[Assemblée nationale.] ARCHIVES ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. LE PELLETIER. Séance du samedi 26 juin 1790, au matin (1). La séance est ouverte à neuf heures du matin. M. Delley d’Agier, secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier. M. de Crillon le jeune, (ci-devant comte). Je demande que dans le procès-verbal, aux mots ont contribué à la prise de la Bastille, on substitue ceux-ci : ont pris la Bastille. (L’Assemblée adopte le procès-verbal avec cette substitution.) M. de Cernon, membre du comité de Constitution, demande que le décret rendu le 24 juin sur un arrêté pris par l’assemblée administrative du départemeut d’Eure-et-Loir , soit généralisé , et qu’en conséquence les mots suivants : à la lecture d’un arrêté pris par l’administration du département d'Eure-et-Loir, soient supprimés. Cette suppression est décrétée. M. de Cernon propose ensuite un projet de décret qui est adopté, sans discussion, ainsi qu’il suit : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport du comité de Constitution, confirmant le vœu des électeurs du département de l’Yonne, donné en vertu du décret du 27 janvier dernier, a décrété et décrète que la ville de Saint-Florentin demeurera définitivement le chef-lieu de son district. » MXongpré, rapporteur du comité des finances, propose deux décrets concernant l’un la viile de Fécamp, l’autre la ville de Beauvais, qui sont adoptés en ces termes : PREMIER DÉCRET. « L’Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, a décrété et décrète que les ofticiers municipaux de la ville de Fécamp sont autorisés à répartir au marc la livre sur les contribuables qui payent au delà de trois livres d’imposition, une somme de 3,000 livres sur le rôle de cette année, à la charge d’en rendre compte par devant le directoire de district et de département. » SECOND DÉCRET. « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des finances, décrète que les droits d’aides, tels qu’ils ont été ci-devant perçus à Beauvais sur les bestiaux, les jours de franc-marché, continueront de l’être sur le même pied sur les bestiaux vendus et destinés pour ladite ville, faubourgs et autres lieux sujets en dépendant ; « Et qu’à l’égard des ventes faites à toutes personnes étrangères auxdits lieux sujets, elles seront exemptes de tous droits généralement quelcon-(1) Cette séance est incomplète au Moniteur. lre Série. T. XVI. liMENTAIRES. [26 juin 1790.] 4�5 ques, à moins que les acheteurs n’y fassent entrer les bestiaux provenant desdits achats. « L’Assemblée nationale recommande à la municipalité de maintenir le régime et la police établie de tout temps dans les francs-marchés dudit Beauvais, et d’avoir la plus grande surveillance pour le maintien des exercices de tous les autres droits d'aides et la suite de leurs recouvrements. » M. Merlin, le Douai. Votre comité de Constitution est instruit qu’il se trouve dans l’assemblée électorale du département du Nord, sur onze cents électeurs, soixante qui, attachés à l’ancien régime, se proposent de faire des protestations ; ce ne sont pointde pareils projets que nous redoutons, mais nous craignons la fureur du peuple contre ces gens qui substituent partout leur intérêt particulier au bien de la patrie. Les commissaires, chargés de veiller à ce que dans les assemblées il ne soit rieu introduit d’étranger à l’élection, craignent quel’esprit de chicane ne traverse leurs fonctions; ei conséquence, votre comité propose de déclarei que les commissaires nommés par le roi, pour la formation des assemblées administratives, seront chargés de tenir la main à la pleine et entière exécution des décrets qui les concernent, et nohmment à celui du 28 mai dernier. M. de Follevllle. L'Assemblée a recours à ces expédients, parce qu’efe enfreint elle-même ses décrets. Elle a reçu à h barre les électeurs de Melun, parce qu’ils lui faisaient des compliments, et elle ne veut pas éci>uter ceux qui disent la vérité. M. Merlin. Je demanda que M. Folleville soit rappelé à l’ordre, et j’obsà've que ce n’est point ici une disposition particulière que je propose, mais seulement une