casuels auxquels ils sont soumis suivant la loi territoriale. Leur produit aurait été divisé par le dividende d’un certain nombre d’années, que l’on aurait choisi eu égard au plus ou moins de fréquence de divers genres de mutations, et que l’on aurait fixé d’après toutes les combinaisons locales. On aurait donné au revenu annuel produit par cette division, un capital au denier à peu près du prix courant des fonds dans le territoire. Enfin, la comparaison du montant de ce capital avec le prix total du fonds, aurait donné la portion ali-quote de cette valeur totale, qui serait devenue le taux du rachat : c’est ainsi que chaque assemblée administrative aurait pu évaluer à un taux différent, mais toujours fixé sur le même principe, le prix du rachat des droits casuels. Inconvénients de ce premier mode. Mais, quelque juste que soit ce plan, quelque simple qu’il paraisse au premier coup d’œil, votre comité n’a pu se dissimuler les inconvénients trop considérables qu’il présentait. Un premier, mais qui n’aurait pas été insurmontable, résulte de ce qu’il arrive souvent que les titres particuliers donnent au propriétaire d’un fief des droits plus moins forts que ceux établis par la loi territoriale. Mais voici les inconvénients plus graves qui ont fixé l’attention du comité. Les combinaisons qui devraient servir de base à l’opération dont il s’agit, pourraient devenir très embarassantes et très compliquées dans certains départements, soit parce qu’il aurait fallu les varier quelquefois pour les divers districts, soit parce que plusieurs départements se trouvent aujourd’hui composés de territoires démembrés de pays régis par des coutumes différentes. Les nombreuses et importantes affaires dont les assemblées administratives vont se trouver chargées pourraient ne leur pas permettre d’apporter à chacune d’elles la célérité que toutes exigent également. Il est impossible de ne pas prévoir que lesavis des assemblées administratives éprouveraient un grand nombre de réclamations, qui vous donneraient peut-être autant de contestations à juger que vous avez formé de départements; cependant il est important d’accélérer une opération qui peut contribuer en partie à remettre le numéraire en mouvement. Il est important d’accélérer la vente des biens domaniaux et ecclésiastiques ; l’incertitude dans laquelle resteraient pendant longtemps ceux qui se proposent de les acquérir sur le taux du rachat des droits mis en vente, pourrait nuire à la rapidité ou aux prix des adjudications. Enfin, Messieurs, annoncer que ce seraient les assemblées administratives que vous chargeriez de fixer létaux du rachat de droits seigneuriaux, ce serait jeter dans les élections primaires, dans la formation des assemblées administratives et dans leur administration un germe de discorde trop dangereux. Tels sont, Messieurs, les motifs qui ont forcé votre comité d’abandonner le plan qui avait paru d’abord, à bien des personnes, le plus juste et le plus régulier, et dont, par cette raison, il était nécessaire de leur faire connaître les grands inconvénients. Mode quia été substituéau précédent , et éléments qui servent de base à ce mode. En abandonnant à regret le seul mode dans lequel on pouvait réunir tous les éléments qui doivent entrer dans l’évaluation du rachat, votre comité a dû, sans doute, s’attacher à y substituer celui qui s'éloignerait le moins de ces bases fondamentales. Ces éléments sont au nombre de trois : U faut que le mode puisse s’adapter à la variété infinie des droits casuels, soit dans leur quotité, soit pour les cas qui les produisent, afin que le taux suive toujours la proportion du plus ou moins d’importance des droits ; Il faut que le mode soit fixé dans une proportion relative au plus ou moins de fréquence des mutations, puisque c’est la probabilité du retour des écbutesqui rend ces droits plus ou moins utiles ; Il faut enfin que ce mode puisse amener un taux qui ait une proportion avec la valeur des fonds redevables des droits. Voici, Messieurs, le mode que votre comité a cru le plus propre à réunir ces trois combinaisons. Il vous propose de distinguer les droits dus pour les mutations par vente et ceux dus pour les mutations d’un autre genre, et de fixer le taux du rachat de chacune de ces deux espèces de droits à une certaine portion aliquote de ce droit. Cette portion sera plus ou moins forte, elle sera du tiers, de la moitié du tout, quelquefois dans des proportions moindres, d’après des distinctions dont je vais vous exposer les principes et les éléments. Vous apercevrez d’abord que ce mode a un rapport direct avec l’importance des droits, puisque le même taux donnera un résultat plus ou moins fort en somme, selon que le droit sera plus fort en quotité dans un tel pays ou dans une telle seigneurie. Quant au rapport que le taux doit avoir avec le plus ou moins de fréquence des droits, voici comment nous avons cru pouvoir remplir cette condition. Nous avons considéré la quotité du droit qui se paye, en cas de vente, comme une des causes qui devait influer plus généralement sur le plus 894 [Assemblé® nationaie-l ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [28 mars 1790.] ou moins de fréquence de ces sortes de mutations, comme une cause qui pourraitêtre regardée comme commune à tous les pays. L’échelle de la variété, qui existe sur la quotité des droits de vente, s’étend depuis la moitié du prix jusqu’au cinquantième. Le poids des droits tombe autant et même plus sur le vendeur que sur l’acquéreur, lequel proportionne toujours son prix à tout ce qu’il doit payer. Le propriétaire, qui vend moins à raison de l’importance du droit, ne peut être conduit que par la nécessité à l’aliénation d’un fonds qui est pour lui aussi précieux, quant au revenu, que le fonds, qui, dans une autre seigneurie, serait vendu le double. S’il veut vendre à trop haut prix, l’acquéreur se retire ; si le seigneur fait une remise considérable pour faciliter les ventes, le droit lui devient moins utile. C’est ainsi que le poids des droits de vente retombe sur celui auquel ils sontdus, comme sur le vendeur, et en diminue la fréquence et l’utilité. Le comité a donc cru pouvoir considérer la quotité du droit comme une des causes qui influe davantage sur la fréquence de leur perception et sur leur produit. Ce n’est pas, sans doute, la seule ; je vous en ai exposé un grand nombre d’autres : mais, dans l’impossibilité où nous nous trouvions de les combiner pour chaque département, pour chaque pays, nous avons dû nous fixer à celle qui était commune. D’ailleurs, les autres causes peuvent être regardées comme de simples exceptions locales, qu’une loi générale ne peut ni ne doit considérer. Application de ce mode aux droits dm pour mutations par vente. En nous fixant donc à ce premier point de vue, nous avons formé une échelle dans laquelle nous avons placé sur sept classes différentes les quotités plus généralement connues des droits dus en cas de vente, en partant de la quotité la plus forte, qui est de moitié, et nous arrêtant à la quotité du douzième. Nous n’avons pas cru devoir descendre plus bas, parce que, quand le droit est arrivé à cette proportion la plus générale, sa dégradation ne peut plus guère influer sur la fréquence des