[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 mars 1791-1 Art. 9. « Jusqu’au bail des fabriques nationales, la fabrication y sera continuée comme ci-devant; elles seront provisoirement régies par les deux administrateurs qui seront nommés en vertu de l’article 1er. Art. 10. « Les tabacs qui se trouveront en fabrication, au moment où les baillisies entreront en jouissance, Beront par tux payés, indépendamment du prix de leur bail, sur le pied de 18 sols la livre. Art. 11. « Immédiatement après i’invenlaire prescrit par l’article 3, les direct ores de district mettront en vente, sous la surveillance des directoires de département, au plus ofirant et dernier enchérisseur, après deux affiches et publications faites deux dimanches consécui ifs dans tuutes les municipalités de leur ressort, les tabacs manufacturés qui se trouveront dans les fabriques, entrepôts, magasins et bureaux ci-devant dépendant de la ferme générale. « Ils vendront de même, mais seulement après la passation des baux des fabriques nationales, les tabacs en feuilles qui s’y trouveront, ainsi que les tibacs qui auraient pu y être fabriqués dans l'intervalle de l’inventaire prescrit par l’article 3 et le bail. Art. 12. « Les officiers municipaux de chaque lieu où il existe des entrepôls de tabacs vérifieront la quantité des tabacs levés par les entreposeurs, au bureau général, et ce, d’après les factuies qui leur en ont été délivrées, et la quantité des tabacs par eux vendus d’api ès leurs registres de vente ; ce qui leur en re.-tera sera remis aux directoires de district qui eu rembourseront le prix aux enirepo-eurs et en feront la vente, ainsi qu’il est prescrit dans l’article 11. Art. 13. « Le tabac fabriqué sera vendu par quintal, le tabac en feuilb s pur millier. Le tabac fabriqué ne pourra être adjugé à un moindre prix que 35 sous la livre, le tabac en feuilles à moins de 12 sous. Art. 14. « Les directoires de districts meîtront en vente, dans les formes prescrites par l’article 11, les sels existants dans les magasins, greniers, dépôts et entrepôts dépendant ci-devant de la ferme générale, excepté néanmoins les sels existants dans les salines de Lorraine et Franche-Comté, et salins de Peccais. Art. 15. « Le sel ne pourra être vendu à un prix moindre que 10 0/0 au-dessus de celui auquel il revient maintena it dans le lieu de la vente; et, à cet effet, il sera dressé, sous les ordres du ministre des finances, un état où ce prix sera réduit en sommes déterminées, suivant les lieux de la situation des greniers, entrepôis, magasins et dépôts ; cet éiat sera imprime et transmis par les départements aux directoires de district, qui seront tenus ne s’y conformer. Art. 16. « Dans les lieux où le sel en magasin, grenier, 223 dépôt ou entrepôt n’excédera pas 2,000 quintaux, il sera vendu par parties de 200 livr es au plus. Dans les lieux où le sel excédera 2,000 quintaux, il sera vendu par millier, à la réserve de 2,000 quintaux qui seront vendus par parties de 200 livres au plus. Art. 17. « Le présent décret sera porté dans le jour à l’acceptation du roi. » L’ordre du jour est un rapport des comités réunis de Constitution , d'agriculture et de commerce, des finances, d'imposition et des domaines , sur les mines et minières du royaume. . M. Regnauld d’Epercy, rapporteur. Messieurs, vous avez ordonné à voire comité d’agriculture et de commerce de vous rendre compte des différentes adresses qui vous ont été présentées sur les mines et minières du royaume. Pour vous proposer un plan digae de son objet et de vous, il a invité les comités de Constitution, des finances, des impositions et des domaines de se réunir à lui; des commissaires nommés par chacun de ces comités se sont assemblés plusieurs fois pour traiter cette matière, l’une des plus importantes qui puissent être soumises à la sagesse de vos décidons. C’est donc au nom de ces comités réunis que je vais avoir l’honneur de vous offrir le résultat de leurs travaux. Après avoir examiné avec la plus sérieuse attention tous les titres qui leur ont été remis sur cet objet; après s’être fait rendre un compte exact de l’état actuel des mines et des conce-sions qui en ont été faites; après avoir consulté toutes les personnes instruites de ce qui est relatif à leur exploitation, vos comités ont pensé, Messieurs, qu’ils devaient appliquer à cetie branche d’administration les principes déjà consacrés par vos décrets, et fixer d’une manière certaine ceux qui peuvent lui être particuliers. Les mines peuvent-elles être considérées comme des > ropriétés particulières, ou comme des propriétés publiques? Voilà la question principale que vous avez à décider; vos comités l’ont examinée sous tous ses rapports : ils l’ont soumise à l’épreuve du droit naturel, du droit public, de la légi-lation de tous les peuples et de celle qui a existé en France, avant lepoque où a commencé la régénéiation de cetEmpire ; et bans toutes leurs recherches, dans tous leurs motifs, ils