autorisation spéciale de faire exécuter vos précédents décrets. Le décret proposé par M. Merlin est adopté en ces termes : « L’Assemblée nationale déclare que les commissaires nommés par le roi pour la formation des assemblées administratives du département du Nord sont chargés de tenir la main, lors des assemblées électorales, à la pleine et entière exécution des différents décrets qui les concernent, notamment de celui du 28 mai dernier. » M. Oossin, rapporteur die comité de Constitu tion. Vous avez renvoyé à votre comité de Constitution une pétition de la ville du Havre tendant à faire décréter par l'Assemblée nationale que les électeurs du département de la Seine-Inférieure seraient consultés sur la fixation du chef-lieu d« l’administration du district de Montivilliers. Le, comité est d’avis qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur cette demande, parce que la division du royaume a été faite avec maturité, que les diverses prétentions ont été examinées impartialement, et que ce serait remettre en question vos décrets antérieurs. (Après quelques courtes observations présentées par divers membres, l’Assemblée décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur la pétition de la ville du Havre.) M. Vernier, au nom du comité des finances, rend compte des difficultés survenues dans le département de l'Ain sur la confection des rôles des impositions. Il propose un pîDjet de décret qui est adopté en ces termes : 30 466 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [26 juin 1790.] « L’Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des tinapces, décrète : « 1° Qu’à la diligence deM. le procureur général syndic du département de l’Ain , il sera incessamment demandé aux officiers des élections de Bourg et Belley, epsemble MM. les anciens administrateurs des provinces de Bresse, Bombes, Bugey et Gex, un état des rôles de supplément, faits sur les ci-devant privilégiés pour les six derniers mois de 1789, et un bordereau des sommes portées par lesdits rôles d’imposiûons, ensemble Une liste pour les communautés qui n’ont pas encore fait procéder à la confection desdits rôles de supplément; « 2° Que la liste des communautés dont les rôles de supplément ne sont pas encore faits sera adressée aiix districts dont dépendent lesdites communautés, pour, par lesdits district, faire procéder, le plus tôt qu’il sera possible, auxdits rôles de supplément qui leur seront enmite renvoyés par les syndics et peréquateurs, pjiur être vérifiés et rendus exécutoires par lesdits districts; « 3° Qu’il sera toujours fait trois originaux de ces rôles, dont l’un sera rerris aux collecteurs, l’autre restera aux archives dl district, et le troisième sera par lui envoyé au département; « 4° Que pour la confection de ces rôles, les municipalités et les collecteurs de 1789 se conformeront à la proclamation du roi du 24 novembre de la même année, rendue à ce sujet ; «5° Qu’il sera incessamment déterminé de quelle manière pp procédera à [assiette et département des impositions de la présente année, ordonnées par [es lettres patentes du 21 février, et ce, sans le concours des députés du bureau des finances et des officiers des élections de Bourg et Belley, et de tous autres qui avaient coutume d’y assister ; « 6*? Continueront néanmoins les juges d’élection de Bourg et Belley d’exercer leurs fonctions et d’en percevoir les émoluments jusqu’à ce qu’il y ait été autrement pourvu; « 7o En ce qui concerne les commissaires départis, les intendants, leurs subdélégués, leurs fonctions cesseront entièrement pour toutes les parties d’administration, du moment où les directoires de département et de district seront en activité, soit que lesdites fonctions aient été exprimées ou non dans l’article 2 du décret du mois de janvier 1790, concernant les fonctions des assemblées administratives; de telle sorte que, conformément à l’article 9, section III dudit décret, il n’y ait aucun intermédiaire entre les administrations de département et le pouvoir exécutif; « 8o Au surplus, l’Assemblée nationale déclare le présent décret commun à tous les départements et districts