228 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE les diverses parties de la république. Les patriotes sont-ils persécutés dans quelque commune ? un prêtre est l’instigateur de cette persécution. La justice nationale a-t-elle brisé les fers d’un bon républicain, victime de la calomnie ? les prêtres trouvent bientôt le moyen de le replonger en prison. Une ville est-elle assiégée ? si des scélérats conspirent pour la livrer aux ennemis de la république, des prêtres sont l’âme de la conjuration. Un ex-moine fut le complice de l’assassin de Collot-d’Herbois; une ex-religieuse fut la sœur de la nouvelle Corday qui voulut unir par le meurtre Robespierre à Marat. Nul complot ne s’est tramé contre la liberté, que les prêtres n’en ayent été ou les auteurs ou les complices. Par quelle fatalité, au moment où nous avons le plus besoin de l’activité du gouvernement révolutionnaire, avons-nous la sécurité d’admettre les prêtres au sein des autorités constituées ? Ils en paralysent la marche; ils y méditent la ruine de la liberté. Nous avons chassé les nobles du sein des autorités constituées; les prêtres sont leurs aînés en crimes, ils doivent avoir le même sort. Les champs de la Vendée portent écrite en caractère de sang et de feu l’histoire des forfaits sacerdotaux. Elles cultiveroient encore paisiblement leurs moissons, ces malheureuses victimes du fanatisme et de l’imposture, si les prêtres ne leur eussent fait perdre leur qualité d’hommes pour les changer en bêtes féroces. Et, pendant ces scènes d’horreur, ils offroient tranquillement d’odieux sacrifices à la divinité ! ils buvoient à longs traits le sang de leurs frères ! A Chollet, la femme d’un patriote tombe entre leurs mains. Elle étoit enceinte. Les monstres ! ils ordonnent de la clouer à sa porte, par les quatre membres, et s’apprêtent à l’égorger. Les brigands plus humains que leurs prêtres, s’y refusèrent, et c’est à ce moment d’humanité que cette républicaine dût son salut. Par-tout l’opinion publique a déjà fait justice des prêtres. Les sociétés populaires les ont rejetés de leur sein. Us se sont appréciés eux-mêmes, et leur indécente apostasie est une nouvelle preuve de leur perversité. Ils avoient juré d’être toute leur vie des imposteurs, la rétractation de leur bouche n’a point changé leur cœur; et si leurs vœux secrets pouvoient être exaucés, vous les verriez aux pieds du duc d’Yorck abjurer la république. Voici le projet de décret que je vous propose : Art. I. Tout ci-devant prêtre est exclus (sic) des assemblées de communes et des fonctions publiques. II. Tous ceux qui en occupent actuellement sont tenus de les quitter dans les vingt-quatre heures après la publication du présent décret (1) . Ces propositions sont vivement applaudies et décrétées. Carrié : Voulez-vous une nouvelle preuve de la férocité des prêtres ? A Machecoul, 800 patriotes furent égorgés, et voici quelle fut la sépulture qu’on leur donna : on les enterra jusqu’à la moitié du corps, en sorte que leur tête et leurs bras restèrent exposés aux injures (1) M.U., XLI, 151; Mess. Soir, n° 677; J. Sablier, n° 1404; C. Eg., n° 678; J. Paris, n° 544; Audit. nat., n° 642. de l’air et à la voracité des animaux carnassiers. Le lendemain, on trouva plusieurs de ces cadavres qui palpitoient encore : eh bien, ce furent les prêtres qui ordonnèrent cette infâmie ! Ils disoient aux brigands : « Frappez les patriotes au cœur, car c’est par-là qu’ils ont péché ». Ils couvroient des balles de liège avec de la poudre, et disoient qu’ils étoient invulnérables. Cet âge n’est pas le seul où les prêtres ont causé les malheurs du monde; et la France, en particulier, se rappelé encore avec horreur les dragonades des Cévennes, la St. Barthélemy et les massacres de Cabrières. J’appuie le projet de décret, et je demande qu’il soit de plus imprimé avec le rapport, et envoyé à toutes les autorités constituées, aux communes, aux sociétés populaires et aux armées, afin que la lecture