mutations. Ainsi, nos sept classes sont le droit à moitié, au tiers, au quint et requint ou au quart, au simple quint, au sixième, au huitième, au douzième. Appliquant à ebacune de ces classes le principe que l’on doit supposer une fréquence plus ou moins grande des mutations, dans les pays et les lieux où ees quotités sont établies, nous avons étendu plus ou moins la révolution des années dans lesquelles on devait supposer une échute; et en divisant le produit de cette échute par le nombre des années, fixé par sa révolution, nous avons regardé le quotient qui eu résulte comme le produit de l’année commune. Les termes de nos différentes révolutions s’étendent, depuis quatre-vingts ans , pour les lieux où le droit est de moitié, et desceudent eu décroissant jusqu’à cinquante ans pour les lieux où le droit n’est qu’au douzième et au-dessous. Ainsi, les sept termes de révolutions d’années qui s’appliquent aux sept classes de la quotité des droits sont 80, 75, 7U, 65, 60, 55 et 50 années. En divisant ensuite chacune des sept classes par le nombre d’années dans la révolution desquelles on devait supposer une échute, nous en avons dû supposer le produit annuel égal à une portion du droit pareille au nombre d’années qui lui servait de diviseur; c’est-à-dire un 80e, un 70e, un 65e du droit, et ainsi de suite, suivant le nombre d’années qui sert de diviseur, Il restait ensuite à chercher le nombre multiplicateur, par lequel nous devions fixer le taux auquel se rachèterait le quotient trouvé pour le produit annuel. Ce nombre multipliant, d’après les principes que j’ai déjà posés, devait être un denier à peu près égal à celui du prix courant des fonds. Ainsi, le produit annuel d’un droit, compris dans l’une des sept classes, devant être, par l’opération précédente, d’un 80e, d’un 60e ou d’un 50e, ou autre portion de ce droit, si l’on multipliait ce produit par l’un de ces nombres, 20, 25 ou 30, on devait en conclure que le capital du rachat devait être 20, 25 fois ou 30 fois le 80°, le 70e, le 65e, OU toute autre portion du droit à laquelle le produit annuel avait d’abord été fixé par la première opération. Ici, votre comité ne pouvait plus marcher avec autant de fermeté. Le denier au prix des fonds varie à l’infini dans l’étendue du royaume ; il dépend de mille combinaisons locales, lesquelles produisent une différence totale, souvent dans un même canton et dans des lieux très peu distants. Dans l’impossibilité absolue où se trouvait le comité d’entrer dans toutes ces combinaisons locales, et même de les connaître ; dans la nécessité même de donner à la loi la plus grande simplicité dont elle pouvait être susceptible, votre comité a cru pouvoir se fixer au denier qui s’éloignait moins des extrêmes : il s’egt arrêté au denier vingt-cinq ; en sorte que le prix du rachat est toujours vingt cinq fois la portion du droit local, à laquelle est réduit le produit annuel, d’après l’époque supposée de l’échute. Considérant ensuite que le nombre 25 contient cinq fois le nombre 5, par lequel on pouvait diviser, sans fractions, toutes les révolutions d’années que nous avons prises pour diviser les échu tes de chacune des sept classes, nous avons partagé chaque révolution d’années en autant de portions qu’elles contiennent de fois le nombre 5 ; et nous avons donné pour taux du rachat de chaque droit, cinq fois cette portion du droit total. Ainsi, le nombre cinq étant compris seize fois dans 80, le droit placé dans la classe où le retour de l’échute n’est supposé qu’une fois en 80 ans, est déclaré rachetable par cinq seizièmes du total de ce droit. Celui placé dans la classe où le retour de l’échute est supposé une fois en 60, est déclaré rachetable par cinq douzièmes du droit, et ainsi des autres. Sans doute.plusieurs personnes se récrieront sur le denier vingt-cinq, auquel nous nous sommes fixés. Les uns diront qu’il est trop fort pour leur province, tandis que d'autres opposeront que ce denier est beaucoup inférieur à celui auquel les fonds se vendent dans leurs cantons; mais les uns et les autres se tranquilliseront, lorsqu’ils voudront bien faire attention à la distinction qu’il faut faire entre l’opération que nous avons prise pour base de la loi, et celle qui aura lieu entre les parties intéressées pour l’exécution de la loi. Le denier que nous avons pris ne sert qu’à fixer dans la loi la portion du droit qui doit servir de taux au rachat, telle, par exemple, que cinq seizièmes, un tiers, une moitié, etc. S’agira-t-il entre les parties d’exécuter la loi, [Assemblé* nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (28 mars l*ïiîü-] il faudra évaluer en somme le droit total pour en tirer les cinq seizièmes, le tiers ou la moitié. Cette évaluation se fera toujours, ou sur le prix certain d’une vente, ou sur une évaluation du fonds à sa juste valeur. Les parties rentreront donc ici nécessairement dans le vrai taux du prix ordinaire des fonds, qui est propre à chaque territoire, à chaque localité; et dès lors l’inconvénient que l’on pourrait reprocher à l’opération de la loi générale, devient bien moins considérable dans son exécution, et n'a plus qu’une très faible influence dans l’opération. Application de ce mode aux droits dus pour les mutations autres que par vente. Je viens de vous exposer, Messieurs, les principes qui ont servi de base à l’opération de votre comité, relative au taux du rachat des droits dus pour les mutations par vente : celle relative aux droits dus pour les mutations d’un autre genre, n’en diffère qu’en très peu de chose. Ici, le taux ne pourrait pas varier en raison de la quotité du droit; si l’on excepte quelques coutumes et quelques provinces, il est partout le même : il consiste communément dans le revenu d’une.année. Mais il y a une grande variété à l’égard de cette seconde espèce de droit, quant aux cas qui y donnent ouverture. Ici, ce droit a lieu pour toutes les mutations quelconques, autres que par la vente : il y a même des lieux où le droit est ouvert par les mutations qui surviennent de la part du seigneur. Ailleurs, il n’est dû, au contraire, que pour les successions collatérales uniquement. Le plus généralement il est dû à toutes les mutations qui ne sont point à titré de vente, excepté les successions et donations en directe. Le droit doit être considéré comme plus ou moins fréquent, selon que la loi ou le titre multiplie ou restreint les cas qui y donnent ouverture. C’est la considération qui nous a conduits à distinguer en cinq classes principales les pays et les fiefs où le droit a lieu, et nous avons étendu ou resserré l’époque de la révolution d’années dans laquelle nous avons supposé une échute, selon que les cas qui y donnent ouverture, sont plus ou moins multipliés dans chacune de ces classes. Au surplus, la réduction du taux du rachat à une portion aliquote du droit total, est la même que celle que je vous ai expliquée à l’égard du rachat du droit de vente . Observation servant de clef aux articles du projet de décret. Ce serait ici, Messieurs, le lieu de vous mettre sous les yeux les tableaux des divers taux que nous avons appliqués à chacune des classes des deux espèces de droits que nous avons distinguées ; mais ce détail, que vous trouverez dans le