[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. { Novembre 1793 1 439 « Le succès que nous avons eu à Maubeuge et qui ne rend plus nos dangers aussi imminents dans la partie du Nord, peut influer à vous décider dans l’exécution de cette mesure. Ne perdez pas d’ailleurs de vue, pour vous fixer sur la certitude de quelque grand projet des Anglais, que l’envoi par eux fait de 4 vaisseaux de Toulon à la flotte de Brest tient à quelque profonde machination, telle que le scélérat Pitt est capable de la concevoir. « Yoilà ce que j’ai à vous communiquer après des réflexions mûries, la carte sous les yeux, et je pense qu’elles fixeront votre attention et que vous les discuterez avec le pouvoir exécutif. « Salut et fraternité. « Je reçois dans ce moment une lettre du général Vergnes qui m’annonce que l’ennemi s’avançant toujours s’est emparé de Laval et n’a pas dû y trouver une grande résistance, car le patriotisme n’est pas chaud dans le pays. Hâtez-vous donc de nous envoyer de grands secours si vous voulez que nous les enveloppions de manière à ce qu’il n’en échappe aucun. Mais pour que les révoltés qui sont maîtres de Nor-moutier ne puissent pas plus échapper que ceux de la Mayenne, faites venir des forces mari¬ times du côté de l’ouest, pendant que nos forces victorieuses de la Vendée marcheront vers cette île; et dès lors il leur sera impossible de se réunir aux Anglais. « Garnier de Saintes. » « P. -8. Les fusils de Caen n’arrivent point, j’envoie un nouveau courrier extraordinaire. » VIII. Le Tourneur, représentant du peuple, dans le dé¬ partement de VOrne et dreonvoisins, à V effet de prendre toutes les mesures de salut publie, à ses collègues membres du comité de Salut pu¬ blic de la Convention nationale (1). « Alençon, le 3e jour de la lre décade du 2e mois de l’an II de la République une et indivisible. « Citoyens collègues, « Je vous ai marqué ce matin que 400 hommes étaient partis d’avant-hier pour se rendre à La¬ val, 100 autres étaient partis hier, venus de Mortagne; 400 autres venant d’ Argentan, arri¬ vés de ce jour, allaient les suivre. Quelle est et quelle sera votre surprise, citoyens collègues, lorsque vous apprendrez que (le directoire du district de) Mayenne, par un arrêté de ce jour, dont je vous envoie la minute (2), fait évacuer Mayenne et ordonne à nos troupes de se replier sur Alençon. J’ai envoyé à Mamers pour avoir des subsistances, on ne peut m’en procurer. Fres-ney m’abandonne par grâce 60 boisseaux, me¬ sure d’Alençon de 30 livres. Je mets tout en réquisition. J’envoie à Pré-en-Pail pour y faire Tester et servir d’avant-garde le détachement qui y est. Le procureur (général) syndic du dé¬ partement m’est annoncé devoir arriver ce soir. ( 1 ) Archives du ministère de la guerre, armée des Côtes de Brest, carton 5/13, liasse 2. (2) Cette pièce n’était pas jointe à la lettre. Je vous rendrai compte de ee qu’il m’aura dit. Le comité de surveillance m’envoie ehercher pour être témoin de la déposition d’un parti¬ culier, aide de camp de l’armée des rebelles. Je vous envoie le procès-verbal (T). Cet homme a la langue bien effilée, il a la figure bien ouverte et il paraît qu’il met de la bonne foi dans ses dépositions par l’espoir qu’il a d’avoir sa grâce. J’envoie au Havre et à Rouen pour faire arrêter les individus désignés. « Vous verrez par le procès-verbal du bataillon que nous avons fait partir que le district de Mayenne a dû prendre deux arrêtés et je n’en ai reçu qu’un, la signature du secrétaire moitié effacée. « Je renvoie à Mayenne pour avoir des ren¬ seignements plus positifs. J’envoie ehercher à Rouen un millier de poudre. Je désire bien que le ministre nous envoie quelques armes. « Thirion est parti du Mans avec 200 hommes et se porte sur Laval par Brulon. « Le