706 ’ [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [5 juillet 1790.1 L’article 20 du projet du comité est lu et adopté, sans discussion, ainsi qu’il suit : « Art. 20. Le code de la procédure civile sera incessamment réformé, de manière qu’elle soit rendue plus simple, plus expéditive et moins coûteuse. » M. Thonret donne lecture de l’article 21 du projet, en ces termes : « Le code pénal sera incessamment réformé, de manière que les peines soient mieux proportionnées aux délits ; observant que les peines soient douces, et ne perdant pas de vue cette maxime, que toute peine qui n’est pas nécessaire est une violation des droits de l'homme, et un attentat du législateur contre la société. » M. Bouche. Cet article est terminé par une maxime qui paraît déplacée. Nous ne faisons pas un code de morale et il n’est pas de la dignité de l’Assemblée de prendre une maxime tirée de l’ouvrage d’un particulier. M. Barnave. On peut substituer à cette maxime un article de la déclaration des droits. Il est plus convenable, en faisant un article constitutionnel, de se référer à la déclaration des droits qu’à un principe de philosophie. Il faut saisir cette occasion de montrer Ja correspondance de nos décrets et de nos principes. — (M. Barnave lit l’article 8 de la déclaration des droits). M. Thouret. Le comité adopte le changement proposé. L’art. 21 amendé est mis aux voix et décrété ainsi qu’il suit : « Art. 21. Le code pénal sera incessamment réformé, de manière que les peines soient proportionnées aux délits; observant qu’elles soient modérées, et ne perdant pas de vue cette maxime : Que la loi ne doit établir que des peines évidemment et strictement nécessaires. » M. le Président. Un membre de l’Assemblée, contre lequel on a répandu des bruits calomnieux, demande à s’expliquer avant que la séance soit levée. Je lui donne la parole, s’il n’v a pas d’opposition. M. de Mirabeau le jeune. Avant hier, j’étais à la campagne; en revenant hier, j’ai trouvé une sentinelle à ma porte, une autre dans mon escalier, et des officiers civils dans un appartement que j’ai sous-loué. J’ai demandé la raison de cet appareil ; on m’a dit que, trois crocheteurs passant dans la cour du commerce, un papier était tombé ; un particulier ayant cru y voir quelque chose contraire à ses idées, courut au corps de garde, et deux soldats suivirent jusque chez moi ces trois crocheteurs. Une personne qui m’accompagnait, demanda comment et par quel acte judiciaire on avait été autorisé à s’introduire dans la maison d’un particulier. Les officiers civils répondirent qu’il n’y avait pas d’acte, mais que le succès justifiait les entreprises hardies. Je ne savais quel succès couronnait cette entreprise. Je demandai comment on était entré dans un appartement qui ne m’appartenait pas ; comment ces papiers s’y trouvaient. L’imprimeur, qui ne se cachait pas, nomma l’auteur, et dit qu’une personne, qu’il ne nomma point, lui avait ordonné d’envoyer ces papiers chez moi. J’interrogeai mon secrétaire, qui me répondit que M. l’abbé Lubersac avait demandé un lieu pour mettre ses papiers. M. Lubersac est un Limousin ; mon secrétaire avait cru que je ne refuserais pas cette permission. Je dis que je n’étais pas instruit de cela; que je n’avais nul rapport littéraire avec M. l’abbé Lubersac. J’observai que, d’après les idées très prononcées du district des Cordeliers et de M. Danton, alors présent, sur la liberté de la presse, je trouvais la démarche du district extraordinaire, et que je ne savais comment on avait cru pouvoir en agir ainsi avec un député. Je n’ai qu’à me louer de l'honnêteté des officiers du district des cordeliers qui se trouvaient là, je ne sais pas pourquoi; mais on m’a dit que ce district avait une suprématie sur tous les autres. Mon district avait aussi chez moi des commissaires : je rendis honnêtetés pour honnêtetés; je fis plus, je déclarai à ces messieurs que je rendrais compte à l’Assemblée nationale de ce qui m’était arrivé ; que je différerais cependant, pour leur donner le temps de rédiger et de faire connaître leur procès-verbal. J’observai cependant que je me trouvais à la merci des mille et un colporteurs de la capitale, et des personnes au service desquelles ils sont. Ces personnes croient tenir le bon Dieu par les pieds, quand ils tiennent le vicomte de Mirabeau dans leurs feuilles. On me dit d’être tranquille, que cela n’arriverait pas, qu’on en répondait; et ce matin trois libelles couraient : l’un est intitulé la nouvelle conspiration du vicomte de Mirabeau. J’ai déjà dénoncé quatre auteurs de cette espèce ; mes conclusions sont un peu fortes; je n’obtiendrai pas tout, mais j’obtiendrai quelque chose. Gomment dénoncer ceux-ci? Gela devient fatigant. Ges coquins-là ont beaucoup de confiance : il faut que l’Assemblée prenne dans sa sagesse des précautions, pour que ces gens-là ne soient pas l’écho de la calomnie. Je prie l’Assemblée de faire juger le plus promptement possible, non-seulement cette affaire, mais celle de l’insubordination des soldats du régiment de Touraine, pour laquelle je remets de nouvelles pièces. ( Voy . ces pièces annexées à la séance de ce jour.) (dette affaire est renvoyée au comité des rapports.) M. Tellier demande à rendre compte des travaux du comité de judicature. Plusieurs membres proposent, à cause de l’heure, d’ordonner l’impression, la distribution et l’adjonction au procès-verbal de la séance. (Voy. plus loin le rapport de M. Tellier). Gette motion est adoptée. La séance est levée à quatre heures du soir.