projet de décret, serait en ce moment trop fastidieux. Je dois seulement ici répondre à une question que l’on pourra être tenté de me faire. Les articles du projet de décret n’énoncent que le résultat de nos opérations; chacun d’eux n’indique point le nombre d’années dans la révolution desquelles nous avons supposé une échute pour chaque classe du droit rachetable II est juste cependant que vous puissiez connaître les éléments de chaque opération particulière pour la juger; mais vous n’éprouverez, à eet égard, aucun embarras, si vous voulez bien vous rappeler que tous les différents taux de rachat sont fixés à cinq portions aliquotes du nombre des années, toujours divisé par 5; en sorte qu’en multipliant la portion aliquote par le nombre 5, vous trouverez toujours le nombre d’années qui sert de diviseur au produit de l’année commune, Par exemple, le taux fixé à cinq seizièmes, cinq douzièmes ou cinq huitièmes, vous indiquera que le produit de l'année commune a été calculé sur une révolution de 80, 60 ou 40 ans, et que nous donnons vingt-cinq fois ce produit annuel pour le taux du rachat: dès lors, les difficultés qui s’élèveraientne pourraient porter que sur le point de savoir si le comité a trop étendu ou trop resserré l’époque de la révolution de telle ou telle échute. Vous avez donc, Messieurs, deux chose* à juger séparément; le Système du mode et son application aux divers droits. Si vous approuvez le mode en lui-même, vous en pourrez changer l’exécution sans le détruire. Non* observerons seulement iei à ceux qui croiraient quelques-unes des révolutions trop éloignées, que nous n’avons point déduit dans notre opération les remises que tous les propriétaires des fiefs sont dans l’usage de faire, et que cette considération a dû entrer dans le calcul des révolutions des années, et de la portion que nous avons donnée dans le droit total, calculé sans remise*. Objets des articles qui forment la dernière partie au décret. Nous voici sortis, Messieurs, du labyrinthe obscur dans lequel nous étions condamnés à chercher une vérité que nous ne pouvions poursuivre qu’à la lueur de ces probabilités, qui ne peuvent jamais acquérir sur l’opiuion cet empire qui n’appartieut qu’aux principes immuables de la morale , ou aux démonstrations mathématiques, La dernière partie de notre travail a pour objet quelques règles que le comité a cru nécessaire de vous proposer, soit relativement à l’exécution de la loi entre les parties intéressées, soit relativement aux conséquences et aux effets qu’elle peut avoir dans l’intérêt des tiers. Manière d’évaluer les fonds pour en évaluer les droits de mutation. Le rachat des droits casuels doit être proportionné à leur valeur. Cette valeur est toujours relative à celle du fonds qui y est assujetti, ou à celle de son revenu. Ainsi, quelque système que l’on embrasse, quelque mode que l’on choisisse, il en résultera toujours pour son exécution, une évaluation, à faire entre les parties intéressées, du fonds sujet aux droits, ou de son revenu. Cette opération deviendra très onéreuse à toutes les parties, si elle ne peut se terminer que par une expertise; le bienfait accordé au redevable, tournera à sa ruine, si les frais de cette expertise sont à sa charge; le bénéfice en sera nul, si ces mômes frais sont à la charge du propriétaire des droits rachetés. Votre couiité vous propose, pour prévenir cet inconvénient, d’ordonner que l’éva-iuation des fonds se fasse sur le prix de l’acquisition, si c’est un nouvel acquéreur qui g@ présente au rachat ; ou sur le prix de la dernière des ventes qui aura été faite dans les dix années 396 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 mars 1790.] antérieures. S’il n’existe point de vente dans ces dix années, le redevable qui voudra se racheter, pourra faire l’offre d’une somme, et, en cas de refus, les frais de l’estimation par experts seront supportés, ou par celui qui aura fait l’offre, ou par celui qui l’aura refusée, selon qu’elle sera jugée suffisante ou insuffisante. La meme faculté d’offrir aura lieu lorsqu’il s’agira d’évaluer le revenu. Inconvénient du rachat au préjudice des propriétaires des droits . Mais voici un second inconvénient du rachat, qui présente une difficulté plus sérieuse, et qui exige, Messieurs, toute votre attention. Le rachat, dont vous accordez la faculté aux redevables, ne peut avoir pour objet que la libération des droits casuels futurs; ceux ouverts par une mutation antérieure au rachat sont un droit acquis aux propriétaires des fiefs, que vous n’avez ni voulu ni pu leur enlever. Cependant il est facile de prévoir deux tournures par lesquelles on tentera de les en priver. Celui qui se proposera d’acheter un fonds non encore racheté, fera avec son vendeur un traité sous seing-privé, dont la première condition sera de racheter le fonds avant que le contrat soit rédigé en acte public. Le vendeur se prêtera volontiers à une opération dont le résultat sera de partager entre le vendeur et l’acheteur le bénéfice du droit de mutation, qui aurait appartenu au propriétaire des droits non rachetés. La vente ne sera rendue publique, qu’après un intervalle de quelques années, et le droit de mutation en sera refusé sous prétexte du rachat fait antérieurement. Plusieurs personnes se feront peut-être un scrupule de se permettre une opération qui est une véritable fraude; mais d’autres pourront, même de bonne foi, croire que votre décret les autorise à prévenir par un rachat la vente qu’ils prévoiront être dans le cas de faire sous un terme prochain. Le second cas diffère essentiellement du premier. Là, il y a une véritable fraude, une volonté peu légitime de se soustraire à un droit acquis, puisque la vente précède le rachat. Ici, au contraire, il n’y a que l’intention excusable de profiter de l’avantage d’une faculté légitime. La vente prochaine est vraisemblable, mais n’est pas certaine. On ne peut pas se dissimuler, néanmoins, que, même dans cette hypothèse, la loi, qui n’en préviendrait pas l’inconvénient, autoriserait une injustice évidente. Le rachat des droits casuels que vous autorisez, est essentiellement un contrat aléatoire dans lequel deux parties traitent sur un événement supposé incertain, et dont le terme peut être très éloigné: cette incertitude est même le motif qui a déterminé le comité à ne supposer les échutes que dans des révolutions très éloignées, et à réduire le prix du rachat à un taux très modique. Mais l’espérance de ce contrat aléatoire est entièrement détruite, si l’incertitude n’existe plus pour les deux parties contractantes. Si celui qui se rachète aujourd’hui sait qu'il est dans la nécessité de vendre dans un terme très prochain, s’il en a pris la résolution par une raison quelconque, il se rachète d’une charge inévitable pour lui, tandis que le propriétaire des droits croit ne recevoir le prix que d’une mutation très incertaine. Sans doute, il serait injuste de porter une inquisition trop rigoureuse dans l’administration intérieure des pères de famille; mais une grande proximité du rachat et de la vente, ne peut-elle pas être regardée comme une espèce de preuve du projet antérieur, ou d’une nécessité préexistante ? Ne peut-on pas dire que le seul fait de ce rapprochement des