ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Baill. de Vitry-lc-François.] 211 [Étals gén. -1789. Cahiers.] Pré; Dumont, curé de Villiers-devant-le-Thours; Angard, curé de Saint-Souplet; Jadelot, prieur de Trois-Fontaines; Langlois , curé de Plivot; Becquey, chanoine de Châlons; (îangaud, curé de Marceuil; de Brauges, chanoine de Vitry; l’abbé Daüdigné; Buirette, curé de Sainte-Menehould;' dom Louis Lènet Divoiry, premier titulaire de Novi, près Rethel; Domyné Deslandres, abbé de Monceilz, président; et Leprest, curé d’Àvenav, secrétaire. La minute du présent cahier, contenant dix feuilles, a été cotée et paraphée par moi, abbé régulier de l’abbaye de Monceilz, ordre dé Prémontré, président de l’assemblée du clergé du bailliage principal et secondaire réunis au bailliage de Vitry, ce 24 mars 1789. Signé Domyné Deslandres. Collationné et certifié véritable et conforme à la minute par moi, greffier en chef soussigné : Félix. CAHIER Des plaintes cl doléances de l'ordre de la noblesse du bailliage de Vitry -le-François. Nota. Ce cahier manque aux Archives de V Empire. Nous le demandons à Vitry-le-Frànçôis et nous l’insérerons ultérieurement si nous parvenons à le découvrir. CAHIER GÉNÉRAL Contenant les très-humbles et très-respectueuses remontrances , plaintes et doléances du tiers-état du bailliage de I itry-le-François, Sainte-Menehould , Saint-Dizier , Epcrnay et Fisme, assemblés à Vitry -le-François bailliage , principal , en exécution de la lettre du Roi du 24 janvier 1789, du règlement y annexé et de l'ordonnance cle M. Legrand, bailli d’épée dudit Vitry, du 17 février suivant (1). Les députés du tiers-état desdits bailliages réunis seront chargés,' avant tout, d’exprimer à Sa Majesté l’amour respectueux et le dévouement sans bornes de ses fidèles communes des bailliages, ainsi que la reconnaissance dont elles sont pénétrées pour la grâce qu’elle vient d’accorder en les appelant au pied du trône et en les mettant à meme de faire connaître à son coeur paternel les abus multipliés sous lesquels elles gémissent et les remèdes qu’elles croient devoir y être apportés. ADMINISTRATION GÉNÉRALE. Art. 1er. Sa Majesté sera très-humblement suppliée par les députés de leur permettre de réclamer aux Etats généraux, pour le tiers-état, l’égalité des suffrages avec les deux autres ordres réunis ; et en conséquence, lorsque la question d’opiner sera proposée, lesdits députés demanderont que les Etats votent ensemble sans les diviser, et que les voix soient comptées par tête et non par ordre, en observant qu’un membre du clergé ouvre d’abord son avis, un de la noblesse ensuite, et enfin deux du tiers-état; que dans le cas où il serait nécessaire de former des bureaux particuliers, ils soient composés de députés du tiers-état, en nombre égal à celui des deux premiers ordres réunis, et qu’il ne soit pris aucune délibération définitive que les propositions des différents bureaux n’aient été rapportées à l’assemblée générale et (1) Nous publions ce cahier cl’après un manuscrit des Archives de l’Empire. qu’elles ne puissent être considérées comme arrêtées définitivement qu’à la pluralité des voix recueillies par tête, et qu’en aucun cas le tiers-état ne puisse être représenté que par des membres pris dans son ordre. Art. 2. Pour fixer invariablement la constitution de la monarchie, les députés reconnaîtront - aux Etats généraux l’indépendance absolue du Roi de toute puissance étrangère, soit ecclésiastique, soit laïque. Ils reconnaîtront pareillement que le trône appartient au Roi comme aîné mâle succédant aux rois de la race, et qu'il doit appartenir également sans aucun partage à ses successeurs mâles soit en ligne directe, soit en collatérale, à l’exception des femelles, dans tous les cas l’ordre de pri-mogôniture gardé. Que dans aucun cas et sous aucun prétexte les sujets du Roi ne peuvent être dispensés par aucune puissance spirituelle et temporelle de leur serment de fidélité. Art. 3. Comme l’intérêt du royaume et la nécessité de donner à la monarchie française une constitution permanente exigent* que la tenue des Etats généraux soit périodique, Sa Majesté sera très-humblement suppliée d’ordonner que lesdits Etats seront à l’avenir convoqués tous les cinq ans (ainsi que cela fut demandé par les Etats de Tours) et qu’à la dernière séance de chaque tenue, lesdits Etats seront ajournés pour ladite époque. Art. 4. Que pendant l’intervalle qui s’écoulera entre chaque tenue des Etats, ils soient remplacés par une commission intermédiaire composée en la même proportion que les Etats généraux, et au moyen de laquelle aucun tribunal de magistratu e ne puisse jamais être revêtu du pouvoir desdits Etats. Sur cet article, le bailliage de Vitry a pensé que ladite commission ne devait pas être permanente, mais seulement convenable dans le cas de nécessité et formée à l’avance des membres nommés par les Etats provinciaux dont il sera ci-après parlé. Sur ce même article, le bailliage d’Epernay, qui vote pour la permanence de cette commission, demande que partie de ses membres soit annuellement renouvelée par le choix des Etats provinciaux. Art. 5. Que les fonctions de cette commission intermédiaire, si elle est déterminée permanente, consisteront à surveiller la répartition des impôts consentis par la nation et à suivre les autres opérations dont elle pourra être chargée par les Etats généraux. Art. 6. Qu’il sera proposé auxdits Etats généraux d’arrêter qu’en aucun cas il ne pourra être établi aucun impôt d’une durée illimitée sans le consentement desdits Etats, qui, à chaque convocation, pourront délibérer sur l’abrogation, prorogation ou modification des impôts, suivant les besoins du royaume. Art. 7. Qu’il sera également proposé d’arrêter qu’en aucun cas il ne pourra être fait aucun emprunt qui ne soit le résultat du vœu des Etats généraux, et qu’en assignant en même temps pour hypothèques au porteur une portion libre des revenus de l’Etat et en pourvoyant aux moyens d’en amortir le principal, si l’emprunt n’est pas viager. Art. 8. Que Sa Majesté sera également suppliée, lors des prochains États généraux, d’accorder à la province de Champagne Rétablissement d’Etats provinciaux en la même forme que ceux du Dauphiné, par arrondissements égaux, et de per- [Étais gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Raiü. de Vilry-le-François.] 212 mettre aux Etats généraux de voler pour l’établissement desdits Etats provinciaux, au sein de leur prochaine assemblée. Sur cet article le bailliage de Vitry observe qu’il lui paraîtrait convenable qu’il y eût en chacun des départements qui diviseront la province, des assemblées qui pussent, ainsi que la commission intermédiaire choisie pour ces assemblées, correspondre avec les Etats provinciaux ou leur commission intermédiaire, faire la répartion des impôts entre les paroisses, porter les plaintes de chaque municipalité et meme des particuliers auxdits Etats provinciaux et renvoyer aux intéressés les arrêtés et décisions desdits Etats, et qu’au surplus ces assemblées fussent composées des trois ordres en la même proportion que les Etats provinciaux et divisées par districts qui en choisiraient les membres parmi les domiciliés ou ayant fonds dans ces districts, pour être, ces assemblées, renouvelées aux époques et dans les formes qui seraient déterminées par lesdits Etats provinciaux. Art. 9. Que l’étonnante bigarrure de la composition des bailliages et les justes motifs de réclamation qu’ont la plupart des citoyens contre leur défaut de représentation aux 'Etats généraux déterminent à supplier Sa Majesté d’ordonner qu’à l’avenir la convocation des Etats généraux se fasse par Etats provinciaux et par arrondissements égaux, soit en population, soit en impositions. Art. 10. Que le droit d’élection, des officiers municipaux soit rendu aux villes de Vitry et Saint-Dizier comme aux autres villes de la province, et il est consenti par ladite ville de Vitry que les officiers municipaux qui la gouvernent actuellement soient conservés jusqu’à leur remboursement effectif; qu’il soit donné aux hôtels de ville une constitution analogue à celle des assemblées provinciales actuellement existantes, et qu’il soit à cet effet provoqué, tant pour l’élection des officiers municipaux que pour les emprunts et les impositions extraordinaires, des assemblées de la commune dans la forme prescrite par les édits de 1764 et 1765. Art. 11. Que toute l’administration et régiê des biens communaux et le régime des municipalités des villes, bourgs et villages soient uniquement confiées aux Etats provinciaux ; que le contentieux en soit attribué aux juges ordinaires des lieux, et que le peuple soit enfin soulagé des vexations et oppressions qui le rendent si fréquemment victime de l’arbitaire; qu’enfin les municipalités soient autorisées à procéder à l’adjudication de leurs usages communaux par-devant les juges des lieux sans frais. Art. 12. Sa Majesté ayant, d’après le vœu des Etats généraux, comme nous le demandons, déterminé la constitution de la nation, les députés pourront aux Etats généraux reconnaître les dettes de l’Etat actuellement existantes comme dettes nationales, supplieront Sa Majesté de leur permettre d’en constater et fixer la masse, et aviseront ensuite aux moyens de les rembourser, d’en assurer les capitaux ainsi que l’acquit des rentes qui ne pourra en aucun cas être suspendu ni retardé. Art. 13. Le tiers-état des cinq bailliages réunis supplie Sa Majesté, lors des Etats généraux, de considérer que le nombre des brigades de maréchaussée est insuffisant pour la sûreté publique, surtout dans les pays couverts de bois, et en conséquence de l’augmenter ; de leur prescrire l’obéissance envers les juges ordinaires, et qu’à cet effet le régime de la maréchaussée soit changé. Art. 14. Sa Majesté sera également suppliée de vouloir bien ordonner que la milice par la voie du sort soit abolie, et que chaque communauté sera tenue de fournir, en raison de sa population, le nombre d’hommes qui sera demandé par le gouvernement, à la charge que la dépense en sera supportée par les fonds libres de la province. Sur ce vœu le bailliage de Vitry a proposé la modification suivante : Que le tirage de la milice soit remplacé par une contribution annuelle de 3 livres par tête, sous le nom de rachat de milice, par tous les garçons ou veufs sans enfants valides et sans égard à la taille, depuis l’âge de dix-huit ans accomplis jusqu’à quarante, dont le produit sera employé à l’entretien et au recrutement des troupes provinciales, sans exception pour les valets, domestiques et livrées du clergé, de la noblesse et des privilégiés, de sorte qu’il n’y ait que les enfants des nobles et les garçons du tiers-état étant au service du Roi qui soient affranchis ou dispensés de ladite contribution. Art. 15. Que toutes communications sur les rivières jugées par les Etats provinciaux nécessaires à la circulation intérieure des denrées, tous chemins, ponts, digues et ouvrages nécessaires au public et à cette circulation cessent d’être charges locales dans tous les cas et soient formés et entretenus au moyen des fonds de la province. Art. 16. Que les chemins vicinaux et de traverse soient déterminés et la largeur fixée par l’ordonnance, et que les municipalités soient autorisées, après une simple sommation , à faire couper les haies et élargir les voies publiques. Art. 17. Que la police des corvées bourgeoises pour la réparation des rues et avenues, qui a toujours appartenu aux officiers de justice des lieux, leur soit conservée avec exclusion pour tous autres officiers de police, de judicature et des finances; que cependant, en cas de négligence de la plupart des juges des lieux, sur la dénonciation des syndics et habitants des paroisses, sur la réquisition du ministère public des bailliages royaux, les procureurs fiscaux et juges des lieux soient contraints d’ordonner et de faire procéder à leur confection ; que pour la contribution à ce genre de travail qui, dans tous les cas, sera proportionné au besoin de la paroisse, il ne puisse être prétendu privilège par qui que ce soit. Art. 18. Que les communautés d’habitants soient autorisées à rentrer dans leurs biens usurpés depuis quarante ans en justifiant de leurs titres. Art. 19. Que lesdites communautés soient autorisées à aliéner ou à louer au profit de leurs communes et de l’avis de la pluralité des habitants, les biens communaux qui ne seraient pas d’une assez grande étendue pour servir à la pâture des bestiaux, à la charge d’emplois pour l’utilité des paroisses. IMPOTS. La nation, d’après les lois constitutionnelles de l’Etat, pouvant regarder comme illégaux la plupart des impôts actuellement subsistants, Sa Majesté, lors des Etats généraux, sera très-humblement suppliée de supprimer lesdits impôts pour les remplacer de suite, du consentement des Etats généraux, par les trois moyens qui vont être proposés.* Art. 1er. Sa Majesté voudra bien permettre aux Etals généraux avant de voler aucun impôt : 1° De vérifier les charges de l’Etat; [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Raill.de Vilry-le-François.] 