[Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [24 août 1190.] ces mots, les premiers moteurs ; et ils seraient suffisamment expliqués par celte phrase qui suit immédiatement : « Ce sont eux et eux seuls qui « ont affranchi l’esprit humain ». Cela n’empêche pas que là gloire d’une Révolution, préparce par Jes lumièr. s et les travaux des gens de lettres, n’appartienne à la nation, qui a eu le courage de briser ses fers le 14 juillet, et à l’Assemblée nationale, qui, le 23 juin, a eu le courage, non moins admirable, de résister sans armes aux ordres du despotisme qui l’entourait de baïonnettes. Il est plaisant que ce soit un M. de Chamois qui veuille faire respecter mes sentiments sur la Révolution, et sur ceux dont elle est l’ouvrage. « Ou a renvoyé celte pétition au comité de Constitution. Il nous semble que l’Assemblée nationale en aurait dû ordonner l’impression ; les gens de lettres qu’on a dédaigné de consulter sauraient au moins s’ils peuvent y adhérer ou protester contre elle en tout ou en partie. » Je ne suis pas si prompt que M. de Chamois à décider ce que l’Assemblée nationale aurait dû faire. Il me semble qu’elle ne doit ordonner l’impression, que quand les objets sont d’une importance majeure et générale. A l’égard de la publicité qce réclame M. de Chamois, a-t-il pu croire que les auteurs dramatiques voulussent s’en priver? A-t-il pu imaginer qu’ils missent quelque si-cret dans une affaire où ils ne sauraient avoir trop de juges? Quelle absurde supposition ! Tout est imprimé, et M. de Chamois lui-même peut juger. Achevons ce paragraphe : la fin est curieuse. « Et puis ! c’est chez M. de Mirabeau (V universel) qu'on a couvé cette pétition: cela a inquiété les intéressés, même ceux qui voudraient bien lui avoir des obligations. » On a couvé! Ne dirait-on pas qu’il s’agit d’une conspiration ? Remarquez qu’il s’agit de réclamations et de plaintes publiquement répétées depuis 20 ans par tous f s auteurs du Théâtre-Français, car ceux du Théâtre-Italien ne se plaignent point du traitement qu’on leur fait : ces derniers conservent toute leur vie la propriété de leurs ouvrages; il n’en est pas de même des premiers. Il faut apprendre à M. de Chamois que ceux-ci se rassemblent en comité chez M. Sédaine, qu’ils ont nommé leur président, qu’ils ont tous été invités chez lui en dernier lieu pour entendre la pétition, et que tous ceux qui s’y sont rendus l’ont signée. Nous ne sommes pas inquiets de ceux qui n’out pu s’y rendre; nous ne craignons assurément aucune protestation. Mais le nom de M. de Mirabeau vous parait donc, monsieur de Chamois, quelque cho.>e de bien terrible? Quoi! parce qu’il s’intéresse à la cause des gensde lettres, et particulièrement des auteurs dramatiques, cela inquiète les intéressé s ? Qui sont-ils ? nommez-les? Qui sont donc les intéressés qui vous ont fait le confident de leurs inquiétudes? Je vous somme, je vous défie de les nommer. Et puis, que signifie donc, monsieur de Chamois, cetteaflectation si malveillante, mais si puérile et. si vaine, de vouloir diviser les auteurs dramatiques dans ce qui est de leur intérêt commun? De quoi vous mêlez-vous? où prenez-vous qu’on a. dédaigné qui que ce soit? Serait-ce vous par hasard? Auriez -vous travaillé pour le théâtre, sans que personne en sût rien? vous aurait-on oublié sans le vouloir ? En ce cas, dites-le-nous; car, en conscience, il n’y a pas de notre faute, dans cet oubli : et nous reconnaîtrons i« Série. T. XV1I1. 257 votre droit d'adhérer ou de protester, quand vous nous aurez appris le titre de vos ouvrages. De la Harpe, auteur de l'adresse et de la pétition . M. Régnier, député de Nancy, annonce qu’il est chargé par la municipalité de Nancy, d’instruire l’Assemblée du rétablissement du calme dans cette ville. Les soldats ont montré la plus entière soumission aux décrets de l’Assemblée nationale. M. Vaqué, colonel des gardes nationales de Colonges, district deTonneins, se présente à la barre; il offre à l’Assemblée l’idée d’un ouvrage qui serait intitulé : la Géographie de la France régénérée, ou son état civil, politique, agricole, industriel et commercial, de tableau présenterait des vues rapides sur les événements qui ont amené et réalisé la Révolution; la liste des membres de l’Assemblée constituante, la Constitution française, l’organisation