ont surtout consulté l’intérêt général, et c’est lui qui présidera à votre décision, puisqu’il est le but où doivent tendre les législateurs jaloux de remplir dignement le ministère auguste et sacré dont la nation les a revêtus. Avant de se livrer à la discussion d’une aussi grande question, vos comités ont voulu se pénétrer de quelques connaissances préliminaires sur l’objet matériel qu’ils avaient à traiter. Les mines sont des dons précieux déposés par la nature dans le sein de la terre pour l’utilité des nations agricoles, industrieuses et commerçantes ; leurs exploitations conduites avec sagesse, et par de grands moyens, foat circuler, sous mille formes différentes, des richesses immenses, qui alimentent sans cesse l’agriculture, le commerce, les arts et l'industrie, offrent des moyens de subsistance à un très grand nombre d’ouvriers, facilitent la suppression de la mendicité, et contribuent ainsi à la tranquillité et à la sûreté (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (20 mars 1791. | m publiques en même temps qu’elles augmentent la masse de nos jouissances et satisfont à nos besoins. L’homme isolé n’aurait jamais pu les extraire : cette opération était au-dessus de ses foi ces, et le résultat lui en aurait été inutile. L’homme civilisé les ignora longtemps, parce que ses besoins primitifs ne lui en avaient pas encore commandé la recherche; et, quand le hasard, plutôt que l'industrie, lui eut dévoilé teur existence, il en négligea l’exploitation par deux motifs puissants: le premier, qu’il n’en savait pas encore l'usage; le seco d, qu’il n’uvait pas encore appris de la nécessité les moyens ue les tourner à son avantage. Les mines, en effet, placées pour la plupart dans les immenses profondeurs de la terre, ne sont point indiquées sur la superficie, ou ne le sont que d’une manière incertaine : cel es qui sont métalliques ne peuvent ê're appliquées à nos besoins que par des opérations secondaires infiniment plus difficiles que leur extraction ; et leur extraction mê ne, comme celle des substances fossiles, demande des travaux immenses, des machines énormes, des sacrifices effrayants. Il faut partout vaincre la nature et c’est peut-être un des plus beaux triomphes que l’homme ait remportés sur elle. Les substances fossiles sont, pour la plupart, moins cach es; mais si la nature semb e avoir invité 1 homme à les fouiller, elle h i a ptéparé des travaux non moins pénibles, elle lui a opposé des obstach s non moins effrayants. EH a placé une première veine de minerai à une profondeur moyenne, mais là elle ne présente qu’un charbon de médiocre qualité et d’un mince produit; quelquefois elle n’offre à ses premières tentatives qu’un rocher couvert d’un enduit de ce fossile; une couche de terre de 2 ou 3U0 pieds couvre une seconde veine : ici l'extracteur est un peu mieux payé de ses travaux, il rencontre une veine moins maigre et d’une qualilé moins inférieure, mais enfin il n’a pas encore a?sez fait pour être dédommagé avec laraesse. Il lui reste à percer une autre masse de terre aussi épai-se, qui couvre une troisième veine de minerai ; quand il est d scemiu à 1,000 ou 1,200 pieds, alors il rencontre cet e troisième vente, et c’est là que la nature est libérale, et qu’elle donne le minerai le plus propre à tous nos besoins : mais, avant d’y arriver, avez-vous remarqué, Messieurs, les obstacles do t il a fallu triompher? Ceux qui ignorent la géométrie souterraine ne peuvent smn faire une just - idée. Creuser ces puits d’essai jusqu’à une profondeur de 1,200 pieds, et q miquelots davantage, ne leur paraîtra sans doute qu’un ouvrage de patience ; mais à peine est-on parvenu à une moyenne profon eur, que déjà les eaux affluent de toutes parts et viennent inonder les premiers travaux. Alors il faut extraire ces eaux à force de bras et de chevaux : souvint même c s moyens sont insuffi ants, souvent et presque toujours, dans les ex loitaliuns en grand, les seules qui toient véritablement avautageu-es, il faut creuser des galeries u’écoulernent où toutes les eaux, par det embranchements pratiqués avec intellige ce, viennent se déposer pour être portées hors de ces souterrains par des pompes à feu ou des machines hydrauliques. Est-on parvenu plus avant? De nouvelles galeries d’écoulement deviennent nécessaires, et 1 s travaux doivent recommencer avec plus de difficultés et de dépenses. Et pensez-vous, Messieurs, que ces puits d’essai, ces galeries d’écoulement soient toujours creusés dans des terrains qui cèdent facilement aux efforts de l’homme ? Non : c’est souvent à travers le to ■, et presque toujour-à travers des montagnes, qu’il faut que le mineur pénètre. Quand il a fait une excavation, il faut qu’il l’etaye et qu’il entretienne à grand* Irais cette charpente immense; et quand, poursuivre un sillon tortueux, il est parvenu à un point où l’air ne circule plus : quand il est dans de* profondeurs où le naz méphitique et les autres airs malfaisants le menacent