213 2° D’aviser aux réformes et modifications dont elles paraîtront susceptibles; 3° De faire la division des départements et d’en régler les dépenses; 4° De s’occuper de l’examen comparatif des ressources de chaque province pour établir entre elles un marc la livre. Art. 2. Elle voudra bien consentir que la nation ait le droit à l’avenir de s’imposer elle-même; que le remplacement des impôts se fasse toujours en argent, jamais en nature, sur les trois ordres indistinctement, au prorata de leur fortune et sans distinction d’aucuns privilèges pécuniaires, et sera ladite imposition payable, quant aux fonds, aux lieux de leur situation, et quant aux facultés, industrie, commerce, émoluments d’offices, places, états, emplois, aux lieux du domicile, sauf aux Etats à délibérer sur le taux de la retenue que pourront faire à leurs créanciers les débiteurs de rentes. Que cet impôt soit étendu aux rentes et pensions assises sur le trésor royal, sur les revenus publics, sur le clergé et autres assignats quelconques, et en conséquence autoriser les payeurs à faire la retenue dudit impôt, du montant de laquelle ils compteront au trésor royale. Le bailliage de Vitry a observé qu’il pourrait y avoir division dans l’impôt en conservant celui des vingtièmes, qui, n’ayant été établi qu’à temps, pourrait être supprimé aussitôt que l’état des finances le permettra. Le bailliage de Saint-Dizier a formé le vœu d’une imposition territoriale, perçue indistinctement sur toutes les propriétés des trois ordres et sans avoir recours pour la perception aux agents du fisc. Art. 3. Que l’impôt soit limité toujours d’une tenue à l’autre, sans pouvoir être jamais prorogé ni étendu sans le concours desdits États généraux, sous aucun prétexte et dans quelques cas que ce soit, parce que Sa Majesté peut toujours réunir ses sujets près de sa personne lorsqu’elle le jugera à propos. Vœux de Vitry et Sainte-Menehould. Art. 4. Que, pour parvenir aune répartition plus équitable sur les fonds et empêcher qu’aucune propriété ne puisse y échapper, il soit fait un cadastre dans chaque paroisse de toutes les propriétés foncières du territoire, avec évaluation relative et proportionnelle des héritages des diverses contrées par-devant des commissaires assistés des municipalités, en observant d’y appeler comme légitimes contradicteurs le syndic et un officier municipal de chacune des paroisses limitrophes et notamment d’après les principes adoptés par la haute Guyenne, sans néanmoins que cette nouvelle évaluation puisse servir de base pour l’imposition actuelle qu’elle n’ait été faite et parachevée pour toute la province. Art. 5. Les Etals généraux, après avoir accordé leur consentement sur l’établissement d’un impôt quelconque, arrêteront le contingent que chaque province devrg, fournir, en raison de la population, de l’abondance et de la qualité des productions, du commerce et autres sources de richesse; en conséquence, ils voudront bien prendre en considération les inégalités qui subsistent dans la répartition des impôts, entre les différentes généralités, et qui grèvent singulièrement la Champagne ; et Sa Majesté sera suppliée d’ordonner au ministre des finances de procurer aux Etats tous les renseignements qui leur paraîtront nécessaires pour établir et perfectionner leurs connaissances en cette partie. Sa Majesté sera suppliée d’ordonner que tous impôts consentis par les Etats généraux et répartis par eux sur les différentes généralités seront perçus nonobstant tous refus, oppositions de provinces et généralités, pays d’Etats et cours de justice, sauf leurs représentations au Roi et aux Etats généraux, et sans qu’en matière d’impôts il puisse être prétendu ni accordé aucun privilège à qui que ce soit, ecclésiastiques, nobles, magistrats, juges, commensaux, traitants, financiers ou autres. Art. 6. Sera Sa Majesté pareillement suppliée d’abonner la province pour tous les impôts et de lui accorder la liberté d’en faire la répartition de la manière la plus avantageuse, la moins onéreuse aux contribuables par les Etats provinciaux. Art. 7. D’ordonner que dans la nouvelle répartition à faire par les Etats provinciaux, on charge d’abord les objets de luxe et de consommation des villes franches. Que tous privilèges des villes franches et abonnées soient supprimés, et que leurs contributions seront les mêmes que celles des autres villes et lieux taillables, sans aucune distinction. Les députés de la paroisse de Rarecourt, bailliage de Vitry, ont réclamé leurs privilèges qu’ils appuient sur une redevance envers l’empire, et se sont réservés d’étayer leurs droits par un mémoire particulier; pourquoi, dans le procès-verbal dudit bailliage il leur a été donné acte de leurs réclamations, et ayant depuis fourni ledit mémoire, il a été signé des commissaires pour être joint audit cahier. Art. 8. Sa Majesté sera suppliée d’ordonner ia suppression de l’imposition industrielle des ma-nouvriers, attendu que le produit net est la seule matière imposable et que le travail, surtout d’un manouvrier, ne peut être considéré sous ce point de vue. Le bailliage de Vitry observe que les manou-vriers, comme sujets du Roi, doivent contribuer aux charges de l’Etal, pourvu que leurs contributions soient fixées dans chaque province au salaire qu’ils peuvent retirer d’une, deux ou trois journées de travail ; que le vigneron qui est imposé pour l’exploitation de sa vigne, ne doit pas être imposé au rôle d’industrie, sinon en proportion du temps qui lui reste après celui employé à son exploitation, et qu’en ce qui concerne les maisons, elles ne doivent pas être considérées comme objet d’exploitation pour ce qui comprend le logement nécessaire et relatif à l’état et à la profession de chaque particulier. Vœu particulier de Sainte-Menehould. Art. 9. D’accorder l’établissement d’une caisse nationale pour acquitter toutes les dépenses annuelles de l’Etat, sous l’inspection et la responsabilité d’une commission nommée par les Etats généraux, constituée par eux et composée de six députés de chaque province, savoir : un du clergé, deux de la noblesse et trois du tiers-état. Art. 10. D’accorder également l’établissement d'une caisse d’amortissement des dettes de l’Etat dont le remboursement sera fixé par les Etats généraux à époque déterminée, non compris les intérêts successifs des capitaux éteints, qui seront également employés sous l’administration de la commission des Etats. Art. 11. D’ordonner que chaque année la commission des Etats généraux sera tenue de rendre compte à la matière des recettes et dépenses de [Baill. de Vilry-le-François.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 214 [Etals gén. 1789. Cahiers.] l’Etat, lequel compte sera rendu public par la voie de d’impression.. La publicité de ce compte est reconnue nécessaire par les cinq bailliages. Art. 12. Que sur les impôts que les Etats provinciaux seront autorisés à lever sur la province, il soit fait une masse suffisante pour réparer tous les accidents des eaux, de la grêle ou du feu, de manière que les non-valeurs qui résultent des décharges accordées aux malheureux ne puissent en aucun cas retomber en rejet sur les communautés. Art. 13. L’agriculture étant le nerf de l’Etat et la partie la plus contribuante, Sa Majesté sera suppliée d’ordonner que sur la masse des impôts, il soit réservé des fonds pour différents objets d’encouragements et d’amélioration plus nécessaires que tant de monuments fastueux, qui, sans utilité publique, ne flattent que la vanité de celui qui en a été l’ordonnateur. Art. 14. Que, pour simplifier la recette des impositions, Sa Majesté sera suppliée d’autoriser les différentes provinces, formées en Etats provinciaux aussitôt qu’il aura ôté possible de réaliser le remboursement des receveurs généraux et particuliers des finances créés dans les pays d’élection et provinces conquises, à faire choix d’un trésorier général de la province avec appointements fixes et déterminés, dans la caisse duquel les municipalités chargées de la perception de l’impôt, verseront les contributions respectives, lequel trésorier général recevrait pareillement le produit de toutes les perceptions de droits dans la province,, et ferait le versement directement au trésor royal, du produit net des impositions. Art. 15. Sa Majesté sera également suppliée d’ordonner le reculement des barrières à l’extrême frontière, afin que tout ce qui est Français ne soit plus étranger à ses concitoyens, conformément aux vœux sur cet objet déjà exprimés lors de la tenue des Etats généraux en 1614. Art. 16. D’ordonner la suppression des aides et le remplacement de leur produit par les moyens les moins onéreux, et surtout libérés des entraves de la finance ; d’ordonner également la suppression de tous les droits qui sont compris dans cette régie comme destructeurs du commerce national. Le bailliage de Vitry demande que, dans lo cas où il ne serait pas possible de supprimer dès à présent les droits d’aides et de la régie, le Roi soit supplié de simplifier ces différents impôts sur les vins, eaux-de-vie et boissons, tant à l’inventaire et à l’entrée des villes qu’à la vente et à la traite de province à autre ; de rendre la perception de ces droits tellement simple que sa dénomination ne soit plus un talent pour le percepteur et une chose effrayante pour le contribuable; d’ordonner que les droits qui subsisteront soient perçus sur tous les ordres de l’Etat sans exception, et que dès à présent le gros manquant qui ne produit presque rien soit supprimé ainsi que les exercices vexatoires chez les gens du commun, qui ne tendent qu’à établir une perception de droit sur la présomption d’une fraude souvent non existante. Dans le cas encore où cette suppression ne pourrait quant à présent être obtenue, le bailliage de Vitry demande provisoirement que les contrôles et marques des matières d’or et d’argent, qui exposent les commerçants en celte partie à ■des recherches et inquiétudes continuelles sans assurer le titre, soit perçu aux frais de la régie, Le bailliage d’Ëpernay réclame avec instance la suppression des droits qui sont perçus par la régie générale, et particulièrement ceux d’aides qui, par leur multiplicité et leur complication, grèvent de la surcharge la plus onéreuse les propriétés de ce bailliage, à cause du commerce des vins auquel elle apporte les entraves les plus préjudiciables, la multiplicité et complication desdits droits provoquant d’ailleurs les fraudes, entraînant la condamnation aux peines les plus sévères. Art. 17. Lorsque les Etats généraux s’occuperont de la nouvelle répartition des impôts qui seront jugés nécessaires, Sa Majesté sera suppliée que ie sel soit rendu marchand sans aucune entrave et au poids, et que si la gabelle ne peut pas être entièrement supprimée, l’impôt se perçoive aux salines et soit fixé par les Etats généraux sans aucune possibilité d'extension, de manière que le sel vendu dans la province revienne au plus à 6 soüs la livre. Et sur cette motion le bailliage de Rethel fait volontiers à Sa Majesté le sacrifice de son privilège, espérant qu’elle considérera comme un acte d’équité de les rédimer du droit de teston envers son seigneur, en observant néanmoins que dans le cas où le sel deviendrait vente libre et volon-laire, il lui serait accordé une indemnité pour la privation du privilège du sel blanc, à raison de 30 livres, dans lequel les habitants du Rethelois ont été maintenus par l’article 18 du titre XVI de l’ordonnance de 1680. La ville de Rocroy fait la même réclamation envers des lettres patentes de 1780. Art. 18. Sa Majesté sera également suppliée d’ordonner la vente du tabac en corde et en carotte, de manière que le peuple puisse s’approvisionner de chacune de ces espèces, attendu que la vente en poudre par les fermiers et leurs "employés est un moyen de plus pour exciter la contrebande et la favoriser ; en eonséquence, le débit de toute espèce de tabac en poudre sera interdit aux fermiers. Art. 19. Le tiers-état des cinq bailliages réunis forme le vœu général pour la suppression de l’octroi municipal qui se perçoit au profit du Roi, attendu que l’objet pour lequel il a été établi est rempli depuis longtemps. Art. 20. Les bailliages de Vitry et Samt-Dizier supplient spécialement les Etats généraux de solliciter auprès de Sa Majesté l’abolition du droit de rouage concédé à la ville de Chàlons tant sur les voitures que sur les bateaux et trains de bois qui descendent sur la rivière de Marne, et ce, pour l’entretien du pavé de ladite ville qui, au moyen d’une charge locale, devient une charge générale et principalement pour le. haut pays de Marne. Art. 21. Le bailliage de Vitry observe que si les différentes suppressions de droits demandées par le tiers-état exigent un remplacement, il conviendrait de préférer pour cela un droit de timbre sur les brevets, commissions, grâces, emplois dignités ecclésiastiques ou laïques et autres provisions et actes émanés de la grande chancellerie, et sur les grades militaires, les réceptions dans les ordres de chevalerie, degrés dans les universités, pensions, gratifications, offices de finances, commissions de finances ou d’employés de toute espèce, écoles des mines, chambre du commerce et sur les brevets, commissions, permissions et autres actes concernant les amirautés. Et quant à ce qui concerne la formule existante, qu’elle soit établie par tout le royaume, et que le produit résultant de l’assujettissement des provinces où elle n’a pas eu lieu jusqu’à ce jour [États gén. 1789, Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Baill. de Vitry-le-François.] 