[Assemblée nationale.] ARCHIVÉS PARLEMENTAIRES. [4 novembre 1789.] 675 M. Dupont de Nemours. Une nation n’a pas le droit d'empêcher un propriétaire de transporter son argenterie qui est un mobilier qui suit Ja personne. M. Glëzen. Dans les circonstances actuelles, il faut distinguer les ouvrages envoyés par les artistes et ceux emportés par les particuliers. Le comité des recherches a reçu des dénonciations de plusieurs envois d'or et d’argent chez l’étranger, et des particuliers réfugiés ne peuvent pas ainsi nuire à leur patrie. M. Garat aîné, se fonde sur la déclaration des droits pour autoriser le transport à l’étranger de l’argenterie qui a été arrêtée, M. Emmery, se fondant sur les circonstances particulières, différentes des intérêts commerciaux et de la déclaration des droits de l’homme, demande le renvoi de Cette affaire au comité des recherches. Cette motion est adoptée. M. le Président lève la séance après avoir indiqué celle de demain pour neuf heures et demie du matin. ANNEXE à la séance de V Assemblée nationale du 4 novembre 1789. MOTION DE M. lé marquis de Châteaüneuf Randon, député du Gévaudan , SUR LA DIVISION DU ROYAUME (1). Messieurs, votre opinion, sans doute déjà fixée sur la grande et importante question de diviser le royaume et les provinces en plus ou moins de départements, me dispensera de passer trop d’instants à discuter les différents moyens que les honorables préopinants ont suffisamment développés, pour vous démontrer la nécessité de Je diviser sur des bases de localité, de population et des proportions plus justes et plus relatives aux changements heureux que viennent d’opérer votre énergie et votre courageux patriotisme : mais je crois que pour y parvenir, il est des préalables nécessaires sans lesquels votre détermination à opérer et jeter les fondements de cette juste répartition de l’empire français, deviendrait infructueuse, s’ils n’étaient pas remplis. Cinq plans vous sont donc proposés pour cette juste et nécessaire répartition ; savoir: 1° Celui de votre comité, en 80 ou 81 départements, composés chacun de 720 communes, et de 6,480 cantons. 2° Celui de M. Aubry du Bochet, en 200 et tant de départements. 3° Un autre encore de lui, en 110 départements. 4° Celui de M. le comte de Mirabeau, en 120 départements. 5° Celui de M. Pison du Galand, en 30 départements. Un des plus ingénieux sans doute, est celui de votre comité de constitution, qui a cherché à en établir les principales bases sur l’égalité de (1) Cette motion n’a pas été insérée au Moniteur; elle ii’a pas été prononcée à la tribune, mais elle a été imprimée et distribuée. l’influence qui est essentielle à chaque individu: mais je suis lâché qu’il se soit entièrement enfermé dans la seule et irrévocable opinion, soit des 80 départements, soit en établissant un intermédiaire entre les assemblées primaires de cantons et celles des départements; parce que je trouve : 1° Que par cet intermédiaire, les véritables représentés seront trop loin de leurs représentants et que le peuple n’aura point un intérêt assez direct à l’administration publique; 2° Que par le nombre de ces 80 divisions, le département fera encore une trop grande masse pour pouvoir obtenir l’avantage désiré, et favoriser quantité de villes ou de pays déjà administratifs par eux-mêmes, comme’ le Gévaudan, le Vivarais et le Velay, pays immenses par le séjour de leurs montagnes, et qui tant par cette première raison, que par leurs localités particulières, ont lieu de prétendre à faire chacun un département, tandis que, par le nombre de 80 proposé par le comité, ces trois pays que leurs montagnes rendent immenses, surtout le Gévaudan, qui comprend la plus grande partie des Céven-nes, n’en font que deux, et que ce dernier encore y parait entièrement morcelé. Celui de M. Pison du Galand, en 30 départements seulement, a le même inconvénient de laisser les masses trop grandes. Celui de M. Aubry du Bochet, en 200 et tant (quoique bien plus subdivisé), ne me paraît cependant pas toucher encore au terme moyen nécessaire, tant sous les rapports politiques et économiques, qu’ecclésiastiques et judiciaires, parce que les principes de l’Assemblée étant de diminuer le nombre d’évêchés maintenant existants, et devant nécessairement en établir un dans chaque département, cette diminution ne serait pas exécutée au point où il me paraît qu’elle doit l’être : d’un autre côté, comme je pense aussi