sans cesse de la mort, c’est alors que de nouveaux travaux attestent son courage et son industrie. Il surrnoute ces dangers par de nouveaux puits et par des procédés que Ja physique emploie à propos. Si ce sont des mines métalliques, il faut, outre ces travaux, creuser des canaux, des étangs immenses pour amener les eaux nécessaires au service des usines; faire construire des fourneaux de reverbère et d’affinage, des laveries, des fonderies, des laboratoires, vies ateliers et des magasins, et enfin consommer une quanti é de combustibles de toute espèce pour les différents traitements des minéraux et des affinages. Que d’art, Messieurs, quels travaux, quelles dépenses ne demande pas une opération de ce genre? Le citoyen paisible, qui jouit de ces trésors, a-t-il jamais t-ongé à tout cela? S’est-il jamais fait une idée des dangers auxquels il a fallu échapper pour lui procurer ces jouissances ? Pour nous, Messieurs, après nous en être bien pén-drés, nous avons admiré avec étonnement les prodiges de l’industrie humaine, et nous avons voulu savoir si c’était l’ambition ou la nécessité qui avait commandé tous les travaux, tous les sacrifie s que l’exploi ation des mines exige journellement. Nous avons consulté l’é'at de nos consommations et la balance du commerce, et nous avons vu que malgré toutes les exploitations qui se fout en France, et dont les matières extraites sont un objet de près de 100 millions, nous sommes encore tributaires de nos voisins de 24 à 25 millions pour cet objet ; ce sont donc nos bénins qui ont fait naître ce gerne d’industrie : ainsi l’exploilation des mines nous a paru non seul meut avantageuse, mais même absolument nécessaire, et nous en avons conclu qu’il fallait la protéger et la soumettre à une législation sage et invariable. Nous disons invariable, et vous savez trop, Mesricu s, combit n la versatilité de nos lois a, jusqu’ici, ralenti nos progrès en tout genre. Les tiroir ét'-'S ne semblent que précaires dans un Em ire dont la législation a fa mobilité du caprice; et le citoyen, qui doit craindre sans cesse la variation de la loi qui doit le protéger invariablement, n’a que l’industrie de l’esclave qui ne s’étend jamais au delà du moment présent. Nous sommes encore loin de nos voisins sur le fait d -s min -s, et nous n’en devons accuser que la faiblesse et l’instabilité de nos lois. 11 tant, Messieurs, vous en présenter l’analyse. D’aoord en 1321, qui nous offre la première époque où le gouvernement s’occupa de cette parti ■ de législation, et celle époque doit nous con mire jusqu’en 1548, Philippe le Long, après avoir déclaré que les trimes étaient royales et domaniales, laisse la liberié indéfinie de les exploiter, et ne se réserve que son droit de souveraineté. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 120 mars 1791.] 225 En 1413, Charles VI exigea le dixième des métaux purifiés ; et, au moyen de cette redevance, il se chargea de défendre et de garder les ouvriers. En 1437, Ch ries VII confirma les dispositions des précédentes ordonnances. En 1483, Charles VIII y ajouta l’exemption de la taille. Louis XII, si juste envers ses sujets, les confirma en 1498, et François Ier, en 1515, en renouvela l’exécution. Pendant c* tte époque, les rois se contentaient de protéger les ouvriers et extracteurs à qui ils avaient abandonné les mines, à la charge d’une redevance du dixième du produit; l’exploitation, moyennant cette condition et celle de dédommager les propriétaires des terrains, était libre 5 tous les mineurs. Les abus de cette liberté indéfinie se firent promptement sentir; la plupart des mines restèrent sans exploitation, et celles qui furent fouillées furent plutôt dévastées qu’exploitées. Nous observerons que jusque-là les ordonnances des rois n’avaient fait aucune énumération des mines et de leurs différentes espèces ; celle de charbon était alors méprisée et abandonnée à cause de l’abondance des bois. La seconde époque doit commencer à Henri II, en 1548, et finir à Henri IV. Henri II crut réparer les abus résultant d’une liberté indéfinie d’exploiter les mines en les livrant à un seul homme. Le sieur Roberval surprit en effet des lettres patentes, le 30 septembre 1548, qui lui permir nt d'ouvrir , profonder et chercher toutes les mines dans les terres du royaume, et de les appliquer à son profit, à lui et aux siens. Cette concession fut confirmée par autres lettres patentes du 10 octobre 1552, qui ajoutent même au privilège du sieur Roberval, et l’on voit que parmi les mines que l’on entend comprendre sous l’administration royale, celles de charbon de terre y sont spécialement désignées. Le roi se réserve le dixième net de l’or et de l’argent effectif, et le dixième brut des autres méiaux et minéraux. Il est enjoint à Roberval de dédommager les propriéiaires de la valeur de leurs terres et non des mines y étant. François II accorda les mêmes privilèges, par édit du 29 juillet 1560, au sieur de Saint-Julien, associé du sieur