seule excite une indignation générale. Plusieurs membres ont parlé successivement et fait diverses propositions (1) . Charlier observe que le décret que la convention vient de rendre doit être examiné dans ses conséquences; qu’il importe de surveiller les prêtres d’une maniéré particulière; il développe les dangers qu’il y auroit de les laisser dans des lieux où leur qualité peut bien être ignorée : il demande le renvoi du décret au comité de salut public qui présentera les moyens d’exécution (2) . Bréard ajoute que le décret est incomplet, en ce qu’il n’atteint pas les prêtres qui se seroient glissés dans les administrations subalternes, et y auroient obtenu des places de simples commis, où cependant ils pourroient nuire essentiellement à la chose publique : en conséquence la convention, après quelques débats, maintient le principe décrété sur la motion de Thureau, mais renvoie au comité de salut public pour les mesures additionnelles et d’exécution (3) . Sur la proposition d’un membre [André Dumont] l’assemblée substitue le mot ecclésiastique à celui de prêtre, et ordonne l’impression et l’envoi aux armées et aux sociétés populaires du discours de Thureau. Barrère termine par rappeller le décret rendu contre les prêtres et qui renvoie au comité de salut public pour les moyens d’exécution. Il observe que les mesures d’exécution ne peuvent être que vicieuses, si le principe l’est lui-même. H annonce que le comité s’occupe d’un rapport sur ce même objet. D’après ces observations, Charlier et plusieurs autres membres demandent le rapport du décret et le renvoi au comité de la proposition de Thureau. Décrété (4) . 54 Sur la pétition des gendarmes de la 35e division, convertie en motion par un membre, « La Convention nationale décrète que la pétition sera renvoyée à la commission du (1) J. Sablier, n° 1404. (2) Ann. R.F., n° 209; J. Fr., n° 641. (3) Rép., n° 190; J. Paris, n° 544; Ann. patr., n° DXXXXIII; J. Lois, n°637; Audit, nat., n° 642. (4) Ann. R.F., n° 209; J. Paris, n° 544; J. Fr., n° 641; Ann. patr., n° DXXXXIII; J. Lois, n° 638; J. Sablier, n° 1404. 228 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE les diverses parties de la république. Les patriotes sont-ils persécutés dans quelque commune ? un prêtre est l’instigateur de cette persécution. La justice nationale a-t-elle brisé les fers d’un bon républicain, victime de la calomnie ? les prêtres trouvent bientôt le moyen de le replonger en prison. Une ville est-elle assiégée ? si des scélérats conspirent pour la livrer aux ennemis de la république, des prêtres sont l’âme de la conjuration. Un ex-moine fut le complice de l’assassin de Collot-d’Herbois; une ex-religieuse fut la sœur de la nouvelle Corday qui voulut unir par le meurtre Robespierre à Marat. Nul complot ne s’est tramé contre la liberté, que les prêtres n’en ayent été ou les auteurs ou les complices. Par quelle fatalité, au moment où nous avons le plus besoin de l’activité du gouvernement révolutionnaire, avons-nous la sécurité d’admettre les prêtres au sein des autorités constituées ? Ils en paralysent la marche; ils y méditent la ruine de la liberté. Nous avons chassé les nobles du sein des autorités constituées; les prêtres sont leurs aînés en crimes, ils doivent avoir le même sort. Les champs de la Vendée portent écrite en caractère de sang et de feu l’histoire des forfaits sacerdotaux. Elles cultiveroient encore paisiblement leurs moissons, ces malheureuses victimes du fanatisme et de l’imposture, si les prêtres ne leur eussent fait perdre leur qualité d’hommes pour les changer en bêtes féroces. Et, pendant ces scènes d’horreur, ils offroient tranquillement d’odieux sacrifices à la divinité ! ils buvoient à longs traits le sang de leurs frères ! A Chollet, la femme d’un patriote tombe entre leurs mains. Elle étoit enceinte. Les monstres ! ils ordonnent de la clouer à sa porte, par les quatre membres, et s’apprêtent à l’égorger. Les brigands plus humains que leurs