qu’il faut une cour de justice supérieure dans chaque département, elles seraient aussi trop multipliées par ce nombre de 200 et tant. Ainsi ce plan ne paraît pas devoir s’adapter aux principes de l’Assemblée ; mais son dernier plan, réduit à 110 départements, aurait plus d’avantage, en ce qu’il se rapproche davantage de celui de M. Mirabeau, qui est celui que, par la nature de mes principes, j’adopterai de préférence, parce que les 120 départements me paraissent beaucoup plus analogues aux principes généraux, et aux avantages que beaucoup de villes et de pays ont lieu d’attendre par leur position locale, que d’ailleurs l’intérêt du peuple est plus direct sans intermédiaire entre les assemblées primaires et lës assembléesde départements; que, de plus, dans chacun desdits départements, il pourra s’établir sans inconvénient un seul diocèse et une cour supérieure. Cependant, je ne vois pas encore l'Assemblée assez pénétrée de la force de tous les différents raisonnements que ces honorables auteurs de projets ont éiablis, pour espérer de lui voir prendre une détermination assez prompte, et Cependant nécessaire pour arriver au travail des assemblées provinciales et des municipalités qui sont attendues avec une si vive impatience dans “tout le royaume, parce qu’elle trouvera toujours un obstacle insurmontable à cette division, tant qu’elle ne se sera pas expliquée Sur les dettes des provinces, dont votre comité vous a fait pressentir la possibilité de lès décréter communes entre tout le royaume. Au seul mot de division dü royaume, et dés [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [4 novembre 1789.] provinces, une infinité de personnes, conduites par cette difficulté insurmontable de leurs dettes et de leur difficulté à se répartir, oubliant les principes déjà établis dans celte Assemblée, et ne pouvant par conséquent pas se soumettre aveuglément aux raisonnements irréplicables de votre comité, pour la nécessité de cette division, se sont récriées, et l’ont trouvée singulièrement chimérique et impraticable, sous l’aspect des rapports économiques, pécuniaires et commerçants qui lient la masse d’une province entre elle et assujettit toutes ses parties, soit à des avantages communs, soit à des dettes solidaires. En effet, Messieurs, sous un tel aspect, cette division qui, dans tous ses rapports, est indispensable, devient aussi impossible si vous ne décrétez pas d'abord que toutes les dettes de chaque province, faites tant pour le compte du Roi que pour la confection des grandes routes et l’utilité générale de toutes, feront masse commune avec les dettes et les charges de l’Etat, pour être réparties également dans le royaume. En vain, Messieurs, vous récrierez-vous contre cette motion expresse que je fais, et croirez-vous injuste de voir participer quelques-unes de nos provinces à des dettes qu’elles n’auraient pas ordonnées; mais plus ou moins cependant toutes les vôtres en ont fait à proportion de leur crédit, soit pour le compte du gouvernement, soit pour leurs grandes routes, utiles à la circulation et au commerce du royaume, ou ne sont pas venues directement au secours de l’Etat dans les circonstances épineuses de l’ancienne administration. Ainsi, ayant déjà décrété et mis les dettes de l’Etat sous la sauvegarde de la nation ; ayant établi la fraternité entre toutes les provinces," par l’extinction de leurs privilèges ; voulant détruire la grande masse de leurs monstrueux corps, qui est réellement nuisible à chacune d’elle, mais dont elles seraient cependant obligées de supporter encore les funestes inconvénients, si ma motion n’était pas agréée , ou autrement la division ne produirait pas l’effet désiré ; ne conviendrez-vous pas qu’il est donc nécessaire de commencer par confondre dans la grande masse du royaume les intérêts pécuniaires de chaque province en particulier? Autrement vous auriez toujours le vice des grands corps administratifs, que l’intérêt pécuniaire, indivisible, obligera de laisser subsister. Sans ce préalable, Messieurs, qui n’a pas d’inconvénient, depuis que vous avez décrété : 1° Que les créanciers de l’Etat seraient sous la sauvegarde de la nation ; 2° Que les biens du clergé, sans distinguer leur localité, seraient à la disposition de la nation entière ; 3° Que l’aliénation des domaines, ainsi sans doute que vous le jugerez à propos, sera décrétée ; gardons-nous de nous abuser; nous ne parviendrons