Roberval qui était décédé, et lui fait don pour quatre années du droit de dixième dû sur toutes les mines du royaume; et ChariesIX accorda ensuite au nommé Vidal le même privilège qui fut confirmé eu 1574 par Henri III. On voit que, dans cotte seconde époque, les rois, usant toujours des mines comme de leur domaine, en accordèrent la concession générale à des tiers; mais ils passèrent d’un extrême à l’autre, de la liberté indéfinie au privilège exclusif, ce qui produisit le même résultat, eVst-à-dire les mêmes abus et les mêmes désavantages. La troisième époque commence à Henri IV et se termine en 1722. Henri IV adopta une administration nouvelle. Le conseil publia en 1601 un règlement en forme d’édit qui confirma les précédentes ordonnances, et excepta par grâce spéciale (ce sont ses termes), ev faveur de la noblesse et des autres bons sujets propriétaires, les mines de soufre, salpêtre, fer, ocre, pétrole, charbon de terre, ardoise, etc. Un g>’and maître fut créé, on retira toutes les provisions antérieures, excepté pour les mines de Languedoc et de Guyenne; on déclara que nul propriétaire ne pourrait ouvrir une mine sans la permission du grand maître. En 1640, le cardinal de Richelieu fut séduit et lre Série. T. XXIV. trompé par un aventurier allemand, nommé le marquis de Beau-Soleil, qui promit beaucoup, obtint ce qu’il voulut et disparut. En 1648, le cardinal Mazarin fit faire des recherches de mines dans différentes parties du royaume, et bientôt il ne fut plus question de mines en France pendant quarante ans; les grands maîtres et leurs subalternes avaient, par leurs exactions, fait disparaître du royaume ce genre d’industrie. On se convainquit de nouveau des abus d’une liberté indéfinie et on livra, en 1670, toutes les mines du royaume à M. de Montozier; et, comme si l’on n’avait connu que les deux extrêmes, quami on Vit que M. de Montozier abusait de son privilège, on accorda de nouveau, par arrêt du conseil du 13 mai 1698, aux propriétaires, indéfiniment, la liberté d’exploiter les mines de charbon; mais ceite liberté fut fatale aux exploitations, et au lieu de se multiplier elles cessèrent absolument. Cependant, on se tourmentait dans le conseil pour trouver un mode de législation plus favorable aux besoins de la société : on l’eût trouvé sans doute, mais la faveur particulière l’emportait toujours sur l’intérêt général. Ce qui s’est passé dans la quatrième époque, qui commence en 1722 et finit en 1740, nous en offre la preuve. Le gouvernement fit, en 1722, la même faute que sous Henri II: M. le duc de Bourbon fut créé grand maître et surintendant des mines et minières de France : on établit une compagnie générale, sous le nom d’un sieur Galabin, pour l’expluitation des mines du royaume, excepté celles de fer; et ce particulier, par un étrange renversement de principes, fut chargé lui-même de l’exécution de l’édit. Le despoiisme révoltant du grand maître et les exactions de ses subalternes produisirent ce qu’ils avaient produit, ce qu’avait également produit la liberté sans bornes, l’anéantissement absolu des exploitations. Enfin, aînés tant d’erreurs, et des erreurs si funestes, les besoins croissant chaque joue, les lumières s’augmentant aussi, on adopta un nouveau mode plus sage, quoique suj > t àdes inconvénients ; et c’est ici que commence la cinquième et dernière épo que de notre législation sur les mines. La charge de grand maître fut supprimée à la mort de M. le duc de Bourbon en 1741, et dès lors les mines se trouvèrent affranchies d’un despote. Les intendants du commerce furent chargés de cette partie sous les ordres des ministres des finances. M. de Trudaine fit publier en 1744 un règlement général pour l’exploitation des mines de charbon, par lequel fut détruite la liberté établie par grâce spèciale, en faveur du propriétaire du sol, et il faut convenir que ce ministre se fonda sur des motifs qui font honneur à ses lumières en administration ; il avait consulté la raison et l’expérience qui lui avaient démontré que le cercle toujours borné des facultés des particuliers, relativement à c< s entreprises si importantes pour la société, et leur ignorance, même leur impéritie, avaient porté la plus cruelle atteinte à cette branche de commerce. Il avait également reconnu que, quoique riches de ce combustible, nos besoins nous avaient forcés de recourir à nos voisins qui, très adroits à profiter de nos fautes, nous ont rendu leurs tributaires de sommes énormes. 