SÉANCE DU 24 MESSIDOR AN II (12 JUILLET 1794) - N° 46 105 droit au champ d’honneur, la somme de 400 liv., à titre de secours provisoire, et renvoie la pétition au comité de liquidation, pour le réglement de la pension. « II. - Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance ». (l) 46 Barère, au nom du comité de salut public, fait un rapport sur les nouveaux avantages remportés par les armées de la République contre les armées coalisées. (2) Barère monte à la tribune. (La salle retentit d’applaudissements). BARERE : Citoyens, c’est encore un jour brillant pour la maison d’Autriche ; Bruxelles est au pouvoir de la république (Vive la république ! s’écrie-t-on de toutes les parties de la salle; tous les membres et les spectateurs agitent leurs chapeaux en signe d’allégresse, au milieu des acclamations universelles), et les braves Anglais, les tacticiens Hessois, les Autrichiens aguerris et les grands tireurs prussiens assiègent par leur fuite combinée leurs propres places. (On applaudit.) C’est sur Anvers, Maëstricht et le Rhin qu’ils dirigent leur marche avec une vitesse qui ne permet plus aux républicains de découvrir leurs projets ultérieurs. La jonction des armées de Sambre-et-Meuse et du Nord s’est faite (les applaudissements redoublent) au même instant à Bruxelles, et avec autant de calme et de gaîté qu’une fête civique, tandis que nos ennemis au contraire se distribuent sur trois points. Voilà donc la tactique républicaine mise en mouvement; la réunion pour nous, et la division pour nos ennemis. (On applaudit.) La division, c’est le partage inévitable des coalitions des tyrans, des fripons et des ambitieux. (Nouveaux applaudissements.) C’est un hommage rendu par les armées aux travaux de la Convention nationale et à l’énergie du peuple français, que celui que leur offre tous les jours une victoire... Mais la lâcheté des troupes de la coalition a rendu les victoires si faciles qu’elle ne nous laisse plus la patriotique jouissance de vous décrire la gloire des soldats républicains dans cette journée où Bruxelles a ouvert ses portes. Nous avions pensé d’abord que les esclaves coalisés défendraient la capitale du Brabant, et que le repaire de cette furie impériale, connue par les boulets rouges lancés sur Lille, ne serait conquis que par une bataille gagnée par les Français; mais l’ordre du jour des Autrichiens paraît être décidément fixé à la fuite et à l’évacuation. (On rit et on applaudit.) Aussi les cent mille Autrichiens, Anglais, Hessois, Prussiens, Hanovriens et autres serfs militaires des tyrans, ont cherché précipitamment d’autres places et des fortifications plus rassurantes pour leur cou-(l) P.V., XLI, 214. Minute de la main de Menuau. Décret n° 9908. Reproduit dans Bin, 28 mess. (1er suppl1); Débats, n° 660 ; J. Lois, n° 652 ; J. Sablier, n° 1432 ; J. Fr., n° 656 ; Mess, soir, n° 692 ; Ann. patr., n° DLVIII. (2) P.V., XLI, 214. rage ; mais ils ont abandonné aux républicains leurs nombreux magasins, comme un bagage inutile et embarrassant. (Les applaudissements recommencent et se prolongent.) Des magasins de tout genre, des subsistances, des fourrages et des munitions de guerre sont la caution de nos succès, et, comme le dit le représentant du peuple Laurent, les arrérages de Dumouriez que les possessions autrichiennes nous remboursent. (On applaudit.) « Je pars pour Bruxelles, dit Laurent dans sa lettre du 22 messidor; il est instant d’aller y faire la récolte pour la république ». (On applaudit) : [Mons, 22 mess. II]. « Citoyens collègues, Je pars cette nuit pour Bruxelles, où il est instant d’aller faire la récolte pour la république. (On applaudit). Dans le peu de temps que je suis resté à Mons, j’ai trouvé beaucoup de besogne à faire. « Demain il partira en numéraire autour de 600,000 liv. à compte des 2 millions que nous avons imposés, Gillet et moi, sur les aristocrates et les moines de Mons. Ce soir on a pris dix otages des plus riches, qui répondront de l’exécution du restant, sous vingt-quatre heures, à peine d’être conduits dans différents châteaux forts de la république. Je pense que leur arrestation nous fournira le reste. « Ces 2 millions ne seront pas le terme de la contribution; il en est nombre qui n’ont pas été assez imposés proportionnellement à leur aristocratie et à leur fortune, et je compte sous peu revenir