pas à détruire ces grands corps de provinces, si nuisibles au bonheur de la France; et leurs représentants, obligés d’être nécessairement contraires à leur division, par la difficulté de prévoir l’égale répartition entre elles, de la niasse de leurs dettes et de leurs avantages, à proportion de l’utilité qu’ellles en auront retirées, n’auront plus de raison de pouvoir s’opposer utilement à la division des grandes administrations ;. car, à proprement parler, on ne peut pas appeler ces divisions, celles du royaume ni des provinces, puisque les provinces n’en auront pas moins leur même dénomination et leurs mêmes limites; leurs mœurs, leurs habitudes n’en seront pas moins conservées, par conséquent cette opération ne peut être envisagée que comme de grandes administrations reconnues vicieuses et trop étendues, divisées en plusieurs parties, de manière qu’elles seront plus faciles à régir, et surtout du laboureur et de l’habitant des campagnes, trop longtemps éloignés d’elles. Si donc les dettes des provinces devenaient communes, et que les plans des grandes routes du royaume, utiles pour la circulation générale et pour le commerce, fussent décrétés devoir être déterminés dans l’Assemblée nationale permanente, pour être compris dans la masse des charges qu’elle imposerait à chaque législature ; en vain alors les bailliages et sénéchaussées de la province du Languedoc, par exemple, ne sauraient nullement se refuser à une division quelconque, surtout les sénéchaussées et bailliages des pays du Yivarais, du Velay et du Gévaudan, faisant partie considérable de cette province : ce dernier surtout que j’ai l’honneur de représenter, parce que, éloigné du centre de cette province, d’un climat bien différent, d’une stérilité bien plus grande, au lieu d’être imposé au dix-huitième comme dans l’administration de cette province, dont cependant il ne faisait qu’une trentième partie, ne sera vraisemblablement jamais imposé au delà de sa proportion d’étendue et de moyens, quand il le sera par l’Assemblée nationale; parce que depuis le xv3 siècle que le gouvernement crut devoir réunir l'administration particulière de ce pays à celle de la province du Languedoc, il a toujours contribué, dans cette fausse base, aux grandes routes de la province, sans avoir pu obtenir, dans son centre, de passage ni d’ouverture de ses montagnes, si ce n’est à ses frais particuliers ; routes qui cependant eussent été plus courtes, plus économiques, plus utiles pour la circulation, pour le commerce et pour les voyageurs, que toutes celles qui ont été faites par clés intérêts particuliers ou spéculatifs d’agents administratifs. Ainsi, ce malheureux pays, naturellement circonscrit par les bornes majestueuses que la nature lui a données dans l’élévation de ses montagnes, trop longtemps sacrifié aux autres pays et diocèses de la province du Languedoc, situés sous déplus doux climats, à qui cependant nos montagnes sont de la plus grande utilité, tant pour leur fournir des grains, des huiles de noix, des châtaignes, des bestiaux gras pour la boucherie, des mules, des chevaux et des étoffes de serge, que pour la nourriture de leurs propres bestiaux mêmes, que les chaleurs excessives de leur climat ne sauraient y laisser subsister pendant l’été ; ainsi, dis-je, ce malheureux pays, après avoir été oublié en chemin par l’administration vicieuse de cette grande province, à qui cependant il était si utile, venait-il enfin depuis deux ans d’obtenir quelque regard de justice, par le projet de deux grandes routes du royaume qui doivent le traverser, et qui même sont déjà commencées ; mais ce ne sera cependant pas une raison pour lui de tenir à celte grande administration, parce que ces routes étant arrêtées, commencées et prouvées être extrêmement utiles pour différentes parties du royaume, seront de même sans doute continuées, par le résultat de la combinaison politique des grandes routes du royaume, que l’Assemblée nationale trouvera dans sagesse. Ainsi, les Gevaudannois ne peuvent que gagner à voir toutes les parties de la France unies dans une même famille et n’auront plus besoin de l’intermédiaire du titre de Languedociens pour être [4 novembre 1789.] [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Français. J’adhère donc d’abord, sans restriction, en leur nom, à la division de l’administration de la province duLanguedoc, si vous l’adoptez préa-� lablement pour tout le