[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. » frimaire an II 537 I 18 décembre 1793 à son comité de sûreté générale, qui en fera inces¬ samment son rapport; « Décrète en outre (1) que la réponse du conseil exécutif provisoire sera insérée au « Bulletin » (2).» Suit le compte rendu de la comparution à la barre du conseil exécutif provisoire (3), d’après le Moniteur universel. LE CONSEIL EXÉCUTIF SE REND DANS LE SEIN DE LA CONVENTION AUX TERMES DU DÉCRET DU 27 FRIMAIRE (4) ET EXPOSE LES ORDRES QU’IL A DONNÉS A SES AGENTS POUR LA SUR¬ VEILLANCE DES COURRIERS (5). Compte rendu du Moniteur universel (6). Le conseil exécutif se présente à la Conven¬ tion. Le Président. La Convention nationale a appris hier avec autant de surprise que d’indi¬ gnation, que la représentation nationale avait été méconnue dans la personne d’un représen¬ tant du peuple, délégué dans les départements, et c’est un agent du conseil exécutif provisoire qui s’est rendu coupable de cet attentat. Quels sont donc ces hommes que vous investissez de votre confiance et de vos pouvoirs? La respon¬ sabilité ministérielle n’est-elle donc à vos yeux qu’un vain nom? Comment des agents subal¬ ternes, que vous avez commis, peuvent -ils ces¬ ser un instant de donner l’ exemple de la sou¬ mission aux lois dont l’exécution vous est con¬ fiée? Quels sont les ordres que vous avez trans¬ mis aux communes dans lesquelles vous avez établi des hommes pour surveiller tous les voya¬ geurs qui passent? Avez-vous ordonné à des communes d’obéir aveuglément à vos agents, et d’arrêter scandaleusement, sur leur simple réquisition, un représentant du peuple qui se fait connaître avec un passeport authentique, revêtu du sceau de la Convention, et contresi¬ gné de son Président et de ses secrétaires? Par¬ lez, la Convention nationale, juste dans les moindres détails comme sur les plus grands ob¬ jets, vous a mandés pour vous entendre. Elle désire connaître, bientôt et par vous-même, (1) Sur la proposition de Charlier, d après le do¬ cument des Archives nationales. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 305. (3) Voy. ci-dessus, séance du 27 frimaire, le décret ordonnant au conseil exécutif de paraître à la barre et d exposer de quelle façon il choisit ses agents et quels sont les ordres qu’il leur donne. (4) Voy. ci-dessus, séance du 27 frimaire an II, le décret ordonnant dn conseil exécutif de paraître à la barre et d’exposer à la Convention de quelle façon il choisit ses agents et quels sont les ordres qu’il leur donne. (5) L’admission du conseil exécutif à la barre n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 28 frimaire; mais le fait est signalé dans tous les comptes rendus de cette séance publiés par les jour¬ naux de l’époque. (6) Moniteur universel [n° 90 du 30 frimaire an II (vendredi 20 décembre 1793), p. 363, col. 3], Voy. ci-après annexe n°2, p. 672, le compte rendu du Journal des Débats et des Décrets. quels sont les coupables sur lesquels doit pe¬ ser la vengeance nationale si justement encou¬ rue. Deforgues. Le conseil exécutif provisoire au¬ rait, dès hier, satisfait à la loi qui le mande à la Convention; mais elle ne lui a été remise qu’à l’instant où vous leviez votre séance. Voici l’ar¬ rêté pris le 15 juillet dernier, par le comité de Salut public. Extrait du registre des arrêtés du comité de 8alut public de la Convention nationale, du 15 juil¬ let 1793, Van II de la Pépublique française, une et indivisible (1). D’après les renseignements communiqués au comité, il arrête : 1° que les ministres de la guerre et de l’intérieur prendront les mesures les plus promptes pour faire arrêter, à la deuxième ou troisième poste tous les courriers qui en partent et ceux qui y arrivent, et de faire vérifier et inventorier le