548 [Assemblée nationale.] digne de la liberté : il veut sincèrement la Constitution; et comme il a senti que sa force ne pouvait être que dans l’union, il n’a montré dans les moments les plus pénibles, que le calme du vrai courage, et l’ordre public n’a pas été troublé un seul instant. (. Applaudissements .) « Nous sommes, etc. « Signé : ÀLQUIER, DE Biron, BOUILLE. >• Un de MM. les secrétaires fait lecture de la suile du procès-verbal de la séance permanente, la ué-libération reprise le 24 juin à neuf heures du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture de la suite du même procès-verbal, la délibération reprise le même jour à 4 heures du soir. M. Giraud-Duplessis. Messieurs, nous avons reçu Oes dépêches du directoire du département de la Loire-Inférieure. Voici entre autres choses ce qu’il nous mande : « Aussitôt que nous avons reçu la nouvelle de la fuite du roi, nous avons donné ordre de s’emparer de tous les dépôts d’armes et de munitions, de s’assurer des caisses publiques, d’exciter le courage des patriotes, de surveiller les mouvements des autres et de s’assurer de ceux dont les démarches paraîtraient contraires aux intérêts de la patrie; nous avons mis un embargo à Paim-bœuf pour empêcher la nouvelle de pénétrer trop tôt dans les colonies; nous avons demandé sur-le-champ le serment de M. du Moutier, maréchal de camp, et des olfîciers de ligne, artillerie et génie; nousavonsentin averti nos concitoyensdu départ du roi et nous les avons ralliés par une proclamation autour de la loi, autuur de leurs représentants à l’Assemblée nationale; le nom du roi a été supprimé du serment prêté par les officiers des troupes de ligne; enfin nous avons pris toutes les précautions.» {Applaudissements.) Voici maintenant, Messieurs, la proclamation des trois corps administratifs du département de la Loire-Inférieure : « Citoyens, « Le roi est parti; mais le véritable souverain, la nation reste; et les Français, dignes de la liberté, sont plus que jamais maîires de leur sort. La Constitution est faite; le destin de i’Empire est fixé ; et sa durée, assise sur les bases éternelles de la raison et de la justice, n’a jamais pu dépendre de la vo onté et delà présence d’un homme. « Le pouvoir qu’il exerçaiitt qu’d a cru anéantir par sa luite, n’était-il pas le nôtre? N’était-ce pas la nation qui le lui avait délégué? Il reste doue encore tout entier à sa source. «L’Assemblée nation ale, dépositaire de la vol on té générale, en avait revêtu celui qu’elle avait trouvé assis sur le trône du despotisme; mais se res-saishsaut, au nom de la nation, de ce même pouvoir, elle le déléguera ou le conservera poulies intérêts ou le salut de la patrie. Comblés de ses bienfaits, rassurés | ar ce qu’elle a fait, sur ce qu’elle peut taire encore, espérons tout de sa sagesse, et croyons qu’elle saura faire servir au bonheur de la France un événement médité pour sa ruine; ceux qui ont su créer la liberté sauront la maintenir; mais c’est à nous, c’est à tous les bons citoyens de la seconder. Partageons à l’envi la gloire de sauver la patrie : rallions-nous autour de cette sainte Constitution, pour laquelle nous avons juré oe verser notre sang. Citoyens, voilà le moment où le vrai patriotisme sera mis {27 Juin 1791.] à l’épreuve: veillons sur nos ennemis, observons les lâches qui oseraient abandonner l’étendard de la liberté, mais gardons-nous des excès, et faisons voir à l’Europe étonnée, que la nation française, en perdant un roi qui l’a trompée, n’en a pas moins conservé retordre, cette union, cette fierté que peut seul inspirer le véritable amour de la liberté. ( Applaudissements .) « FIDÉLITÉ A LA NATION ET A LA LOI. « Nantes, le 22 juin 1791. « Signé : P. -F. Grihault, vice-président ; Coiquaud, président du district; Daniel Kervegan, maire; P.-J.