époques détruit le principe aléatoire que la loi a supposé dans le contrat, et l’oblige d’accorder une indemnité quelconque au propriétaire des droits rachetés? Rappelez-vous ici, Messieurs, qu’en fixant un taux du rachat, vous vous mettez à la place des parties contractantes, et que vous faites pour elles un marché aléatoire sur un événement que vous supposez incertain, sur une casualité future et éloignée. Dès lors, pouvez-vous vous dispenser de conclure que vous ne devez point appliquer le bénéfice de ce marché aléatoire, si la casualité se trouve détruite par le fait, lorsque vous réfléchirez qu’en opérant autrement, vous détruiriez nécessairement entre les parties la casualité, qui est la base de votre taux, qu’alors les redevables ne se présenteraient au rachat, qu’au moment oh ils se proposeraient de vendre, et que, contre votre propre intention, vous rendriez la consommation des rachats plus longue, puisque ceux qui n’auraient point l’intention prochaine de vendre, n’auraient plus aucun intérêt au rachat, et n’y seraient plus portés par l’appât d’un bénéfice à faire sur la casualité de la charge? Ce sont ces considérations qui déterminent votre comité à vous proposer d’assujettir au droit de mutation, nonobstant le rachat antérieur, les aliénations volontaires qui seraient faites par le même propriétaire dans les deux années qui suivent le rachat. En adoptantcette idée, vous vous dispenserez de faire une loi contre le cas de fraude dont je vous ai fait connaître la possibilité. On ne reprochera point à votre loi l’immoralité attachée à celles qui punissent sur une simple présomption. Ce ne sera point une peine que vous prononcerez contre celui que vous assujettirez au paiement du droit ; ce sera une justice que vous rendrez au propriétaire des droits, à l’égard duquel vousjugerez que le marché aléatoire se trouve détruit par le seul fait du rapprochement des époques du rachat et de l’aliénation, quelque pure qu’ait été l’intention du redevable. Proscription du retrait lignager sur les droits rachetés. Vous savez, Messieurs, que le rachat volontaire d’une rente foncière irrachetable, était considéré comme une vente, et donnait ouverture au retrait lignager, dans le pays où il a lieu. La faculté que vous accordez aux redevables des droits seigneuriaux deviendrait illusoire, si un lignager pouvait faire revivre le lendemain les droits rachetés la veille entre les mains du premier propriétaire. Nous vous proposerons donc de proscrire dès à présent, pour ce cas particulier, ce droit de retrait lignager, qui, favorable sous un certain point de vue, apporte de si grandes entraves au commerce des fonds, et devient d’ailleurs une source féconde de procès par les épines dont nos lois en ont hérissé l’exercice. [28 mars 1790 .J [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Effet du rachat vis-à-vis des tiers, tels que les propriétaires des fiefs supérieurs et les créanciers. Les propriétaires des fiefs sont ordinairement assujettis, en versd’autres fiefs, à des droits casuels de la même nature que ceux qui leur appartiennent. Les droits qui leur sont dus, forment une partie delà valeur de leurs fiefs. Ils sont le gage du paiement des droits dont ils sont grevés, et du rachat de ces mêmes droits. Ce gage serait souvent considérablement diminué, quelquefois entièrement anéanti, si celui qui recevra le rachat, pouvait en consumer le prix, et conserver la faculté de ne le point racheter. Il doit jouir de cette faculté quant aux propriétés qu’il conserve, mais il est juste qu’il soit obligé de se racheter pour les portions qui l’anéantissent par le rachat qui lui est fait. Le principe ne peut éprouver de contradiction, mais la manière de conserver les droits du fief supérieur exige une attention particulière. Tout créancier quelconque peut, sans doute, former une opposition entre les mains des débiteurs de son débiteur ; mais : 1° il serait souvent bien difficile de connaître tous les redevables d’un tel fief; 2° il serait trop dangereux d’autoriser le propriétaire d’un fief supérieur à former autant d’oppositions particulières qu’il peut exister de redevables dans un fief. Ce serait exposer les propriétaires des droits rachetables à se voir écraser par des frais ruineux. Votre comité a donc dû chercher une forme qui pût concilier les droits de toutes les parties intéressées, et prévenir les vexations que la haine ou l’avidité des praticiens pourrait occasionner. Il a pensé qu’il fallait obliger tous ceux qui auraient reçu des remboursements, à en faire, à une certaine époque de l’année, la déclaration à ceux auxquels ils étaient tenus d’en remettre une portion, sous peine d’être condamnés à la restitution du double. 11 faut néanmoins permettre aux propriétaires des fiefs supérieurs, qui ne croiraient pas devoir s’en rapporter à la bonne foi de ceux qui relèvent d’eux, de veiller à la conservation de leurs’ droits, non par des oppositions multipliées entre les mains de tous les redevables, mais par une seule opposition générale au greffe des hypothèques, ou au greffe du juge royal du ressort, dans les lieux où l’édit de 1771 n’a point d’exécution. Cette opposition sera à leurs risques, toutes les fois que la déclaration leur aura été faite dans le temps prescrit. Enfin, votre comité a cru convenable d’assujettir au contrôle et à l’enregistrement par extrait sur le registre du contrôle, toutes les quittances de rachat, afin qu’elles pussent être connues de tous ceux qui y auraient intérêt : mais nous vous proposerons de fixer le contrôle à un droit très modique. Nous vous proposerons même d’établir par une loi précise l’exemption du droit de centième, pour le remboursement des rentes foncières, laquelle exemption n’a eu lieu qu’en vertu d’un simple règlement du conseil, du 9 septembre 1775, à un droit très modique. Vous prévoyez facilement, Messieurs, qu’une grande partie de ces précautions devient commune aux créanciers ordinaires, pour la conservation de leurs hypothèques. Votre comité a vu avec peine que ces règlements imposeraient une certaine gêne aux redevables, qui seraient obligés, avant d’exécuter leur paiement, de s’assurer s’il existe ou non] une opposi-397 tion : mais l’intérêt particulier doit toujours fléchir devant l’intérêt général ; et il n’y avait point de comparaison à faire entre les inconvénients qu’aurait entraînés la liberté naturelle des remboursements, et la précaution très peu onéreuse à laquelle ce règlement soumettra les redevables. Quant à la quotité de ce que chaque propriétaire de fief sera obligé de payer à celui dont il relève, à raison des rachats qui auront été faits au premier, il est aisé de prévoir qu’elle se réglera sur les taux prescrits par la loi, d’après l’hypothèse particulière à laquelle ils seront applicables, et que la règle qui a lieu pour le tout, est celle qui doit avoir lieu pour une partie de ce tout. Un rachat de 1,000 livres reçu par le propriétaire d’un fief, suppose que cette portion de son fief valait 1,000 livres. Il devra donc à celui dont il relève, pour le rachat de cette portion de son fief, la même somme qu’il devrait pour le rachat d’un fief dont la valeur totale ne serait que de cette somme de 1,000 livres, c’est-à-dire les