sur cet article. « D’un autre côté, les patriotes s’apprêtent à faire un don patriotique splendide, qui ne sera pas beaucoup inférieur à l’impôt. « Les esprits vont être stimulés par une Société populaire nouvellement établie, et qui paraît animée d’un bon esprit. « Cette masse pécuniaire augmentera par l’imposition des abbayes et des prieurés qui sont aux environs de la ville. J’ai envoyé des commissaires pour leur signifier une taxe de 1 million, répartie proportionnellement aux facultés de chacun; j’aurai soin que cette tâche soit remplie. « Ce n’est pas sur le numéraire seul que j’ai frappé ou fait frapper; on a demandé vingt mille quintaux de grains dans la seule ville de Mons, et cette demande se remplit avec assez de célérité, de façon que l’on confectionne ici par jour quarante mille rations de pain, ce qui nous met extrêmement à l’aise pour les subsistances. On fait aussi dans les campagnes, et surtout chez les moines, les perquisitions des denrées nécessaires pour la troupe; ce qui nous donnera au moins la même quantité que la ville de Mons. « Une foule d’autres denrées sont mises en réquisition, ainsi que vous le verrez par la copie de la réquisition du commissaire ordonnateur Veillant; mais, pour ne pas paralyser totalement le commerce de cette ville, je vais faire délivrer une certaine quantité de marchandises requises que je ferai refluer sur les derrières, de façon que le restant soit mis en circulation. « Je veille surtout pour qu’on livre ce qui est nécessaire à l’artillerie ; nous avons aussi trouvé des SÉANCE DU 24 MESSIDOR AN II (12 JUILLET 1794) - N° 46 105 droit au champ d’honneur, la somme de 400 liv., à titre de secours provisoire, et renvoie la pétition au comité de liquidation, pour le réglement de la pension. « II. - Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance ». (l) 46 Barère, au nom du comité de salut public, fait un rapport sur les nouveaux avantages remportés par les armées de la République contre les armées coalisées. (2) Barère monte à la tribune. (La salle retentit d’applaudissements). BARERE : Citoyens, c’est encore un jour brillant pour la maison d’Autriche ; Bruxelles est au pouvoir de la république (Vive la république ! s’écrie-t-on de toutes les parties de la salle; tous les membres et les spectateurs agitent leurs chapeaux en signe d’allégresse, au milieu des acclamations universelles), et les braves Anglais, les tacticiens Hessois, les Autrichiens aguerris et les grands tireurs prussiens assiègent par leur fuite combinée leurs propres places. (On applaudit.) C’est sur Anvers, Maëstricht et le Rhin qu’ils dirigent leur marche avec une vitesse qui ne permet plus aux républicains de découvrir leurs projets ultérieurs. La jonction des armées de Sambre-et-Meuse et du Nord s’est faite (les applaudissements redoublent) au même instant à Bruxelles, et avec autant de calme et de gaîté qu’une fête civique, tandis que nos ennemis au contraire se distribuent sur trois points. Voilà donc la tactique républicaine mise en mouvement; la réunion pour nous, et la division pour nos ennemis. (On applaudit.) La division, c’est le partage inévitable des coalitions des tyrans, des fripons et des ambitieux. (Nouveaux applaudissements.) C’est un hommage rendu par les armées aux travaux de la Convention nationale et à l’énergie du peuple français, que celui que leur offre tous les jours une victoire... Mais la lâcheté des troupes de la coalition a rendu les victoires si faciles qu’elle ne nous laisse plus la patriotique jouissance de vous décrire la gloire des soldats républicains dans cette journée où Bruxelles a ouvert ses portes. Nous avions pensé d’abord que les esclaves coalisés défendraient la capitale du Brabant, et que le repaire de cette furie impériale, connue par les boulets rouges lancés sur Lille, ne serait conquis que par une bataille gagnée par les Français; mais l’ordre du jour des Autrichiens paraît être décidément fixé à la fuite et à l’évacuation. (On rit et on applaudit.) Aussi les cent mille Autrichiens, Anglais, Hessois, Prussiens, Hanovriens et autres serfs militaires des tyrans, ont cherché précipitamment d’autres places et des fortifications plus rassurantes pour leur cou-(l) P.V., XLI, 214. Minute de la main de Menuau. Décret n° 9908. Reproduit dans Bin, 28 mess. (1er suppl1); Débats, n° 660 ; J. Lois, n° 652 ; J. Sablier, n° 1432 ; J. Fr., n° 656 ; Mess, soir, n° 692 ; Ann. patr., n° DLVIII. (2) P.V., XLI, 214. rage ; mais ils ont abandonné aux républicains leurs nombreux magasins, comme un bagage inutile et embarrassant. (Les applaudissements recommencent et se prolongent.) Des magasins de tout genre, des subsistances, des fourrages et des munitions de guerre sont la caution de nos succès, et, comme le dit le représentant du peuple Laurent, les arrérages de Dumouriez que les possessions autrichiennes nous remboursent. (On applaudit.) « Je pars pour Bruxelles, dit Laurent dans sa lettre du 22 messidor; il est instant d’aller y faire la récolte pour la république ». (On applaudit) : [Mons, 22 mess. II]. « Citoyens collègues, Je pars cette nuit pour Bruxelles, où il est instant d’aller faire la récolte pour la république. (On applaudit). Dans le peu de temps que je suis resté à Mons, j’ai trouvé beaucoup de besogne à faire. « Demain il partira en numéraire autour de 600,000 liv. à compte des 2 millions que nous avons imposés, Gillet et moi, sur les aristocrates et les moines de Mons. Ce soir on a pris dix otages des plus riches, qui répondront de l’exécution du restant, sous vingt-quatre heures, à peine d’être conduits dans différents châteaux forts de la république. Je pense que leur arrestation nous fournira le reste. « Ces 2 millions ne seront pas le terme de la contribution; il en est nombre qui n’ont pas été assez imposés proportionnellement à leur aristocratie et à leur fortune, et je compte sous peu revenir sur cet article. « D’un autre côté, les patriotes s’apprêtent à faire un don patriotique splendide, qui ne sera pas beaucoup inférieur à l’impôt. « Les esprits vont être stimulés par une Société populaire nouvellement établie, et qui paraît animée d’un bon esprit. « Cette masse pécuniaire augmentera par l’imposition des abbayes et des prieurés qui sont aux environs de la ville. J’ai envoyé des commissaires pour leur signifier une taxe de 1 million, répartie proportionnellement aux facultés de chacun; j’aurai soin que cette tâche soit remplie. « Ce n’est pas sur le numéraire seul que j’ai frappé ou fait frapper; on a demandé vingt mille quintaux de grains dans la seule ville de Mons, et cette demande se remplit avec assez de célérité, de façon que l’on confectionne ici par jour quarante mille rations de pain, ce qui nous met extrêmement à l’aise pour les subsistances. On fait aussi dans les campagnes, et surtout chez les moines, les perquisitions des denrées nécessaires pour la troupe; ce qui nous donnera au moins la même quantité que la ville de Mons. « Une foule d’autres denrées sont mises en réquisition, ainsi que vous le verrez par la copie de la réquisition du commissaire ordonnateur Veillant; mais, pour ne pas paralyser totalement le commerce de cette ville, je vais faire délivrer une certaine quantité de marchandises requises que je ferai refluer sur les derrières, de façon que le restant soit mis en circulation. « Je veille surtout pour qu’on livre ce qui est nécessaire à l’artillerie ; nous avons aussi trouvé des 106 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE denrées de l’ennemi à Mons, et beaucoup d’autres objets dont je vous envoie l’état. Tout ce qui ne sera pas utile ici sera envoyé dans nos magasins. « J’ai réintégré dans leurs possessions tous ceux qui avaient été persécutés par le grand conseil de l’Etat et les agents de l’Autriche. « Nous avons trouvé ici des émigrés qui sont saisis; il y en a encore de cachés que j’aurai bientôt, et de suite ils partiront pour le tribunal révolutionnaire établi à Cambrai. « Les moines baissent pavillon, ainsi que les aristocrates; les cloches des couvents sonnent pour la troisième fois pour nos victoires, et les fenêtres à grands pans s’illuminent. Je sais que ce sont des grimaces hypocrites, mais enfin ils marchent jusqu’à ce que, les ayant abattus par les espèces, je les mette dans le cas de se reposer plus qu’ils ne voudraient. S. et F. ». Laurent. BARÈRE : La punition des émigrés ne se borne pas à ceux que les troupes de la république ont pris à Mons. On nous écrit du siège de Nieuport, le 19 de ce mois, les faits suivants : [Extrait de la lettre du Cn Poulain, lieut. au 3e bon de l’Oise; Du siège de Nieuport, 10 mess. Il J. «... Par deux petits bâtiments qui ont