district d’Évron et celui de Sillé-le-Guil-laume se retirent sur Fresnay et tout ce pays souffre pour les subsistances. « J’ai écrit à Chartres pour les prévenir que je leur envoie les détenus qui nous viennent de Laval, ceux de Mayenne, et ceux de cette ville. Les prêtres, au nombre de 60, devaient arriver ce soir ici, je ne sais qui les a arrêtés en route, seulement je sais qu’üs vont à Lassay. Je les envoie chercher parce que je ne veux pas qa’ils tombent au pouvoir des rebelles. La Mayenne en général est très fanatique, et le département de l’Orne en renferme un grand nombre. « Je n’ai pu me procurer de secrétaire qu’ au¬ jourd’hui, je vais faire copier tous les arrêtés que j’ai pris depuis mon départ et les ferai passer à tous les comités qu’ils concernent. « Si vous le jugez nécessaire, vous m’obligerez en m’envoyant un collègue, car avec la meil¬ leure volonté, je ne me crois pas les talents et les forces nécessaires pour opérer tout le bien que je désire. Depuis 3 jours, je ne (me) eouehe pas, je ne suis pas secondé parce que toutes les admi¬ nistrations craignent de se compromettre et elles ne feraient pas une pause d’a (sic), qu’elles ne m’eussent prévenu ou consulté. Toutes les mu¬ nicipalités de campagne m’accablent pour les subsistances et les détenus. « Je vous envoie un malheureux jeune homme qui a perdu la vue au service de la patrie, une balle lui est-entrée par une tempe et sortie par l’autre. Il a besoin de secours et je ne doute pas que la Convention ne le reçoive avec intérêt. « J’ai fait arrêter plusieurs distributeurs de faux assignats, ce sont des marchands de che¬ vaux pour le compte de la République : ils sont actuellement devant leurs juges. J’ai déjà saisi 4 assignats faux de 400 livres chacun, tous si¬ gnés Abraham. Il y en a deux émissions, les uns sont bien mieux faits que les autres. « Je vous fais passer aussi deux canons de fusils achetés par la commune de Mortagne qui, lorsqu’on les a essayés, se sont brisés, comme vous le verrez. J’ai fait arrêter le marchand et rendre le montant ; il y en a 72, je les ai saisis J’ai su quel était le premier vendeur, je l’ai fait prendre cette nuit à Argentan; celui-ci me dé¬ clare les avoir achetés au Havre, je vais le faire arrêter également. « Les prêtres constitutionnels dans les dis*. (1) Cette pièce n’était pas jointe à la lettre. 440 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. -I fnov�bre m3U tricts de Laigle et d’ Argentan ne valent pas mieux que les autres. J’en tiens un, et trois autres ne m’échapperont pas. Enfin, je fais de mon mieux et j’agis. « Notre étranger promet de nous faire demain une nouvelle déclaration intéressante pour la République. Après ce nouvel interrogatoire, je le ferai passer au comité de sûreté générale. « Salut et fraternité. « Le Tourneur. » IX. Trieur de la Marne, représentant du peuple, dans les départements maritimes, aux représentants du peuple composant le comité de Salut pu¬ blic (1). « Vannes, le 3e jour du 2e mois de l’an II de la République française. « Nous étions occupés à Brest, citoyens col¬ lègues, à prendre, avec Jean Bon Saint-André et Bréard, les mesures de salut public relatives à la marine, lorsqu’il nous est arrivé un courrier extraordinaire qui nous annonça que les rebelles de la Vendée menaçaient le département du Morbihan, et qu’il était instant d’y faire passer des forces. Mes deux collègues ont pensé que je devais partir sur-le-champ pour Vannes, et re¬ quérir dans les villes que je trouverais sur ma route des gardes nationales pour pouvoir op¬ poser une force imposante aux rebelles. Je suis passé par Landerneau, Châteaulin, Quimper, Quimperlé et Hennebont, et partout j’ai trouvé un grand nombre de citoyens prêts à voler à la défense de Vannes, et je n’ai eu