cinq seizièmes, les cinq huitièmes, ou autre portion, etc., du droit qui serait dû en cas de vente d’unfief de la valeur de 1,000 livres, avec les cinq douzièmes, les cinq seizièmes ou autre portion du droit qui serait dû pour les mutations autres que par vente, selon la nature des droits auxquels le nef total se trouvera assujetti. Chaque propriétaire de droits rachetables devant être le maître de stipuler ses intérêts comme il le jugera à propos, et de traiter de gré à gré avec les redevables, le propriétaire du fief supérieur sera obligé de liquider le rachat qui lui sera dû sur la somme portée en la quittance du rachat fait au premier, sans pouvoir critiquer l’opération, sous prétexte que la liquidation est inférieure au taux de la loi. Il ne pourra critiquer la quittance qu’autant qu’il lui imputera un déguisement dans la somme qui a été véritablement payée. La loi lui réserve la faculté de faire preuve de la fraude, ou de déférer le serment sur la sincérité de l’acte qu’il suspectera. Suppression du droit d'échange fiscal. Votre comité ne pouvait quitter la matière du rachat des droits féodaux, sans arrêter ses regards sur cet impôt extraordinaire que la fiscalité a déguisé sous la dénomination absurde d’un droit féodal, comme si une charge féodale pouvait être autre chose que la condition imposée lors de la concession primitive des fonds, comme si le roi, même en qualité de seigneur féodal suzerain universel, avait pu imposer des conditions nouvelles à ses vassaux et arrière-vassaux, et vendre à tous propriétaires de fiefs, et même à des étrangers, une féodalité et des droits qui n’ont dû leur existence qu’à une autorité arbitraire. Ce droit d’échange est très peu utile à la nation, puisqu’il a été aliéné en très grande partie : toutes les aliénations en ont été faites à très vil prix ; en sorte que les remboursements dus aux acquéreurs seront très peu considérables. Votre comité n’hésitera donc point à vous proposer la proscription de ce droit purement bursal. Résumé et plan général du projet de décret. Je viens de vous développer, Messieurs, tous les objets que votre comité a cru devoir faire entrer dans le projet de décret qu’il a l’honneur de vous proposer; j’en résume en peu de mois le plan. 3§8 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 mars 1790.] Les cinq premiers articles sont destinés à décider plusieurs questions dont la solution préalable était nécessaire; telles sont celles de savoir si le rachat n’est qu’une faculté, et une faculté individuelle, et qu’elle peut être l’effet de la solidarité de la directe sur un fonds divisé entré plusieurs copropriétaires. Le rachat emporte une véritable aliénation d’un droit, immobilier et foncier; nous avons donc dû en second lieu, fixer notre attention sur les précautions qu’exigeraient certaines propriétés inaliénables, et certaines personnes dont les biens sont sous la protection spéciale de la loi. 11 faut un tarif de rachat pour ces sortes de personnes : il est encore nécessaire pour ceux qui ne pourraient point se concilier degré à gré. C’est la troisième partie du décret qui Se divise naturellement en deux. La première concerne le rachat des charges fixes, telles que les redevances annuelles. Il ne s’agissait, à cet égard, que de déterminer la forme de l’évaluation du produit annuel de quelques-unes de ces redevances, et de leur donner un capital. Quant à la forme de l’évaluation, votre Comité était guidé par des règles ou des usages existants-, il ne s’agissait que de prévenir les frais sur quelques-uns. Quant au capital, les bases en étaient plus arbitraires. Votre comité a cru pouvoir vous proposer le denier 25. Là seconde opération, qui concerne l’évaluation du rachat des droits casuels, présentait des difficultés plus réelles. Votre comité n’avait pour guidé que des probabilités : il a cru s’être attaché aux plus vraisemblables, à l’égard des mutations par vente, en les divisant en sept classes, selon que les droits en sont plus ou moins forts, et à l’égard des droits dus pour les autres mutatious, selon que ies cas, qui ÿ donnent ouverture, sont plus ou moins multipliés, lia pensé que ces deux considérations doivent conduire à supposer un retour plus ou moins fréquent de chacune de ces deux espèces de droits. En s’appuyant sur cette probabilité, il a supposé aux droits des différentes classes une échutedansun nombre plus ou moins étendu d’années, qui est devenu le diviseur indicatif de leur produit annuel, et le dernier 25 a été le multiplicateur qui a donné le tarif du rachat de ce produit annuel. line quatrième partie a pour objet d’établir quelques règles générales pour l’exécutioir du rachat entre les parties intéressées, et sur ses conséquences et ses effets relativement aux tiers, tels que ies créanciers de celui qui doit recevoir le rachat, et le propriétaire du fief dont relève un autre fief altéré par l’effet du rachat. Enfin, un deruier article prononce la suppression du droit d’échange purement fiscal. Tel est, Messieurs, le plan générai du travail que votre comité a l’honneur de vous présenter : il ne peut se flatter de l’avoir porté au degré de perfection que votre sagesse et vos lumières peuvent seules lui donner; mais il ose espérer que votre indulgence excusera ses erreurs en faveur de son fêle, et en considération des difficultés sans cesse renaissantes, que présentait une opération pour laquelle ii fallait créer jusqu’aux éléments qui devaient lui servir de base. suite du projet de décret, sur les droits PÉO0AÜX. TITRE IV. Dés principes du mode et du taux du rachat des droits seigneuriaux déclarés rachetables par les articles un et deux du décret du 15 mars. Art. i#r. Tout propriétaire pourra racheter les droits féodaux et censuels dont son fonds est grevé, eucore que les autres propriétaires, de la même seigneurie, ou du même canton, ne voulussent pas profiter du bénéfice du rachat; sauf ce qui sera dit ci-après à l’égard des fonds chargés de cens ou redevances solidaires. Art. 2. Tout propriétaire pourra racheter lesdits droits, à raison d’un fief, ou d’un fonds particulier, encore qu’il se trouve posséder plusieurs fiefs, ou plusieurs fonds censuels, mouvants de la même seigneurie, pourvu néanmoins que ces fonds ne soient pas tenus sous des cens et redevances solidaires, auquel cas le rachat ne pourra pas être divisé. Art. 3. Tout propriétaire de fiefs, ou fonds censuels, ne pourra point racheter divisément les charges et redevances annuelles dont le fief, ou le fonds, est grevé, sans racheter en même temps les droits casuels et éventuels. Art. 4. Lorsqu’un fonds tenu en fief ou en cen-sive, et grevé de redevances annuelles solidaires, sera possédé par plusieurs copropriétaires, l’un d’eux ûe pourra point racheter divisément lesdites redevances au prorata de la portion dont il est tenu, si ce n’est du consentement de celui auquel la redevance est due ; mais il sera tenu de racheter la redevance entière, et il pourra se faire subroger aux droits du créancier, pour les exercer contre les codebiteurs, à la charge de ne les exercer que comme pour une simple rente foncière, et sans aucune solidité ; et chacun des autres codébiteurs pourra racheter à volonté sa portion divisément. Art. 5. Pourra