136 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j i!rbnoTCn!breaÏ793 ministres de la justice et de la marine, tous de¬ mandant de décréter un mode d’exécution des lois relatives à la déportation. Vous lui avez pareillement renvoyé l’examen de la demande d’un de vos membres, en inter¬ prétation de la disposition de la loi sur la men¬ dicité, qui déporte aux colonies les mendiants incorrigibles. Il pense qu’il est inhumain de laisser languir dans une prison, après jugement, les déportés; car si la loi commande impérieu¬ sement de se conformer à la sentence prononcée contre eux et de l’exécuter littéralement, elle veut aussi que le jugement soit strictement exé¬ cuté à leur égard, et qu’une peine n’y soit point substituée à une autre; or les laisser des mois, des années dans une prison après condamnation, c’est substituer une peine à une autre. Quant aux mendiants, votre comité doit vous observer que les colonies en général ne sont déjà que trop infectées de ces mauvais garne¬ ments, qui ne cessent d’y affluer depuis la Ré¬ volution. Ce sont de pareils gens qui, soudoyés par les ennemis intérieurs et extérieurs de la France, y ont suscité et fomenté les troubles qui régnent depuis trois ans ; en augmenter le nom¬ bre lorsque le salut public exige qu’on le diminue c’est vouloir y perpétuer le désordre et y propo-ger l’esprit contre-révolutionnaire. D’après d’aussi fortes considérations, il estime que vous devez déporter les mendiants incorrigibles dans un lieu où ils puissent vivre en travaillant. La partie de l’île de Madagascar qui vous a été désignée, obvie aux grands inconvénients qui viennent de vous être démontrés, et renferme tout ce qui est essentiel pour faire vivre les dé¬ portés, même pour les y faire prospérer s’ils se corrigent et s’adonnent au travail seulement quatre heures chaque jour, et voici comment. Dans la partie de cette île dont il est question, la République possède, en vertu de chartes passées par l’ancienne Compagnie des Indes avec les chefs et les anciens du pays, trois lieues environ de territoire; il est si fertile que le riz, le cambare blanc, les patates, les haricots rouges et quantité d’excellents fruits y croissent sans culture, etsne coûtent que la peine de les cueillir. Le cochon sauvage, le gibier de toute espèce, le poisson y abondent et sont aussi bons, pour ne pas dire meilleurs, qu’en France. Les bœufs, les cabris y prospèrent, et sont à très bas prix; le climat en est sain et tempéré; enfin, il s’y trouve des bâtiments pouvant contenir, en les réparant, 200 hommes. L’île de France y entretient un commissionnaire pour les achats de ces derniers objets; elle y envoie en conséquence pour les exporter, et par continuation de petites embar¬ cations, et des navires de 3 à 600 tonneaux. Il y a de plus dans la même île et sur la même côte deux établissements plus considérables : Foulpointe et la baie d’ Autougil ; dansde dernier, il vient d’être organisé un comité municipal et administratif. Ce comité fournira aux déportés tous les instruments de culture et autres objets de première nécessité, et les contiendra dans la plus exacte discipliné avec cinquante hommes de guerre. Combien de pères de famille honnêtes, pourra faire escorter par les frégates en station dans la mer des Indes. Voici le projet de décret. (Suit le texte du décret que nous avons inséré ci-dessus d’après le procès-verbal.) « Le projet de décret est adopté. » et laborieux, mais dans l’indigence, se regarde¬ raient fort heureux d’y être avec leur famille ! Il n’en coûtera rien à la nation pour le trans¬ port des condamnés, et voici pourquoi ; la pointe du sud de l’île de Madagascar se trouve sur la route que l’on tient ordinairement pour aller aux îles de France et de la Réunion et autres adja¬ centes ; la République est obligée d’envoyer tous les ans plusieurs vaisseaux et navires, afin d’ap¬ provisionner les magasins; elle pourra donc se servir des mêmes vaisseaux et navires, qui trans¬ porteront ces bannis, pour porter les objets d’approvisionnement nécessaires auxdites îles, et les faire escorter par les frégates en station dans la mer des Indes. Les déportés une fois mis à terre, à Madagas¬ car, ces vaisseaux, frégates et navires s’y répa¬ reront très facilement et sans frais, y prendront des bœufs et rafraîchissements, y feront même des salaisons pour les équipages, et pourront se charger en outre de riz et de petites mâtures pour les îles de France et de la Réunion. Ces mâtures ne coûtent que la peine de les couper dans les forêts très voisines du port et de les embarquer. Le temps de la relâche, ne fût-il que de douze jours, suffira pour ces opérations : ces moyens d’économie, trop longtemps négligés, ne sont certainement point à mépriser. Votre comité vous propose le projet de décret suivant : (Suit le texte du décret que nous avons inséré ci-dessus d’après le procès-verbal.) _ « La Convention nationale, sur la proposition d’un membre [Charmer (1)], rapporte son dé¬ cret du 8 avril dernier (2), en ce qu’il avait établi une indemnité en faveur des marchés passés pour le compte de la République avec stipulation de payement en espèces, ou autres clauses y rela¬ tives. En conséquence, les débets ne seront payés qu’en assignats au pair de la valeur stipulée en numéraire dans lesdits marchés ou conven¬ tions (3). » Compte rendu du Moniteur universel (4). Julien (de Toulouse). Vous avez créé, par votre décret du 5 octobre (5), une Commission de la Belgique pour examiner les demandes en indemnités faites par les fournisseurs qui ont alimenté nos troupes pendant la retraite de la Belgique. Les fonctions de cette Commission doivent se borner d’après la loi à fixer ces in¬ demnités réclamées, à cause de la perte des assi¬ gnats. Plusieurs comités lui renvoient journel¬ lement des questions d’une autre nature, telles que celles qui regardent la conduite à tenir par nos armées, si elles rentrent dans la Belgique. Je crois bien que, si le cas arrive, vous traiterez (1) D’après les divers journaux de l’époque. (2) Voy. ce décret, Archives parlementaires , lre sé¬ rie, t. LXVI, séance du 8 avril 1793, p. 450, le décret dont il est question. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 258. (4) Moniteur universel [n° 42 du 12 brumaire an II (samedi 2 novembre 1793), p, 172, col. 2]. Voy. d’autre part ci-après, annexe n° 1, p. 147, le compte rendu de la même discussion d’après divers journaux. (5) Voy. ce décret : Archives parlementaires, lre sé¬ rie, t. LXXVI, séance du 5 octobre 1793, p. 123.