15 226 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [io mars 1791.] Ce ministre fit à cette époque plusieurs concessions , dont quelques-unes sont encore en vigueur aujourd’hui. En 1763, M. Berlin, chargé de ce département, suivit cette nouvelle marche, ajouta beaucoup de concessions à celles qui existaient déjà, ce qui prouve que dès lors le régime adopté était plus favorable à l’exploitation et avait déjà fait naître une émulation utile. Cette étude de la législation française sur les mines nous a montré de grandes vérités; elle nous a appris, Messieurs, qu’il est également dangereux de livrer les mines au despotisme d’un seul, ou de les abandonner à une liberté indéfinie’, elle nous a convaincus qu’une législation versatile anéaniit toute espèce d’industrie parce que le citoyen , qui ne compte pas fermement sur la stabilité d’une loi protectrice ne travaille qu’à regret, étant tourmenté sans relâche par l’inquiétude et la défiance; elle nous a convaincus enfin de la nécessité d’une loi invariable; et puisqu’elle doit être invariable, il faut la méditer avant de la prononcer. J’ai eu l’honneur de vous l’annoncer, Messieurs, vos comités l’ont soumise à l’épreuve de la législation française, qui, mobile dans son administration, a été cependant appuyée sur un principe invariable; nous l’avons soumise à la législation de tous les peuples connus, à celle du droit naturel et du droit public. Vous allez juger nos recherches et nos méditations; mais, pour ménager vos moments, nous serons rapides et nous ne vous en offrirons que le résultat. Et d’abord toute notre législation, à dater de la première race de nos rois jusqu’à nos jours, nous présente les mims comme propriétés royales et domaniales. En 635, Dagobert accorda à l’abbaye de Saint-Denis huit milliers de plomb à percevoir tous les deux ans sur les mines d’Alsace. Charlemagne, en 786, donna à ses fils, Louis et Charh-s, avec les villes d’Ask et Glichon, tous les droits régaliens, dans l’énumération desquels les mines se trouvent spécialement comprises. A partir de cette époque, jusqu’en 1321, l’exploitation des mines a été abandonnée en France; ce fut alors que Philippe le Long déclara les mines être de droit royal et domanial. Ce principe a été confirmé par ses successeurs, et toutes les mines sans exception étaient rangées dans la même classe : toutes étaient propriétés royales et domaniales. Henri IV crut devoir, pour de grandes considérations, affranchir de son droit de souveraineté les mines de charbon et quelques autres en faveur de sa noblesse et pour gratifier { ce sont les termes de l’édit de 1601) nos bons sujets propriétaires des lieux. L’exception ne frappait pas sur les mines de métaux, et si elle porta sur les mines de charbon, elle confirma la règle; et lVxpéâence, comme nous l’avons dit, fit bientôt connaître que cette exception avait été funeste à ce genre de mine; aussi fut-elle abolie; mais un règlement aussi impolitique produisit les mêmes inconvénients, et, si on crut les corriger par l’édit de 1698, ui donna encore aux propriétaires la liberté 'exploiter les mines, on vit bientôt renaître les mêmes abus. Ainsi, Messieurs, les traits rapprochés de notre législation vous prouvent que, inconstante dans ses règlements, elle est invariable dans le principe; qu’elle a toujours placé toutes les minesau nombre des propriétés domaniales. Ensuite, l’histoire des peuples connus nous a appris que tous avaient considéré les mines comme propriétés nationales; et pour ne citer qu’un trait sur mille, à Athènes, dans ses plus beaux jours, dans les siècles des Aristide et des Thémistocle, il futarrêtéque le produit des mines qui se distribuait au peuple serait consacré à la construction des vaisseaux de la République. Mais, Messieurs, ne croyez pas que vos comités aient adopté ce principe sur la foi de nos anciennes législations et de celles des autres peuples. Quelque imposante que soit la voix de toutes les nations, vos comités ont pensé qu’il serait possible que l’erreur eût été généralement prise pour la vérité : ils ont donc consulté les maximes du droit naturel et du droit public. Ils sont remontés à la source de toute propriété; ils l’ont vu dériver, dans le principe, d’un partage ou d’un travail constamment appliqué par le premier occupant sur un objet, sans aucune opposition. Cette propriété ainsi acquise n’a pu devenir transmissible que par la garantie de la société; les particuliers ne possèdent donc rien que par la loi, et tous leurs droits étant un effet de sa protection, ils ne peuvent en jouir que d’une manière qui convienne à la République. Si, dans l’origine des sociétés, la propriété n’a pu s’établir que par un partage ou par le travail, il est constant qu’elle ne peut avoir pour objet que la surface des terres dont la culture assurait à tous les individus leur subsistance et celle de leurs troupeaux. Elle ne peut pas s’étendre sur les mines que la terre renfermait dans son sein, et qui y restèrent ignorées longtemps après l’établissement de la société, parce que les besoins n’en avaient pas encore demandé l’exploitation. Si la propriété ainsi acquise ne s’étendit pas sur les mines dont l’homme ignorait l’existence, les mines n’ont pas été partagées; et si elles sont demeurées indivises, quelle conséquence en voyez-vous résulter? N’en voyez-vous pas résulter q u Viles n’ont pas eu de maître particulier, et que, dès lors, elles sont restées en masse dans la main de chaque