215 vienne en diminution de l’exorbitation de ce droit, à l’effet de rétablir ainsi l’égalité et la proportion des contributions dans les différentes provinces qui composent le corps de l’Etal et lui conserver le même produit. Art. 22. Sa Majesté sera suppliée d’ordon ner la ré-formation depuis longtemps projetée et reconnue nécessaire des tarifs des droits de contrôle et d’insinuatiou, que la loi nouvelle soit claire, précise et ne puisse exposer le peuple aux vexations trop communes des agents 1 du fisc, avec clause expresse que la perception une fois faite opérera la libération entière du débiteur sans aucun retour ultérieur contre lui en aucun cas, et que les contestations qui pourront s’élever sur le nouveau tarif soieut portées devant les juges ordinaires, et dans le cas où ce travail ne pourrait être fait dans un bref délai, qu’il soit au moins pourvu à la réforme provisoire des principaux abus. _ Et le bailliage de Vitrv ayant appuyé cette motion d’un mémoire fourni par la communauté des notaires de ladite ville, qui indique ces principaux abus et contient des vues utiles et intéressantes sur cette partie, il a été arrêté que ce mémoire sera annexé aux présentes comme en faisant partie, à l’effet de quoi il a été signé par M. le lieutenant général et commissaire-rédacteur du présent cahier. Art. 23. D’ordonner pareillement que les contrôleur ne pourront réunir les fonctions de notaires ni les notaires les fonctions d’huissiers, et que les agents du domaine ne pourront faire des recherches chez les particuliers. Art. 24. Les exemptions locales du droit de contrôle des actes des notaires et même clans la ville de Paris donnant lieu a des abus relativement à la date des hypothèques, Sa Majesté sera suppliée de supprimer ces exemptions, sauf à n’exiger qu'un registrement de forme sur un registre public, si elle pense devoir maintenir les franchises fondées sur rachat ou concession de faveur. Art. 25. La communauté de Sermaise, dépendante du bailliage de Vitry, a observé que quoiqu’elle soit aussi grevée que les autres communautés de la province par les impositions ordinaires ; elle est de plus chargée sans aucun motif particulier du payement des droits d’inspecteurs aux boucheries et du rachat des offices municipaux ; pourquoi elle supplie Sa Majesté de jeter un regard favorable sur la position malheureuse où elle se trouve. La communauté de Villeroi, dépendant du même bailliage, a également observé qu’elle forme pour le payement des impositions une dépendance du pays messin et de la recette particulière de Toul, tandis que, pour l’administration de la justice, elfe ressortit au bailliage de Vitry dont elle est éloignée de 18 lieues ; pourquoi elle supplie Sa Majesté de la réunir au bailliage de Toul dont elle est beaucoup plus voisine. Art. 26. Sa Majesté sera très-humblement suppliée d’accorder i’abolition du droit de franc-fief et tous les autres qui ne pèsent que sur une classe, ne devant plus y avoir de distinction entre les trois ordres, relativement aux impôts. Art. 27. D’ordonner que la corvée soit supportée également par les trois ordres. Les bailliages d’Epernay et Fîmes proposent de mettre cette contribution à la charge, de ceux qui tirent des routes le plus d’utilité, par rétablissement des barrières sur les chemins. Le bailliage de Vitry supplie Sa Majesté de prendre en considération le projet présenté en Champagne pour opérer les reconstructions et réparations des routes par le moyen d’un droit de roulage qui serait perçu à des barrières sur les voitures de poste, diligences, messageries, voiture de maître et de roulage autres que celles de grains et farines, pour le charroi des récoltes en grains et comestibles pour l’approvisionnement des villes et villages du même canton. RÉFORME DES ABUS. Art. 1er Sa Majesté sera très-humblement suppliée d’ordonner, lors des Etats généraux, la suppression des haras et gardes-étalons. Leurs franchises et immunités contrarient le système de suppression absolue de tout privilège : l’inutilité des étalons publics n’est plus un problème. Vœu particulier clu bailliage de Vitry. Art. 2. D’ordonner la suppression des pépinières entretenues aux frais des provinces : c’est une source d’abus et d’infidélités de la plupart des pépiniéristes, qui occasionnent une grande dépense sans utilité. Art. 3. D’examiner de nouveau et de réformer l’ordonnance qui réserve les grades militaires à la seule noblesse; de considérer que ce règlement est en contradiction avec l’édit donné à Fontainebleau en novembre 1750s portant création d’une noblesse militaire et avec les motifs qui Font dicté à son auguste aïeul. Les talents et le courage ne sont pas précisément annexés à la noblesse; un grand nombre de membres du tiers-état a servi et sert encore la patrie avec autant de zèle, de courage et de succès que les gentilshommes; l’ordonnance contre laquelle le tiers-état des cinq bailliages réclame ne peut avoir d’autres effets que de priver la monarchie de serviteurs utiles ; elle fait sentir trop vivement au troisième ordre qu’il est placé au dernier rang. Art. 4. Il paraît important à une nation libre, franche et sensible à l’homleur, de voir supprimer dans le code militaire toutes les punitions humiliantes infligées depuis quelque temps dans lé cas où il ne s’agit que de discipline. Art. 5. Les Etats généraux demanderont la liberté de la presse comme un moyen d’éclairer l’administration, d’instruire les sujets du Roi de toutes les ressources de l’Etat et d’attaquer les abus en les développant, à la charge par les auteurs, soit qu’ils se fassent connaître, soit qu’ils désirent rester inconnus, de signer les manuscrits de leurs ouvrages, et par les libraires et imprimeurs de mettre leur nom en tête de l’ouvrage, et demeurer, ainsi que les au très � responsables dans le cas où ils contiendraient des libelles ou des principes contraires à. la religion, aux bonnes mœurs, à l’autorité souveraine du Roi, à l’indépendance de la couronne et à l’indissolubilité du serment de Fidélité des sujets. Art. 6. D’accorder la liberté individuelle de tous les citoyens, en ordonnant la suppression des lettres de cachet et la destruction des prisons d’Etat, ou au moins de remédier, sur l’avis des Etats généraux, au danger desdites lettres de cachet, en considérant d’un coté l’avantage qui en résulte en différents cas, d’un autre, l’abus qu’on en a fait, et que l’on pourrait en faire encore; d’y pourvoir soit par Rétablissement d’un comité chargé de cette partie, soit autrement. Art. 7. D’ordonner que personne ne soit admis à exercer l’art de la chirurgie qu’il ne soit domicilié, qu’il n’ait fait les cours nécessaires dont il rapportera certificats, et qù’il n’ait été reçu qu’a- 216 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Baill. de Vitry-le-François.] près examens sérieux, lesquels examens et réceptions seront faits sans'frais; de ne plus à l’avenir accorder de privilèges à aucuns charlatans ou empiriques pour parcourir les provinces et y distribuer leurs remèdes destructeurs ; de révoquer enfin tous brevets accordés jusqu’à ce jour. Art. 8. D’autoriser avec les Etats généraux la vente des domaines engagés ou non pour la liquidation de la dette publique, ou du moins à les louer à bail emphytéotique, de manière que le peuple puisse en profiter et les améliorer comme sa propriété. Le bailliage de Vitry observe que, sous la dénomination des domaines, on ne pourra comprendre les atterrissements des rivières de Champagne, dans la révolution d’un demi-siècle; l’Etat se trouverait réunir au domaine la plupart des héritages qui y sont situés de part et d’autre des rivières ; en conséquence, Sa Majesté est suppliée de ne plus permettre à l’avenir aucune concession d’îles, îlots et atterrissements, comme contraires au droit de propriété. Et pareillement, sans que les usages et pâturages des communautés d’habitants dont les monuments anciens prouvent qu’ils en avaient la propriété, puissent non plus être réputés faire partie du domaine, nonobstant les taxes sur eux imposées à différentes époques, la distraction de partie ; les ventes et reventes faites de l’autorité du conseil du Roi, les cens que les communautés payent au domaine en raison de leurs usages, dans tous lesquels les communautés seront maintenues, quand meme ils seraient situés dans l’enclave des seigneuries domaniales. Art. 9. Que comme les loteries sont un jeu en chances inégales et cependant d’un attrait trop puissant, surtout pour les classes indigentes, Sa Majesté sera suppliée d’en ordonner la suppression. Art. 10. D’ordonner la suppression des privilèges exclusifs des maîtres de poste aux chevaux, sauf à leur accorder pour le service gratuit dont ils pourraient être chargés envers le gouvernement, une indemnité suffisante. justice. Art. 1er. La justice souveraine étant inaccessible aux pauvres, l’étendue immense du parlement de Paris n’otfrant aux gens aisés qu’une justice tardive et ruineuse, Sa Majesté sera très-humblement suppliée, lors des Etats généraux, d’accorder à la province de Champagne une cour souveraine sous la dénomination de parlement, qui connaîtra en dernier ressort de toutes les affaires civiles, criminelles, police et finances, tant ordinaires qu’extraordinaires. Art. 2. Que les magistrats attachés à cette cour soientpourvus par Sa Majesté sur la présentation des Etats provinciaux, et ce par commissions à vie et sans finances. Qu’il soit pourvu par lesdits Etats aux honoraires desdits magistrats, qui ne pourront recevoir aucuns émoluments ou épices pour aucunes de leurs fonctions, sans par cette cour pouvoir connaître en première instance ni par évocation sur appel des saisies réelles, directions de créanciers, distributions mobilières, distribution du prix des immeubles par ordre d’hypothèques. Art. 3. Qu’à l’égard des offices des juges royaux inférieurs, Sa Majesté sera suppliée d’enysupprimer la vénalité lorsque l’état des finances permettra d’en effectuer le remboursement. Art. 4. De réaliser la promesse qu’elle a bien voulu faire de réformer les études dans les universités, et d’ordonner qu’aucun magistrat ne sera reçu dans le parlement de la province qu’il n’ait atteint l’âge trente ans, qu’il n’ait exercé la profession d’avocat pendant un temps déterminé ou n’ait été revêtu d’un office dejudicature dans les sièges royaux inférieurs. Art. 5. D’ordonner pour lesdits sièges inférieurs qu’aucun magistrat n’v sera admis qu’il n’ait atteint l’âge de vingt-sept ans, et n’ait observé la profession d’avocat au moins trois ans et que sur l’avis et consentement des juges eux-mêmes et des officiers municipaux du lieu de leur établissement, et enfin que les jugements rendus par lesdites cours supérieures et les tribunaux inférieurs seront toujours motivés. Art. 6. Sa Majesté sera suppliée de prendre en considération l’inégalité et le vice des différents arrondissements pour les juridictions, et ordonner en conséquence une division méthodique et géographique de la généralité pour déterminer le ressort desdites juridictions. Sur cet article le bailliage de Sainte-Menehould propose de former des présidialités composées de deux cents paroisses, nonobstant la diversité des coutumes, et de diviser ces présidialités en prévôtés composées de vingt à trente paroisses. Vitry, qui jouit seul de la présidialité, observe que Sa Majesté doit être suppliée d’ordonner la suppression des jugements de compétence en matière présidiale lorsqu’elle sera respectivement consentie ou non contestée sur la demande portée devant les juges présidiaux; comme aussi d’établir une commission du conseil pour la conservation de la juridiction présidiale et d’ordonner que la compétence de ces sièges sera décidée par voie d’administration. Vitry demande pareillement que les appels des duchés-pairies soient portés aux présidiaux pour les cas qui n’excéderont pas leur compétence. Les bailliages de Saint-Dizier et Fîmes proposent la suppression de toute présidialité, attendu le vœu formé pour l’établissement d’une cour souveraine en Champagne. Ces deux bailliages votent également pour l’augmentation d’attribution de chaque bailliage pour juger sans appel les causes purement personnelles, en nombre de juges et jusqu’à la somme qui sera déterminée par les Etat généraux. Les autres bailliages observent que les avantages qui résultent du pouvoir accordé aux bailliages royaux de juger souverainement et sans frais les causes de 4U livres et au-dessous, font désirer que ce pouvoir soit porté à la somme de 100 livres sans autres frais, procédures, droits de greffe ou du Roi, que ceux qui sont actuellement perçus. Art. 7. Que le code civil et criminel soit réformé, ainsi que le code pénal pour tous les sujets du Roi, à l’effet de faire cesser les préjugés qui entachent les ordres et les familles de la punition du coupable. Que, pour parvenir à la réformation de code si désirée, Sa Majesté sera suppliée d’autoriser dans chaque bailliage une commission de juges et d’avocats pour présenter à la commission' du conseil à ce sujet les plans de réformation relatifs aux abus de la procédure dans les sièges inférieurs qui ne sont connus dans les districts que par ceux qui y pratiquent. Art. 8. Que (es offices de jurés-priseurs et ceux des greffiers des experts soient supprimés, parce qu’ils donnent ouverture à des vexations contre les sujets du Roi et présentent peu d’intérêt pour l’Etat. Art. 9. Que les notaires et les huissiers soient [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Baill. dë Vitry-le-François.] 217 réduits à un nombre fixe dans chaque bailliage, de manière que les arrondissements qui leur seront donnés ne puissent gêner la confiance et le besoin du peuple. Que, pour opérer cette réduction, les dernières charges livrées soient les premières supprimées, et en laissant néanmoins jouir les titulaires leur vie durant, et qu’à leur décès, le remboursement soit fait par les notaires ou huissiers conservés. Art. 10. Qu’il y ait un dépôt public des expéditions des actes de notaires dans les greffes de chaque bailliage, sans néanmoins que les greffiers puissent en délivrer des expéditions, sinon dans le cas de la perte des minutes, dûment constatée. Vœu de Sainte-Menehould. Art. 11. Qu’il soit procédé à la réformation de la coutume de Vitry par des commissaires des trois ordres choisis par leurs pairs et composés dans la même forme que les Etats généraux. Sur cet article les bailliages d’Epernay, Fîmes et Saint-Dizier proposent qu’il n’y ait qu’une seule coutume dans la province, dans laquelle les dispositions les plus sages et les plus susceptibles d’être rendues uniformes pour les habitants d’une même contrée seront recueillies d’après le choix qui en sera fait dans les diverses coutumes, actuellement existantes dans cette province. Art. 12. Les lois étant trop inconnues des habitants de campagne, cette ignorance les expose à devenir coupables; ainsi il paraîtrait convenable que tous les ans à des époques fixes les lois relatives au nouveau régime national fussent publiées au prône des paroisses. Vœu d’Epernay (seul). Art. 13. Que les procès ne puissent plus à l’avenir être discutés que par mémoire respectif et sur papier libre, sans ministère de procureur. Art. 14. Qu’il sera demandé un tarif uniforme pour régler les frais de justice tant dans les sièges royaux que dans les justices seigneuriales, alin dé laisser le moins possible l’arbitrage des juges, des avocats, des procureurs, greffiers, huissiers et sergents, et qu’il ne puisse être perçu aucun droit que ceux qui seront attribués par le règlement. Art. 15. Le roi Charles IX et Henri III, augustes prédécesseurs de Sa Majesté, avaient, sur la demande des Etats tenus à Orléans et à Blois, ordonné la réduction des offices dans les parlements et la suppression des tribunaux extraordinaires; mais les lois données sur les doléances de ces Etats sont restées sans exécution par les circonstances qui ont empêché ces suppressions d’être effectuées. Aujourd’hui le tiers-état du bailliage de Vitry, en réitérant le vœu des Etats d’Orléans et Blois, supplie Sa Majesté de retrancher une partie des offices de judicature et finance, soit dans les cours et près d’icelles, soit enfin dans tous les autres sièges et tribunaux, que les besoins de l’Etat plutôt que Futilité de leurs fonctions ont fait multiplier ; que les privilèges attribués à ces offices doivent pareillement être supprimés; d’ordonner