prêtres, s’y refusèrent, et c’est à ce moment d’humanité que cette républicaine dût son salut. Par-tout l’opinion publique a déjà fait justice des prêtres. Les sociétés populaires les ont rejetés de leur sein. Us se sont appréciés eux-mêmes, et leur indécente apostasie est une nouvelle preuve de leur perversité. Ils avoient juré d’être toute leur vie des imposteurs, la rétractation de leur bouche n’a point changé leur cœur; et si leurs vœux secrets pouvoient être exaucés, vous les verriez aux pieds du duc d’Yorck abjurer la république. Voici le projet de décret que je vous propose : Art. I. Tout ci-devant prêtre est exclus (sic) des assemblées de communes et des fonctions publiques. II. Tous ceux qui en occupent actuellement sont tenus de les quitter dans les vingt-quatre heures après la publication du présent décret (1) . Ces propositions sont vivement applaudies et décrétées. Carrié : Voulez-vous une nouvelle preuve de la férocité des prêtres ? A Machecoul, 800 patriotes furent égorgés, et voici quelle fut la sépulture qu’on leur donna : on les enterra jusqu’à la moitié du corps, en sorte que leur tête et leurs bras restèrent exposés aux injures (1) M.U., XLI, 151; Mess. Soir, n° 677; J. Sablier, n° 1404; C. Eg., n° 678; J. Paris, n° 544; Audit. nat., n° 642. de l’air et à la voracité des animaux carnassiers. Le lendemain, on trouva plusieurs de ces cadavres qui palpitoient encore : eh bien, ce furent les prêtres qui ordonnèrent cette infâmie ! Ils disoient aux brigands : « Frappez les patriotes au cœur, car c’est par-là qu’ils ont péché ». Ils couvroient des balles de liège avec de la poudre, et disoient qu’ils étoient invulnérables. Cet âge n’est pas le seul où les prêtres ont causé les malheurs du monde; et la France, en particulier, se rappelé encore avec horreur les dragonades des Cévennes, la St. Barthélemy et les massacres de Cabrières. J’appuie le projet de décret, et je demande qu’il soit de plus imprimé avec le rapport, et envoyé à toutes les autorités constituées, aux communes, aux sociétés populaires et aux armées, afin que la lecture seule excite une indignation générale. Plusieurs membres ont parlé successivement et fait diverses propositions (1) . Charlier observe que le décret que la convention vient de rendre doit être examiné dans ses conséquences; qu’il importe de surveiller les prêtres d’une maniéré particulière; il développe les dangers qu’il y auroit de les laisser dans des lieux où leur qualité peut bien être ignorée : il demande le renvoi du décret au comité de salut public qui présentera les moyens d’exécution (2) . Bréard ajoute que le décret est incomplet, en ce qu’il n’atteint pas les prêtres qui se seroient glissés dans les administrations subalternes, et y auroient obtenu des places de simples commis, où cependant ils pourroient nuire essentiellement à la chose publique : en conséquence la convention, après quelques débats, maintient le principe décrété sur la motion de Thureau, mais renvoie au comité de salut public pour les mesures additionnelles et d’exécution (3) . Sur la proposition d’un membre [André Dumont] l’assemblée substitue le mot ecclésiastique à celui de prêtre, et ordonne l’impression et l’envoi aux armées et aux sociétés populaires du discours de Thureau. Barrère termine par rappeller le décret rendu contre les prêtres et qui renvoie au comité de salut public pour les moyens d’exécution. Il observe que les mesures d’exécution ne peuvent être que vicieuses, si le principe l’est lui-même. H annonce que le comité s’occupe d’un rapport sur ce même objet. D’après ces observations, Charlier et plusieurs autres membres demandent le rapport du décret et le renvoi au comité de la proposition de Thureau. Décrété (4) . 