société, et que chaque société enfin a eu le droit d’en disposer ? D’ailleurs, Messieurs, étant bien reconnu qu’une mine est tellement disposée dans le sein de la terre, qu’il faut qu’elle soit exploitée dans son ensemble, et n’a de prix que par ce mode d’exploitation; et cet ensemble ne correspondant jamais, ou du moins très rarement, à une propriété unique, il ne peut être l’accessoire d’aucune propriété individuelle, et dès lors il est la propriété de tous, il est à la disposition de la société, parce qu’il est certain que ce qui n’a pas de maître particulier est dans les mains de la nation. D’après ces principes, nul ne peut se dire propriétaire d’une mine; nul ne peut avoir d’autre droit sur une mine que celui que donne une concession émanée de la nation. Ceux qui voudraient que les mines fussent des dépendances des propriétés foncières, appuient leur opinion sur un projetée M. Turgot, annoncé dans un ouvrage périodique en 1769. Mais M. Turgot n’a pas pensé que les mines étaient des propriétés particulières; car si. dans son système, il proposait d’un côté que chacun eût droit d’extraire dans son champ, il proposait, de l’autre, que chacun eût le droit d’extraire dans le champ d'autrui sans son aveu, et enfin, que le minéral fût au premier occupant, et qu’ainsi, en ouvrant chez soi et passant sous autrui, on fût premier occupant. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 mars 1791.J Vous devez sentir, Messieurs, combien ce système est loin de celui qui vou irait que les mines fussent des propriétés particulières; car, si elles étaient propriétés particulières, nul doute que le propriétaire ne pourrait extraire la mine qui serait sous son champ, et les voisins n’y auraient aucun droit. M. Turyot pensait donc, et c’est à ce point unique qu’il faut réduire son projet, que les mines sont au premier occupant, c’est-à-dire qu’elles n’avaient pas de maître particulier, et qu’elles sont à tous. Mais si elles n’ont pas de maître particulier, si elles sont à tous, elles sont doue en masse indivise dans la main de la nation, et dès lors elles sont à sa disposition. C’est la conséquence immédiate, la seule qu’on puisse tirer du système de M. Turgot; aussi ce ministre philosophe, que Pinflnence de la cour ne détourna jamais du bien public, fit-il plusieurs concessions à des compagnies. Mais, Messieurs, dans un moment où vous accordez une protect on si juste et si éclairée aux propriétés particulières, devriez-vous être entraînés par les autorités et les principes que nous venons de vous retracer, si l’intérêt delà France s’y opposait? Nous ne le pensons pas, Messieurs; tout doit plier devant l’intérêt général. Si donc l’intérêt général exigeait que les mines fussent confiées à l’exploitation des propriétaires, nous le disons a�ec assurance, vous ne devriez pas balancer à adopter ce parti, et même vous ne vous écarteriez pas des principes; car les mines resteraient toujours à votre disposition. Mais, comme vous ne pouvez, vous ne devez en disposer que pour le p'us grand avantage de la société, vous ne les livrerez qu’à ceux qui pourront en faire l’exploitation la plus utile à la nation. Il faut donc consulter l’intérêt national. Rappelez-vous, messieurs, ce que nous avons eu l’honneur de vous dire en commençant; retracez-vous le tableau que nous avons mis sous vos yeux, des travaux immenses hérissés d’obstacles et de dangers, des dépenses énormes que l’exploitation entraîne ap-ès elle, et voyez s’il est possible qu’un particulier les entreprenne; et, s’il en avait la témérité, croyez-vous qu’il réussît. Non, sans doute, vous ne te penserez pas. Cent propriétés se réuniraient ea vain : ils succomberaient, soit à cau-m de la faiblesse de leurs moyens, soit à cause de l’impossibilité de leur réunion, et de l’accord qui doit régner entre de pareils associés. Vos comités ont examiné avec soin les tableaux des produits annuels de quelques provinces du royaume, en objets tirés du sein de la terre. Ils donnent une idée des richesses immenses qu’une bonne administration des mines pourrait procurer à la France; mais en même temps ils ne nous montrent que trop quels sont encorenos besoins en ce genre. Il a été vérifié qu’en 1787, qui paraît une année moyenne, il est entré en France pour 33,133,328 livres d’objets tirés du s in de la terre, et qu’il en est sorti pour 8,687,357 livres. Ainsi, déduisant l’exportation de l’importation, il reste encore une somme énorme de 24,442,971 livres, payée à l’etranger pour des matières que la France renferme dans son sein. Et remarquez, Messieurs, que dans ce tableau ne sont pus comprises les matières minérales qui sont eutree-en Lorraine et en Alsace, ui forment un dix-huitième du royaume; et que, ans les sommes d’exportation sont compris 3 millions pour nos colonies; ce qui diminue le 227 prix de l’exportation, et peut être ajouté à la masse des besoins de l’Empire français. L’insuffisance de notre exploitation est donc prouvée d’une manière