334 [Assemblée nationale.} voirs ne sont pas définis, où tous les devoirs sont incertains, et où on ne fait pas un pas sans craindre une erreur ? Une administration provisoire est sans cesse arrêtée par le désaveu qui peut la suivre ; elle a peine à faire quelque bien ; et au moment où nous recouvrons la liberté, il faut nous donner et la liberté de faire le bien, et le pouvoir de le faire dans toute son étendue. M. Beauvais des Préaux, président du district des Prémontrés, fait ensuite lecture d’un mémoire où sont développés tous les avantages que doit retirer la capitale de l’existence des districts dans l'organisation de la municipalité de Paris. M. le Président fait à la députation la réponse suivante : L’Assemblée nationale ne peut douter ni du patriotisme des citoyens et de la commune de Paris, dont elle a tant de preuves, ni de la soumission de tous les Français aux décrets de l’Assemblée nationale, sanctionnés par le roi. Elle a consacré le principe que tous les citoyens ont le droit de présenter des pétitions : elle prendra donc en considération l’adresse qui lui est présentée par la majorité des districts de Paris et les idées qu’ils pourront lui soumettre. Bientôt dans le développement du système de l’organisation et de la représentation générale, l’Assemblée nationale appliquera à l’organisation particulière de la ville de Paris, les principes qu’elle a déjà décrétés devoir être communs à tous les citoyens et à toutes les parties de l’Empire. Conserver les principes politiques et conserver les droits des citoyens, ne sont pas dans l’administration des Etats deux maximes contradictoires : c’est une seule maxime. L’Assemblé nationale pèsera soigneusement les observations que vous lui avez présentées. (La séance est levée à dix heures du soir.) ANNEXE A la séance de l’Assemblée nationale du 23 mars 1790. Observations des députés de Saintonge contre les prétentions de la ville de la Rochelle. Me voir que soi, ne s’occuper que de ses intérêts, leur sacrifier l’avantage de tout ce qui nous entoure, c’est le caractère de l’égoïsme. Ce sentiment qui créa le despotisme, devrait être mort au moment où la liberté a pris naissance. Comment survit-il à l’esclavage de la France? et comment ose-t-il se montrer aussi à découvert que dans les prétentions de la ville de la Rochelle. On demande pour elle la réunion de tous les établissements que va créer le nouveau régime. 11 semble qu’une inique substitution ait assuré tous les avantages à la Rochelle ; que la loi ne doive considérer qu’elle dans leur dispensation, et que la Saintonge doive être soumise à ses spéculations et à ses désirs. Examinons donc les titres sur lesquels la Rochelle fonde ses injustes projets d’envahissement. t. La Saintonge isolée avait tout pour former un [23 mars 1790.] département ; surface, population, impositions, convenances, rien ne lui manquait ; elle n’avait rien à désirer de ses voisins que de la bienveib* lance et de l’affeclion. L’Aunis, au contraire, avec une population Re 100,000 âmes, une surface de 120 lieues carrées se complaisait dans son enceinte, et voulait reste? seul. Les députés de Saintes, loin de contrarier ce vœu de leurs voisins, se sont empressés d’y réunir le leur; ils se sont clairement exprimés dans un mémoire remis au comité de constitution, pour que l’Aunis eut son administration particulière : ceux de Saint-Jean-d’Angely ne s’y sont pas opposés. L’Angoumois, au levant, voulait aussi former un département particulier. Cette position géographique a engagé le comité à proposer des sacrilices à la Saintonge, et à lui demander de s’unir avec l’Aunis, pour faire un département, en abandonnant du côté de l’An-goumois, une portion de terrain pour l’agrandir. Les Saintongeois ont senti qu’ils appartenaient à l’Etat avant d’appartenir à la province. En conséquence, ils se sont réunis à la justice de l’Assemblée, qui les a réunis par un décret avec l’Au-nis, pour faire avec lui une même société. Cette réunion ne leur a été pénible que parce qu’elle entraînait la nécessité d’une séparation avec d’anciens frères qu’ils espèrent retrouver dans leurs nouveaux associés. Mais les députés de îa Saintonge n’ont pas entendu se soumettre à un despote, ni même se donner une métropole ; ils ont cru trouver, au contraire, dans les dispositions fraternelles de La Rochelle, dans les ressources de sou industrie, dans l’avantage de ses relations, un nouveau moyen de bonheur. Le siège du département et du directoire, le tribunal du même nom, l’établissement des caisses, Saintes et Saint-Jean-d’Angely, eussent tout possédé, si elles fussent restées seules, comme elles le pouvaient, puisqu’elles se suffisaient à elles-mêmes. La Rochelle, au contraire, veut tout avoir. Mais l’Assemblée nationale, qui se trouvera entre elle et nous, interposera sa justice. ' Puisque la Rochelle invoque en sa faveur les raisons de droit et de convenance, pour mettre le comité Reconstitution et l’Assemblée nationale à même de prononcer, nous examinerons les convenances et les droits. § leï‘. — Raisons de droit. Nous serions tentés de demander ce qu’on entend ici par les droits. Ceux de l’homme, ceux du citoyen sont définis et consacrés par l’Assemblée nationale. Mais parmi les monuments précieux de la liberté conquise, nous cherchons en vain des décrets qui consacrent les droits des cités. Nous n’en connaissons pas qui établissent la hiérarchie des villes; nous croyons même et nous le disons avec joie aux modestes habitants d'un village obscur, mais heureux par cela même qu’il est inconnu, nous croyons qu’aux veux du législateur et du gouvernement, Une communauté de campagne a autant et plus de droits à leur intérêt, à leur surveillance, que de fastueuses cités. C’est la première qui nourrit et alimente les secondes. 11 est bon de réparer l’injustice de l’au-cien régime; le temps n’est plus où le pauvre était foulé, privé de son nécessaire, chassé de sa chaumière pour embellir le palais d’un despote. archives parlementaires.