néanmoins le copropriétaire d’un fonds grevé de redevances solidaires, en rachetant, ainsi qu’il vient d’être dit, la redevance entière, ne racheter les droits casuels que sur sa portion, sauf au propriétaire du fief â continuer de percevoir les mêmes droits casuels sur les autres portions du fonds, et sur chacune d’elles divisément, lorsqu’il y aura lieu, jusqu’à ce que le rachat en ait été fait. Art. 6. Pourront les propriétaires de fiefs, ou de fonds censuels, traiter avec les propriétaires de fiefs dont ils sont mouvants, de gré à gré, à telle somme, et sous telles conditions qu’ils jugeront à propos, du rachat, tant des redevances annuelles que des droits casuels; et les traités ainsi faits de gré à gré entre majeurs ne pourront être attaqués sous prétexte de lésion quelconque, encore que le prix du rachat se trouve inférieur ou supérieur à celui qui aurait pu résulter du mode et du prix qui sera ci-après fixé. Art. 7. Les tuteurs des mineurs, ou interdits, les grevés de substitution, les maris dans les pays ou les dots sont inaliénables, môme avec le consentement de la femme, ne pourront liquider les rachats des droits dépendant de fiefs appartenant aux mineurs, âuX interdits, à des substitutions, et aux femmes mariées, qu’eu la forme et au taux ci-après prescrit, et à la charge du remploi. Il en sera de même à l’égard des pro- [Àsseülbléè nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [28 mars 1790.] 399 priétaires des fiefs, lesquels par les titres sont assujettis au droit de réversion en cas d’extinction de la ligne masculine, ou dans d’autres cas ; le redevable, qui ne voudra point demeurer garant du remploi, pourra consigner lé prix du rachat, iequei ne sera délivré aux personnes qui sont assujetties au remploi qu’en vertu d’une ordonnance du juge, rendue sur les conclusions du ministère public, auquel il sera justifié du remploi. Art. 8. Lorsque le rachat aura pour objet des droits dépendant d’un fief appartenant à une communauté d’habitants, lesofheiers municipaux ne pourront le liquider que sous l’autorité et avec l’avis des assemblées administratives du département, ou de leur directoire, lesquels seront tenus de veiller au remploi du prix. Art. 9. Si le rachat concerne les droits dépendant de fiefs appartenant à des gens de mainmorte et dont l’administration soit donnée à une municipalité, le rachat sera liquidé par les officiers de la municipalité dans le ressort desquels se trouvera situé le chef-lieu du fieF. Les officiers municipaux ne pourront procéder à cette liquidation qu’avec l’autorisation des assemblées administratives du département, ou de leur directoire, et seront tenus d’en déposer le prix entre les mains du trésorier du département : l’Assemblée nationale se réservant de statuer ultérieurement sur l’emploi du prix desdits rachats. Art . 10. L’Assemblée nationale se réserve pareillement de statuer sur l’emploi du prix des rachats des droits dépendant des fiefs appartenant à la nation, sous les titres de domaines de la couronne, apanages, engagements ou échanges non encore consommés, ainsi que sur les personnes avec lesquelles lesdits rachats pourront être liquidés et auxquelles le paiement en devra être fait. Art. 11. Lorque les parties, auxquelles il est libre de traiter de gré a gré, ne pourront point s’accorder sur le prix du rachat des droits seigneuriaux, soit fixes ou casuels, le rachat sera fait suivant les règles et les taux ci-après. Art. 12. Pour liquider le rachat des droits fixes (tels que les cens et redevances annuelles eu argent, grains, denrées ou fruits de récolte), il sera formé une évaluation du produit annuel total des charges dont le fonds est grevé ; et ce produit annuel sera racheté au taux ci-après indiqué. Quant à l’évaluation du produit annuel, elle sera faite pour chaque espèce de redevances ainsi qu’il suit. Art. 13. A l’égard des redevances en grains, il sera formé une année commune de leur valeur sur les dix années antérieures à l’époque du rachat, d’après le prix commun de chacune des dix années, formé sur le prix des grains de même nature relevé sur les registres du marché du lieu, ou du marché le plus prochain s’il n’y eu a pas dans le lieu. Si, dans ces dix années, il s’en trouve une ou plusieurs dans lesquelles Je prix des grains soit monté à un taux excessif, tel que le tiers eu sus (par exemple de 10 à 15), cette année ou ces au nées seront retranchées, et l’année com-wunê ne sera formée que sur les années restantes. Art. 14. Il en sera de même pour les redevances en volailles, beurre, fromage, cire et autres denrées, dans les lieux où leur prix est porté dans les registres des marchés. À l’égard des lieux où il n’est point d’usage de tenir registre du prix des ventes de ces sortes de denrées, les directoires des districts en formeront incessamment un tableau estimatif sur le prix commun auquel ont coutume d'être évaluées ces sortes de denrées pour le paiement des redevances foncières. Ce tableau estimatif servira, pendant l’espace de dix années, de taux pour l’estimation du produit annuel des redevances dues en cette nature dans le ressort de chaque district. Art. 15. Chaque directoire de district formera pareillement un tableau estimatif du prix ordinaire des journées d’hommes, de chevaux, bêtes de travail et de somme, et des voitures -, ce tableau estimatif sera formé sur le taux auquel lesdites journées ont accoutumé d’être estimées pour les corvées, et servira, pendant l’espace de dix années, de taux pour l’estimation du produit annuel des corvées réelles. Art. 16. Quant aux redevances qui consistent eu une certaine portion des fruits récoltés sur le fonds (telles que champarts, terrages, agriers, tasques, dîmes seigneuriales et autres de même nature), il sera procédé, par des experts que les pariies nommeront ou qui seront nommés d'office par le juge, à une évaluation de ce que le fonds peutproduire en nature dans une année commune. La quotité annuelle du droit à percevoir sera ensuite fixée dans la proportion du produit de l’année commune du fonds; et ce produit annuel du droit sera évalué eu la forme prescrite par l’article 12 ci-dessus, pour l’évaluation des redevances en grains. Art. 17. Quant à celles des banalités que l’article 24 du décret du 15 mars a déclarées exceptées de la suppression sans indemnité; lorsque les communautés d’habitants voudront s’en libérer, il sera fait par des experts choisis par les parties ou nommés d’office parle juge, une estimation delà diminution que le four, moulin, pressoir ou autre usine pourra éprouver dans son produit annuel, par l’effet de la suppression du droit de banalité et de la liberté rendue aux habitants. Art. 18. Dans tous les cas où l’évaluation du produit annuel d’une redevance pourra donner lieu à une estimation d’experts, si U rachat a lieu entre des parties qui aient la liberté de traiter de gré à gré, le redevable pourra faire au propriétaire des droits, par acte extrajudiciaire, une offre réelle d’une somme déterminée. En cas de refus d’accepter l’offre, lès frais de l’expertise, qui deviendra nécessaire, seront supportés par celui qui aura fait l’offre, ou par ie refusant, selon que l’offre sera jugée suffisante ou insuffisante. Art. 19. Si l’offre