-M. Sotin, administrateur du district ; Le Maignon, docteur-médecin, officier municipal; Marie, Papin, Dufrexou, Joyau, Nugent, Le Tourueux, procureur général syndic ; Nicolas ûupoirier fils, Fourmi père, Jacques Lecadre,Rozier,Dobrée, Lepelé aîné, Cantin, Bazille, Beaufranchet, Delahaye, Noël, P. -H. Lambert, Julien Lefèvre, procureur syndic du district; Carié oncle , notable; F.-S. Pineau, Donnet, Lepot, Garreau, procureur de la commune , et Pierre Grelier, secrétaire général. » M. Chabroud. Cet acte des corps administratifs de la ville de Nantes annonce un principe qui est dans tons les esprits ; mais il n’a pas encore été énoncé d’une manière aussi précise. Je demande que l’Assemblée ordonne l’impression de cette proclamation et son insertion dans le procès-verbal. (Cette motion est décrétée.) M. Vieillard de Coutances. J’ai reçu une lettre de M. Dumouriez, maréchal de camp , commandant de toutes les forces militaires dans le département delà Loire-Inférieure, ainsi conçue : « Nantes, ce 23 juin 1791. « Nous voilà ilans la crise, mon cher Vieillard, soyons plus forts que le danger; nous serions la plus vile des nations si nous ne combattions pas jusqu’à l’extrémité pour notre sublime Constitution. Assurez l’Assemblée nationale que le département de la Loire-Infé: ieure, qui m’a donné sa confiance et le commandement de ses forces militaires, sera un des plus fermes soutiens de la Constitution et de la liberté, et qu’au premier ordre de l’Assemblée, je volerai à son secours avec deux mille braves soldats de ce seul département, du canon et deux régiments dont un de dragons, et que je grossirai en roule cette armée i our me porter à tel point de l’Empire qu'on voudra, sans que la tranquillité de ce département soit troublée, malgré les contre-révolutionnaires que nous mettrons à la raison. Je vivrai libre sous la plus belle des Constitutions, ou je mourrai libre; je vous embrasse; de vos nouvelles. « Signé: DUMOURIEZ ». (L’Assemblée ordonne qu’il sera fait mention honorable de cette lettre dans le procès-verbal.) M. le Président fait donner lecture par un de MM. les secrétaires d’une lettre de M. d'Estaing, lieutenant général et vice-amiral, ainsi conçue: « Paris, le 23 juin 1791 . « Monsieur le Président, « L’impossibilité dans laquelle ma santé me ARCHIVES PARLEMENTAIRES. o49 [Assemblée nationale. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 juin 1791.] met de sortir m’empêche d’aller prendre des informations à l’Assemblée nationale. J’ignore si les ofliciers qui ne sont pas en activité sont admis à prêtnr le serment; j’ignore d’autre part quel est l’officier chargé de le recevoir dans ce département. « Mon doute m’a mis dans le cas d’adresser mon serment à la section de la Bibliothèque, à laquelle j’appartiens. Mais invité par mes concitoyens à l’adresser à l’Assemblée nationale et convaincu qu’aucune démarche n’est indécente quand on exnrime le vœu de ses concitoyens, je viens prier l’Assemblée de recevoir l’assurance de mou zèle pour le maintien de la Constitution. « Lieutenant général et vice-amiral, je voudrais qu’il existât un élément de plus sur lequel je pusse m’acquitter de tout le devoir de citoyen. (. Applaudissements . ) « Signé : d’ËSTAING. » M. le Président. Il m’arrive à chaque instant un nombre considérable d’adresses de directoires de départements, de districts, de municipalités, de gardes nationales. Plusieurs membres : Il faut les lire ! M. le Président. 