nombre et la qualité des paquets ou lettres dont ils sont porteurs, et arrêter toutes celles qui ne seraient pas énon¬ cées dans leurs passeports; 2° Il sera écrit aux représentants du peuple près les armées, pour surveiller les trompettes ou autres envoyés de l’ennemi auprès des géné¬ raux. Et ont signé au registre : les citoyens Couthon, Saint-Just, Hérault, Gasparin, Thuriot Prieur et Barère. Pour extrait conforme : Couthon, Gasparin et Thuriot. Pour copie conforme : Le ministre de la guerre, J. Bouchotte. Le ministre de la guerre, en conséquence de cet arrêté, a donné l’ordre suivant (2) : « Jean-Baptiste-Noël Bouchotte, ministre de la guerre, ordonne au citoyen Nicolas-Hyp-polite Balardelle, de se transporter à Villeneuve-Saint -Georges, district de Corbeil, département de Seine -et -Oise, pour et en exécution de l’ar¬ rêté du comité de Salut public, faire arrêter les courriers qui en partent et qui y arrivent, vérifier et inventorier le nombre et la qualité des paquets ou lettres dont ils sont porteurs, et arrêter toutes celles qui ne seraient pas énon¬ cées dans leurs passeports, de se concerter tant avec la municipalité dudit lieu qu’avec le com¬ missaire nommé par le ministre de l’intérieur, pour remplir la même mission ; en conséquence, de requérir, en cas de besoin, de ladite muni-(1) Cet arrêté existe aux Archives nationales , car¬ ton F7, n° 43941 (dossier Bouchotte). (2) Cet ordre existe aux Archives nationales , car¬ ton F7 n° 4394* (dossier Bouchotte). 638 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES: f ?! ?-imaile J 1 18 décembre 1733 eipalité et tontes antres environnantes', les se¬ cours et assistances nécessaires, « A Paris, le 18 août 1793, l’an II de la Ré¬ publique, une et indivisible. » « Le ministre de la guerre, « Botjchotte. » Telles sont les instructions données par le con¬ seil à cet agent. S’il s’est écarté des limites qui lui étaient tracées, le conseil sera le premier à lè rappeler à ses devoirs, et si ses écarts sont condamnables, à le soumettre à toute la rigueur des lois. Le conseil exécutif provisoire n’a pas vu sans un sentiment profond de douleur qu’on l’eût accusé dans la Convention nationale de préten¬ dre rivaliser de pouvoir avec elle. Le conseil exécutif rivaliser de pouvoir avec la Conven¬ tion! Il n’a. jamais voulu rivaliser que de zèle et de dévouement avec les plus purs et les plus chauds défenseurs de la liberté; mais toutes ses délibérations, tous ses vœux n’ont jamais d’au¬ tre but que d’investir la Convention de tout le respect qu’elle mérite, < t dont elle a besoin pour, accomplir ses hautes destinées. Et, d’ailleurs, que sont donc les membres du conseil exécutif? Ne sommes-nous pas tous du peuple? N’avons-nous pas été appelés à nos fonctions par les représentants du peuple? N’avons-vous pas juré de vivre libres ou mou¬ rir pour la liberté et pour le peuple? Nous se¬ rait-il possible de violer cet engagement sacré? A-t-on vu un seul de nous approcher jamais des tyrans que pour les combattre? Comment pourrait -on donc nous transformer en agents du despotisme et de la tyrannie? Citoyens, un seul mot, la qualification de mi¬ nistre est la cause de la défaveur meurtrière dans laquelle languit le conseil exécutif. Cette expression magique a l’influence malfaisante de tout corrompre, de tout dénaturer. La vertu la plus pure est obscurcie et devient suspecte, le dévouement le plus complet a l’air de l’intri¬ gue, l’attachement inviolable aux principes est regardé comme l’orgueil et l’abus du pouvoir. Tout, jusqu’à là langue, doit être régénéré dans le système républicain. Nous ne sommes plus les ministres des despotes, nous sommes les agents d’un gouvernement populaire. Faites donc disparaître jusqu’aux expressions qui re¬ tracent encore des