qu’il sera pourvu aux indemnités équitables de tous les officiers supprimés, en sorte que si d’un côté le bien de l’Etat a exigé l’extinction de leurs offices, d’un autre ils ne puissent se plaindre d’avoir été seuls victimes de la réforme des abus; qu’en conséquence du vœu porté en cet article, les bureaux des finances soientfsupprimés, leurs fonctions d’administration dévolues aux Etats de la province et leurs fonctions pour le contentieux et la mouvance du Boi aux bailliages royaux, chacun pour leur ressort, sauf l’appel au parlement de la province. Que les sièges d’élection soient pareillement supprimés et leurs fonctions relatives aux impositions dévolues au bureau intermédiaire de département, et leurs fonctions au contentieux dévolues aux juges royaux ordinaires. Que les grands maîtres et sièges des Tables de marbre, sièges des eaux et forêts, soient pareillement supprimés, et que le parlement de la province connaisse au souverain de tous les contentieux des Tables de marbre et les bailliages royaux des contentieux de la maîtrise, sans préjudice aux grades des seigneurs qui ressortiront au parlement ; qu’il y ait seulement un officier des eaux et forêts près chacun bailliage pour les visites et opérations dans les forêts, qui recevra les commissions du conseil à ce sujet et aura la conservation du marteau du Roi. Le bailliage de Saint-Dizier propose sur cet article que Sa Majesté soit suppliée d’ordonner la réunion des officiers des maîtrises aux juges ordinaires royaux, avec rang et séance avec les officiers des bailliages, et la présidence lors du jugement du contentieux des eaux et forêts, réservant auxdits officiers des maîtrises les opérations forestières, l’aménagement des bois et la garde du marteau du Roi. Que dans un délai qui sera fixé, tout pourvu actuel d’office de secrétaire du Roi sera tenu, pour transmettre à sa postérité la noblesse attachée à son office, de souffrir la perte de la moitié de sa finance, et que dans le cas où il préférerait de conserver sa finance entière, il ne jouira alors que de la noblesse personnelle et non transmissible. Art. 16. Que Sa Majesté. sera suppliée d’abroger tous privilèges de committimus , lettres de garde gardienne, attributions de juridiction au scel du châtelet ou autres sièges et tribunaux au moyen desquels on évoque la connaissance des affaires litigieuses et essentiellement des saisies réelles, ordres, distributions de deniers, etc., qui, pour l’intérêt public, doivent être duresœrtexclusif des tribunaux de première instance ; que cependant il pourra être accordé lettre de surséance aux officiers de Sa Majesté pendant le temps de leur service près de sa personne, ;sans entendre comprendre au présent article le droit de princes et pairs, en ce qui concerne leurs affaires pures personnelles, les droits de leur apanage et de leurs pairies, de n’être jugé tant au civil qu’au criminel que par la cour des pairs. Art. 17. Que Sa Majesté sera suppliée d’ordonner que le délai pour le sceau des lettres de ratification sur les ventes d’immeubles, fixé par l’édit de 1771 à deux mois, sera prorogé à quatre; qu’au moins dans le cas où il serait estimé que cette prorogation ne devrait pas être accordée, il soit ordonné ; l°que dans tous les tribunaux les grandes vacances ne seront pas comptées dans le temps de l’affiche; 2° que pour les plus grande publicité, la vente sera affichée, à l’auditoire du bailliage royal de la situation des biens, dont l’exploit de publication et affiche sera paraphé par le juge ou ancien praticien et sera visé dans les lettres de ratification. Art. 18. D’ordonner par une loi précise qui fixera la jurisprudence, que tout acquéreur qui voudra purger les hypothèques sera tenu de payer le prix de son acquisition aux créanciers opposants, sans pouvoir profiter des termes qu’il aurait stipulés dans son contrat avec le vendeur, et [Baill. do Viiry-lc-François.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 218 [États gén. 1789. Cahiers.] même de rembourser les capitaux des rentes constituées à leur profit, sans que cet acquéreur puisse prétendre avoir le délai de payer et la faculté de rembourser que son vendeur avait, nonobstant clauses des subrogations aux droits du vendeur. Art, 19. D’abroger les comptes à l’hôtel du juge ou des commissaires, au greffier et aux procureurs et sans utilité, le juge ou commissaire étant oblige de renvoyer les parties à l'audience sur leurs prétentions respectives et d’ordonner sur les comptes que les procureurs donneront leurs moyens par écrit, pour être le jugement rendu suivant la nature de l’affaire, soit à l’audience, soit sur délibérés ou appointements. Art. 20. De simplifier les procédures pour parvenir à la restitution des délits champêtres, les visites en ces sortes d’atfaires étant extrêmement coûteuses dans les sièges royaux et emportant souvent plus de 80 livres de frais où le dégât n’a pas la valeur de 3 livres; en conséquence, d’ordonner qu’il y aura dans chaque communauté deux prud’hommes choisis ou continués annuellement par les municipalités, et un troisième pour remplacer en cas de partage , d’absence, maladie ou parenté de l’un et l’autre des deux premiers, qui soient avertis par les gardes ines-siers dans les vingt-quatre heures des rapports par eux faits au greffe, et qui soient tenus dans un autre délai de constater le dégât, en faire l’estimation et le rapport au greffe, sur lequel hauteur du dégât pourra payer entre les mains du greffier le montant de l’estimation des prud’hommes, celui de leur proces-verbal, celui des gardes messiers et les droits du greffier, tous lesquels druits seraient modérément taxés, soit par le règlement qui autorisera cette procédure, soit par tes municipalités dans l’acte de nomination desdits prud'hommes, et le montant de l’estimation du dégât serait remis par le greffier au propriétaire de l’héritage, sans préjudice à l’action du ministère public dans le cas de dégât à garde faite ou de nuit et sauf l’action de recours contre ceux qui auraient fait des dégâts antérieurs. Art.. 21. D’ordonner le rétablissement des assises dans les bailliages royaux auxquels tous juges en ressortissant seront tenus de comparaître ainsi que les procureurs fiscaux, greffiers, praticiens, notaires, huissiers et sergents pour répondre aux plaintes et dénonciations qui seraient faites d’abus dans l’exercice de leurs fonctions, et en être réprimés avec amendes et interdictions s’il y a lieu; lors desquelles assises les juges et officiers municipaux adresseront au procureur du Roi leur attestation fidèle de la conduite des vie et mœurs, réputation et renommée des praticiens, huissiers et sergents de leur résidence, sans qu’ils puissent jamais donner lieu à prise .à partie, et dans le cas où un praticien, huissier ou sergent se trouverait mal noté trois années de suite, il serait interdit sans retour. Art. 22. D’accorder un meilleur établissement pour les gardes messiers pour la conservation des biens de campagne et pour la sûreté publique. COMMERCE. Art. 1er. Sa Majesté sera très-humblement suppliée, lofs des Etats généraux, d’accorder l’établissement de juridictions consulaires dans toutes les villes où le commerce l’exigera, sans que les juges ordinaires des lieux dans lesquels lesdites juridictions auront ôté établies puissent connaître des matières qui leur sont Attribuées. Art. 2. D’ordonner que les marchands roulants et colporteurs seront tenus de prendre un seul brevet et de choisir un domicile dans lequel ils acquitteront i’hnpôt eu la même proportion que les autres sujets du Roi, à raison dé leur bénéfice arbitré. Art. 3. Le bailliage de Sainte-Menehould a voté la peine de mort contre les banqueroutiers frauduleux. Art. 4. Le bailliage de Saint-Dizier demande la suppression des corps de métiers et jurandes et des privilèges exclusifs accordés â quelques corporations et pareillement à quelques particuliers pour faits relatifs au commerce, métiers ou professions; il demande en outre l’abrogation des lettres de cession et des arrêts de surséance. Les bailliages de Vilry et Sainte-Menehould, au contraire, demandent la conservation des corporations et jurandes, et qu’il plaise au Roi conserver aux veuves des maîtres reçus en exécution de l’édit de 1777, ies privilèges de maîtrise salis nouvelles lettrés ni finance; ils ajoutent que comme les corporations sont peu riches et peu nombreuses dans ies villes de province, ii serait à désirer que l’on diminuât les dépenses annuelles de nomination des syndics et adjoints et que les redditions de compte n’aient lieu que tous ies trois ans. • Art. 5. Le bailliage de Sainte-Menehould demande que les noti catholiques faisant le commerce soient admis â exercer les chargés de leurs corporations, comme tous autres sujets du Roi. Art. ü. Les Etats généraux représenteront à Sa Majesté que le prêt "à intérêt sans aliénalion du principal, s’étant introduit depuis longtemps en diverses villes de commerce , comme l’usage eu est passé en plusieurs provinces et qu’il n’est pas formellement autorisé, certains tribunaux le réprouvent. Eu conséquence, il serait à désirer qu’il y eût sür cela uniformité dans tout le royaume ; que le taux de l’intérêt du prêt sans aliénation du principal et celui de l’escompte fussent fixés par une loi positive qui pût guider ies juges et tranquilliser les consciences. Art. 7. Les mômes Etals généraux seront invités de prendre en considération le vœu de l’uniformité des poidset mesures par tout le royaume, dans une proportion facile pour les subdivisions ; les effets salutaires que le commerce doit retirer de cette coopération, depuis si longtemps si désirée, sont le vœu des bailliages réunis, excepté Vitry, qui y trouve des inconvénients â cause de la diversité des mesures servant â la prestation des droits seigneuriaux. Art. 8. i’our éviter la disette des grains, ies villes principales de la province doivent être autorisées â former des greniers publics dans une année d’abondance. Cet article n’est le Vœu que des bailliages do Fîmes et Epernay,et il est rejeté par ceux de Vilry, Sainte-Menehould et Saint-Dizier. Art, 9. Le bailliage de Fîmes seul, et pour des considérations locales, estime que pour donner au peuple plus de moyen de travail, augmenter l’activité de l’agricniture en y employant pins de bras, et mettre les laboureurs" dans le cas d’élever une plus grand quantité de bestiaux, il doit, être défendu aux laboureurs d’exploiter au delà de trois charrues, et au delà de deux lorsqu’ils �exploiteront que de petits marchés. Art. 10. Le bailliage de Saint-Dizer, pour le plus grand avantage de l’agriculture, demande l’abrogation de la contrainte par corps qui a lieu dans les baux de fermage. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Baill. de Vitry-le-François.] 219 [États gén. 1789. Cahiers.] Régime des bois. Art. 1er. Sa Majesté, lors des Etats généraux, sera suppliée d’ordonner une nouvelle vérification des bois et usines pour que les intérêts des maîtres de forges ne ruinent pas le peuple par le prix excessif auquel la consommation de ses usines pourrait porter cet objet de première nécessité. Vitry et Saint-Dizier ajoutent qu’il serait du bien public d’ordonner la réduction des fourneaux de forge, nouveaux feux allumés depuis la réformation de 1733, qui, loin d’en faire éteindre aucuns, semble en avoir multiplié le nombre. Saint-Dizier forme un second vœu analogue au premier pour 1 exécution de l’arrêt du 10 mars 1733, par lequel il est ordonné qu’il sera fait, lors des ventes et adjudications des bois, des réserves, quanta la quantité de cordes de bois de chauffage nécessaire à la consommation et l’approvisionnement des villes de Saint-Dizier, Vitry et Ghâlons et de leurs environs, avec défense à tous adjudicataires de convertir en bois de charbon les parties réservées pour le chauffage, à peine de 1 ,000 livres d’amende. Art. 2. Gomme depuis longtemps on se plaint delà rareté des bois, le bailliage' de Vitry demande que l’ordonnance des eaux et forêts, au titre: Des bois des particuliers , article 1er, qui les autorise à fixer le règlement de leurs bois à dix ans, soit réformé, et qu’il le soit à l’âge du taillis, douze de la précédente exploitation, six modernes et deux chênes anciens, ce qui produira beaucoup plus de chauffage et de charpente, sauf si la nature des bois ne permettait pas une aussi longue révolution, à obtenir des juges qui en doivent connaître, la permission de couper plus tôt, ce qui sera accordé sur rapport d’experts et sans aucuns frais que ceux de la visite d’experts. Et Cependant, pour ne point priver les propriétaires de leurs revenus pendant les premières années, ils seront autorisés après le nouvel aménagement à exploiter la première coupe, quoiqu’elle n’ait atteint que l’âge de dix ans, et ainsi de suite et de, tire à aire, annuellement, jusqu’à la révolution de ce nouveau règlement. Art. 3. Le tiers-état des cinq bailliages demande aussi que les articles 4 du titre XVH et 2 du titre XVIII de la même ordonnance, qui prescrivent que. les adjudications se feront à l’extinction des feux, soient abrogés à raison des abus qui en résultent et à cause de la trop grande autorité que peut 'avoir le juge ou autre commissaire qui procède à l’adjudication, de la faire tomber à qui il. lui plaît; qu’en conséquence, il soit ordonné que toute adjudication de réparations d’ouvrages publics ou à la charge des communautés sera faite au rabais. Qu’il soit avisé à une autre manière d’administrer les bois communaux et indépendants de toutes juridictions contentieuses, en là confiant aux Etats de la province, par correspondance avec les ministres du Roi en cette partie, et sauvant par là les gros frais des officiers de maîtrise, qui consomment la majeure partie du prix de ces bois ; que la police de ces mêmes bois demeure aux grueries des seigneurs ou autres juges ordinaires locaux; qu’il soit établi une forme plus simple de procéder aux visites, martelage et récolements par un seul officier des eaux et forêts établi près ces bailliages, en présence du syndic et d’un adjoint des communautés, lequel officier sera rétribué par jour effectif de son travail. Art. 4. Que les futaies et réserves soient accordées aux communautés sur l’avis des Etals provinciaux, ou de leurs commissions intermédiaires, par arrêt du conseil, dont l’adresse sera faite