716 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES [Paris hors les murs.] susceptibles; mais elles ne pourront jamais être exécutées, en aucun cas, qu’après avoir été visées par le comité établi par l’article ci-dessus. Art. 51. Que les ministres soient comptables aux Etats généraux de l’emploi des fonds qui leur seront confiés, et responsables auxdits Etats généraux de leur conduite, en tout ce qui sera relatif aux lois du royaume. Art. 52. Qu’aucun emprunt, sous quelque forme qu’il puisse être, aucun papier circulant, aucun office ou commission, de quelque nature qu’ils soient, ne puissent être créés et établis que par la volonté et du consentement de la nation assemblée. Art. 53. Que le sel, comme denrée de première nécessité, soit diminué, et que les bureaux de greniers à sel soient augmentés, afin d’en rendre l’achat plus facile. Art. 54. Que la mendicité soit abolie, et que l’on avise aux moyens d’v remédier soit par une imposition sur les biens-ï'onds de la paroisse, soit par la diminution du revenu des riches abbayes ou autres gros bénéficiers. Art. 55. Supprimer le droit de relief qui est exigible sur les biens féodaux par les seigneurs à chaque mutation. Le présent cahier fait et arrêté par ladite assemblée par nous soussignés, que nous, Bernard et Le Blanc, en nosdi tes qualités, avons côté et paraphé ces dits jour et an. Signé Louis Leroi; Sainte-Beuve; Bercher; De-lacour ; Gilquin ; Pétré ; Dambly ; Lallemant ; Binard; Laurent; Massy ; Bénard. Leblanc, syndic. CAHIER Des plaintes , doléances et remontrances des habitants composant le tiers-état de la paroisse de Moissy-Cramayel (1). L’an 1789, le 13 avril, tous les habitants de la paroisse de Moissy-Cramayel, assemblés au son de la cloche en la salle ordinaire de la municipalité, conformément à l’ordonnance de M. le prévôt de Paris du 4 de ce mois, à l’effet de rédiger le cahier de doléances, plaintes et remontrances que les paroissiens ont à faire pour le bien public, lequel sera remis aux deux députés nommés par les habitants ; L’intention desdits paroissiens étant de concourir aux vues bienfaisantes de Sa Majesté, et de déposer à ses pieds leur dévouement au bien de l’Etat, ils la supplient d’accueillir favorablement les observations et demandes que renferment les articles ci-après : Art. 1er. Une répartition égale d’impôts sur tous les biens que possèdent et font valoir les trois ordres. Art. 2. La fixation d’un prix égal par tout le royaume et la liberté à chaque citoyen d’acheter du sel à proximité de son local. Art. 3. Une réforme établie dans les commis établis pour la perception des droits sur les vins, laquelle est très-onéreuse; la suppression des droits d’entrée dans toutes les villes, excepté celle de Paris. Art. 4. L’abolition entière des capitaineries, et (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. notamment en cette paroisse, où. le cultivateur serait privé de sa récolte par le dégât considérable qu’y cause le gibier , et qu’il soit enjoint à tous seigneurs ayant droit de chasser la grande bête, de ne pouvoir jouir de ce privilège que depuis le 1er novembre jusqu’au 1er mai, vu le tort que ces sortes de chasses causent. Art. 5. Ladestruction générale du lapin, à moins de garenne forcée, entourée de murs de 7 à 9 pieds de hauteur, et celle des lièvres, perdrix, etc., lorsque la trop grande quantité l’exigera. Art. 6. Celle des pigeons; les avantages qu’on en retire n’égalent pas à beaucoup près le tort qu’ils font, surtout dans les années où le blé est versé. Art. 7. Le rétablissement des chemins qui servent de communication de paroisse à autre, et les tenir de la largeur fixée par l’ordonnance, et l’entretien et réparations des ponceaux y adjacents. Art. 8. Un nouveau code criminel, parce que celui qui existe a souvent immolé des victimes innocentes. Art. 9- La suppression des justices particulières pour être renvoyées aux bailliages les plus proches. Art. 10. L’abolition des requêtes qui autorisent les huissiers à garder entre leurs mains les deniers provenant des ventes, à la suite des inventaires, deniers qui, très-souvent, se trouvent