des législatures, celle de tous les pouvoirs, de toutes les administrations, les richesses nationales, la population ; l'étendue, les diverses productions du sol et de l’industrie, les consommations, les importations et exportations du commerce comparé dans sa balance avec celles des autres nations commerçantes; les biens nationaux, leur valeur capitale, leur produit annuel, le montant des aliénations, les dettes publiques exigibles en capitaux, en rentes viagères et perpétuelles; les impositions directes et indirectes, leur mode de répartition et de perception, la dépense nationale, tant pour la liste civile que pour les autres payements généraux; la force publique, la garde nationale, l’armée de ligne, la marine, etc.; les tribunaux, leur organisation, leur régime, leur compétence, enfin l’éducation nationale. En descendant l’échelle de la division de ce travail, chaque point du tableau de la France trouvera ses développements, de manière qu’en remontant ensuite dans un ordre rétrograde des municipalités aux cantons, aux districts et aux départements, on arrivera toujours par des résultats au résultat général; par ce système, sans aucuue répétition, chaque chose serait à sa place naturelle et dans l’étendue convenable à son importance. A la tin de chaque législature, on recueillerait les changements qui pourraient survenir; le mode d’exécution est prompt et facile; il suffirait d’ordonner aux directoires de département et de district et aux municipalités d’e ivoyer à l’auteur les états et renseignements qu’il demanderait, et qui formeraient en grande partie ses matériaux. M. Vaqué consacrerait pour offrande patriotique le quart du bénéfice, et le reste serait employé sous la direction du Corps législatif. Il déclaré qu’accoutumé à vivre de peu, après les frais de l’entreprise, surveillée par des commissaires, il ne réserverait pour lui que l’ho-neur d’avoir rempli, par un ouvrage utile, ses devoirs de citoyen. M. Brostaret. L’intention deM. Vaqué est excellente et je demande que son adresse soit renvoyée au comité de Constitution pour en faire le rapport. (Cette motion est adoptée.) M. Périsse-Duluc, député de Lyon , annonce à l’Assemblée que tout est dans le plus grand calme danscette ville; lesbarrières ont été rétablies sans aucune opposition; la perception des octrois a été remise en activité; la sagesse et la fermeté *7 288 (Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [24 août 1790. du corps municipal ont contribué à cet heureux résultat. L’Assemblée témoigne sa satisfaction de ces heureuses nouvelles, par des applaudissements. M. le Président quitte la séance pour se rendre chez le roi à la tète de la députation nommée dans la séance du matin. M. d’Andr�, ancien président, remplace M. Dupont (de Nemours), au fauteuil. L’ordre du jour est la suite de la discussion du projet concernant le dessèchement des marais. M, Henrtault-Iiamerville, rapporteur. Dans votre séance du 1er mai dernier, vous avez adopté l’article 1er. Je vais vous donner lecture de l’article 2. « Art. 2. Les municipalités enverront sous trois mois, à l’assemblée de leur district, un état raisonné des marais ou terres inondées de leur arrondissement, et l’assemblée de district le fera passer dans le mois, avec ses observations, à l’assemblée du département. Cet état contiendra les noms des propriétaires, la situation et l’étendue de ces terrains, les causes de leur submersion, le préjudice qu’ils portent au pays, les avantages u’ils pourraient tirer de leur culture, les moyens 'effectuer le dessèchement et l’aperçu des dépenses qu’il exigera. » (Cet article est mis aux voix et adopté dans les termes proposés par le comité.) M. Heurtault-I�amerville lit l’article 3 qui est adopté, sans modifications, ainsi qu’il suit (1) : « Art. 3. Les assemblées de département communiqueront ces états, et les mémoires qui leur auront été adressés à toutes personnes qui voudront en prendre connaissance. Les assemblées de département feront vérifier sur le lieu, de la manière qui leur conviendra, la nature des marais dont le dessèchement leur sera indiqué, et les observations des mémoires qui les concerneront: le procès-verbal en sera rendu public par la voie de l’impression, envoyé à toutes les municipalités du district, et le rapport de tous les mémoires