voulu sortir, nous les avons attaqués à coups de fusil; mais ils nous auraient échappé sans deux pièces de canon qui les ont forcés de rester au milieu du canal. Les personnes qui étaient dans ces bâtiments se sont jetées à la nage pour rentrer à Nieuport; il n’en est resté que très-peu ; nous leur en avons tué une cinquantaine, et pris 15. Ayant questionné ceux que nous avions faits prisonniers pour savoir de quelle nation ils étaient, ils n’ont voulu répondre; comme ils étaient nus, nous avons monté dans leurs bâtiments, pour voir quels habits ils portaient; nous n’avons trouvé que des habits rouges, avec des boutons sur lesquels était écrit : Royal-Emigré, et dans toutes leurs poches étaient leurs titres et brevets. « Nous comptons que 300 émigrés ont péri hier tant par le feu que par l’eau. BARÈRE : Voici maintenant les lettres officielles de l’occupation de Bruxelles; vous y verrez que les deux armées ne connaissent que la chaleur des combats, et que le soleil brûlant de cette saison ne fait qu’augmenter leur courage. Que ne doit pas espérer la république de pareils citoyens ! (On applaudit.) [Richard, repr. près VA. du Nord au C. de S.P.; Bruxelles, 22 mess. II]. « Nous continuons de marcher de succès en succès. Les deux armées du Nord et de Sambre-et-Meuse ont fait hier leur jonction sur Ath, et maintenant elles marchent de front, l’armée du Nord tenant toujours la gauche. L’ennemi paraît se retirer sur trois points : Anvers, Maëstricht et le Rhin. Nous saurons demain sa marche de la manière la plus certaine. « J’irai demain sur Nivelles trouver mes collègues Gillet et Guyton, et conférer avec eux. Il est tard et je suis rendu; je vous écrirai demain avec plus de détail ». [Armée du Nord. Le Gal en chef au C. de S. P.; Au quartier gal de Bruxelles, 22 mess. II]. « Citoyens représentants, la jonction des armées du Nord et de Sambre-et-Meuse vient de s’opérer; elles sont arrivées ensemble à Bruxelles, elles n’ont pas mal fait ; leur réunion ne peut faire espérer que du mieux en poursuivant les soldats des tyrans coalisés, qui, malgré les grandes chaleurs qui se font sentir depuis quelques jours, s’en vont à grandes journées ; les magasins qu’ils sont forcés d’abandonner sont partout très-nombreux, et de toute espèce, et il nous arrive journellement quantité de déserteurs et de prisonniers. Vive la république ! « Signé PlCHEGRU ». BARÈRE : Mais je n’aurai point parlé de Bruxelles et de ses derniers tyrans sans avoir fait connaître à la Convention et au peuple français l’effroyable morale des rois qu’il combat. Oui, je les dénoncerai à l’Europe, au monde entier, ces faussaires couronnés, ces fabricateurs privilégiés de fausse monnaie, ces avilisseurs de la foi publique. Chez les tyrans, des édits, des arrêts du conseil, des ordonnances sévères condamnent à des peines terribles ceux qui fabriquent de fausse monnaie, ou qui altèrent l’effigie royale sur les métaux. Eh bien, les auteurs de ces crimes, les fabricateurs de fausse monnaie, ce ne sont plus quelques métallurgistes indignes, ou quelques fripons obscurs : ces ennemis du commerce et de la probité publique, ce sont les rois. A Londres se trouve, par les ordres de Georges et sous la surveillance de Pitt, un hôtel de fausse monnaie. Là, les arts précieux de la papeterie et de la gravure sont asservis au crime et condamnés à multiplier de faux signes de la fortune de la nation française. Des millions de signes faux sont fabriqués à Londres; des pacotilles nombreuses sont envoyées dans les pays des coalisés pour déverser au milieu de nous ces signes mensongers en même temps que les soldats de la tyrannie porteraient sur notre territoire tous les fléaux d’une guerre de cannibales. Ainsi nous avions à nous défendre et contre leurs monnaies et contre leurs armes. C’est là le présent que nous devions attendre des Anglais. Mais ce qui paraît plus extraordinaire, c’est de voir le pacte écrit entre les Anglais et les Autrichiens, entre les rois de Londres et d’Ostende, pour faire circuler les poisons subtils appliqués à la fortune territoriale de la république française. C’est encore ici un fruit de la victoire remportée par l’armée du Nord. C’est à Ostende que 2 millions 270,010 livres de faux assignats de fabrique anglaise ont été saisis par les troupes françaises. (On applaudit.) C’est là qu’a été