mentionnée en l’article ci-dessus, est faite à un tuteur, à un grevé de substitution, ou à d’autres administrateurs quelconques, qui n’ont point la liberté de traiter de gré à gré, ces administrateurs pourront employer en frais d’administration ceux de l’expertise, lorsqu’ils auront été jugés devoir restera leur charge. Art. 20. Le rachat de la somme à laquelle aura été liquidé le produit annuel des droits de redevances fixes et annuelles se fera : savoir, pour les redevances en argent et corvées, et pour le produit des banalités, au denier vingt ; et quant aux redevances en grains, volailles, denrées et fruits de récolte, au denier vingt-cinq. Art. 21. Tout redevable, qui voudra racheter les droits seigneuriaux dont son fonds est grevé, sera tenu de rembourser, avec le capital du rachat, tous les arrérages des rentes üxes et annuelles qui se trouveront dus, tant pour les années antérieures que pour l’année courante, au prorata du temps qui sera écoulé depuis la dernière échéance jusqu’au jour du rachat. Art. 22. À l’avenir, les corvées réelles ne s’ar» 400 [Assemblée nationale. j ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 mars 1190.) rogeront point, même dans les pays où le principe contraire avait lieu, si ce n’est qu’il y ait eu demande et jugement de condamnations; elles ne pourront pas non plus .être exigées en argent, mais en nature, si ce n’est qu’il y ait eu demande et condamnation. En conséquence, il ne sera tenu compte, lors du rachat des corvées, que de l’année courante, laquelle sera évaluée en argent, au prorata du temps qui sera écoulé depuis la dernière échéance jusqu’au jour du rachat. Art. 23. Quant au rachat des droits casuels, c’est-à-dire de ceux qui ne sont dus que dans le cas de mutation, soit de la part du propriétaire du fonds ci-devant roturier, soit de la part des fonds ci-devant appelés tiefs, il sera fait d’après les règles et les distinctions ci-après. Art. 24. Dans les pays et lieux où les fonds sont soumis à un droit particulier pour les mutations par vente, ou autres équipoilents à vente, il sera payé pour le rachat de ce .droit particulier, savoir : 1° Pour les fonds sur lesquels le droit de vente est de la moitié du prix, cinq seizièmes dudit droit ; 2° Pour les fonds sur lesquels le droit est du tiers, cinq quinzièmes, ou le tiers du droit; 3° Pour les fonds sur lesquels le droit est du quint et du requint, ou du quart, cinq quatorzièmes dudit droit; 4° Pour les fonds sur lesquels le droit est du quint, cinq treizièmes dudit droit; 5° Pour les fonds sur lesquels le droit est du sixième, cinq douzièmes dudit droit ; 6° Pour les fonds sur lesquels le droit est du huitième, cinq onzièmes ; 7° Pour les fonds sur lesquels le droit n'est que du douzième, ou à une quotité inférieure, quelle qu’elle soit, la moitié du droit. Art. 25. Dans les pays et les lieux où le droit dû pour les mutations par vente, ne se trouverait être dans aucune des proportions ci-dessus indiquées, et dont la quotité se trouverait être à un terme moyen entre deux des sept classes ci-dessus, le rachat dudit droit se fera sur le pied de celle de ces deux classes, dont le taux est le moins fort. Art. 26. Dans les pays et les lieux où les fonds sont soumis, outre le droit dû pour les mutations par vente, à un droit particulier et différent pour les mutations d’un autre genre, le rachat de cette seconde espèce de droit se fera d’après les distinctions et les règles ci-après : Art. 27. 1° Dans les pays et les lieux où ce droit est dû à toutes les mutations, à la seule exception des successions et donations en directe, et des mutations de la part du seigneur, il sera payé pour le rachat dudit droit, sur les fonds qui y sont sujets, les cinq douzièmes dudit droit ; Art. 28. 2* Dans les pays et. les lieux où ce même droit n’est dû que pour les seules mutations en succession collatérale, il sera payé pour le rachat les cinq dix-huitièmes dudit droit ; Art. 29. 3° Dans les pays et les lieux où le même droit est dû à toutes mains, c’est-à-dire à toutes les mutations de la part du propriétaire du fonds redevable, et même pour les successions et donations en directe, il sera payé pour le rachat les cinq sixièmes dudit droit ; Art. 30. 4° Dans les pays et les lieux où le même droit, quoique dû pour les successions directe et collatérale, n’a lieu que quand l’héritier succède par moyen, ou quand il est mineur, il ne sera payé pour le rachat, que les cinq huitièmes dudit droit; Art. 31. 5° Dans les pays et les lieux où le droit ci-dessus désigné se paie à toutes les mutations autres que par vente, tant de la part du vassal ou emphytéote, que de la part du ci-devant seigneur, il sera payé pour le rachat un droit entier. Art. 32. Dans les pays et les lieux où le droit dû pour les mutations qui ne s’opèrent point par vente, ne pourrait point seplacer dans l’une des cinq classes ci-dessus comprises aux articles précédents, soit parce qu’il ne serait point dû dans tous les cas exprimés par l’un de ces articles, soit parce qu’il serait dû dans un cas non prévu par l’article, le rachat s’en fera au taux fixé par celui desdits articles qui réunira le plus grand nombre des cas pour lesquels le droit est dû dans ces pays ou ces lieux particuliers. Art. 33. Pour l’application de l’article précédent on n’aura aucun égard au droit que certaines coutumes ou certains titres accordent pour les prétendues mutations par mariage, ou par la mort du mari, sur les biens personnels de la femme, lequel droit est et demeure supprimé à compter du jour delà publication du présent décret. Art. 34. Dans les pays et les lieux où les fonds ne sont soumis qu’à un seul et même droit, tant pour les mutations par vente que pour les autres mutations, il sera payé pour le rachat les cinq sixièmes du droit. Art. 35. Lorsqu’il s’agira de liquider le rachat des droits casuels dus pour les mutations par vente, l’évaluation du droit se fera sur le prix de l’acquisition, si le rachat est offert par un nouvel acquéreur: sinon, sur le prix de la dernière des ventes qui aura été faite du fonds dans le cours de dix années antérieures. Art. 36. Si le rachat n’est point offert par un nouvel acquéreur, ou s’il n’existe point de vente du fonds faite dans les dix années précédentes, dans le cas où les parties ne s’accorderaient point de gré à gré, le redevable, qui voudra se racheter, pourra faire une offre extra -judiciaire d’une somme. En cas de refus de la part du propriétaire des droits d’accepter l’offre, les frais de l’estimation par experts seront supportés par celui qui aura fait l'offre, ou par celui qui l’aura refusée, selon que l’offre sera déclarée suffisante ou insuffisante, sauf aux administrateurs, qui n’ont point la faculté de composer de gré à gré, à employer en frais d’administration ceux de l’expertise, ainsi qu’il est dit en l’article 19 ci-dessus. Art. 37. Lorsqu’il s’agira de liquider le rachat des droits casuels qui se paient à raison du revenu, l’évaluation sen fera sur le taux du dernier paiment qui en aura été fait dans les dix années antérieures; s’il n’en existe pas, le redevable pourra faire une offre d’une somme, et en cas de refus les frais de l’estimation par experts seront supportés comme il est dit dans