à l’officier qui sera établi près les bailliages et par-devant qui il sera procédé aux adjudications desdites futaies et réserves , ainsi qu’à celles des ouvrages publics pour lesquels ces coupes auront été accordées, desquels ouvrages lés devis ainsi que la réception seront faits par les ingénieurs ou sous-ingénieurs de la province, sans frais, attendu qu’ils sont appointés par la province même, si mieux n’aiment les communautés, par Un architecte du canton, et il ne pourra être procédé aux adjudications que six semaines après le dépôt desdits devis fait au greffe. Art. 5. Que Sa Majesté, lors des Etats généraux, sera suppliée de rendre commun au pays de bois en Champagne, le règlement par elle fait pour le ressort de la maîtrisé de Sedan par son arrêt du 25 janvier 1781, qui réduit les amendes pour simples délits de bestiaux échappés dans les bois, à *30 sous et pareille somme de restitution pour chaque bœuf ou vache trouvé en délit. DROITS FÉODAUX ET SEIGNEURIAUX. Vœu de Sainte-Menehould. Art. Ie1:. Sa Majesté sera suppliée; lors des Etats généraux, de permettre que toutprûpriétaire puisse démembrer son fief à volonté et suiVantses besoins, à l’exception des terres titrées, le droit naturel voulant que l’homme dispose de sa propriété d’après les motifs de convenance personnelle. Art. 2. D’ordonner la suppression des banalités, corvées seigneuriales et de tous les droits qui gênent la liberté ou qui n’ont d’autres principes que dans les anciens vestiges de la barbarie et l’esclavage. Art. 3. De donner Une loi qui autorise chaque citoyen à se rédimèr 'd’un cens, d’une charge perpétuelle quelconque, cohime contraire au droit naturel, et que le remboursement en soit fixé sur le pied du denier trente de la valeur desdits objets, lors du remboursement, qui sera fixé à la volonté du débiteur. Le bailliage de Vitry propose le rachat des redevances personnelles au denier vingt-cinq, et n’a pas cru devoir former demande en rachat des redevances réelles. Le bailliage de Fîmes, pour les intérêts particuliers de la ville, fait toutes réservés de droit contre les rachats ci-dessus, attendu que ces droits lui sont patrimoniaux. Art. 4. D’ordonner la suppression des droits de stellage, minage et hallage, et généralement de tous ceux qüi grèvent la vente des denrées de première nécessité, pour être ïesdits droits remboursés par cliacuh e des villes et paroisses qui y sont assujetties, et ce au denier trente. Sur cet-article, la ville de Fîmes fait ses réserves de droits, attendu que ces objets forment la plus grande partie de son revenu patrimonial accordé par la charte de 1226. Art. 5. De donner une loi pour l’abolition du retrait censuel, et que les seigneurs soient tenus de produire et faire reconnaître les titres en vertu desquels ils jouissent des différents droits de leurs terres. Art. 6. D’autoriser tous particuliers à mettre rouir leurs chanvres dans les rivières, ruisseaux où ru tu ires pratiqués exprès pour cet objet, mais à la condition expresse que le cours d’eau ne [Baill. de Vilry-le-François.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 220 [Étals gén. 1789. Cahiers.] pourra être intercepté, et à la charge du curement de la rivière et de l’enlèvement des matières servant à faire rouir le chanvre. Art. 7. D’accorder la liberté d’arroser les prairies par tous les moyens, même des batardeaux, nonobstant l’opposition des meuniers ou propriétaires des cours d’eau, mais sous la condition d’un dédommagement s’il y a lieu, ou relativement au chômage des usines, lequel sera fixé par la loi. Art. 8. D’accorder une loi sévère qui ne puisse être éludée contre les chasseurs qui dévastent les empouilles, méprisent le pauvre jusque dans sa propriété, et qui autorisera les communautés à agir en nom collectif contre lesdits chasseurs, à l’effet de faire prononcer contre eux les dommages et intérêts et l’amende aux termes de l’ordonnance. Art. 9. D’accorder aussi la révocation de l’arrêt de règlement du parlement de Paris du 15 mai 1779, dont les formalités impossibles à remplir rendent nuis tous les efforts du cultivateur pour échapper aux dégâts occasionnés parles lapins, et d’autoriser les laboureurs à faire constater les dommages par une seule visite quelque temps avant les moissons. Art. 10. Sa Majesté sera suppliée d’ordonner que les droits 'de péage, soit royaux, soit seigneuriaux, seront examinés, et à cet effet de donner à la commission subsistante à cet égard l’activité qu’elle doit avoir; que tous les droits de péage qui ne seraient pas fondés en titres suffisants seront abolis sur-le-champ; que ceux qui auraient eu pour objet de concession une charge quelconque d’utilité publique imposée aux concessionnaires, et qui aura cessé d’être remplie, soient également supprimés sur-le-champ, et dans le cas où les péages subsistants auront été prouvés par titres, qu’il sera pourvu par les Etats provinciaux à leur remboursement, n’entendant comprendre au présent article les droits de bacs dont les propriétaires remplissent les charges de la concession ; que la commission intermédiaire des Etats provinciaux sera chargée de veiller à l’exécution du présent article. DE LA RELIGION ET DU CLERGÉ. Art. 1er. Sa Majesté sera suppliée de considérer avec les Etats généraux que le clergé faisant corps avec la nation, n’en doit plus être séparé par des assemblées particulières, ses octrois de dons gratuits et ses décimes, mais que dans chaque province il doit supporter la subvention commune et doit être assujetti à tous les droits de perception comme les autres sujets du Roi. Art. 2. Les Etals généraux voudront bien solliciter auprès de Sa Majesté une loi portant suppression des annates, et par laquelle les sujets du Roi ne seront plus obligés de s’adresser à Rome pour les provisions de bénéfices et les dispenses, et Sa Majesté réservera exclusivement ce privilège pour être exercé - par un conseil composé de prélats, à la charge par les ecclésiastiques ou autres nécessités d’obtenir des provisions ou dispenses, de payer les droits dus suivant l’ancien régime, pour le produit être employé aux besoins de l’Etat. Art. 3. Demander l’abrogation des dispositions de l’édit de 1695 au sujet des églises et presbytères; en conséquence, que , les décimateurs et gros bénéficiers soient seuls tenus de l’entretien et réparations et constructions des églises et presbytères. Art. 4. Que les évêques et gros bénéficiers soient obligés de résider dans le chef-lieu de leur bénéfice, afin qu’en y consommant leurs revenus, ils contribuent à entretenir le numéraire dans leur province. Art. 5. Que l’édit concernant les réguliers soit observé; qu’en conséquence, toutes maisôns religieuses où il n’y aura point neuf sujets nés Français ou naturalisés, soient supprimées, et leurs biens mis en économat, sous l’administration des Etats généraux, pour l’acquit des dettes du clergé qui seraient reconnues être charges de l’Etat ou pour la dotation des curés et de bureaux de charité dans les campagnes. Art. 6. Supplier Sa Majesté d’obtenir un bref de sécularisation pour tous les religieux rentés qui désireront quitter leur maison, en leur assignant sur les revenus de leur communauté une pension convenable, et en appliquant au surplus le prix de la vente qui sérail faite des maisons vacantes et des biens en dépendant, à l’acquit des dettes du clergé, le fonds nécessaire pour l’acquit des fondations préalablement prélevé. Art. 7. D’augmenter les portions congrues relativement à la population des paroisses, et ordonner qu’à l’avenir les droits casuels soient supprimés. Art. 8. D’ordonner qu’il n’y ait plus d’annexes, et que chaque paroisse ait son curé. Art. 9. Le bailliage de Vitry a sur cet objet un vœu particulier.' Il demande, pour procurer aux villes et campagnes de bons et utiles pasteurs, nécessaires avec les évêques au maintien de la religion et des mœurs, une répartition plus équitable des revenus ecclésiastiques, qui soit telle que le revenu des curés les mette en état de pourvoir au soulagement des malades de leurs paroisses et de souffrir le retranchement des honoraires attachés à plusieurs fonctions ; que les dîmes ecclésiastiques soient restituées par tous les corps séculiers et réguliers, et tous bénéficiers qui les possèdent, pour former la dotation des curés et remplir leurs charges, et qu’à cet effet les dîmes ecclésiastiques de chaque diocèse soient mises en régie et administration commune près de l’évêque, dont le compte sera présenté aux Etats provinciaux; que la dotation des curés soit assignée sur le produit total des dîmes dans chaque diocèse et fixée à raison delà population des paroisses pour les campagnes et dans une autre proportion qui sera arbitrée pour les villes, les anciens fonds et domaines des curés leur restant en imputation de leur dotation, et en diminution d’autant sur la contribution des dîmes. Que l’universalité des dîmes ainsi régie soit en outre chargée des réparations et entretiens des églises entières et presbytères sans nulle contribution de la part des propriétaires habitants (sauf les réparations usufruitières à la charge des curés pour les presbytères), et en outre du payement des vicaires qui seront établis dans toutes paroisses de deux cents feux et au-dessus, et où il ne serait fondé d’ailleurs. Qu’il soit pourvu à l’indemnité des évêques, abbés, prieurs, corps séculiers et réguliers qui perdront leurs dîmes, soit par union de bénéfices, soit par réduction du nombre des membres qui composent ces corps, soit par union et corporation de membres ensemble, étant inutile que les chapitres soient aussi nombreux dans leurs membres, et qu’il y en ait plus d’un dans une ville. Art. 10. Les Etats généraux seront priés de réclamer contre l’abus de concentrer dans la haute noblesse toutes les places honorables et dignités ecclésiastiques, parce que si la naissance doit ob- [Étals géa> 1789, Cahiers.] tenir des préférences à mérite égal, le tiers des cinq bailliages regarde comme une grande immoralité de compter le mérite pour rien et d’accorder tout à la faveur et à la naissance. Art. 11. D’observer que la réformalion des mœurs ôtant un des objets les plus essentiels d’un bon gouvernement, l’éducation du peuple paraît mériter la plus grande attention, et qu’il doit être proposé, entre autres moyens, de veiller à une instruction plus soignée des maîtres d’école et d’établir des prix pour les élèves et les instituteurs. Art. 12. Que, pour parvenir à supprimer la mendicité, il serait à propos de fonder des fonds de charité dans les campagnes où il n’y en a point, et dans celles où ils sont insuffisants, au moyen desquels les gens inlirmes et hors d’état de gagner leur vie seraient retenus et nourris dans chaque paroisse, lesquels fonds seraient pris sur les fonds des maisons religieuses supprimées, avant d’en faire l’application à l’acquit des dettes du clergé, et au surplus les Etats voudront bien provoquer l’exécution des lois contre les mendiants, vagabonds dangereux à la société. Art. 13. Sa Majesté sera suppliée, pour procurer au peuple une augmentation de salaire et d’aisance, en multipliant les jours de travail et provoquer la suppression et le renvoi aux dimanches de toutes les fêtes autres que celles de Noël, de la Circoncision, de l’Epiphanie, de la Purification, de l’Incarnation, de l’Ascension, du Saint-Sacrement, de l’Assomption et de la Nativité de la Vierge, de la Toussaint et de la fête patronale, qui néanmoins sera dans chaque diocèse célébrée le même jour dans toutes les paroisses, pour prévenir tous les désordres qui résultent du concours du peuple à chaque fête de village. Art. 14. De donner une loi qui déterminera enfin l’espèce de fruits sujets à la dîme, pour anéantir les procès que fait naître journellement ce défaut de détermination, et de régler qu’il n’y ait que les vins et les gros grains qui puissent être assujettis, et qui abrogera en conséquence toutes dîmes vertes, de charnage, de suite ou rapport de fer. Art. 15. Le bailliage de Sainte-Menehould forme un vœu particulier qui serait d’ordonner qu’elle soit convertie en argent, qu’elle soit imposée au marc la livre des propriétaires décimables sur le pied des trois derniers baux qui ont pu en être faits, ou à dire d’experts à défaut de baux. Art. 1 6. Sa Majesté sera suppliée d’ordonner une loi tendant efficacement à prévenir l’abus énorme des pots-de-vin lors des baux des biens ecclésiastiques, d’abroger le principe jusqu’à présent reconnu que le bénéficier nouveau pourvu ne doit pas être obligé d’entretenir le bail de son prédécesseur, afin qu’il ne soit point apporté d’obstacles à l’amélioration des biens ecclésiastiques ; d’ordonner en conséquence que les baux seront entretenus et exécutés pour les années pour lesquelles ils auront été faits, et que, pour empêcher tout abus de la part des bénéficiers, il ne pourra être fait aucuns baux des biens ecclésiastiques que sur adjudication à l’enchère, soit en justice, soit par-devant notaire, en présence du ministère public et après publication. Art. 17. A l’égard des dettes du clergé, le bailliage de Vitry demande que cet ordre entrant dans la classe commune, ses dettes deviennent celles de l’Etat, et que néanmoins ces dettes provenant du capital de ses impositions, que le clergé n’a point acquitté en prélevant des emprunts dont il n’a acquitté que les intérêts par ses décimes, il soit pourvu à leur remboursement : 1° par l’alié-[Baill. de Vitry-le-François.] 