royaume, malgré l’opinion contraire imprimée de mes co-députés des communes; mais aussi j’ai l’honneur de vous proposer de décréter que toutes les dettes de chaque ~ province, laites tant pour le gouvernement, que pour l’ouverture des grandes routes, et de l’utilité commune des provinces, seront, dès à présent, tant pour le passé que pour l’avenir, communes à toute la nation; et que, quant aux intérêts indivisibles, il y sera pourvu parla nation elle-même, de la manière qmelle avisera, pour tourner à son profit commun. Je n’adhère pas à la motion de M. le comte de Vaudreuil, député de la sénéchaussée de Castel-naudary, en corps de 84 députés de la province, comme plusieurs honorables membres de cette province ont cru devoir l’annoncer ( 1) ; mais comme représentant de la nation française, qui désire, pour perfectionner l’ouvrage que vous entreprenez, qu’après les établissements des différents départements, ou des diverses administrations du royaume, toutes celles résultantes de chaque province aient 1a réserve, après la formation de leurs nouvelles divisions, deux mois avant la première législation, de se réunir dans * un lieu désigné, mais par le moyen d’un ou de deux députés seulement par département, pour se résumer sur les différents points de leur division, concilier les divers intérêts que chacune d’elles ne pourrait diviser, par des raisons morales ou physiques de localité. Je me résume donc, et j’ai l’honneur de vous proposer le décret suivant : L’Assemblée nationale a décrété et décrète : 1° Que pour faciliter et opérer plus promptement la division indispensable des grandes administrations des provinces du royaume trop longtemps éloignées des vrais contribuables, les dettes de toutes les provinces du royaume, faites tant pour le compt* du gouvernement que pour celui de l’administration générale de chacune d’elles, seront confondues les unes avec les autres, pour faire masse commune avec celles de l’Etat ; 2° Que toutes acquisitions, toutes charges, tous établissements et tout revenu quelconque perçu au profit de la totalité de chaque province, seront dorénavant régis et administrés ou aliénés au profit de la nation entière, de la manière qu’elle l’avisera ; 3° Que tous les administrateurs actuels de chaque province feront incessamcnt passer le relevé de leurs dettes à l’Assemblée nationale, pour être comprises dans la masse générale de celles de la nation ; 4° Que dorénavant toutes les grandes routes projetées par l’administration générale de chaque province, seront suivies sans aucun changement et réparties à l’avenir sur tout le royaume. Ce décret passé, Messieurs, je ne crois pas qu’il y eût quelque opposant à la division proposée en plus ou moins de départements ; du moins le crois-je susceptible de lever les obstacles des dettes, des chemins, des acquisitions et des établissements particuliers qui lient chaque partie d’une grande province entre elles et qui forcent ceux qui désirent le plus leur division, de ne pas y accéder. Par ce moyen, plus de prétexte pour s’opposer à une division si essentielle. (1) MM. les évêques de Montpellier, de Nîmes et d’Uzès. 677 Ce décret passé, alors si les plans paraissent à l’Assemblée assez suffisamment discutés pour balancer celui du comité de constitution, je demanderai la priorité pour celui de M. de Mirabeau, parce qu’il me semble réunir le plus d’avantages pour être mis aux voix avec celui du comité. Si enfin l’Assemblée ne se croit pas en état d’aller aux voix sur cette importante question, je demande que M. de Mirabeau et les auteurs des différents plans soient adjoints au comité de constitution, pour concilier leurs vues les unes avec les autres, être pris par lui en considération, pour être incessament portés à la décision de l'Assemblée, sans cela nous ne terminerions peut-être jamais utilement. Ce décret passé, je ne vois plus d’opposition pour marcher à grands pas au terme heureux de la recréation de cet empire. Il a fallu franchir bien des obstacles pour parvenir à détruire ces détestables et antiques fondements, mais en vain, Messieurs, croiriez-vous en avoir fait assez et en refaire encore, si vous ne préveniez pas par votre sagesse, et n’écartiez pas promptement les difficultés immenses que rencontreront toujours dans l’intérieur des provinces les répartitions de leurs dettes communes, et encore plus l’impossibilité de répartir, entre toutes les divisions d’une même