54 Sur la pétition des gendarmes de la 35e division, convertie en motion par un membre, « La Convention nationale décrète que la pétition sera renvoyée à la commission du (1) J. Sablier, n° 1404. (2) Ann. R.F., n° 209; J. Fr., n° 641. (3) Rép., n° 190; J. Paris, n° 544; Ann. patr., n° DXXXXIII; J. Lois, n°637; Audit, nat., n° 642. (4) Ann. R.F., n° 209; J. Paris, n° 544; J. Fr., n° 641; Ann. patr., n° DXXXXIII; J. Lois, n° 638; J. Sablier, n° 1404. SÉANCE DU 9 MESSIDOR AN H (27 JUIN 1794) N° 55 229 mouvement des armées, pour qu’elle ait à pourvoir sans délai aux besoins de ce corps » (1). 55 Un membre [Barère] annonce, au nom du comité de salut public, la prise importante de Charleroy par les troupes de la République; caissons, canons, munitions de tout genre sont tombés au pouvoir des Français : 6,000 hommes, au commencement du siège, avoient déjà mordu la poussière; la garnison, au nombre de 3,000, a été faite prisonnière; les républicains n’ont pas voulu entendre parler de capitulation, les esclaves se sont rendus à discrétion, ils s’en sont rapportés à la générosité française (2) . Barère entre dans l’Assemblée; les applaudissements qui l’accompagnent à la tribune sont le présage des victoires nouvelles qu’il vient annoncer. Plusieurs drapeaux paraissent à la barre, [portés par des militaires de l’armée du Nord]. Les applaudissements recommencent. Barère : Vous voyez à la barre les signes d’une nouvelle victoire. Les drapeaux de la garnison autrichienne, suspendus à la voûte du péristyle, vont marquer la prise de Charleroi par les troupes de la République. (Les plus vifs applaudissements éclatent dans toutes les parties de la salle). 2 fois le siège de cette place a été commencé depuis le 28 prairial; d’abord un avantage remarquable avait été remporté sur les esclaves impériaux; 6.000 d’entre eux avaient mordu la poussière, et des canons avaient été pris; la 2onde fois a été terrible : ce sont les canonniers qui ont agi, et la foudre républicaine a converti en cendres la ville autrichienne. (Les applaudissements recommencent). Une garnison de 3.000 hommes est prisonnière, et les républicains n’ont pas même voulu s’abaisser jusqu’à la capitulation. Entendez comment des esclaves capitulent; en tombant aux genoux des républicains, ils font l’éloge de leur générosité. [ Charleroi , 25 juin 1794. Au général commandant de VA. française de la Sambre ]. « Nous nous en rapporterons à la générosité française, espérant que la garnison, qui doit avoir mérité l’estime des armées françaises, aura un sort tel que l’honneur le demande. Reygnac, général major». (On applaudit). Barère : Cet éloge ne peut être suspect. Comme il dément les calomnies vomies par les journaux de Bruxelles et de Londres ! Il y a 8 jours, je rapportais à la Convention la capitulation d’y près; aujourd’hui je viens vous dire qu’avec de l’artillerie formidable et des hommes libres la diplomatie guerrière s’est vigoureusement simplifiée; les Autrichiens ' se sont rendus à discrétion. (1) P.V., XL, 237. Minute de la main de Turreau. Décret n° 9696. (2) P.V., XL, 237. Le soir de la prise de Charleroi, 1.500 hommes de cavalerie autrichienne sont venus attaquer la division de gauche; la cavalerie républicaine et l’artillerie légère les ont tournés, ils leur ont tué 150 hommes et pris environ 200 chevaux. (On applaudit). Voilà une addition aux faits que je vais lire, et dont la nouvelle officielle a été portée au général Jourdan, au moment du départ du citoyen Lebas, adjudant général, et du citoyen Charbonnier, adjoint aux adjudants généraux. Ainsi l’armée du Nord, fidèle dans toutes ses parties à la destinée glorieuse que la république lui a imposée, repousse les hordes étrangères avec un égal succès d’un bout de la frontière à l’autre; de l’Océan à la haute Sambre les soldats se renvoient la victoire : hier c’était Ypres, aujourd’hui c’est Charleroi; c’est maintenant le tour de la partie gauche de l’armée, au sommet de la West-Flandre. Représentants du peuple, voilà donc les fruits de vos efforts, voilà les résultats précieux de votre union, voilà les garants de la belle république que vous avez fondée sur les cadavres des Capets et des fédéralistes. Cependant, au