178 [Assemblée nationale.) Art. 8. A l’égard des biens des religionnaires fugitifs adjugés à titre de location, ceux qui en obtiendront la mainlevée seront obligés d’en entretenir les baux ; et ils en percevront les ioyei s, à compter du jour de leur demande. Ils pourront, en conséquence, exercer contre les fermiers toutes les actions résultant desdits baux, à la charge d’en remplir également toutes 1 es clauses et conditions. Art. 9. Pourront néanmoins, ceux qui auront obtenu mainlevée, faire procéder à la visite des baux par experts, ou à défaut, nommés d’office; lesquels estimeront les ré édifications, plantations et améliorations qui se trouveront à faire auxdils biens; et ils sont autorisés à compenser le montant de cette estimation jusqu’à due concurrence avec les sommes qu'ils devront rembourser aux adjudicataires, en vertudes dispositions de l’article précédent. Art. 10. Dans lecasoùle montant des sommes, à répéter d’après l’estimation des experts, excéderait le remboursement à faire à l’adjudicataire, celui qui a obtenu la mainlevée pourra se pourvoir devant les mêmes juges pour s’y faire payer le surplus par l’adjudicataire. Art. 11. Les baillistes etadjudicataires des biens appartenant aux religionnaires fugitifs, seront tenus de restituer à ceux qui obtiendront la mainlevée de ces biens, le prix des bois et arbres de futaie qu’ils auraient coupés sur ces biens depuis le jour de publication du dicret rendu le 10 juillet-dernier, et ce à dire d’experts accordés ou prix d’oftice. Art. 12. Les héritiers ou ayants cause des religionnaires fugitifs, dont les biens auraient été vendus, ne pourront les revendiquer; mais il leur sera donné mainlevée et délivrance des rentes constituées par le gouvernement des deniers provenant de la vente desdits biens. Art. 13. Tous prétendants droit à la propriété des biens dont la mainlevée aura été accordée, seront tenus de se présenter dans le délai de cinq années, à compter du jour de la publication de la prise de possession desdits biens, prescrite par l’article VI du préseut décret. Lequel délai courra même contre les mineurs sans aucuneespérance de restitution. Art. 14. Ceux qui se présenteront dans le délai de cinq années ne pourront repéter les fruits de ceux qui auraient obtenu la mainlevée, qu’à compter du jour de la demande. Art. 15. Les portions de revenu des biens des religionnaires fugitifs, ci-devant accordés aux dénonciateurs, cesseront de leur appartenir, à compter du premier janvier 1791, et seront soumises à la même régie et comptabilité qui sera établie pour le surplus des autres biens. Art. 16. Les dons et les concessions, faits à titre gratuit, des biens des religionnaires fugitifs, sont révoqués sans que les donataires et concessionnaires puissent se prévaloir d’aucune prescription; et néanmoins ils ne seront tenus à aucune restitution des fruits; mais la prescription pourra être opposée par leurs héritiers et successeurs à titre universel, qui auraient possédé lesdits biens pendant l’espace de trente ans. A l’égard des tiers acquéreurs et successeurs à titre particulier, ils ne pourront être inquiétés en aucun cas. Art. 17. Toutes les demandes en mainlevée et toutes les instances en restitution desdits biens, qui sont actuellement pendantes au conseil, seront, après la publication du présent décret, renvoyées au tribunal de district de la situation des biens, [2 décembre 1790.] pour y être jugées les premières par ordre de leur date. Art. 18. Il sera dressé incessamment un tableau des biens saisis sur les religionnaires fugitifs, et qui sont actuellement compris dans le bail général avec l’énonciation des lieux de leur situation et indication des noms des fugitifs ou propriétaires anciens, lequel tableau sera imprimé et envoyé à chaque tribunal de district pour y être affiché et enregistré. Art. 19. Après l’expiration du délai de trois années fixé pour se pourvoir en mainlevée, les biens pour lesquels il ne se sera pas présenté aucun demandeur en mainlevée, seront vendus dans les mêmes formes que les biens nationaux, pour le prix en provenant être placé en capitaux ou déposé dans la caisse de l'extraordinaire, et être restitués sans intérêt aux parents heritiers ou avants-cause dans quelque temps