11 me semblerait important que les travaux de l’Assemblée ne fussent pas suspendus. M. Prieur. J’insiste pour que lecture des adresses soit faite : ces adresses énoncent le sentiment des citoyens du royaume sur les événements actuels ; c’est pour nous le seul moyen de connaître l’opinion générale et de nous rendre compte de la marche et des progrès de l’esprit public. M. l’abbé Gouttes. On pourrait faire un extrait des diverses adresses et le présenter à l’Assemblée. M. le Président. Si l'Assemblée le trouve bon, on lui rendra compte des adresses au commencement de la prochaine séance. Un membre : Nous demandons une séance extraordinaire ce soir pour cela. (Oui! oui!) (L’Assemblée décrète qu’elle tiendra ce soir séance, extraordinaire pour entendre la lecture des adresses.) L’ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret du comité militaire sur les places de guerre et postes militaires (1). M. Bureaux de Pusy, rapporteur, soumet à la discussion la suite de’s articles du projet de décret. Plusieurs amendements on modifications de rédaction sont proposés; quelques-uns sont adoptés par le rapporteur. Les articles suivants formant le complément du titre 1er sont successivement mis aux voix comme suit : Art. 18. « Les particuliers qui, par les dispositions de (1) Voy. ci-dessus, séance du 25 juin 1791, page 527. l’article 14 ci-dessus, perdront une partie du terrain qu’ils possèdent, en seront indemnisés par le Trésor public, s’ils fournissent le titre légitime de leur possession légale, l’Assemblée nationale n’entendant d’ailleurs déroger en rien aux aœres conditions en vertu desquelles ils seront entrés en jouissance de leur propriété. Art. 19. « Les dispositions des articles 15, 16, 17 et 18 ci-dessus seront susceptibles d’être modifiées dans les places où quelques portions de vieilles enceintes non bastionnées font partie des fortifications. Dans c<- cas, les corps administratifs et les agents militaires se concerteront sur l’étendue à donner au terrain militaire national; et le résultat de leurs conventions, approuvé par le ministre de la guerre, deviendra obligatoire pour les particuliers, auxquelles demeureront néanmoins réservées les indemnités qui pourront leur être dues, et qui seront réglées à l’amiable, s’il se peut, par les départements, sur l’avis des districts ; et en cas de désaccord, par le tribunal du lieu. Art. 20. « Les terrains militaires nationaux, extérieurs aux places et postes, seront limités et déterminés par des bornes, toutes les fois qu’ils ne se trouveront pas l’être déjà par des limites naturelles, telles que chemins, rivières ou canaux, etc. Dans le cas où le terrain national ne s’étendrait pas à la distance de vingt toises de la crête des parapets des chemins couverts, les bornes qui devront en fixer l’étendue seront portées à cette distance de vingt toises ; et les particuliers, légitimes possesseurs, seront indemnisés, aux frais du Trésor public, de la perte de terrain qu’ils pourront éprouver par cette opération. Art. 21. * Dans les postes sans chemin couvert, les bornes qui fixeront l’étendue du terrain militaire national seront éloignées du parement extérieur de la clôture, de 15 à 30 toises, suivant que cela sera jugé nécessaire. Art. 22. « Tous terrains dépendant des fortifications, qui, sans nuire à leur conservation, seront susceptibles d’être cultivés, ne le seront jamais qu’en nature d’herbages, sans labour quelconque, et sans être pâturés, à moins d’une autorisation du ministre de la guerre. Art. 23. « Le ministre de la guerre désignera ceux desdits terrains qui seront susceptibles d’être cultivés, et dont le produit po *rra être récolté sans inconvénients ; il indiquera pareillement ceux des fossés, les canaux, flaques ou étangs qui seront susceptibles d'être pêchés ; il adressera les états de ces divers objets aux commissaires des guerres, qui, conjointement avec les corps administratifs, et de la manière qu’il est prescrit aux articles 5, 6, 7, 8, 9 et 10 du titre VI, les affermeront à l’enchère, en présence des agents militaires qui auront été chargés par le ministre de prescrire les conditions relatives à la conservation des fortifications. Art. 24. « Les fermiers de toutes les propriétés nationales, dépendantes du département de la guerre,