milieu des cris de la victoire, des bruits sourds se font entendre, des calomnies obscures circulent, des poisons subtils sont infusés dans les journaux, des complots funestes s’ourdissent, des mécontentements factices se préparent, et le gouvernement est sans cesse vexé, entravé dans ses opérations, tourmenté dans ses mouvements, calomnié dans ses pensées et menacé dans ceux qui le composent. Aux convulsions de l’athéïsme impuissant ou puni ont succédé les astuces du fanatisme, qui se réveille et qu’on cherche à aigrir plus fortement; pour le rendre plus actif on cherche à rouvrir des temples, en subtilisant sur les expressions d’un décret. Ce ne sont pas ici des terreurs mensongères; il faut le dire, la victoire n’est pas même une caution suffisante pour le gouvernement : dans ce moment même, au milieu des succès de cette campagne, les contre-révolutionnaires, frappés par vos décrets et mis hors la loi, étaient en correspondance avec les gouvernements anglais et espagnol et avec toute [s] les factions que vous avez punies; ce sont les relations de Bordeaux; jugez de ce que doivent faire les contre-révolutionnaires secrets, ceux qui espèrent couvrir leurs complots de quelque apparence civique ou d’un vernis de patriotisme. Que serait-ce donc si la fortune des combats ne secondait pas le courage des républicains ? Que serait-ce si des intrigants et les ennemis implacables de tout ce qui est bien public pouvaient enter leurs crimes sur une défaite, et placer leur conjuration sur des revers militaires ? Héritiers sacrilèges des Brissot, des Hébert, des Chaumette et des Danton, c’est à vous qu’il faut attribuer cette tourmente de l’opinion publique et les menaces éternelles d’assassinat et de subversion dans le gouvernement. Mais c’est en vain que les ombres criminelles de ces contre-révolutionnaires semblent investir le temple des lois. Les représentants du peuple, éclairés sur les intérêts du peuple et sur leur propre sûreté, sauront tirer parti de la victoire au dehors pour anéantir au dedans toutes les coalitions impies ou les complots parricides de SÉANCE DU 9 MESSIDOR AN H (27 JUIN 1794) N° 55 229 mouvement des armées, pour qu’elle ait à pourvoir sans délai aux besoins de ce corps » (1). 55 Un membre [Barère] annonce, au nom du comité de salut public, la prise importante de Charleroy par les troupes de la République; caissons, canons, munitions de tout genre sont tombés au pouvoir des Français : 6,000 hommes, au commencement du siège, avoient déjà mordu la poussière; la garnison, au nombre de 3,000, a été faite prisonnière; les républicains n’ont pas voulu entendre parler de capitulation, les esclaves se sont rendus à discrétion, ils s’en sont rapportés à la générosité française (2) . Barère entre dans l’Assemblée; les applaudissements qui l’accompagnent à la tribune sont le présage des victoires nouvelles qu’il vient annoncer. Plusieurs drapeaux paraissent à la barre, [portés par des militaires de l’armée du Nord]. Les applaudissements recommencent. Barère : Vous voyez à la barre les signes d’une nouvelle victoire. Les drapeaux de la garnison autrichienne, suspendus à la voûte du péristyle, vont marquer la prise de Charleroi par les troupes de la République. (Les plus vifs applaudissements éclatent dans toutes les parties de la salle). 2 fois le siège de cette place a été commencé depuis le 28 prairial; d’abord un avantage remarquable avait été remporté sur les esclaves impériaux; 6.000 d’entre eux avaient mordu la poussière, et des canons avaient été pris; la 2onde fois a été terrible : ce sont les canonniers qui ont agi, et la foudre républicaine a converti en cendres la ville autrichienne. (Les applaudissements recommencent). Une garnison de 3.000 hommes est prisonnière, et les républicains n’ont pas même voulu s’abaisser jusqu’à la capitulation. Entendez comment des esclaves capitulent; en tombant aux genoux des républicains, ils font l’éloge de leur générosité. [ Charleroi , 