administration de province, les avantages qui lui étaient connus et ne pourront plus le lui être. Rassurons donc, Messieurs, à cet égard nos commettants, déjà si étonnés de nos élans, de nos efforts et de notre courage, qu’ils doutent encore si notre ouvrage sera assez généralement parfait, pour obtenir le succès certain qu’ils désirent si ardemment. Au nom du zèle pur qui vous anime tous, ne dédaignez donc pas de fixer un instant votre attention sur les divisions intestines qui résulteraient indispensablement pour chaque province à pays d’états que vous voulez diviser, relativement à la quotité des répartitions des dettes communes de ces provinces, dans chacune de ses parties. Bientôt chacune d’elles se dirait : Notre association politique, commerçante et économique est détruite; nous n’avons plus rien de commun à cet égard ; ce n’est point nous qui avons contracté ces dettes immenses et solidaires; ce ne sont pas nos vrais représentants ; ce n’ont été que de vains fantômes d’Etat ; ce n’ont été que de chimériques administrateurs nés, qui, la plupart du temps ont malversé nos fonds et nos caisses, et dont la providence nous a fait justice. D’autres vous diraient encore: Nous étions injustement répartis dans la masse administrative de la province, nous étions imposés au dix-huitième, tandis que nous ne devions l’être qu’au trentième ; depuis un temps immémorial nous contribuons à payer des dettes et à faire des dépenses, aux avantages desquelles nous n’avons pas participé. Enfin toutes, ou la plupart, fondées sur des raisonnements pareils, s’écrieraient et s’écrient même déjà : Justice nous est rendue, nous retrouvons les droits sacrés des hommes libres et des Français réunis en une seule et même famille, imposés proportionnellement à leurs moyens ; les laboureurs, ces braves et précieux nourriciers de l’Etat, se disent déjà tous entre eux : Nous avions gémi sous l’oppression des charges que nos fortunes particulières suffisaient à peine pour remplir, nous en sommes délivrés ; nous avons un département sous nos yeux, des assemblées de canton et de district, nous jouirons enfin directement, par nos représentants, des bienfaits et des vertus du monarque chéri qui nous gouverne, et dont [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (S novembre 1789.] 678 nous ne jouissions auparavant que par des intermédiaires inabordables, de l’arbitraire et du despotisme affreux desquels son courage paternel vient de nous délivrer. Plus de privilège abusif ni pécuniaire dans le royaume, plus de ces corps à mainmorte dont les grands biens superflus, et au delà de ce qui sera nécessaire pour la vie aisée de ceux qu’on laissera subsister pour le culte divin, pour le soin des hôpitaux et des établissements utiles, seront aliénés sans distinguer les localités de leur siège, pour payer les dettes communes de la nation : tous les maux et fléaux passés du royaume, étant pour ainsi dire confondus dans un seul et même trésor national, les charges en seront réparties également sur tous les Français à raison de leurs facultés. Ainsi tous les Français, dans toute la surface de cet empire, en même temps qu’ils connaîtront et se soumettront aux nouvelles lois qu’ils se seront données, sauront aussi sur quelles bases pécuniaires ils payeront leurs charges ; car s’il en était autrement, la nouvelle imposition des anciennes provinces et pays d’états , devra nécessairement être bien inférieure à celle de toutes les autres, à raison de leurs charges, et ne pourront jamais subvenir aussi facilement et aussi également que toutes les autres, aux besoins extraordinaires de l’Etat. Je désire donc, Messieurs, pour l’utilité commune et pour mieux perfectionner ce que vous avez fait, comme pour travailler plushardimentencore à ce que vous avez à faire, que vous décrétiez les quatre articles que j’ai l’honneur de vous proposer et que je dépose sur le bureau; autrement je ne pourrai jamais me défendre de la crainte de voir l’intérêt pécuniaire renverser le précieux édifice que vous établissez, et assurément il ne manquera pas de mécontents pour y travailler. J’ai l’honneur d’ajouter de plus, Messieurs, au nom de mes commettants et de tous mes concitoyens que si, contre l’opinion d’une partie des quatre-vingt-quatre députés de la province qui prétendaient infructueusement rester unis, j’ai assuré au contraire, malgré l’opinion de mes codéputés, les communes, que ces