trouvée la charte du passage gratuit de ces assignats : les tarifs des rois ne doivent pas sans doute être imposés sur leurs crimes, et la fabrication d’assignats britanniques ne pouvait pas payer des droits à l’empereur; c’eût été une exaction horrible; aussi les officiers de l’empereur ont-ils eu le soin d’écrire à Ostende que ce transit des faux assignats venant de Londres sera gratuit, et ce noble et généreux procédé mérite d’être publié, pour l’honneur et la gloire de la royauté européenne. (On rit et on applaudit.) C’est un bel exemple de loyauté et de probité à donner au monde, et 106 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE denrées de l’ennemi à Mons, et beaucoup d’autres objets dont je vous envoie l’état. Tout ce qui ne sera pas utile ici sera envoyé dans nos magasins. « J’ai réintégré dans leurs possessions tous ceux qui avaient été persécutés par le grand conseil de l’Etat et les agents de l’Autriche. « Nous avons trouvé ici des émigrés qui sont saisis; il y en a encore de cachés que j’aurai bientôt, et de suite ils partiront pour le tribunal révolutionnaire établi à Cambrai. « Les moines baissent pavillon, ainsi que les aristocrates; les cloches des couvents sonnent pour la troisième fois pour nos victoires, et les fenêtres à grands pans s’illuminent. Je sais que ce sont des grimaces hypocrites, mais enfin ils marchent jusqu’à ce que, les ayant abattus par les espèces, je les mette dans le cas de se reposer plus qu’ils ne voudraient. S. et F. ». Laurent. BARÈRE : La punition des émigrés ne se borne pas à ceux que les troupes de la république ont pris à Mons. On nous écrit du siège de Nieuport, le 19 de ce mois, les faits suivants : [Extrait de la lettre du Cn Poulain, lieut. au 3e bon de l’Oise; Du siège de Nieuport, 10 mess. Il J. «... Par deux petits bâtiments qui ont voulu sortir, nous les avons attaqués à coups de fusil; mais ils nous auraient échappé sans deux pièces de canon qui les ont forcés de rester au milieu du canal. Les personnes qui étaient dans ces bâtiments se sont jetées à la nage pour rentrer à Nieuport; il n’en est resté que très-peu ; nous leur en avons tué une cinquantaine, et pris 15. Ayant questionné ceux que nous avions faits prisonniers pour savoir de quelle nation ils étaient, ils n’ont voulu répondre; comme ils étaient nus, nous avons monté dans leurs bâtiments, pour voir quels habits ils portaient; nous n’avons trouvé que des habits rouges, avec des boutons sur lesquels était écrit : Royal-Emigré, et dans toutes leurs poches étaient leurs titres et brevets. « Nous comptons que 300 émigrés ont péri hier tant par le feu que par l’eau. BARÈRE : Voici maintenant les lettres officielles de l’occupation de Bruxelles; vous y verrez que les deux armées ne connaissent que la chaleur des combats, et que le soleil brûlant de cette saison ne fait qu’augmenter leur courage. Que ne doit pas espérer la république de pareils citoyens ! (On applaudit.) [Richard, repr. près VA. du Nord au C. de S.P.; Bruxelles, 22 mess. II]. « Nous continuons de marcher de succès en succès. Les deux armées du Nord et de Sambre-et-Meuse ont fait hier leur jonction sur Ath, et maintenant elles marchent de front, l’armée du Nord tenant toujours la gauche. L’ennemi paraît se retirer sur trois points : Anvers, Maëstricht et le Rhin. Nous saurons demain sa marche de la manière la plus certaine. « J’irai demain sur Nivelles trouver mes collègues Gillet et Guyton, et conférer avec eux. Il est tard et je suis rendu; je vous écrirai demain avec plus de détail ». [Armée du Nord. Le Gal en chef au C. de S. P.; Au quartier gal de Bruxelles, 22 mess. II]. « Citoyens représentants, la jonction des armées du Nord et de Sambre-et-Meuse vient de s’opérer; elles sont arrivées ensemble à Bruxelles, elles n’ont pas mal fait ; leur réunion ne peut faire espérer que du mieux en poursuivant les soldats des tyrans coalisés, qui, malgré les grandes chaleurs qui se font sentir depuis quelques jours, s’en vont à grandes journées ; les magasins qu’ils sont forcés d’abandonner sont partout très-nombreux, et de toute espèce, et il nous arrive journellement quantité de déserteurs et de prisonniers. Vive la république ! « Signé PlCHEGRU ». BARÈRE : Mais je n’aurai point parlé de Bruxelles et de ses derniers tyrans sans avoir fait connaître à la Convention et au peuple