25 juin 1794. Au général commandant de VA. française de la Sambre ]. « Nous nous en rapporterons à la générosité française, espérant que la garnison, qui doit avoir mérité l’estime des armées françaises, aura un sort tel que l’honneur le demande. Reygnac, général major». (On applaudit). Barère : Cet éloge ne peut être suspect. Comme il dément les calomnies vomies par les journaux de Bruxelles et de Londres ! Il y a 8 jours, je rapportais à la Convention la capitulation d’y près; aujourd’hui je viens vous dire qu’avec de l’artillerie formidable et des hommes libres la diplomatie guerrière s’est vigoureusement simplifiée; les Autrichiens ' se sont rendus à discrétion. (1) P.V., XL, 237. Minute de la main de Turreau. Décret n° 9696. (2) P.V., XL, 237. Le soir de la prise de Charleroi, 1.500 hommes de cavalerie autrichienne sont venus attaquer la division de gauche; la cavalerie républicaine et l’artillerie légère les ont tournés, ils leur ont tué 150 hommes et pris environ 200 chevaux. (On applaudit). Voilà une addition aux faits que je vais lire, et dont la nouvelle officielle a été portée au général Jourdan, au moment du départ du citoyen Lebas, adjudant général, et du citoyen Charbonnier, adjoint aux adjudants généraux. Ainsi l’armée du Nord, fidèle dans toutes ses parties à la destinée glorieuse que la république lui a imposée, repousse les hordes étrangères avec un égal succès d’un bout de la frontière à l’autre; de l’Océan à la haute Sambre les soldats se renvoient la victoire : hier c’était Ypres, aujourd’hui c’est Charleroi; c’est maintenant le tour de la partie gauche de l’armée, au sommet de la West-Flandre. Représentants du peuple, voilà donc les fruits de vos efforts, voilà les résultats précieux de votre union, voilà les garants de la belle république que vous avez fondée sur les cadavres des Capets et des fédéralistes. Cependant, au milieu des cris de la victoire, des bruits sourds se font entendre, des calomnies obscures circulent, des poisons subtils sont infusés dans les journaux, des complots funestes s’ourdissent, des mécontentements factices se préparent, et le gouvernement est sans cesse vexé, entravé dans ses opérations, tourmenté dans ses mouvements, calomnié dans ses pensées et menacé dans ceux qui le composent. Aux convulsions de l’athéïsme impuissant ou puni ont succédé les astuces du fanatisme, qui se réveille et qu’on cherche à aigrir plus fortement; pour le rendre plus actif on cherche à rouvrir des temples, en subtilisant sur les expressions d’un décret. Ce ne sont pas ici des terreurs mensongères; il faut le dire, la victoire n’est pas même une caution suffisante pour le gouvernement : dans ce moment même, au milieu des succès de cette campagne, les contre-révolutionnaires, frappés par vos décrets et mis hors la loi, étaient en correspondance avec les gouvernements anglais et espagnol et avec toute [s] les factions que vous avez punies; ce sont les relations de Bordeaux; jugez de ce que doivent faire les contre-révolutionnaires secrets, ceux qui espèrent couvrir leurs complots de quelque apparence civique ou d’un vernis de patriotisme. Que serait-ce donc si la fortune des combats ne secondait pas le courage des républicains ? Que serait-ce si des intrigants et les ennemis implacables de tout ce qui est bien public pouvaient enter leurs crimes sur une défaite, et placer leur conjuration sur des revers militaires ? Héritiers sacrilèges des Brissot, des Hébert, des Chaumette et des Danton, c’est à vous qu’il faut attribuer cette tourmente de l’opinion publique et les menaces éternelles d’assassinat et de subversion dans le gouvernement. Mais c’est en vain que les ombres criminelles de ces contre-révolutionnaires semblent investir le temple des lois. Les représentants du peuple, éclairés sur les intérêts du peuple et sur leur propre sûreté, sauront tirer parti de la victoire au dehors pour anéantir au dedans toutes les coalitions impies ou les complots parricides de