commettants et les leurs suivraient sans restriction la décision de l’Assemblée, comme ils le feront encore, malgré quelques délibérations contraires qui leur ont été sollicitées, mais auxquelles les deux tiers du pays ne veulent point adhérer; j’en appelle encore' à votre justice pour décider favorablement sur le sort du Gévaudan, pays formé par la nature pour faire un département à lui seul, et auquel il semble qu’un reste de domination de ce qui a toujours fixé l’unique administration de la province, c’est-à-dire les villes de son centre voudraient lui en ôter l’avantage, en ne se prêtant point assez aux moyens de le lui faciliter. Vous savez, Messieurs, que le comité avait destiné, dans son plan, six départements au Languedoc, et que dans cette répartition, le Gévaudan se trouvait uni ou avec une partie du Vivarais, ou avec Je Velay, tandis que ce pays a presque à lui seul le territoire suffisant pour former le sien ; que le comité en avait tellement senti la nécessité, qu’il en avait ajouté, dans son aperçu un septième. Mais le décret de l’Assemblée ayant décidé que ces départements se feraient par la réunion des députés de chaque province, il se trouve, que ceux des parties centrales ont commencé par déterminer les leurs, et ne se sont point embarrassés de ceux des trois pays du Vivarais, du Velay et du Gévaudan, qui, cependant, tant par leur nature physique et morale, que par leur plus grande proximité de la capitale, prise pour base de la division, eussent dû commencer par être déterminés. Cependant il s’y en forme un septième qui, bien loin de rectifier la première erreur, et de donner à chaque pays le sien séparé, tel que la nature et leur antique administration particulière le leur prescrit, semble, au contraire, augmenter l’injustice de préférence accordée à la partie de la province la plus éloignée. A mon avis ces trois pays doivent nécessairement être d’accord entre eux, et convenir des objets réciproques que, pour l’utilité et la convenance respective, ils pourraient se céder : le Velay, dans sa position actuelle, étant le plus petit, ayant par conséquent besoin de beaucoup plus, demande quelque partie du Gévaudan, que celui-ci, quoique satisfait desacontenanceactuelle, lui céderait, si d’un autre côté, le département'de Nîmes lui donnait ce qu’il a de trop, pour remplacer ce que des sentiments de fraternité lui font consentir à céder; le comité y consent, mais Nîmes n’agit pas aussi fraternellement : en conséquence, j’ai l’honneur de réclamer votre justice, en cas que la décision en soit portée à l’Assemblée, pour que les départements tant de Nîmes que de Montpellier, ainsi que tous les autres de la province, dont l’analogie est à peu près la même, en soient réduits à leur juste contenance, ou ne soient formés qu’après ceux des trois pays du Gévaudan, du Vivarais et du Velay, qui toujoursayant été distincts de l’analogie physique et morale du reste de la province, et ayant même une diffé-renceentre clîacund’eux, doivent nécessairement, dans ce nouvel ordre de choses, conserver plus que jamais les avantages de leur ancienne et Unique administration, que vers le quinzième siècle, une politique spéculative du gouvernement rendit subordonnée à celle delà province du Languedoc. Je demande encore, qu’en cas que mon projet de décret pour confondre toutes les dettes des provinces, de quelque naturequ’elles soient, dans la masse commune de celles du royaume, ne fût pas accueilli par l’Assemblée, les trois pays, surtout le Gévaudan, plus disgracié de la nature et plus dénué de ressources que les autres, ne soient tenus de prendre leur portion distributive de celles de la province dû Languedoc qu’au prorata, tant de leur ancienne étendue, et non de la quotité ancienne de leur imposition, que de leurs facultés, et des avantages qu’ils auront pu retirer des dépenses particulières de la province, à l’exception cependant des dettes faites pour le compte du gouvernement, qu’ils ont à cesser de payer fraternellement, à raison de leur étendue, population et ressources actuelles. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. CAMUS. Séance du jeudi 5 novembre 1789 (1). Il a été fait lecture du procès-verbal d’hier. On a lu ensuite différentes adresses : L’une de la commission intermédiaire du Dauphiné, qui annonce que l’assemblée indiquée à Romans pour le 2 novembre est remise au 14 défi) Cette séance est incomplète au Moniteur