qu’ils se présentent, en justifiant par eux de leur descendance ou titres d’hérédité, suivant les formes déjà décrétées. Art. 20. Les baillistes et autres débiteurs des biens mis en régie ne pourront, sous quelque prétexte que ce soit, se refuser au payement du prix de leurs baux ou du montant des rentes qu’ils doivent; et ils seront tenus de payer au régisseur général actuel les arrérages échus et à échoir des fermages et rentes jusqu’au jour de la signification de la mainlevée qui pourra eu être accordée, jusqu’à ce que l’Assemblée nationale ait statué sur le nouveau régime qu’elle se propose u’établir dans cette partie en attendant la vente desdits biens portée dans l’article précédent. Art. 21. Toutes personnes qui, nées en pays étrangers, descendent eu quelque degré que ce soit d’un Français ou d’une Française expatriés pour cause de religion, sont déclarés naturels français, et jouiront des droits attachés à c tte qualité, s’ils reviennent en France, y fixent leur domicile et prêtent le serment civique. Les fiis de famille ne pourront user de ce droit sans le consentement de leur père, mère, aïeul ou aïeule, qu’autant qu’ils seront majeurs ou jouissant de leurs droits. Art. 22. L’Assemblée nationale charge sou président de présenter dans le jour ce decret à la sanction du roi, avec prière à Sa Majesté de donner des ordres à tous ses ambassadeurs, ministres, envoyés, résidents, consuls, vice-consuls ou gérants, auprès des puissances étrangères, afin que ce présent décret soit incessamment connu de toutes les familles françaises ou descendant de Français. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. ALEXANDRE DÈ LAMETll. Séance du jeudi 2 décembre 1790, au matin (1). La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin. M. Salieetti, secrétaire , donne lecturedu procès-verbal de la séance d’hier. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 décembre 1790. J Divers membres présentent quelques observations qui sont rejetées par la question préalable et le p;ocès-verba! est adopté. Il (jst fait lecture d’une adresse des instituteurs publics de l'Oratoire qui font hommage à l'Assemblée d'un projet d'éducation nationale. Le passage suivant de l’adresse est fort applaudi : « Débarrassés de ces formes claustrales et si dangereusement captivantes qu’inventèrent la superstition et le despotisme pour attrister l’innocence, rembrunir les vertus et provoqmr tous les vices, les p nsionnaires peuvent devenir des familles nationales, des abrégés de la cité. La Constitution française peut s’v réfléchir, tous b s pouvoirs s’v peindre en raccourci et la jeunesse y faire un heureux apprentissage des mœurs du citoyen et des devoirs de l’homme public. « Il est un sexe que l«t Constitution de l’Etat n’appelle point à l’exercice des droits politiques, mais que la nation et nos mœurs ont destiné à une grande influence sociale. Son éducation, sans doute importante, est peut-être encore un de ces iniérêts publics, dont les lois sont forcées de remettre le soin aux mœurs. Les familles ne sont-elles pas les principale-ou presque les seules écoles essentiellement consacrées à l’enseignement de ces devoirs domestiques, de ces vertus conjugales et maternelles qui composent la morale des citoyennes? Bornons à un très petit nombre d’années et d’objets l’instruction publique des filles : leurs mères y suppléeront avec zèle et remercieront la loi de ne les avoir point exemptées de leur obligation la plus douce. « Le législateur portera ses regards sur ['héritier du trône, sur cet enfant de la nation qui deviendra le magistrat suprême, le gardien des lois, le moteur des forces, le conservateur de l’harmonie sociale. Que la mollesse et l’adulation n’environnent pas son enfance; mais que sous les yeux des représentants de la nation, près des exemples de son père, au milieu de jeunes citoyens de son âge, il apprenne les devoirs des rois en éiudiant les droits des peuples ; qu’il aille parcourir ensuite sa riche et industrieuse patrie ; qu’il aille en des régions étrangères interroger la nature, la raison et les moeurs; et qu’il revienne promettre à son pays le bonheur des générations présentes. C’est surtout dans l’éducation du jeune prince qu’il convient d’emprunter