français l’effroyable morale des rois qu’il combat. Oui, je les dénoncerai à l’Europe, au monde entier, ces faussaires couronnés, ces fabricateurs privilégiés de fausse monnaie, ces avilisseurs de la foi publique. Chez les tyrans, des édits, des arrêts du conseil, des ordonnances sévères condamnent à des peines terribles ceux qui fabriquent de fausse monnaie, ou qui altèrent l’effigie royale sur les métaux. Eh bien, les auteurs de ces crimes, les fabricateurs de fausse monnaie, ce ne sont plus quelques métallurgistes indignes, ou quelques fripons obscurs : ces ennemis du commerce et de la probité publique, ce sont les rois. A Londres se trouve, par les ordres de Georges et sous la surveillance de Pitt, un hôtel de fausse monnaie. Là, les arts précieux de la papeterie et de la gravure sont asservis au crime et condamnés à multiplier de faux signes de la fortune de la nation française. Des millions de signes faux sont fabriqués à Londres; des pacotilles nombreuses sont envoyées dans les pays des coalisés pour déverser au milieu de nous ces signes mensongers en même temps que les soldats de la tyrannie porteraient sur notre territoire tous les fléaux d’une guerre de cannibales. Ainsi nous avions à nous défendre et contre leurs monnaies et contre leurs armes. C’est là le présent que nous devions attendre des Anglais. Mais ce qui paraît plus extraordinaire, c’est de voir le pacte écrit entre les Anglais et les Autrichiens, entre les rois de Londres et d’Ostende, pour faire circuler les poisons subtils appliqués à la fortune territoriale de la république française. C’est encore ici un fruit de la victoire remportée par l’armée du Nord. C’est à Ostende que 2 millions 270,010 livres de faux assignats de fabrique anglaise ont été saisis par les troupes françaises. (On applaudit.) C’est là qu’a été trouvée la charte du passage gratuit de ces assignats : les tarifs des rois ne doivent pas sans doute être imposés sur leurs crimes, et la fabrication d’assignats britanniques ne pouvait pas payer des droits à l’empereur; c’eût été une exaction horrible; aussi les officiers de l’empereur ont-ils eu le soin d’écrire à Ostende que ce transit des faux assignats venant de Londres sera gratuit, et ce noble et généreux procédé mérite d’être publié, pour l’honneur et la gloire de la royauté européenne. (On rit et on applaudit.) C’est un bel exemple de loyauté et de probité à donner au monde, et SÉANCE DU 24 MESSIDOR AN II (12 JUILLET 1794) - N° 46 107 cette infamie manquait au livre où un député à la Convention a buriné les crimes des rois. (Applaudissements.) Voici les pièces qui les prouvent. [Rapport de la commission des revenus nationaux]. « Le vérificateur en chef des assignats informe la commission que le commissaire vérificateur, chargé de la surveillance des départements du Nord, du Pas-de-Calais et des pays occupés par les armées de la République, a saisi et arrêté [à] Ostende pour 2.270,010 liv. de faux assignats, de fabrique anglaise. « Il joint ici les copies de transit que délivrent les états de Brabant, pour faire passer librement, et en exemption de droits, les faux assignats. « Si le comité de salut public ne connaissait pas toute l’étendu[e] de la perfidie des gouvernements ennemis de la France et la bassesse de leurs moyens, il en trouverait une preuve certaine dans les faits qui ont donné lieu au présent rapport. Bouchet, adjoint, et Laumond. [Les trésorier général, conseillers et commis des domaines et des finances de l’empereur et roi]. « Très-chers féaux amis, « Le nommé Dufour nous ayant demandé la permission de faire transiter sur Liège une caisse arrivée à son adresse à Ostende, contenant des assignats, nous vous faisons cette lettre pour vous autoriser à effectuer cette expédition en exemption de tous droits ; vous en oserez de même pour toutes les expéditions d’assignats qui pourront se présenter ci-après à la même destination. « A tous, très-chers féaux amis, Dieu vous ait en sa sainte garde. « De Bruxelles, au conseil des finances, le 26 mai 1794. « Paraphé Ag. Bounisset. « Au bas était : Aux officiers principaux d’Os-tende. P.c.c. Dolbannaud, ar. principal. « Ostende, le 15 messidor, l’an 2 de la république française, une et indivisible. P.c.c. Deperey. Bureau principal d’Ostende. - Extrait du registre de recettes de transit pour le troisième