d’autre peine que celle de contenir leur zèle. 1000 hommes et 4 canons sont partis de Brest; des détache¬ ments de Lorient sont aussi arrivés et je compte qu’il y aura sous huit jours environ 3,000 hom¬ mes réunis à Vannes où je suis arrivé le 1er de ce mois. De bonnes nouvelles nous arrivent de la Vendée, mais nous avons été tant de fois trompés sur cet infernal pays, que je n’ai pas cru devoir suspendre la marche des forces qui se portent vers le Morbihan. J’ai fait part de leur arrivée à mes collègues qui sont à Rennes et à Nantes, et au général Rossignol que j’attends aujourd’hui. J’ai d’autant moins balancé à gar¬ der les troupes que le département du Morbihan est un de ceux qui demandent à être le plus surveillés. Toutes les administrations ont con¬ couru aux forces départementales et au fédéra¬ lisme ; le peuple des campagnes est gangrené de fanatisme, et on assure que plus de 200 prêtres réfractaires infectent les campagnes. « Je profiterai de mon arrivée dans le pays pour purger toutes les administrations, mais je suis dans le plus grand embarras pour les rem¬ placements. J’espère pourtant trouver quelques bons républicains dont les principes nous assu¬ reront le pays. Je profiterai du séjour des trou¬ pes pour opérer une régénération et une purga¬ tion complète. « Je suis secondé ici par le jeune Julien que j’y ai trouvé, il se conduit on ne peut mieux (1) Archives du ministère de la guerre , armée des Côtes de Brest , carton 5/13, liasse 2. dans la mission que vous lui avez donnée et il mérite à tous égards la confiance du comité. « Prieur (de la Marne) ; Blavier, secrétaire de la commission. « P. S. Lorient paraît régénéré, c’est un poste important. Tréhouart est à Belle-Isle. » X. Jean-Baptiste Le Carpentier, représentant du peuple, dans le département de la Manche, au comité de Salut public (1). « Valognes, le 4e jour de la 1er décade du second mois, l’an II de la République. « Citoyens collègues, « J’avais le pied dans la voiture pour me rendre à Cherbourg, lorsqu’un courrier extraor¬ dinaire m’est arrivé du département de la Manche, pour me remettre, avec une lettre des administrateurs, copie de celle qu’ils reçurent hier de mon collègue Garnier. Cette dépêche a provoqué une nouvelle mesure que vous trou¬ verez contenue dans-l’arrêté ci -joint. Garnier va marcher contre les rebelles, je vole à Cher¬ bourg. Je réponds sur ma tête de la sûreté de ces côtes. « Le Carpentier. » Arrêté (2). Nous, représentant du peuple, délégué par la Convention nationale dans le département de la Manche; Vu la lettre adressée hier aux administrateurs du département de la Manche par notre collègue Garnier, laquelle écrite de Muneville près la mer, à 10 heures du soir, nous a été transmise au¬ jourd’hui par les mêmes administrateurs, et dont il résulte que selon le rapport fait à notre col¬ lègue, les rebelles qui menaçaient Rennes, avaient tourné cette ville, que même le cri pu¬ blic assurait qu’ils étaient à Pontorson et que ces mouvements annonçaient de leur part l’in¬ tention de se jeter dans le département de la Manche. Considérant que le salut de ce département, comme celui de l’Ille-et-Vilaine et de la Répu¬ blique entière exige que les derniers coups de vigueur soient portés contre les rebelles et qu’il est nécessaire d’employer à cet effet les troupes formées dont nous pouvons encore disposer sans compromettre d’ailleurs la sûreté de nos côtes ; Avons, en vertu des pouvoirs à nous donnés, arrêté ce qui suit : Art. 1«. Le contingent du district de Coutances, levé dans le mois de juin dernier, actuellement orga¬ nisé en bataillon et armé avec une partie des (1) Archives nationales, carton AFii, 268, pla¬ quette 2257, pièce 32. (2) Archives nationales, carton AFii 268, pla¬ quette 2257, pièce 31.