quelques idées à la sagesse de ces peuples antiques qui, s’ils avaient des institutions inférieures à celles des Français, étaient au moins trop près de la nature pour être loin de la liberté. » (L’adresse et le projet d’éducation nationale sont renvoyés au comité de Constitution.) M. Iaarclievêque-Thihaut propose d’admettre M. 0. Gormaun pour remplacer M. de Cocbe-rel, député de Saint-Domingue. Un membre du comité de vérification des pouvoirs observe que la démission de M. de Cocherel n’a pas été acceptée parce qu’elle n’était pas conçue en termes convenables. (L’Assemblée, sur cette observation, passe à l’ordre du jour.) M. Vieillard , député de Coutances , rend compte, au nom du comité des rapports, d’une contestation qui s’est élevée entre le directoire du département de la Somme et la municipalité de Doullens. Cette ville ayant obtenu, lors de la division du royaume, un cinquième district, a 179 excité de grandes réclamations dans l’assemblée électorale. Plusieurs communautés du district même, effrayées de la dépense, en ont demandé la suppression au d rectoire. Sur celte pétition, le procureur général syndic a écrit à toutes les communautés pour (es engager à émettre leur vœu, en ajoutant que, s’il était général, l’Assemblée nationale pourrait y déférer sur l’avis du directoire du departement. Piquée de cette démarche, la commune de Doullens a pris une délibération injurieuse au directoire et aux députés du déparlement à l'Assemblée naiionale : elle l’a fait ensuite répandre au nombre de mille exemplaires, sous le nom du sieur Riogard, notable. Le directoire a cassé aussitôt cet acte et a mandé à la barre le maire, le procureur de la commune, le sieur Ri gard et le greffier avec son registre. Les deux premiers ont obéi, mais les autres ne s’étant pas rendus, le directoire a envoyé sur les lieux, pour commissaire, le sieur Emery et a pris un parti bien sévère contre le sieur Ringard ; il l’a suspendu de ses fonctions de notable et de citoyen actif jusqu’à ce qu’il eût obéi. Le commissaire arrivé, la municipalité lui a répondu qu’ebe persislait dans ses précédents arrêtés; qu’au surplus, elle avait instruit le Corps législatif. Je n’entrerai pas, dit le rapporteur, dans la question de savoir si le cinquième district est un e ou non, cela ne nous regarde pas; mais on ne peut nier que la conduite ne la commune de Doullens ne soit extrêmement répréhensible vis-à-vis du directoire. 11 est vrai que le directoire ne devait pas suspendre le sieur Ringard sans le renvoyer en même temps aux tribunaux pour être jugé, car ce renvoi est expressément ordonné par voire instruction. Votre comité a donc pensé qu’il fallait annuler les arrêtés de la commune de Doullens et la partie de celui du directoire qui concerne le sieur Ringard. Voici le projet de décret que nous vous proposons : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu sou comité des rapports sur les pétitions respectives des administrateurs du directoire du département de la Somme, et des officiers municipaux de la ville de Doullens, décrète que sou comité de Constitution lui fera incessamment son rapport sur les differents délits dont les membres des municipalités et corps administratifs peuvent se rendre coupables, et sur les punitions qu’il conviendra d’infliger suivant les circonstances; « Et néanmoins déclare la délibération prise par le corps municipal et par le conseil général de la commune de Doullens, le 27 septembre dernier, et autres qui en ont été la suite, nulles et comme non-avenues. « Déclare pareillement la délibération prise le 30 octobre dernier, par les administrateurs du directoire du département de la Somme, nulle et comme non-avenue, en ce que, par ladite délibération, le sieur Ringard, notable, a été suspendu de cette qualité et de celle de citoyen actif. » (Ge décret est adopté sans opposition.) M. Vernier, au nom du comité des finances , présente un projet de décret qui a pour objet : 1° les formes avec lesquelles Jes délibérations du conseil général de chaque commune pourront être exécutées; 2° celles avec lesquelles les districts on départements pourront établir des impositions particulières et faire des emprunts qui les con-cer tien i ; 3° la manière dont les dépenses des dé-