47 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES* [2 juin 4790.] M. Defermon. Il n'est pas possible d’envoyer les prêtres d’un département à cent lieues de là. Je propose cet amendement : « Le nombre des métropolitains sera déterminé, et les lieux où ils seront établis fixés selon qu’il sera convenable.» (Cet amendement est adopté.) M. Bouchotte. Je demande que le métropolitain, qui est évêque avant d’être métropolitain, soit soumis, dans un jugement qu’il aura rendu comme évêque, à l’appel à une autre métropole. M. Martineau. Il faut ajourner cet amendement; le comité vous présentera un travail sur la juridiction ecclesiastique. (L’amendement est ajourné.) La motion de M. Camus, amendée parM. Defermon, est décrétée en ces termes : Art. 3. « Il sera conservé tel nombre de métropoles qu’il sera jugé convenable, et les lieux de leurs sièges seront déterminés* Lorsque l’évêque diocésain aura prononcé dans son synode sur les matières de sa compétence, il y aura lieu au recours au métropolitain, lequel prononcera dans le synode métropolitain. » M. le Président annonce que l’Assemblée se réunira demain à 7 heures et demie, pour se rendre à la paroisse de Saint-Germain-l'Auxer-rois, et assister à la grand’messe et à la procession. M. le Président. J’ai reçu de la municipalité de Monlauban une lettre qui m’annonce que la tranquillité est rétablie dans cette ville. J’en donne lecture : « Monsieur le Président, « Nous nous empressons de vous annoncer la plus heureuse nouvelle. La paix et la concorde sont rétablies dans la ville de Montauban ; les prisonniers que le peuple avait faits dans la sanglante journée du 10 mai sont en liberté. C’est ce même peuple qui a demandé leur élargissement, par un transport de générosité qu’aucune expression ne saurait peindre (Il s'élève des murmures). M. Dumas, maréchal général des logis de la garde nationale parisienne, chargé des ordres du roi pour le rétablissement de la tranquillité publique dans notre ville, a su l’intéresser, l’émouvoir et éteindre en lui tout sentiment d’aversion et de haine ; l’éloquence touchante et le caractère de franchise et de loyauté qu’il a déployés, lui ont gagné tous les cœurs. Nous lui devons ces témoignages, qu’il est bien doux pour nous de lui rendrê, en échange de la paix et du bonheur qu’il nous a procurés. (On applaudit .) « Le temps ne nous permet pas de vous donner les détails d'un événement qui nous comble de joie, mais nous ne tarderons pas à vous en envoyer un récit circonstancié; nous espérons qu’il réconciliera tous les Français au peuple de Montauban, qui n’a pas été moins généreux dans le pardon, que modéré dans la colère ( les murmures se reproduisent), et que les calomnies odieuses, répandues de la manière la plus atroce, semblaient devoir rendre moins accessible aux sentiments de l’humanité qu’à ceux de l’aigreur et de la vengeance. Nous espérons surtout que l’auguste Assemblée que vous présidez, éclairée par l’amour de la justice et de la vérité, rendra son estime et sa protection à Une cité malheureuse, que la stagnation du commerce et des pertes de tout genre ont réduite à la plus extrême détresse. Pour nous, qu’üne prévention aveugle a outrageusement in* culpés, nous attendons avec courage et avec sécurité les lumières de l’information que 8a Majesté a ordonnée et nous sommes sûrs, non seulement qu’elle ne donnera lieu à aucune inculpation contre nous, mais qu’elle manifestera} delà manière la plus éclatante, la pureté et la noblesse de notre conduite, et qu’elle nous fera obtenir de tous les hommes sages, et surtout de l’Assemblée nationale, dont le suffrage est le plus précieux à nos cœurs, des applaudissements et des actions de grâces. » (Cette lettre est renvoyée au comité des rapports.) M. lé Président. Je dois informer l’Assemblée que je viens de recevoir une lettre de M. de Saint-Priest , relative à l'affaire de Marseille. Plusieurs membres demandent le renvoi au comité des rapports. Une partie de l’Assemblée insiste pouf que la lettre soit lue* M. le Président lit cette lettre qui est ainsi conçue : « Paris, le 2 juin 1790 <> Monsieur le Président, j’ai lu dans le Moni~ leur en quels termes m’avait dénoncé à l’Assemblée nationale Un député extraordinaire de Marseille, et j’ai été informé que cette affaire était renvoyée au comité des rapports ; je crois devoir vous adresser mes répliques* « Pour suivre l’ordre de l’accusation, je commence par un reproche dont le Moniteur a fait sans doute trop peu de cas poiir le rapporter, mais qui n’a pas moins été articulé contre moi... (Il s'élève de grands murmutes *) (On demande encore le renvoi au comité des rapports.) M. de Folleville. On ne peut refuser d’entendre la lecture de cette lettre. On le doit d’autant plus qu’une partie de l’Assemblée a les mêmes plaintes à former contre le Moniteur : il ne dit jamais que ce qui est contraire à cette partie de l’Assemblée. M. le Président continue la lecture de la lettre de M. de Saint-Priest : « On m’a imputé d’avoir fait une réponse ironique à une demande de la ville de Marseille à Sa Majesté, pour en obtenir des fusils. J’ai rendu compte au roi de cette demande; et d’après l’examen de l’état des arsenaux dans les provinces méridionales, le roi m’a autorisé à faire espérer des armes à la ville de Marseille, si l’on pouvait recouvrer une partie de celles qui avaient été pillées récemment à Lyon, ainsi qu’on y était parvenu quelque temps auparavant à Saint�Etienne-en-Forez, après un semblable désordre. Ce n’était point là de l’ironie, et je respecte trop mes devoirs pour l’employer en pareil cas. « Je vais suivre le Moniteur pour CO qui peut me concerner dans le discours du député de Marseille à l’Assemblée nationale. « Une lettre du ministre est arrivée avec l’ordre à la garde nationale d’évacuer les forts, et au régiment de Vexin d’en Sortir également} pour être remplacé par celui d’Ernest* Ainsi, oü punissait des soldats qui avaient donné une preuve de [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. patriotisme en ne voulant pas tirer sur des Français ; ainsi le ministre prenait des mesures différentes de celles que vous aviez ordonnées par votre décret ; ce décret accompagnait la lettre du ministre, mais il n’était pas revêtu des formes constitutionnelles. » « Pour juger de la vérité des allégations de ce député, il suffit de connaître la teneur du décret, la voici : « L’Assemblée nationale, profondément affligée « des désordres qui ont eu lieu dans plusieurs « endroits du royaume, et notamment dans la ville « de Marseille, charge son président de se retirer « vers le roi, pour remercier Sa Majesté des me-« sures qu’elle a prises, tant pour la recherche « des coupables que pour la réparation de ces « excès , et renvoie l’examen de cette affaire et « de ses dépendances au comité des rapports. » « Quelles étaient ces mesures dont on remerciait le roi? Les mêmes dont j’ai rendu compte à l’Assemblée par ma lettredu 11 mai, en lui communiquant ma lettre du 10 à la municipalité de Marseille. Elle porte uniquement « de faire éva-« cuer immédiatement par la troupe nationale « les forteresses où elle s’est introduite, en ie3 « remettant aux troupes qui en avaient ci-devant « la garde exclusive. » Or, le régiment de Vexin seul composait ci-devant la garnison des forts ; l’ordre du roi dit simplement, « pour la garde en « être faite par ses troupes, » sans aucune désignation du régiment d’Ernest. « A l’égard de la forme constitutionnelle qui manquait, a-t-on dit, au décret, j’observe que les décrets n’en sont revêtus que lorsqu’ils contiennent des dispositions exécutoires. Celui dont il s’agit n’en renfermait aucune, ainsi qu’on l’a vu ; si j’en ai envoyé copie à la municipalité de Marseille, ce n’a été que pour lui faire connaître l’adhésion de l’Assemblée nationale aux mesures ordonnées par Sa Majesté. « La harangue du député s’est terminée en ces termes : « Vous ne souffrirez pas que cette ville < intéressante reste sous le despotisme d’un mi-« nistre que nous avons dénoncé, que nous dé-« nonçons encore ; qui, en donnant une extension « arbitraire à votre décret, a fait d’une loi pater-« nelle une loi de sang, qui nous a induits en er-« reur en nous