221 nation ou rachat des rentes foncières qui sont dues au clergé sur les biens de campagne; 2° par l’aliénation des justices seigneuriales, droits de chasse et honorifiques qui lui appartiennent, à l’exception des droits et justices qui dépendent des pairies ecclésiastiques et évéchés; 3° par la mise en économat pendant douze années des abbayes , prieurés et chapelles de nominations royales, même de patronage ecclésiastique; 4° par l’exécution de l’édit des réguliers, la suppression des maisons régulières où ne se trouve pas le nombre de religieux requis pour la conventualité, et par l’aliénation des biens dépendant de ces maisons, sauf l’acquit des fondations ; 5° en défendant à ceux des religieux mendiants et communautés de filles qui seront jugées inutiles au maintien de la religion et des mœurs de recevoir des novices, et appliquant, à mesure que leurs maisons deviendront vacantes, le produit de la vente de leurs maisons et biens à l’acquit de ces dettes ; 6° en réduisant le grand nombre de maisons religieuses par la sécularisation dont il a ôté parlé ci-dessus, et la vente des maisons où il n’y aura plus, par ce moyen, de conventualité et celle des biens en dépendant. Le bailliage de Sainte-Menehould à l’égard, des dettes du clergé, demande qu’elles ne puissent' être considérées que comme dettes particulières de leurs bénéfices, à moins que le corps ne justifie aux Etats généraux que les emprunts qu’ils ont contractés pour subvenir aux besoins de l’Etat excédaient la proportion dans laquelle leurs biens auraient dû être imposés, et cet excédant seul pourrait être considéré comme dette de la nation ; mais que le clergé acquittant aujourd’hui les impôts dans les mêmes proportions que tous les sujets du Roi, doit rester seul chargé de liquider ses engagements, comme chaque individu doit acquittera dette qui grève sa propriété. Fait et rédigé sur les cinq cahiers des bailliages réunis, par nous, commissaires soussignés, nommés d’office à cet effet par M. le bailli de Vitry, en exécution de son ordonnance du 28 du présent mois, sous toutes réserves et sans aucune approbation préjudicielle, à Vitry, le 30 mars 1789. Signé Luzure; de Branges; Hatot; Hatotel; Lo-chet;.Duchainet; Férand; Mouton; Barbier, lieutenant général, président, et Félix, greffier. La minute du présent cahier, contenant vingt-sept feuilles, a été cotée et paraphée par moi, Pierre-François Barbier , commissaire du Boi, lieutenant, greffier au bailliage et siège présidial de Vitry-le-François, avec le mémoire de la communauté de Rarécourt et celui de la communauté des notaires de Vitry, après avoir été signe par les commissaires nommés à cet effet, ainsi que de moi, lieutenant général, et du greffier, à Vitry, le 30 mars 1789. Signé BARBIER. MÉMOIRE Pour les habitants de Rarévourt , bailliage de Vitry , le-François , à joindre au cahier de doléances dudit bailliage. De temps immémorial la communauté de Rarécourt jouit des privilèges et franchises qui lui ont été conservés de règne en règne parla France, la maison d’Autriche et les ducs de Lorraine. Ils supplient très-humblement Sa Majesté de les maintenir dans ces privilèges et de leur conserver la protection que les rois, ses augustes prédécesseurs, ont bien voulu leur accorder. ARCHIVES PARLEMENTAIRES 222 [États gén. 1789. Cahiers.] Les privilèges des habitants de Rarécourt leur ont été continués par lettres de sauvegarde du 25 avril 1552, à la charge par eux de payer au Roi par chaque chef de ménage 2 sous 6 deniers; ils acquittent ce droit à l’cngagiste de Sa Majesté au comté de Passavant. Charles-Quint leur a également octroyé des lettres de sauvegarde en 1523 et elles portent qu’elles sont données par continuation de celles de ses prédécesseurs, et nommément de Charles IV, roi de Bohème et duc de Luxembourg; elles assujettissent également les habitants à payer 2 sous 6 deniers par chaque chef de ménage et de les porter annuellement comme ils le fout toujours à la recette des domaines de Sa Majesté Impériale à Luxembourg. Enfin les ducs de Lorraine, et notamment René d’Anjou, le 22juin 1433, etGharles, duc de Lorraine, le 10 avril 1643, leur ont accordé pareille sauvegarde moyennant une pareille redevance de 2 sous 6 deniers par chef de ménage; et ces lettres défendent expressément d’exiger d’eux aucune autre contribution et imposition. Ils acquittent encore aujourd’hui cette redevance au domaine de M. le prince de Condé, représentant les ducs de Lorraine dans le Clermontois. La protection réunie des trois puissances a toujours eu l’effet de maintenir les privilèges de Rarécourt, et jamais ils n’ont été asservis à aucune des trois que jusqu’à concurrence de la redevance à eux due. La réunion des Trois-Evêchés et celle des duchés de Lorraine et de Bar a placé Rarécourt entre ces deux provinces et celle de la Champagne, et il a cessé d’être un des points des frontières du royaume; mais cet agrandissement n’a rien changé dans la constitution de ce village; différentes fois les traitants ont cherché à étendre sur eux les droitsdu lise, mais ils ont toujours échoué, Ll suffit de rappeler ici le dernier arrêt du conseil qu’ils ont obtenu le 1er juin 1728; également en cette partie, il décharge les habitants de Rarécourt de toute imposition et les maintient dans la jouissance de leurs privilèges. Les habitants de Rarécourt espèrent-que Sa Majesté le roi de France voudra bien les maintenir dans l’état où ils sont ; fidèles à leurs engagements, ils acquitteront toujours aves certitude et fidélité l’engagement qu’ils ont contracté de servir la redevance de 2 sous 6 deniers par ménage qu’ils payent annuellement. MM. les députés aux Etats généraux sont priés et spécialement chargés d’appuyer auprès des Etats généraux les réserves que les habitants de Rarécourt ont fait insérer au cahier des doléances du bailliage de Vitry-le-François et de les supplier ainsi que Sa Majesté de la prendre en considération. Signé Magisson et Sauce, députés de la paroisse de Rarécourt. Paraphé par les commissaires soussignés, au désir de l’ordonnance deM. le lieutenant général au bailliage de Vitrv de cejourd’hui 20 mars 1789, sous les réserves portées en icelles. Signé Lczure;Saliigny de Matignicourt; Hatotel; Dorizy; Férand; Goumaud; Biarnois; Morel; Barbey; J. Blanc; de Crancé; de Balharn; Barbier, lieutenant général, président, et Félix, greffier. La minute du présent mémoire est cotée et paraphée en toutes ses pages par M. le lieutenant général au bailliage de Vitry, pour être joint au cahier de ladite ville. Paraphé de nouveau, le 30 mars 1789, pour être [Baill. de Vitry-le-François.] joint au cahier général de Vitry, Sainte-Menehoud, Fîmes, Epernay et Saiut-Dizier. Signé Barbier. Paraphé de nouveau par les commissaires soussignés, au désir de l’ordonnance de M. le bailli de Vitry, du 28 mars 1789. Signé Férand; de Branges; Hatotel; Lochet; Duchaînet-Lezure; Hatot; Mouton; Barbier, lieutenant général, président, et Félix, greffier. MÉMOIRE Contenant les plaintes et doléances de la ; compagnie des notaires royaux de Vitry-le-François . 1! est généralement reconnu que les tarifs des droits de contrôle et d’insinuation du 29 septembre 1722, comparés aux explications, distinctions et exceptions données depuis leur établissement jusqu’à présent, forment le code le plus imparfait, le plus contradictoire, le plus vicieux qu’il soit possible d’imaginer ; c’est un chaos profond dans lequel se perdent également les contributions et les employés à la'perception ; il ne reste à ceux-ci que la ressource de l’arbitraire, et le public en est journellement la victime. Depuis longtemps nous nous sommes flattés d’une réforme salutaire à cette partie; ce grand travail était achevé au mois de janvier "1781, M. Necker nous en a donné l’assurance dans son compte rendu au Roi à cette époque, et puisque dès cet instant ce généreux ami de la nation a senti le besoin de cette réforme, nous devons croire que nous le verrons s’effectuer aussitôt que les circonstances le permettront ; mais jusqu’à cet heureux événement, qui peut être retardé longtemps encore parce que le gouvernement paraît donner toute, son attention" à des objets d’une plus haute importance, il est des abus au bien public qui se renouvellent tous les jours et dont il serait possible d’obtenir provisoirement la réformation, en attendant le nouveau code qui nous est promis. Nous allons parcourir les plus frappants de ces abus. Contrats de mariage. Cet acte, le plus solennel des contrats civils, le plus intéressant des liens de la société, méritait plus que tout autre d’etre affranchi de toute gêne ; aussi les lois générales, les coutumes locales se sont toutes accordées à lui donner la plus grande faveur; toutes stipulations sont permises par contrat de mariage, la loi n’en excepte que celles qu’elle ne peut permettre en aucun cas, celles qui seraient contraires aux mœurs ou au bien public. Cependant, par un contraste bien malheureux, ce même acte si essentiel, favorisé de la manière la plus spéciale par les lois, la jurisprudence de tous les tribunaux, se trouve tellement asservi par les lois du fisc, qu’il n'est pas une seule stipulation qui ne soit le prétexte d’un tribut particulier. Si on déroge à la coutume en modifiant la stipulation de communauté, on paye un droit d’insinuation. Si on établit un préciput en faveur de la femme, et qu’on lui donne le droit de reprendre ce préciput en renonçant à la communauté, il est dû un second droit "d’insinuation. Si le mari stipule en faveur de sa femme une donation d’une somme modique pour l’achat de ses habits nuptiaux, autre droit d’insinuation. Si, au lieu du douaire coutumier, on 'convient ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Élats gén. 1789. Cahiers.] d’un douaire préfix, souvent moindre que le coutumier, et que ce douaire préfix accorde à la femme la jouissance d'une portion d’immeubles quelconque, ne fut-ce qu’un logement dans la maison du mari, tel qu’il est accordé par la coutume, on perçoit un autre droit d’insinuation. S’il y a donation entre les futurs, autre droit d’insinuation. S’il leur est fait quelque donation particulière par un collatéral ou par un ami, c’est encore un droit d’insinuation. On ne finirait point si on voulait donner ici un détail de toutes les clauses qui donnent lieu à ce droit d’insinuation, droit d’autant plus onéreux qu’il se cumule sur chaque contrat de mariage, en sorte qu’il arrive très-fréquemment de percevoir cinq à six droits d’insinuation sur chaque acte. Que l’on ne s’imagine point que la rigueur de ces droits donne à l’administration un produit aussi considérable qu’elle semble le permettre ; cette rigueur produit un effet absolument contraire, lorsque les parties se présentent chez le notaire pour y faire rédiger leurs conventions; le premier soin de l’officier est de les instruire du montant des droits dont elles vont être chargées ; on leur en fait un détail qui les effraye, et la plupart du temps elles suppriment de leurs conventions celles qui entraînent un droit onéreux. Il arrive de ceci, d’un côté, que les parties n’ont point rempli leurs intentions, de l’autre, que l’administration ne perçoit point des droits qui se multiplient à l’infini*. Il serait donc du bien public que les contrats de mariage fussent libérés de toute entrave qui gêne de toutes parts la rédaction ; qu’à la place de tous ces droits multipliés assis sur chaque stipulation particulière, il y eût un seul droit proportionné à la qualité et plus encore à la fortune des contractants; la modération du droit le mettant à la portée de chaque classe de citoyens, l’administration gagnerait par la multiplicité des actes ce qu’elle perdrait par la force des droits. Partage des successions et licitations entre coheritiers. Les actes de cette classe sont encore de la première importance; il n’est pas un citoyen qui ne désire de les faire par-devant notaire ; il aurait l’avantage de renouveler à chaque mutation ses titres de propriété, d’en assurer la conservation par l’existence de la minute dans un dépôt public, con tre fous les accidents domestiques qui les font disparaître dans chaque maison ; après quelques générations, on ne serait jamais embarrassé de trouver la preuve de la possession des biens, on éviterait tous ces procès inextricables qui naissent à l’ouverture de chaque succession collatérale pour parvenir à reconnaître les biens de chaque ligne. On éviterait pareillement toutes ces difficultés qui s’élèvent journellement sur les domaines en retrait lignager par l’embarras où on est de justifier de la possession de chaque héritage; mais malgré tous ces avantages il est de fait que dans les provinces tous ces actes se font sous seing privé, et pourquoi? attendu l’énormité des droits de contrôle et centième denier. D’abord le droit de contrôle se perçoit sur toute la masse mobilière et immobilière de la.succession; en vain oppose-t-on aux employés des domaines qu’il serait juste de diminuer sur cette masse les charges et dettes dont la succession est tenue, suivant cet axiome de droit : Bona non computan-tur nisi deducto cere alieno, Ce qui est vrai en [Bail!, de Vitry-le-François,] 223 droit paraît cesser de l’être en matière de finance; au principe le plus certain on vous oppose une décision du conseil ou une lettre des administrateurs, et il n’y a rien à répliquer. D’un autre côté, si le partage contientune soulte, on perçoit le droit de centième denier sur cette soulte. En vain oppose-t-on encore à cette perception les principes les plus certains de la jurisprudence; en vain dit-on que le partage est un acte déclaratif et non point attributif de propriété ; que l’héritier, par l’effet du partage, se trouve avoir une portion d’immeubles plus considérable que ses cohéritiers, n’acquiert rien d’eux, mais est censé avoir été, dès l’instant de la succession ouverte, saisi de tout ce qui lui échoit par le partage, et que comme le centième denier n’est dû qu’à chaque mutation d’immeubles, le droit n’est point dû en cas de soulte, parce qu’il n’y a point de mutation. Ces principes, qui sont d’un usage trivial au palais, sont inconnus dans les bureaux; on y juge contre l’évidence qu’il y a mutation jusqu’à concurrence de la soulte, et on perçoit le droit de centième denier sur cette soulte. 