consommés par les frais que l’on est obligé de faire pour jouir de son droit. Art. 11. Suppression totale des dîmes grasses, sur lesquelles il n’y a aucun règlement; cette demande est fondée sur la liberté d’innover que se permettent la plupart des curés. Art. 12. Assurer une aisance honnête aux curés, les fixer à 2,000 livres au plus par chaque année; cette somme est suffisante pour un honnête pasteur. Art. 13. Charger les curés de se loger à leurs frais, à l’avenir ; tant en constructions que réparations, cette dépense devient très-onéreuse aux propriétaires, par les palais qu’ils exigent, en vertu des ordonnances des juges et parties. Art. 14. La liberté aux cultivateurs de pouvoir faire ôter, jusqu’au moment de la récolte, les herbes nuisibles à leurs grains; comme aussi celle de faire faucher les foins et luzernes, quand bon leur semblera. Art. 15. Que, dorénavant, inhibition soit faite à tous seigneurs propriétaires de ne pouvoir planter en bois aucunes terres, sans y être autorisés par l’administration. Art. 16. Que la mesure de Paris pour les grains serve de base pour tout le royaume. Art. 17. Que les dîmes de toute espèce de grains et fourrages, qui se perçoivent à la neuvième, onzième, treizième, quinzième et dix-septième par chaque arpent, soient réduites à la quantité de quatre gerbes, comme cela se pratique dans la banlieue de Paris. Art. 18. Qu’à compter dès à présent, la clause de la contrainte par corps insérée dans tous les baux à loyer soit nulle et de nul effet. Art. 19. La suppression du tirage de la milice, qui est une surcharge d’impôts pour les paroisses. Art. 20. Qu’il soit défendu expressément à tous bénéficiers de permuter et résigner leurs bénéfices, sous quelque prétexte que ce soit. Art. 21. Qu’il soit permis d’entrer dans les abbayes royales et maisons privilégiées, pour faire la recherche et arrêter les banqueroutiers qui s’y réfugient. 717 [États gén. 1789 Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] Art. 22. Une modification sur les droits imposés sur les cuirs. Art 23. De défendre expressément, et sous les plus fortes peines, accaparements, sociétés et levées de blés en tout tout temps, même dans la plus grande abondance, à moins qu’il n’y ait. un ordre exprès des Etats généraux ou de l’assemblée intermédiaire; avec celte précaution salutaire l’on parviendra à empêcher la disette des grains, à défaut d’une année de récolte. Art. 24. Que tous ecclésiastiques qui ont des fermes qu’ils font valoir par eux-mêmes n’aient pas ce droit, puisque cela n’est pas leur état, d’autant plus qu’il y a une très-grande quantité de pères de famille qui désirent avoir des fermes pour l’établissement de leurs enfants; ne pouvant en avoir, c’est une désolation pour ces pauvres pères de famille. Art. 25. Que tous propriétaires qui ont plusieurs fermes n’aient pas à louer leursdites fermes à un fermier seul ; que dans chaque ferme il y ait un fermier , comme cela était anciennement. Art. 26. Que les très-grosses fermes, de quatre ou cinq charrues, soient divisées en deux, et que la ferme la plus considérable ne soit pas de plus de 300 arpents de labour. Art. 27. Nous prouverons que les propriétaires retireront autant de leurs fermes, ayant dans chacune desdites fermes un fermier, et les bâtiments en seront beaucoup mieux entretenus, qu’avec un seul fermier pour plusieurs fermes. Art. 28. Nous prions et supplions très-humblement Sa Majesté d’étendre ses bontés sur tout son peuple, qui est dans la plus grande misère, à cause de la cherté des grains et du pain. Art. 29. Nous prions Sa Majesté d’inviter les propriétaires à fournir des travaux aux pauvres mercenaires, pendant trois mois, à compter de ce jour. Clos et arrêté lesdits jour et an, et ont, les habitants, signé avec nous : Nouette Delorme; Lherminot; Acquinet; Colin; Mouton; Carnot; Gauthier; Mathieu; Nicolas Heaume; Gargues; Goupy; Verrier; Mouton; Semeladi. CAHIER Des plaintes , doléances et remontrances des habitants de la paroisse des Molières , faites et rédigées en l’assemblée desdits habitants tenants cejour-d’hui 14 avril 1789, devant M. le lieutenant général