débris monarchiques. Nous laisserons à ceux de vos comités, avec lesquels nous avons des relations, à vous attester notre dévouement individuel ; mais nous devons vous le déclarer, nous sommes collectivement de la nullité la plus complète. Arrachez -nous donc à une léthargie aussi pénible pour nous, que fu¬ neste aux intérêts de la République. Le gou¬ vernement dont vous venez de fixer les bases, va marquer le poste de tous les fonctionnaires. Qu’une nouvelle dénomination consacre nos de¬ voirs, et annonce l’origine des fonctions qui nous sont confiées. Une conscience pure suffit au simple citoyen. L’homme public a de plus be¬ soin, pour faire le bien, de l’estime, de la con¬ fiance, et même de la bienveillance de ses con¬ citoyens. U sera facile de trouver six agents qui aient plus de lumières, plus de talents; mais, nous osons le dire, il sera difficile d’en trouver de plus dévoués et de plus vrais républi¬ cains. Le conseil1 attend les ordres de là Conven¬ tion (1). Charlier. Je ne vois pas que le conseil exé¬ cutif' ait répondu a l’article du décret qui l’a mandé. J’ai bien entendu la lecture d’un arrêté très sage pris par le comité de Salut public, mais le conseil n’a pas rendu compte s’il a donné des ordres à ses agents pour faire arrêter les représentants du peuple. Il faut que le Prési¬ dent lui en fasse la question comme elle est pré¬ cisée par le décret. Merlin (de Thionville) . Je m’oppose à cette proposition. D’après la lecture qui vient d’être faite, il est constant que si le conseil exécutif n’a pas donné d’autre instruction que celle qu’il vient de lire, il est évident qu’il n’a pas outre¬ passé l’arrêté du comité de Salut public. Mais pour savoir s’il n’a pas donné d’autre ordre, il faut entendre l’agent qui l’aurait reçu; or, l’agent coupable sera traduit à la barre, et je crois bien que s’il a l’ordre dans sa poche, il le présentera plutôt que de porter sa tête à l’échafaud. Il ne faut donc pas interroger da¬ vantage les ministres, mais attendre l’agent qui a commis le délit. Duhem. Je regarde la proposition de Merlin comme absolument inadmissible et contraire au gouvernement. La Convention ne connaît ici que le conseil exécutif. Il est indigne d!elle d’inter¬ roger des milliers d’agents subalternes : elle ne doit pas suivre les infractions particulières faites aux lois, mais punir les chefs. Je demande, comme Charlier, que le Président fasse au con¬ seil exécutif les questions portées dans le dé¬ cret. Beforgues.Le conseil exécutif a partagé l’in¬ dignation de la Convention, quand il a vu la prévarication d’un de ses agents; il n’a pas donné d’autre ordre que celui qu’il vient de lire, et il se propose de livrer à la rigueur des lois les agents coupables. Gohier, ministre de la justice. J’ai l’honneur d’annoncer à la Convention que les coupables sont arrêtés. Méaulle. Je me souviens que, dans l’organi¬ sation du gouvernement, vous avez décrété que vous feriez tomber la responsabilité, non pas sur les ministres collectivement, mais sur ceux qui seront coupables. Je demande le renvoi des pièces au comité de sûreté générale pour exa¬ miner quels sont les véritables auteurs du délit. Ce renvoi est décrété. La Convention ordonne l’insertion au Bulle¬ tin du discours du Président et de la réponse du conseil exécutif (2). « La Convention nationale, sur la proposition d’un membre [Duhem (3)1 décrète que les (1) Deforgues était ministre des affaires étrangères et président du conseil exécutif; (2) Le Bulletin de la Convention [8e jour de là 3e déeade du 3e mois de l’àn II (mercredi 18 dé¬ cembre), reproduit, avec quelques légères variantes� le compte rendu. du Moniteur jusqu'aux observations de Charlier. (3) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales , carton C 282, dossier 795.