trimestre de Vannée 1 794, où se trouve comme suit : Le 3 juin 1794. Transit à Liège, sortant par Dormale, une caisse contenant assignats, exempte de tous droits, ensuite d’ordre du conseil en date du 26 mai dernier, à l’adresse Dufour. Libre. « Vt. L. Cabot. « P.c.c., fait à Ostende, le 4 juillet 1794. Dolbannaud. P.c.c. Deperey. BARÈRE : Proclamons donc, le jour de la prise de Bruxelles, proclamons le brevet honorable du transit gratuit des faux assignats ; traduisons le même jour des brigands décorés du nom de roi devant le tribunal incorruptible des nations, et condamnons ces tyrans aux galères de l’opinion publique. (Vifs applaudissements.) Le comité de salut public, de concert avec le comité des finances et la commission des revenus nationaux, a pris les mesures nécessaires pour arrêter les effets de ce poison versé sur la fortune et le crédit national, et pour prévenir les maux que l’im-probité et l’atrocité des rois préparaient à la république. C’est un beau chapitre à ajouter à la foi punique de Londres et de ses maîtres. En expiation de ce crime politique, nous ferons brûler sur la place publique les faux assignats trouvés à Ostende. Le vent doit emporter les cendres des crimes anglais, comme l’énergie française chasse devant ses armées les hordes étrangères. (On applaudit). Mais détournons nos regards de ce tableau hideux des probités royales et impériales, et voyons le tableau consolateur de la joie des Français à l’approche de la fête nationale du 14 juillet (vieux style) : c’est la première époque de l’énergie française, où le premier sentiment de la liberté a été fortement prononcé. Quel républicain n’entend pas retentir avec délices à son oreille le tocsin qui rassembla les citoyens de Paris, et le bruit de la foudre nationale qui renversa cette Bastille que nulle ambition, nul complot, nulle puissance humaine ne pourra rebâtir dans le cours des siècles sur le sol français ? (On applaudit à plusieurs reprises). Nous touchons à l’époque glorieuse où se renouvelle ce beau jour, et cette époque qui fit frémir le tyran des Français est entourée aujourd’hui des victoires remportées sur tous les trônes de l’Europe, complices de tant de forfaits inouïs. Le comité de salut public a pensé qu’il était inutile de rappeler par un décret ce beau jour de la gloire française; il est écrit en caractères de feu dans tous les cœurs qui ne sont pas morts pour la liberté et la patrie. Il y aura sans doute dans toute la République une fête simple et spontanément ordonnée dans chaque commune, dans chaque canton, dans chaque district. Pour nous, nous ferons célébrer cette journée dans la commune centrale de la république par un concert majestueux, digne du peuple, par des chants guerriers, par des serments de vaincre et par le pas de charge. (On applaudit.) L’Institut national de Musique prépare des chants propres à réunir tous les courages et à orner la fête du peuple. (On applaudit.) Barère propose un projet qui est adopté en ces termes (l) : « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [de BARÈRE, au nom] du comité de salut public, décrète que les nouvelles officielles sur les nouveaux succès de l’armée du Nord et de l’armée de Sambre-et-Meuse, seront insérées dans le bulletin, et envoyées sur le champ aux autres armées de la République. « Le rapport du comité de salut public sera (l) Mon., XXI, 196-199. SÉANCE DU 24 MESSIDOR AN II (12 JUILLET 1794) - N° 46 107 cette infamie manquait au livre où un député à la Convention a buriné les crimes des rois. (Applaudissements.) Voici les pièces qui les prouvent. [Rapport de la commission des revenus nationaux]. « Le vérificateur en chef des assignats informe la commission que le commissaire vérificateur, chargé de la surveillance des départements du Nord, du Pas-de-Calais et des pays occupés par les armées de la République, a saisi et arrêté [à] Ostende pour 2.270,010 liv. de faux assignats, de fabrique anglaise. « Il joint ici les copies de transit que délivrent les états de Brabant, pour faire passer librement, et en exemption de droits, les faux assignats. « Si le comité de salut public ne connaissait pas toute l’étendu[e] de la perfidie des gouvernements ennemis de la France et la bassesse de leurs moyens, il en trouverait une preuve certaine dans les faits qui ont donné lieu au présent