effrayante, quoique nos mines soient aussi riches, aussi abondantes et aussi multipliées que celles des pays qui placent leurs principales ressources dans l’exploitation des mines. Ainsi donc, pour en rendre l’exploitation florissante, pour assurer à la France les sommes qu’elle envoie annuellement à l’étranger, écoutons la voix de l’expérience, toujours plus sûre que des systèmes exagérés, enfantes dans les rêveries du cabinet. Elle nous dit que la liberté indéfinie pour l’exploitation des mines frustrerait la nation des produits qu’elle a droit d’attendre de son sol; elle nous dit que cette liberté même est directement opposée à 1 intérêt des propriétaires de la surface. Il est nécessaire de distinguer les différentes espèces de mines, et cette distinction jettera un nouveau jour sur la question soumise à votre décision. Les unes sont appelées mines ordinaires en masse eten filons et comprennenttousles métaux et demi-métaux, même les substances fossiles ; et toutes ne peuvent s’exploiter qu’en profondeur. Les autres sont les mines en couches superficielles de tran-port ou d’alluvioo. Elles comprennent également les métaux. D’abord, quant aux mines métalliques comprises dans la première espèce, jamais les propriétaires de la superficie ne se sont avisés de vouloir les exploiter. Indépendamment des travaux nécessaires à leur exploitation, des obstacles qu’ils rencontrent, des dépenses énormes qu’ils occasionnent, ainsi que l’exploitation des substances fossiles, les dangers sont plus nombreux; ensuite la manipulation du minéral demarntedes connaissances qui ne sont qu’à la portée que des g ns de l’art ; elle exige de nouvelles dépenses, des sacrifices longtemps infructueux que peuvent supporter seuls des capitalistes réunis en société; et bien souvent encore tous ces capitalistes perdent-ils à ce jeu toute leur fortune, et l’Etat y a toujours gagné une richesse .considérable, soit par l'entretien des ouvriers et le revenu annuel ' sur la masse circulante et agi-sante dans le commerce des capitaux employés à l’entreprise. Ainsi il ne peut y avoir la moindre difficulté relativement aux mines métalliques en masse et en filon. Il serait cependant possible que les succès remportés par les compagnies, à force d’art, de travaux et de dépenses, réveillassent quelques intérêts particuliers. Mais, jusqu’à présent, il faut rendre cette justice aux propriétaires de la surface qui recouvre de pareilles mines; ils n’ont i pas assez méconnu leurs forces pour hasarder une seule réclamation. A l’égard des substances fossiles, telles que les charbons de terre, plusieurs particuliers ont entrepris de les fouiller, et vous avez même vu, Messieurs, qu’un de nos rois, Henri lV,déierminé par des considérations qui lui parurent puissantes, permit, par grâce spéciale, aux propriétaires l’exploit >tion de ces sortes de mines; qu’avant cette époque on avait donné une liberté indéfinie de les exploiter; mais vous avez vu aussi que les abu> qui en étaient résultés l’avaient fait détruire; que si, en 1698, un arrêt du conseil l’avait rétablie, les mêmes abus o�t [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 mars 1791.) 225 depuis nécessité un nouveau mode d’administration. Qu’est-il arrivé dans tous les temps? Une grande négligence dans la recherche des mines, une exploitation mal dirigée, une concurrence et des divisions entre les propriétaires, qui, jointes au défaut de facultés et de connaissances, ont occasionné d’abord la dévastation des mines entreprises, et ensuite leur abandon total. Les traces de ces abus subsistent encore, et ne seront pas effacées de longtemps dans plusieurs des ci-devant provinces. Le préambule de l’arrêt de règlement de 1744, auquel nous devons une exploitation plus avantageuse, nous offre la preuve de cette vérité. Voici comment il s’explique : « Sa Majesté, étant informée que les disposi-« tions de l’arrêt de 1698 sont presque demeurées « sans effet, soit par la négligence des proprié-« taires à faire la recherche et l’exploitation « desdites mines, soit par le peu de facultés et « de connaissances de la part de ceux qui ont « tenté de faire sur cela quelques entreprises ; « que d’ailleurs la liberté indéfinie, laissée aux « propriétaires par ledit arrêt de 1698, a fait « naître en plusieurs occasions une concurrence « entre eux, également nuisible à leurs entrepri-« ses respectives, le roi a ordonné et ordonne, « etc. » Le règlement qui fut fait à celte époque contient des dispositions très sages ; mais, comme le sort des meilleures lois en France a toujours été d’être mal exécutées, il arriva que, dans quelques provinces, les propriétaires qui n’avaient pas profité de la liberté accordée par l’arrêt de 1698, furent aiguillonnés par la défense de celui de 1744, et entreprirent d’exploiter les mines de charbon dans le Forez, le Lyonnais, l’Anjou, l’Auvergne, le Limousin, etc.; et il faut convenir que, dans cette partie de la France, les mines se manifestant