l’article précédent. Art. 38. Ilne sera payé aucun droit, ni de vente, ni de rachat, pour les fonds domaniaux ou ecclésiastiques, qui seront vendus en exécution du décret du ................. . . L’exemption n’aura lieu cependant à l’égard des biens ecclésiastiques que pour ceux qui sont mouvants de fonds domaniaux, ou qui auront payé le droit d’indemnité aux propriétaires des fiefs dont ils relèvent, ou à l’égard desquels le droit d’indemnité se trouverait prescrit conformément aux règles qui avaient lieu ci-devant. Art. 39. Les sommes qui seront dues pour lç 401 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. rachat, soit des redevances annuelles, soit des droits casuels, seront payées aux propriétaires desdits droits, outre et indépendamment de ce qui se trouvera leur être dû pour raison de mutations ou d’arrérages échus antérieurement à l’époque du rachat. Art. 40. Si le propriétaire, qui aura racheté les droits seigneuriaux casuels et autres, dont son fonds était chargé, vend ce même fonds ou l’aliène dans les deux anuées postérieures au rachat par un acte volontaire quelconque, sujet au droit de mutation, le droit sera dû nonobsttant le rachat. Art. 41. Les lignagers de celui qui aura reçu le rachat des droits seigneuriaux dépendants de son fief, ne pourront point exercer le retrait desdits droits, sous prétexte que le rachat équipolle à une vente. Art. 42. Les propriétaires de fiefs, qui auront reçu le rachat en tout, ou partie, des droits seigneuriaux, fixes ou casuels, dépendants de leurs fiefs, et qui seront soumis eux-mêmes à des droits casuels envers un autre fief, seront tenus de payer au propriétaire du fief le rachat qui lui sera dû, proportionnellement aux sommes qu’ils auront reçues ; et ce rachat sera exécuté progressivement dans tous les degrés de l’ancienne échelle. Art. 43. Le rachat dû par le propriétaire du fief inférieur sera liquidé sur la somme portée en la quittance qu’il aura donnée, encore que la quotité en soit inférieure aux taux ci-dessus fixés, à moins qu’il n’y ait fraude et déguisement dans l’énonciation de la quittance; et ce rachat sera liquidé sur ceux des taux ci-dessus fixés, qui seront applicables au fief dont dépendaient les droits rachetés : en telle sorte qu’il ne sera payé pour ce rachat que la même somme qui serait due pour le rachat d’un fief de la même valeur que celle portée en la quittance. Art. 44. Tout propriétaire de fief, qui aura reçu le rachat de droits dépendants de son fief, sera tenu, à peine de restitution du double, d’en donner connaissance au propriétaire du fief dont il relève, dans le cours du moi&de janvier de l’année suivant celle dans laquelle les rachats lui auront été faits, sans préjudice du droit du propriétaire supérieur d’exiger les rachats à lui dus avant le terme, s’il en a eu connaissance autrement. Art. 45. Pourront tous les propriétaires de fiefs qui ont sous leurs mouvances d’autres fiefs, former, s’ils le jugent à propos, au greffe des hypothèques du ressort de la situation des chefs-lieux des fiefs mouvants d’eux, une seule opposition générale au remboursement de toutes sommes provenant des rachats offerts aux propriétaires des nefs qui sont sous leur mouvance : mais ils ne pourront former aucune opposition particulière entre les mains des redevables ; et les frais de l’opposition générale, ainsi que ceux qu’elle occasionnerait, seront à leur charge, si la notification ordonnée par l’article 44, leur a été faite ou leur est faite dans le délai prescrit. Art. 46. Les créanciers des propriétaires de fiefs dont dépendent les droits féodaux ou censuels rachetâmes, pourront former au greffe des hypothèques du ressort de la situation des chefs-lieux desdits fiefs une seule opposition générale au remboursement des sommes provenant desdits droits, mais ils ne pourront former aucune opposition particulière entre les mains des redevables, à peine de nullité, et de répondre en leur propre et privé nom des frais qu'elles occasionneraient. Âfy 4t. Dans les pays ou l’édit de juin 1771 p’a point d’exécution, lés oppositions générales lr3 Série, T. XII. [28 mars 1790.] dont il est parlé aux articles 45 et 46 ci-dessus, pourront être formées au greffe du siège royal du ressort; il y sera tenu à cet effet un registre particulier par le greffier, auquel il sera payé les mêmes droits établis par l’édit de juin 1771. Art. 48. Les propriétaires de fiefs et les créanciers, qui formeront les oppositions générales désignées dans les articles 45 et 46 ci-dessus, ne seront point obligés de les renouveler tous les trois ans. Lesdites oppositions dureront trente ans, dérogeant, quant à ce seulement, à l’édit de juin 1771. Art. 49. Les créanciers qui auront négligé de former leur opposition, ne pourront exercer aucun rècours contre les redevables qui auront effectué le paiement de leur rachat. Art. 50. Les redevables ne pourront effectuer le paiement de leur rachat qu’après s’être assurés quil n’existe aucune opposition au greffe des hypothèques, ou au greffe.du siège royal dans les pays où il n’y a point de greffe des hypothèques. Dans le cas où il existerait une ou plusieurs oppositions, ils s’en feront délivrer un extrait qu’ils dénonceront à celui sur lequel elles seront faites, Bans pouvoir faire aucune autre procédure, ni se faire autoriser à consigner que trois mois après la dénonciation, dont ils pourront répéter les frais, ainsi que ceux de l’extrait des opposants. Art. 51. Toute quittance de rachat des droits seigneuriaux, même celles reçues par les notaires dont les actes sont exempts du contrôle, seront assujetties au contrôle; il en sera tenu un registre particulier, sur lequel le commis enregistrera par extrait la quittance, en énonçant le nom du propriétaire du fief qui aura reçu le rachat, celui du fiefdont dépendaient les droits rachetés, le nom de celui qui aura fait le rachat et la somme payée. Il ne sera payé que quinze sols pour le droit de contrôle et d’enregistrement. Les frais en seront à la charge de celui qui fera le rachat, lequel sera tenu de l’obligation de faire contrôler la quittance, sous les peines prescrites par les règlements existants. Art. 52. Dans les pays où le contrôle n’a pas lieu, il sera établi, dans chaque siège royal, un registre particulier pour le contrôle et enregistrement des quittances de rachat, et il sera payé au greffier quinze sols pour tout droit. Art. 53. Il ne sera perçu aucun droit de centième denier sur les remboursements des droits féodaux, soit fixes, soit casuels. Art. 54. Les droits d'échange établis au profit du roi par les édits de 1645 et 1647, et autres règlements subséquents, soit qu’ils soient perçus au profit du roi , soit qu’ils soient perçus par des concessionnaires, engagistes ou apana-istes, sont et demeurent supprimés, à compter e la publication des lettres-patentes du 3 novembre 1789, sans néanmoins aucune restitution des droits qui auraient été perçus depuis ladite époque. Les acquéreurs desdits droits présenteront, dans le délai de six mois, à compter du jour de la publication du présent décret, leurs titres au comité de liquidation, établi par le décret du 23 janvier de la présente année; et il sera pourvu à leur remboursement ainsi qu’il appartiendra. ÎO