rapport. Bouchet, adjoint, et Laumond. [Les trésorier général, conseillers et commis des domaines et des finances de l’empereur et roi]. « Très-chers féaux amis, « Le nommé Dufour nous ayant demandé la permission de faire transiter sur Liège une caisse arrivée à son adresse à Ostende, contenant des assignats, nous vous faisons cette lettre pour vous autoriser à effectuer cette expédition en exemption de tous droits ; vous en oserez de même pour toutes les expéditions d’assignats qui pourront se présenter ci-après à la même destination. « A tous, très-chers féaux amis, Dieu vous ait en sa sainte garde. « De Bruxelles, au conseil des finances, le 26 mai 1794. « Paraphé Ag. Bounisset. « Au bas était : Aux officiers principaux d’Os-tende. P.c.c. Dolbannaud, ar. principal. « Ostende, le 15 messidor, l’an 2 de la république française, une et indivisible. P.c.c. Deperey. Bureau principal d’Ostende. - Extrait du registre de recettes de transit pour le troisième trimestre de Vannée 1 794, où se trouve comme suit : Le 3 juin 1794. Transit à Liège, sortant par Dormale, une caisse contenant assignats, exempte de tous droits, ensuite d’ordre du conseil en date du 26 mai dernier, à l’adresse Dufour. Libre. « Vt. L. Cabot. « P.c.c., fait à Ostende, le 4 juillet 1794. Dolbannaud. P.c.c. Deperey. BARÈRE : Proclamons donc, le jour de la prise de Bruxelles, proclamons le brevet honorable du transit gratuit des faux assignats ; traduisons le même jour des brigands décorés du nom de roi devant le tribunal incorruptible des nations, et condamnons ces tyrans aux galères de l’opinion publique. (Vifs applaudissements.) Le comité de salut public, de concert avec le comité des finances et la commission des revenus nationaux, a pris les mesures nécessaires pour arrêter les effets de ce poison versé sur la fortune et le crédit national, et pour prévenir les maux que l’im-probité et l’atrocité des rois préparaient à la république. C’est un beau chapitre à ajouter à la foi punique de Londres et de ses maîtres. En expiation de ce crime politique, nous ferons brûler sur la place publique les faux assignats trouvés à Ostende. Le vent doit emporter les cendres des crimes anglais, comme l’énergie française chasse devant ses armées les hordes étrangères. (On applaudit). Mais détournons nos regards de ce tableau hideux des probités royales et impériales, et voyons le tableau consolateur de la joie des Français à l’approche de la fête nationale du 14 juillet (vieux style) : c’est la première époque de l’énergie française, où le premier sentiment de la liberté a été fortement prononcé. Quel républicain n’entend pas retentir avec délices à son oreille le tocsin qui rassembla les citoyens de Paris, et le bruit de la foudre nationale qui renversa cette Bastille que nulle ambition, nul complot, nulle puissance humaine ne pourra rebâtir dans le cours des siècles sur le sol français ? (On applaudit à plusieurs reprises). Nous touchons à l’époque glorieuse où se renouvelle ce beau jour, et cette époque qui fit frémir le tyran des Français est entourée aujourd’hui des victoires remportées sur tous les trônes de l’Europe, complices de tant de forfaits inouïs. Le comité de salut public a pensé qu’il était inutile de rappeler par un décret ce beau jour de la gloire française; il est écrit en caractères de feu dans tous les cœurs qui ne sont pas morts pour la liberté et la patrie. Il y aura sans doute dans toute la République une fête simple et spontanément ordonnée dans chaque commune, dans chaque canton, dans chaque district. Pour nous, nous ferons célébrer cette journée dans la commune centrale de la république par un concert majestueux, digne du peuple, par des chants guerriers, par des serments de vaincre et par le pas de charge. (On applaudit.) L’Institut national de Musique prépare des chants propres à réunir tous les courages et à orner la fête du peuple. (On applaudit.) Barère propose un projet qui est adopté en ces termes (l) : « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [de BARÈRE, au nom] du comité de salut public, décrète que les nouvelles officielles sur les nouveaux succès de l’armée du Nord et de l’armée de Sambre-et-Meuse, seront insérées dans le bulletin, et envoyées sur le champ aux autres armées de la République. « Le rapport du comité de salut public sera (l) Mon., XXI, 196-199.