11 en est de même des licitations lorsque l’un des cohéritiers réunit la totalité d’un immeuble à titre de licitation ; il n’acquiert rien de ses cohéritiers, l’acte le déclare seul propriétaire du total et la loi le réputé saisi de la totalité dès l’instant du décès de l’auteur commun. Ce principe est si certain que les parts indivises de ses coopérations lui passent sans aucune charge ni hypothèque du chef des colicitants, et que son titre ne donne ouverture à aucuns droits seigneuriaux, et cependant toutes les décisions du conseil s’accordent à imposer le droit de centième denier sur tes licitations jusqu’à concurrence de la valeur des portions réunies par l’adjudication, parce qu’elles sont fondées sur ce principe faux et erroné, qu’il y a mutation de propriété à l’égard de ces parties réunies. Ce sont des perceptions aussi révoltantes qui déterminent le citoyen à se garantir de cette vexation en se contentant d’actes sous seing privé, et ces décisions arrachées par la cupidité n’ont servi qu’à tarir une des sources du revenu public. Que l’on substitue à cette perception odieuse un droit modéré, que sur la masse du partage on fasse la réduction des dettes de la succession, que sur la somme restant on perçoive le droit de contrôle seulement au quart de la fixation laite par le tarif de 1722 ; Que l’on affranchisse les soultes et les licitations du droit de centième denier, puisqu’il est démontré que ce droit est contre les principes, et bientôt on verra tout le monde empressé à donner à ses actes une forme authentique ; on fera volontiers un sacrifice modéré pour se procurer tous les avantages qui en résultent. Cette espèce d’acte qui, depuis rétablissement du contrôle, ne produit rien ou presque rien, sera une nouvelle source de revenus, et le gouvernement aura cette satisfaction rare qu’il cîoit cependant toujours avoir en vue celle de ne tirer l’impôt qu’au même instant où celui qui le paye sent l’avantage de l’acte qui le produit. Quittances de remboursements. Lorsqu’un particulier a emprunté par acte passé devant notaire une somme quelconque, ou lorsque, ayant acquis un héritage, il est demeuré débiteur du tout ou partie du prix de son acquisition, il a payé volontairement le droit de contrôle du titre qu’il laisse à son créancier, parce qu’il a calculé sur cette dépense en se déter-ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. IBaill. de Vitry-le-François.] 224 lEtats gén. 1789. Cahiers.] minant à contracter; lorsque ensuite des circonstances plus heureuses le mettent à portée de rembourser, son premier désir est d’assurer sa libération en faisant inscrire sa quittance de remboursement sur la minute du titre originaire. Il se transporte chez le notaire pour faire dresser cette quittance, c’est une simple mention en quatre mots; mais quel est son étonnement lorsque l’officier lui observe que ces quatres mots inscrits sur la minute lui coûteront un droit de contrôle égal à celui qu’il a payé pour le contrat ! Il se fait répéter plusieurs fois cette observation, ne conçoit pas le motif d’une loi aussi onéreuse et finit par prendre de son créancier une quittance sous seing privé qui ne produit aucun droit au fisc, qui ne satisfait pas le débiteur fâché de n’avoir pu éteindre son obligation, et qui se voit avec douleur forcé d’en conserver soigneusement la quittance aux risques de la perdre. Ce meme débiteur fait ensuite d’autres affaires, et il inspire de la confiance à ceux auxquels il montre la quittance du prix de son acquisition antérieure ; mais sa fortune se dérange, il ne trouve plus à emprunter; quelle est sa ressource? cette quittance sous seing privé qui lui a été donnée dix ans auparavant est son pouvoir. Il peut, en la supprimant de concert avec son créancier, faire revivre l’hypothèque d’une dette qui ne devrait plus subsister, et la dette même; le créancier rend à son débiteur les fonds qu’il en a jadis reçus; ou s’il n’a pas de fonds, transporte sa créance à un autre prêteur, et par cette manœuvre dont l’usage est malheureusement trop fréquent, cette ancienne créance que l’on fait revivre absorbe le gage des créanciers postérieurs, qui cependant n’avaient donné crédit que par la certitude où ils étaient de l’extinction de cette ancienne créance. Ils sont donc dupes de leur bonne foi ; et quelle est la cause première de cette escroquerie? la rigueur de la loi qui a imposé sur les quittances de cette nature un droit disproportionné à l’intérêt que le débiteur peut avoir de se procurer ces quittances par devant-notaire. Ce droit est donc nuisible à l’administration elle-même, puisqu’il est assez fort pour déterminer les personnes qui désireraient un acte passé devant notaire à se contenter d’un acte sous seing privé ; il est nuisible au débiteur en ce que c’est contre son gré qu’il se détermine à renonceràune sûreté qu’il croyait d’abord nécessaire; il est nuisible au bien public en ce qu’il peut en résulter et qu’il en résulte en effet, tous les jours, des fraudes contre lesquelles on ne peut se défendre. Il est donc d’un intérêt général de proscrire un pareil abus, et le seul moyen d’y réussir est de ne taxer le droit de contrôle des quittances qu’à 10 sous, comme acte simple; et lorsque le titre du créancier a été contrôlé, ce simple droit, malgré sa modicité, produira infiniment plus que dans l’état actuel des choses, où la rigueur du droit rend son produit presque absolument nul. Déclarations pour le payement des droits de centième denier et franc-fief. Les règlements assujettissent les héritiers en ligne collatérale à fournir déclaration des biens meubles à eux échus et de la valeur desdits biens dans le délai de six mois, à peine de 200 livres d’amende en cas de fausse déclaration. D’autres règlements assujettissent les rotu-rieurs possesseurs de fiefs à payer un droit de franc-fief, qui est à chaque époque le payement d’une année de revenu du fief dont il s’agit. Lorsqu’un débiteur se présente au bureau pour acquitter un droit de centième denier d’un bien produisant 200 livres de revenu et qu’il s’agit de faire l’estimation du capital de ce revenu, le commis ne manque pas de lui dire : « Les biens-fonds se vendent à raison du denier trente du revenu; ainsi 200 livres de revenu donnent au denier trente un principal de 6,000 livres; vous devez donc le centième denier sur 6,000 livres, et il faut estimer sur ce pied, ou je ne reçois point votre déclaration. « D’un autre coté, si un roturier acquéreur d’un bien fief moyennant 6,000 livres se présente au bureau pour acquitter le droit de franc-fief et qu’il ne justifie pas d’un bail qui constate le revenu de ce bien, on lui dit : « Le revenu d’un bien à défaut de bail ne peut s’estimer qu’à raison du denier vingt. Votre acquisition est de6,000 livres en principal, le revenu sur le pied du denier vingt est de 300 livres ; vous devez donc pour droit de franc-fief de votre acquisition en principal 300 livres. » Ainsi, lorsqu’il s’agit de percevoir le droit sur le principal de la valeur d’un bien, ce bien doit être estimé à raison du capital au denier trente de son revenu ; si, au contraire, le droit doit se percevoir • sur le revenu , ce revenu doit être estimé à raison du denier vingt du capital, et conséquemment il est reconnu en matière de finances qu’un revenu de 200 livres donne un capital de 6,000 livres, et qu’un capital de 6,000 livres donne un revenu de 300 livres; c’est ainsi que la bouche des commis de l’administration souffle le chaud et le froid, suivant l’intérêt de l’administrateur, et il est très-naturel qu’un procédé aussi partial indispose le redevable contre les percepteurs et rende également odieux et l’impôt et celui qui le reçoit. il parait conforme à tous les principes d’ordre et de justice de mettre fin à une contrariété aussi frappante en sollicitant une décision portant que dans tous les cas la valeur d’un bien sera déterminée par le capital au denier vingtde son produit. Le denier vingt est le taux de l’intérêt légal. Un bien quelconque n’a de valeur réelle que jusqu’à concurrence de cette proportion ; si un acquéreur y met un prix supérieur, cette affaire de spéculation a une raison de convenance ; mais la valeur intrinsèque est toujours la môme, elle ne peut avoir d’autres proportions que celles autorisées par la loi, et comme, en toutes choses et particulièrement en matière d’impôt, il faut une base fixe et déterminée, il est donc de la justice du gouvernement d’établir cette base à raison du denier vingt. La même partialité, une contrariété aussi révoltante se rencontrent encore dans les cas qui vont être cités. Lorsqu’un particulier fait l’acquisition d’un immeuble situé dans la coutume de Yi-try, réputée allodiale, et que par le contrat d’acquisition cet immeuble n’est point déclaré chargé de cens, les commis de l’administration leréputent fief, et en conséquence décernent contre l’acquéreur une contrainte en payement du droit de franc-fief. Si sur cette demande l’acquéreur prétend ne pas devoir le droit parce qu’il est noble, l’administration lui répond que l’état de noblesse est une exception et que c’est à celui qui la propose de la prouver. Cette réponse est dans les principes et elle est appuyée d’une jurisprudence constante. Mais si l’acquéreur prétend ne devoir pas le [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES MRLËMENTAiftES. [Baill. de Vitry-le-Franç6is.] 228 droit parce que l’immeuble par lui acquis n’est point uef, l’administration lui répond encore que c’est à lui à prouver que celte négative et cette seconde réponse sont appuyées de décisions du conseil. Or, si la première réponse à celui qui se prétend noble est vraie et conforme aux principes, la seconde est nécessairement fausse et contraire aux mêmes principes , parce que l’état de roture étant l’état naturel et général de tout immeuble, la qualité du fief n’est qu’accidentelle , c’est une exception à la règle générale ; cette exception est proposée par l’administrateur, et conséquemment c’est sur lui que tombe l’obligation d’en faire la preuve ; mal à propos oppose-t-il que le propriétaire de l’immeuble par lui prétendu fief peut justifier de la qualité de roture, par la représentation de déclarations sèches aux terriers de la seigneurie dans laquelle cet héritage est assis, c’est réduire ce propriétaire à l’impossible, parce qu’il est de fait qu’en Champagne, dans les seigneuries qui n’ont point de censive universelle, ou on ne fait point de terrier, ou si le seigneur en fait la dépense, il ne demande les déclarations que des héritages sujets aux droits seigeuriaux. Si l’immeuble dont il s’agit est réellement fief, l’administration a bien plus de facilité pour prouver ce fait; tous les greffes lui sont ouverts, les registres de contrôle sont en sa possession, et comme il n’v a point de tief dont le propriétaire ne soit assujetti à rendre d’époque à autre des aveux et dénombrements , l’administrateur trouvera toujours quand il voudra la preuve de la féodalité. Il est donc absurde d’obliger l’acquéreur à faire la preuve impossible d’une négative quand on peut facilement faire contre lui la preuve d’un fait positif s’il existe, et cependant cette absurdité se renouvelle tous les jours. Variation dans la perception des droits decontrôle et d'insinuation. Le mode et la quotité de la perception étant depuis longtemps régis arbitrairement, d’un instant à l’autre il est obtenu par l’administration des décisions du conseil qui autorisent la perception jusque-là inusitée, ou qui, en d'autres cas, renouvellent une perception qui dès longtemps auparavant avait été proscrite. On peut donner pour exemple : 1° le droit d’insinuation du pré-ciput en faveur de la femme lorsque par contrat de mariage on accorde à cette femme le droit de renoncer à la communauté, de reprendre ce pré-ciput ; 2° le droit de contrôle des délégations dans, les actes de vente lorsque le titre du créancier délégué n’est point contrôlé. Ges perceptions ont été établies autrefois ; la justice des réclamations les avait fait proscrire ; les traitants ont trouvé des instants favorables pour les faire revivre et ils en ont profité. Qu’est-il arrivé? les commis de l’administration ont fait des relevés depuis vingt ans des actes qui pouvaient donner lieu à ces perceptions ; on a donné un effet rétroactif à ces décisions, et tous ceux qui ont été compris dans ces relevés ont été poursuivis et contraints au payement de droits dont ils ne connaissaient pas l’existence lorsqu’ils ont contracté; en sorte que la cessation de perception d’un droit qui semble accordé par faveur ou plutôt par justice au public est un piège tendu à sa bonne foi ; il contracte avec l’assurance que cette stipulation n’entraînera aucun frais parce qu’elle en est affranchie; il ne l’aurait point inséré s’il n’avait eu cette certitude, et cependant près de vingt ans lr* Série, T. VI. après, en vertu d’une décision nouvelle (et souvent sur une simple lettre de l’administration), les commis de cette administration reviennent sur leurs pas et perçoivent sur lui un droitqui n’existait point lorsqu’il a contracté. Tout homme qui ne connaîtra point les procédés de l’administration tiendra cette imputation pour calomnieuse, tant elle répugne à la justice, on peut dire même à l’honnêteté; cependant, tous les jours, cette vexation se renouvelle. Quel en serait le remède? rien n’est si simple : il suffira d’ordonner que jamais une décision du conseil ou interprétation des tarifs n’aura d’effet rétroactif, qu’avant de la mettre à exécution ; il en sera donné par l’administration communication au syndic de la communauté des notaires de chaque bailliage, afin qu’il puisse en instruire ses clients et que chacun, en souscrivant un acte devant notaire, soit aa-suré de la quotité des droits qu’il doit supporter. Forcements de recette. D’après des règlements multipliés, l’administrateur est fondé à forcer ses commis en recette des droits qu’ils ont omis de percevoir ou qu’ils n’ont pas suffisamment perçus. Ce droit, injuste en lui-même, est la source intarissable de tous les moyens d’extension créés depuis la publication des tarifs. Lorsqu’un contrôleur fait l’analyse d’un acte pour asseoir sa perception, son premier soin est d’en examiner attentivement toutes les dispositions pour juger s’il y a différentes manières d’y appliquer les articles du tarif qui peuvent y être relatifs; si l’acte est un peu compliqué, le commis est incertain sur les moyens d’en saisir la vraie perception ; supposons-lui un fond de probité, son incertitude le déterminera d’abord en faveur du redevable, mais bientôt la crainte d’être forcé en recette le fera revenir sur ses pas, il préférera sa tranquillité à l’intérêt du redevable, et finira toujours par percevoir le droit le plus rigoureux. Par cette conduite intéressée, dont on lui fait une nécessité, le percepteur se met à l’abri de toutes recherches, et il laisse à celui qui a payé un droit plus qu’équivoque, le soin d’en poursuivre la restitution; cette restitution est souvent peu intéressante pour chaque particulier; on craint de ne point réussir, on a payé, on ne s’en occupe plus, et le droit plus injustement perçu demeure à l’administration. Cet abus se multiplie à l’infini, parce qu’il se renouvelle tous les jours dans chaque bureau ; aussi chaque jour voit naître de nouvelles perceptions, dont jamais les employés n’auraient eu