transmettant un décret non re-« vêtu des formes nécessaires pour qu’il fût « authentique, et qui vient nous accuser encore.» « Après les explications que j’ai déjà données, je crois pouvoir me dispenser de répondre à ce paragraphe; on trouvera difficilement dans le recueil imprimé des pièces relatives aux forts de Marseille, à quoi se rapportent les mots : « des-« potismed’un ministre, extension arbitraire des •« décrets, loi paternelle devenue loi de sang : » une loi de sang, grand Dieu ! « On a de plus imputé au ministre, en cette occasion, une marche hâtive et vindicative. Les ordres du roi et ma lettre , quoique signés le 10 mai, ne sont cependant partis que le 13, et parce qu’étant informé que l’Assemblée s’occupait d’un décret à rendre sur le même sujet, j’ai cru plus convenable que le même courrier fût porteur du décret et des ordres de Sa Majesté. « Quant à l’épithète vindicative , j’observe qu’a-près m’être constamment occupé depuis plus de vingt ans de la prospérité de Marseille et de son commerce, j’y ai reçu à mon retour de Constantinople des témoignages peu équivoques de l’affection et de la reconnaissance de ses citoyens. Je ne les oublierai jamais, et je n’effacerai de ma mémoire que les reproches peu mérités que me [2 juin 1790.] fait aujourd’hui la municipalité de ’cette ville, si intéressante sous tant de rapports. » M. le Président lève la séance à trois heures et demie, et renvoie la suivante à ce soir, six heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. BRIOIS DE BEAUMETZ-Séance du mercredi 2 juin 1790, au soir (1). M. Chabrond, secrétaire , fait l’énonciation des adresses et délibérations suivantes : Adresses de félicitation, adhésion et dévouement des communautés de Bremur et d’Origny, département de la Côte-d’Or; du conseil général de la commune et de la troupe patriotique des paroisses d’Eraville et de Roquebrune, département de la Charente; des villes de Dôle et de Théobon; des officiers municipaux de la ville et de la garde nationale de Bergerac; du district de Saint-Pierre-de-Lyon; enfin, de la ville deCastelnaudary: toutes ces adresses improuvent expressément la déclaration d’une partie de l’Assemblée nationale, ainsi que tous autres écrits qui tendent à affaiblir le respect et la confiance dus à ses décrets. La municipalité de Castelnaudary envoie en même temps une délibération des officiers du présidial de cette ville, renfermant les mêmes sentiments. Adresses de la communauté de Leguevin, département de la Haute-Garonne'; et de celles de Montevrain et de Veziunes, département de l’Yonne; elles font le don patriotique du produit des impositions sur les ci-devant privilégiés. Adresses des communautés deChaillé-les-Marais, département de la Vendée ; de Saint-Victor et du bourg a’Ornes-en-Verdunois, dont tous les habitants ont prêté, de concert avec les officiers municipaux, le serment civique. Adresses des municipalités des paroisses formant le canton de Dammarie, département d’Eure-et-Loir; elles exposent la misère extrême des habitants affligés par des grêles successives, et implorent la protection de l’Assemblée. Adresses des membres de la fédération du département de la Haute-Vienne et des départements limitrophes, qui a eu lieu à Limoges, le 9 du mois dernier; ils expriment avec énergie la résolution qu’ils ont prise de défendre jusqu’au dernier soupir la Constitution : «Daignez, disent-ils, continuer ce grand œuvre : il immortalisera la nation française, parce que l’univers entier admirera ses lois, et voudra se les approprier ; » ils supplient l’Assemblée de s’occuper de l’organisation des gardes nationales. Adresse de la municipalité du bourg de Ghoisy-le-Roi ; elle annonce que la contribution patriotique des habitants monte à 17,415 livres. Adresses des communautés formant le canton du Sap ; de l’assemblée électorale du district de Lons-le-Saunier; de l’assemblée primaire du canton de Sos, département d’Agen ; de l’assemblée des électeurs du département du Loiret, tenue à Orléans; et, enfin, de celle du département de (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.