du bailliage de Lincourt (1). Les habitants de ladite paroisse des Molières, chargent spécialement les députés qui vont être par eux élus en la présente assemblée, d’exposer et de représenter en celle de la juridiction royale, à laquelle ils sont appelés, que les impôts excessifs qui se perçoivent chez eux et sur la levée annuelle des milices, sont pour eux des fardeaux qu’ils ne supportent qu’avec la plus grande peine, et qui les entretiennent dans une misère continuelle, les uns en leur enlevant la majeure partie des fruits de leurs travaux et de leurs sueurs, les autres en arrachant du sein des familles des citoyens naissants, qui en feraient le soutien, et (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. contribueraient aux progrès de l’agriculture, mais à qui l'épouvante du sort, plus que le sort même, fait, pour s’y soustraire, abandonner ses foyers, en se réfugiant dans les villes et principalement dans la capitale où ils en sont affranchis, sans parler des contributions occultes, et toujours forcées, qui se font entre les appelés au sort, et que la sagesse et la vigilance du gouvernement n’a encore pu empêcher, malgré les plus expresses défenses et la rigueur des peines infligées contre les contrevenants ; mais comme l’Etat ne peut subsister et se soutenir que par des contributions quelconques, de la part de tous les sujets du Roi, lesdits députés sont chargés de consentir à l’établissement ou prorogation des subsides que les Etats généraux jugeront nécessaires, toutes dépenses inutiles préalablement retranchées, pourvu toutefois que les impôts qui distinguent les ordres soient supprimés et remplacés par des subsides également répartis entre tous les citoyens, sans distinction ni privilèges, à raison seulement de leurs propriétés et de leurs facultés, comme aussi de demander la suppression des milices, sauf à pourvoir à la levée des troupes suffisantes par des engagements volontaires. Au surplus, lesdits habitants laissent à leurs-dits députés la faculté de se joindre et de se réunir aux députés de ladite assemblée générale qui, plus éclairés et plus instruits que le public de la nation, sont dans le cas de développer, de faire valoir et d’exposer plus amplement les maux sous lesquels le peuple gémit, et les abus qui subsistent dans les différentes parties de l’administration, qui sont mieux connus dans les villes que dans les campagnes, afin d’en obtenir l’adoucissement et le redressement. Art. 1er. Les députés voudront bien faire observer à l’assemblée des Etats généraux, que, dans le cas où les cultivateurs auraient à se plaindre des dégâts occasionnés par le gibier, les formes introduites par les arrêts de la cour, des années 1778, 1779, seraient anéanties, comme tendant plutôt à interdire les voies de réclamation qu’à opérer le dédommagement du cultivateur, en laissant aux parties plaignantes la faculté de le faire constater sommairement, et pour tel délit que ce soit, et d’agir séparément, chacun pour son intérêt particulier, même de se réunir, si elles le jugent à propos. Art. 2. Il serait essentiel qu’il fût enjoint à ceux qui ont des colombiers et volières, de les tenir fermés pendant le temps précieux des semences et des récoltes. Art. 3. Il serait encore une autre observation essentielle à faire : suivant l’édit du mois de mars 1667, et autres subséquents, les ecclésiastiques et gens de mainmorte, ainsi que les nobles, peuvent exploiter une seule ferme par leurs mains, du labour de quatre charrues, sans payer aucune imposition ni subside, ce qui devient onéreux au tiers-état : . 1° Parce que la paroisse se trouve chargée des impositions générales; 2° Parce qu’il leur était défendu de jouir ainsi de quatre charrues de labour qui peuvent composer et former quatre exploitations différentes; ces quatre exploitations, faites divisément, procureraient l’établissement de quatre pères de famille, la population en deviendrait plus abondante, le fils d’un laboureur ne tomberait pas en servitude, l’agriculture en aurait plus de progression, l’Etat en serait mieux servi, et enfin les impositions se trouveraient mieux réparties.