ainsi que du procès-verbal de vérification, sera fait à la plus prochaine assemblée du département ». M. Ilenrtault-Lamerville donne lecture de l’article 4 en ces termes: « Lorsqu’une assemblée de département aura déterminé défaire exécuter le dessèchement d’un marais, le propriétaire de ce marais sera requis de déclarer, dans l’espace de six mois, s’il veut le faire dessécher lui-méme, le temps qu’il demande pour l’opérer et les secours dont il a besoin pour cette entreprise; l’assemblée de département pourra, suivant les circonstances, accorder un délai au propriétaire et, dans tous les cas, elle lui fera connaître si elle peut lui procurer les secours qu’il réclame. » M. Regnaud {de Saint-Jean-d’Angély). Je propose un amendement à cet article. G’est de réserver à l’Assemblée le soin de décider seule des marais nationaux, tant qu’ils ne seront pas vendus. (Get amendement est unanimement adopté,) (1) Voy. le projet de décret du comité d’agriculture, Archives parlementaires, tome XV, p. 362. M. Pervinquière, Le terme de marais peut recevoir une trop grande extension ; je propose donc pour les marais des communes de laisser aux municipalités des lieux, le soin de décider du meilleur emploi qui pourra leur être donné. (Get amendement est egalement adopté.) Par suite de ces votes l’article 4 est décrété ainsi qu’il suit : « Art. 4. Lorsqu’une assemblée de département aura déterminé, pour le bien général, de faire exécuter le dessèchement d’un marais des domaines nationaux, des communautés ou des particuliers, le propriétaire de ce marais sera requis de déclarer, dans l’espace de six mois, s’il veut le faire dessécher lui-même, le temps qu’il demande pour l’opérer et le secours dont il a besoin pour cette entreprise. L’Assemblée nationale, comme conservatrice des biens nationaux, tant qu’ils ne seront pas vendus, décidera seule de ce qui les concernera, et le conseil général des municipalités déclarera ce qu’il croira être le plus utile pour les marais des communautés. L’assemblée de département pourra, suivant les circonstances, ou l’étendue des marais, accorder un délai au propriétaire, et, dans tous les cas, elle lui fera connaître si elle peut lui procurer le secours qu’il demande. >•• M . Henrtault - Lamerville , rapporteur . Messieurs, votre comité s’inspirant des obverva-tions qui vous ont été soumises dans votre séance du 1er mai dernier, notamment par M. l’abbé Grégoire, m’a chargé de vous proposer deux articles additionnels qui prendraient place après l’article 4 et qui deviendraient les articles 5 et 6 du décret. En voici le texte : « Art. 5. Pour accélérer et faciliter ces entreprises, procurer de l’occupation aux ouvriers et faire jouir plus promptement la nation des avantages qui doivent résulter des dessèchements, le Trésor national fera un fonds de prêt de cinquante mille livres dans chaque département qui le réclamera; cette somme pourra être avancée en totalité ou en partie aux propriétaires ou aux entrepreneurs, sous l’hypothèque privilégiée des terrains desséchés, ou moyennant toute autre hypothèque ou caution suffisante, et à la charge du remboursement du capital et des intérêts dans cinq années. « Art. 6. L’Assemblée nationale, afin de ne rien négliger pour accélérer les importantes améliorations, accordera àtous propriétaires ou entrepreneurs qui dessécheront des marais, les primes suivantes, savoir: 24 livres par arpent desséché dans un an, à compter de la publication du présent décret; 12 livres par arpent desséché dans Tannée suivante, et 6 livres par arpent desséché dans la troisième année, autant cependant que l’assemblée du département croira le secours des primes nécessaire au dédommagement des frais de l’entrepreneur , en outre des antres conditions qui seront expliquées ci-après. » M. Bonnemant. Votre comité a le tort de vouloir rendre générales des mesures qui doivent être particulières à chaque province. Je crois qu’il faut laisser aux assemblées administratives le soin de pourvoir au dessèchement des marais parles meilleurs moyens possibles. Quant aux cinquante mille livres dont on veut charger l’Etat en faveur de chaque département, pour subvenir à cette entreprise, la somme serait trop considérable pour les uns qui n’ont que peu ou point de marais, et insuffisante pour d’autres qui possèdent