du royaume. » M. "Vernier, organe du comité des finances , donne ensuite lecture d’une délibération du dé-artement de la Haute-Saône, et propose un décret ui est adopté dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, approuve la délibération et les mesures prises par le conseil d’administration du département de la Haute-Saône, pour subvenir à la disette extrême des grains et au soulagement de la classe indigente ; ordonne, en conséquence, que ladite délibération, en date du 15 juin, sera exécutée dans tout son contenu. » M. Démennier, rapporteur du comité de Constitution. Dans l’ancien régime, les professeurs, maîtres et principaux des collèges ne payaient ni décimes, ni impositions; leurs appointements étaient si modiques, qu’ils se trouvaient dans l’impossibilité de le faire; comme ils ne peuvent actuellement représenter leurs quittances d’imposition directe, on leur fait des difficultés pour les admettre à exercer les droits de citoyens actifs. Votre comité de Constitution vous propose de décréter que, pour cette année seulement, la quittance de contribution patriotique doit tenir lieu d’imposition directe aux professeurs, maîtres et principaux des collèges, s’ils réunissent d’ailleurs les qualités requises. Ce décret est ainsi rendu : « L’Assemblée nationale déclare que, pour les élections de cette année seulement, 1$ quittance de la contribution patriotique doit tenir lieu d’imposition directe aux maîtres, professeurs et principaux des collèges de Paris, lesquels pourront exercer les droits de citoyens actifs, s’ils réunissent d’ailleurs les conditions requises. » M. Démeunier fait eusuite le rapport de V affaire de M. de Toulouse-Lautrec, renvoyée hier aux comités réunis de Constitution et des recherches : Vos comités des recherches et de Constitution ont examiné avec soin le parti que devait prendre l’Assemblée nationale sur la question qu’elle a traitée hier relativement à l’inviolabilité de ses membres. On a paru désirer que le traité renfermât trois dispositions : la première, qui rappelât l’indépendance et l’inviolabilité des députés ; la seconde, particulière à M. de Lautrec ; et enfin, l’approbation de la conduite de la municipalité de Toulouse. Nous avons remarqué que, dans ce moment, il était impossible de développer en détail les principes de l’inviolabilité; il tient à deux points importants, la loi sur les jurés en matière criminelle, et l’établissement d’une haute cour nationale, devant laquelle serait renvoyé le membre déclaré jugeable. Votre comité a pensé qu’il fallait décréter seulement que, jusqu’à cet établissement, aucun membre de la législature ne pourrait être déprété d’ajournement personnel ou de prise de corps, que lorsqu’après le vu de la plainte, l’Assemblée aurait décidé s’il y a lieu à l’accusation. Ces dispositions sont importantes, non seulement pour la dignité et l’indépendance de vos membres, mais encore pour qu’il ne survienne pas d’interruption dans les travaux. Voici le projet de décret qu’ont l’honneur de vous soumettre vos comités des recherches et de Constitution : « L’Assemblée nationale, se réservant de statuer en détail sur les moyens constitutionnels d’assurer la liberté et l’indépendance des membres de la législature, déclare que, jusqu’à l’établissement des jurés en matière criminelle, les députés à l’Assemblée nationale ne pourront être décrétés de prise de corps ou d’ajournement personnel que lorsque, sur le vu de l’information et des pièces de conviction, l’Assemblée aura décidé qu’il y a lieu à accusation : en conséquence, l’Assemblée déclare non avenu le décret prononce le 17 contre M. de Lautrec, un de ses membres; lui enjoint de venir à l’Assemblée rendre compte de sa conduite ; et après l’avoir entendu, après avoir examiné l’instruction, elle décidera s’il y a lieu à accusation; et, en cas que cela soit ainsi décidé, elle désignera le tribunal par devant lequel l’affaire doit être portée. Son président est chargé de faire connaître à la municipalité de Toulouse que son zèle patriotique a obtenu l’approbation de l’Assemblée. » M. d’André. Je ne dirai rien sur les principes