l’idée s’ils n’étaient sans cesse éveillés par la crainte de payer de leur bourse un droit dont leur conscience désavoue le perception. Il est de la justice du gouvernement de faire cesser un abus aussi répréhensible; que l’administration fasse choix de commis instruits et dignes de sa confiance, qu’elle fasse surveiller et vérifier leur travail à l’effet de poursuivre, dans le délai de deux ans fixé par les règlements, le recouvrement des droits omis, mais qu’elle n’impose point à ses employés l’obligation indispensable de taxer toujours au plus fort, surtout dans une perception de droits qui le plus souvent est arbitraire. Titres nouveaux. La rénovation d’un titre de créance est assujettie par l’article 91 du tarif du contrôle au même droit que le contrat originaire; cette loi est d’autant plus dure que, si plusieurs coobligés passent 15 226 [États gén. 1789. Cahiers.] reconnaissance du même titre par des actes séparés, il est' dû autant de droits de contrôle qu’il v a d’actes distincts. Il serait de la bienfaisance du Roi de modérer ce droit peu productif en lui-même en ce qu’il ne tombe jamais que sur des débiteurs de sommes peu considérables. Si la créance est intéressante et que le droit de contrôle soit trop onéreux, au lieu de passer un acte devant notaire, le débiteur laisse prendre une sentence dont les frais sont moins coûteux, parce qu’il n’est pas dû de contrôle. Il serait donc de l’intérêt de l’administration elle-même de consentir à la modération proposée. On pose de fait que son produit sur cette partie augmenterait, parce qu’à dépense égale on préférera un acte secret passé devant notaire, à la publicité d’une sentence; mais tant qu’il résultera du calcul que l’acte devant notaire coûtera trois ou quatre fois plus que la sentence, on préférera cette voie à l’acte notarié; l’intérêt de l’administration est. donc mal combiné, elle doit concourir à la réforme proposée. Renonciations à successions ou communautés. On ne conçoit pas cjuel peut avoir été le prétexte qui a déterminé à régler le droit d’insinuation d’un acte de renonciation sur la qualité de la personne décédée; dans tous les cas, celui qui renonce ne prend rien à la succession ou communauté qu’il répudie; qu’importe doncla qualité de celui dont le décès nécessite l’acte de renonciation? Souvent l’homme de la dernière classe est l’héritier présomptif d’un parent que son état a placé dans une classe supérieure. La succession s’ouvre; le malheureux, trompé dans son attente, trouve des affaires dérangées qui le forcent à renoncer ; l’espoir qu’il avait de recueillir une succession devient une charge imprévue, il est obligé de faire la dépense d’un acte de renonciation, et les droits d’insinuation de cet acte se perçoivent non à raison de sa qualité, mais en proportion de celle du défunt; une pareille distinction ne semble-t-elle pas établie uniquement pour insulter le malheur ? Prenons un autre exemple : Un artisan, dans une ville, a souvent pour toute fortune ses bras et une nombreuse famille; une mort prématurée l’enlève à cette famille désolée ; l’état de ses affaires nécessite une renonciation, et le droit de cet acte rigoureux se règle sur la qualité du défunt; il était artisan d’une ville, cela suffit pour le placer en seconde classe. En vain remontre-t-o.n aux commis que cette seconde classe ne comprend que les notables artisans, qu’un homme qui meurt insolvable n’est pas un artisan notable; l’évidence de cet argument est bientôt obscurcie par une foule de décisions du conseil; si ce malheureux citoyen laisse dix enfants, on fait payer à chacun 4 fr. 10 c. d’insinuation et 15 francs' de droit de contrôle pour le même acte d’une renonciation commune, ce n’est qu’à ce prix qu’on permet à des enfants accablés du poids de leur infortune de pleurer avec sécurité celui qui soutenait leur existence. Démissions de biens par les pères et mères à leurs enfants. Cet acte est très-fréquent parmi le peuple. Un laboureur , un vigneron propriétaires de quelques héritages les font valoir aussi longtemps que les forces le leur permettent; tant qu’ils ont pu travailler eux-mêmes, ce modique patrimoine leur a suffi pour vivre, payer leurs impôts, élever leurs enfants mais le moment vient où leurs [Baill. de Vilry-le-François.] bras engourdis par les tristes effets d’une vieillesse accélérée par un travail forcé ne suffit plus à leurs besoins; ils n’ont de ressource que dans la force de leurs enfants, ils leur abandonnent l’héritage qu’ils ont reçu de leurs ancêtres, ils y joignent le peu de meubles qu’ils possèdent, et ces enfants respectables, en assurant aux auteurs de leurs jours la tranquillité de leurs dernières années, s’acquittent ainsi envers eux de la dette qu’ils ont contractée dans leur enfance. Le dirons-nous à la honte de notre siècle, cet acte intéressant de la piété filiale est assailli par tous les traits de la bursalité; le droit decontrôle se perçoit sur la valeur des biens abandonnés, sans distraction des charges dont ils sont grevés; cet abandon, qui ne peut être considéré que comme une succession anticipée en ligne directe, donne lieu au droit de centième denier sur la valeur des fonds, et à un droit d’insinuation sur la valeur des meubles ; cet acte enfin devient tellement onéreux qu’il est hors la portée de la plupart de ceux qui le projettent. Observons cependant qu’il n’y a ni dans les règlements qui établissent le droit de centième denier, ni dans le tarif de l’insinuation, aucune disposition qui autorise expressément la perception de ces droits; ce n’est que par extension et en surprenant à la religion du conseil des décisions successives que l’on est parvenu ainsi par degrés à attaquer dans tous ses points l’acte le plus respectable de la société. Qualité des parties. Les différentes classes établies par les tarifs de contrôle et insinuation du 29 septembre 1722, étaient évidemment vicieuses; mais elles le sont devenues bien plus encore par les décisions interprétatives du conseil obtenues successivement par les agents. Comment a-t-on pu imaginer vouloir mettre dans la même classe les personnes les plus hautes en dignités et en .fortune, et un simple bourgeois d’une ville de province? Il est vrai que suivant le texte de la loi, on ne devait comprendre en cette première classe que des bourgeois vivant de leurs revenus, ce qui supposait des bourgeois aisés et en état par leur fortune de supporter un droit assez fort ; mais par les différée tes décisions obtenues successivement, tout ce qui porte la qualité de bourgeois a été appliqué à cette classe, en sorte qu’un malheureux artisan que le poids des années force à renoncer à sa profession de crainte d’en supporter inutilement la charge, n’ayant plus à prendre d’autre qualité que celle de bourgeois, s’il veut faire un testament par le même droit qu’un maréchal de France, ses enfants, s’ils n’ont point d’état parti-• culier, sont réputés bourgeois, et s’ils font un contrat de mariage, payent le même droit que le gentilhomme le plus qualifié. Dans une autre classe on voit associés les officiers de judicature, avocats, médecins, notaires et artisans ; il est vrai que le texte de la loi portait notables artisans, mais il a fallu interpréter le mot notable. D’abord on a décidé qu’il s’appliquerait à tous les artisans qui se trouvaient réunis en corps de jurande ; ensuite cela n’a pas suffi : le terme notable a été regardé dans le texte comme un mot insignifiant, et tous les artisans de quelque espèce qu’ils soient, quelque modique que soit leur fortune, ont été mis dans la même classe, en sorte que le plus vil, le plus malheureux de tous les artisans d’une ville où il y a juridiction royale, est assimilé aux officiers de judica* ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (États gén. 1789. Cahiers, j ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Baill. de Vitry-le-François.] 221 lure, avocats, médecins et autres bons habitants de la même ville. On voit trop combien une pareille disposition est injuste; on sait qu’elle est sentie depuis longtemps, que le gouvernement est persuadé de la nécessité d’y apporter remède. Il n’est donc question que de fixer son attention sur cet objet essentiel et de solliciter les modifications nécessaires pour arrêter le cours de pareils abus. Insinuation des actes portànt mutations d'immeubles sujets au droit de centième denier. Il y a environ vingt ans qup lorsqu’un notaire recevait le contrat de vente d’immeubles, le commis qui contrôlait cet acte percevait en même temps le droit de contrôle et d’insinuation, quoique l’immeuble vendu fût situé hors du ressort de son bureau. On s'est plaint et avec raison que cette insinuation ne remplissait pas l’objet de la loi, qui était de rendre publiques les aliénations d’immeubles, et en conséquence les commis ont eu ordre, lors-u’ils contrôleraient un acte portant mutation 'immeubles hors de l’arrondissement de leur bureau, de recevoir pour l’insinuation au bureau de la situation des biens, et il a été accordé à l’acquéreur un délai de trois mois pour acquitter le droit. Ce délai passé il est dû un double droit. Cette marche paraît assez simple; cependant elle est sujette à des inconvénients. 1° Le public ne connaît pas les arrondissements des différents bureaux établis par l’administration ; ils varient d’un instant à l’autre, soit par la suppression des anciens bureaux, soit par l’établissement des nouveaux, en sorte qu’un acquéreur qui se trouve quelquefois sur la fin du délai de trois mois, envoie son contrat à un bureau voisin au lieu de l’envoyer à celui de son arrondissement, ce qui le fait tomber malgré lui en contravention et lui fait encourir la peine du double droit ; il faudrait donc que le commis qui contrôle l’acte, au lieu de renvoyer vaguement au bureau de la situation des biens, renvoyât directement et par désignation de nom au bureau dans lequel l’insinuation doit être faite. 2° Un acquéreur est souvent éloigné du bureau où son contrat doit être insinué; il manque d’occasions pour y envoyer, ou il oublie cette obligation ; le délai s’écouie et il arrive trop tard. Il est dur pour une simple omission qui ne peut être considérée comme une fraude, puisque l’acte de contrôle est connu par les commis de l’administration, d’encourir la même peine que celui qui a cherché à éluder le droit par un acte sou£ seing privé ; il serait donc juste que ce délai fût de six mois au lieu de trois. Mais il y aurait un autre moyen, en soulageant le public d’une gêne désagréable, d’assurer à l'administration le payement du droit et de lui en procurer la recette plus prompte : ce serait d’autoriser le commis qui contrôle l’acte à percevoir le droit d’insinuation, mais de l’obliger en même temps à faire porter dans le délai de trois mois sur le registre du bureau delà situation des biens l’enregistrement de l’acte insinué ; celte obligation n’ajouterait rien à son travail, puisqu’il est obligé par ses ordres de régie de donner des extraits de tous ses envois à l’effet de vérifier si les acquéreurs y ont satisfait. Ce serait donc faire le bien public en lui évitant des démarches .coûteuses et souvent le payement d’un double droit qu’il encourt involontairement. Ce serait faire le bien de l’administration, en lui procurant une rentrée plus prompte et plus facile de ses droits; et puisque ce double bien peut se faire sans augmenter le travail, il ne peut y avoir aucune raison de le retarder. Il y aurait seulement une précaution à prendre : l’administration serait garant du défaut d’enregistrement dans chaque bureau où il doit être fait ; on sent que sans cette précaution le droit une fois perçu, ses commis s’embarrasseraient fort peu de l’enregistrement qui cependant est essentiel pour la publicité des aliénations. Payement du droit de centième denier en succession collatérale. Ce droit doit être payé dans les six mois du jour de la succession ouverte ; dans une même succession il se trouve des biens épars dans l’arrondissement de différents bureaux et souvent même en plusieurs provinces; l’héritier est obligé d’aller ou d’envoyer à ces différents bureaux ; là on y fait une difficulté, ailleurs une autre, les voyages se multiplient et tout cela augmente la charge de l’impôt. Quel inconvénient y aurait-il que la déclaration de tous les biens dépendants de l’hérédité se fit en un seul bureau, celui du lieu où la succession est ouverte? Ce serait simplifier sans inconvénient une opération souvent très-longue pour le redevable et elle ne préjudicierait en rien à l’administration ; la déclaration une fois fai te les commis pourraient la vérifier dans chaque arrondissement , l’y faire enregistrer chacun pour ce qui Je concernerait, et tout serait dans l’ordre. Toutes les fois que l’on peut, en percevant un impôt, alléger le fardeau de celui qui le supporte, on doit remplir ce devoir sacré de politique et d’humanité. Conduite des commis de V administra tion envers les redevables. Nous revenons encore aux déclarations à faire par les héritiers collatéraux pour le payement des droits de centième denier. Les règlements portent que ces déclarations se feront dans le délai de six mois, et que dans le cas où elles se trouveraient fausses soit par l’omission d’une partie des immeubles échus, soit par une évaluation fausse de leurs valeurs, les déclarants seront condamnés à la restitution des droits omis, au payement du double des droits et en l’amende de 200 livres. D’après des lois aussi rigoureuses, le fermier peut donc sans se compromettre recevoir des redevables leur déclaration telle qu’ils jugeront à propos de le faire, sauf à la vérifier et si elle se trouve fausse, à faire prononcer les peines portées par les règlements. Au lieu de cela, que font les commis ? ils prennent d’abord la note des biens à déclarer, ils en fixent eux-mêmes la valeur au plus haut, ils exigent des redevables de faire une estimation conforme à celle qu’ils ont faite eux-mêmes ; si on s’y refuse ils rejettent la déclaration et ne veulent point s’en occuper. . Le redevable, peu au fait des règlements, s’effraye des suites de cette querelle ; souvent il est à la fin du délai, il craint de le laisser écouler et il paye ce qu’on lui demande, crainte de pis. S’il a plus de fermeté et qu’il menace de faire signifier sa déclaration et ses offres par le ministère d’un Huissier, on lui répond qu’il n’y a point