pour la plupart à la surface, les propriétaires ont dû être plutôt tentés d’enfreindre ce règlement. Mais leurs entreprises ne furent pas fructueuses. Ils fouillèrent sans règles ni principes ; creusèrent un nombre prodigieux de puits, en tirèrent le charbon, qui est toujours de mauvaise qualité à la première veine. Quand ils furent parvenus à environ 100 pieds, inondés par les eaux, ils furent forcés d’abandonner leurs entreprises, parce qu’ils manquaient de moyens pour faire des galeries d'écoulement, des galeries d’embranchement pour amener toutes les eaux à ud point central d’où on pût les élever au jour avec des pompes à feu ou des machines hydrauliques. Bien souvent aussi ces propriétaires cédaient les mines qui se trouvaient fous leur champ à des ouvriers, pour une redevance journalière ; et les ouvriers, comme on peut le penser, s’étant fort peu embarrassés de la conservation des mines, il en est résulté des travaux encore plus mal dirigés, et des éboulements qui ont causé la ruine de ces mines et la mort d’un très grand nombre d’individus. Cependant le charbon, devenu de nécessité première, manqua tout à coup, et les manufactures privées de ce combustible, firent entendre leurs plaintes, qui furent secondées par différentes villes du royaume. Alors les propriétaires sentirent leur impuissance; des compagnies se présentèrent, traitèrent avec eux de l’indemnité qui leur était due pour leurs premiers travaux, et le conseil j cencéda à ces compagnies le droit de reprendre | l’exploitation de ces mines, après avoir eu la sage précaution d’en faire constater le délabrement, et l’impossibilité des propriétaires, qui furent entendus, et qui en convinrent, comme cela est prouvé par des procès-vorbaux. Vos comités ont eu les preuves de tous ces faits et ils ne se sont pas bornés là. Ils ont voulu savoir si les compagnies exploitent avec sagesse et d’une manière plus utile, et ils peuvent vous attester que cette branche d’industrie a fait des progrès rapides et consolants depuis plusieurs années, et qu’elle n’attend qu’une loi invariable pour effacer les succès de nos voisins, faire dis-: paraître la dépendance où nous sommes encore d’eux, de près de 25 millions, comme je vous l’ai prouvé tout à l’heure, en vous présentant la balance du commerce pour l’année 1787 qui, pour les charbons de terre seulement, est à notre désavantage de la somme de 4,953,222 livres. Vos comités se sont enfin procuré les procès-verbaux d’inspection des mines du Lyonnais et du Forez, faite en 1782 et 1783, et ils ont vu avec plaisir que l’extraction des mêmes mines, par les concessionnaires, l’emportait considérablement sur celles exploitées par les propriétaires, et que la plupart ae ces dernières, faute de moyens suffisants, sont abandonnées, et que leur exploitation ne pourrait être continuée sans le plus grand danger pour les travailleurs. il a donc dû paraître démon iré à vos comités que l’exploitation des mines de charbon, comme celle des mines métalliques en masse et en filon, doit être faite par des concessionnaires, pour l’avantage de la société; il a dû leur paraître démontré, par l’expérience, que l’exploitationen grand, des unes et di s autres, est impossible à un seul propriétaire. L’intérêt général, d’accord avec la législation française et celle des nations étrangères, exige donc que vous consacriez ce principe de droit naturel et de droit public : Que les mines sont dans la main et à la disposition de la nation. Affermissons ce principe par d’autres maximes. On doit demeurer d’accord que nul individu, de quelque liber té qu’il jouisse, quelque protection que la loi accorde à la propriété, ne peut avoir le droit funeste de s’opposer à l’intérêt général. On doit également convenir que l’intérêt général exige que toutes les richesses de la société soient mises eu valeur active, et qu’aucune de ces ressources ne soit perdue. De ces deux principes, il en résulte un troisième, c’est que nul particulier ne peut être censé propriétaire d’un fonds dont l’exploitation lui est impossible, et dont cependant le produit est absolument nécessaire à la société. Vous venez de consacrer ces principes, sans lesquels nul gouvernement ne pourrait subsister, par votre décret du 24 décembre 1790, qui ordonne le dessèchement des marais qui nuisaient à la salubrité de l’air, ou qui, n’étant point en culture, faisaient perdre à la République un produit sur lequel elle*, a droit de compter. On ne vous accusera pas, sans doute, d’avoir voulu porter atteinte à la propriété : non, Messieurs; mais vous avez voulu que le citoyen, qui ne jouit que par la loi, ne nuisît pas à la société de qui émane la loi. Votre comité d’agriculture vous a développé ces principes d’une manière bien précise dans le premier rapport qu'il vous a présenté sur le Code rural, le 29 août 1790, en vous proposant [Assemblée nationale. | ARCHIVES PARLEMENTAIRES. lîO mars 1791.J 229 de prononcer l’indépendance du sol sous plusieurs exceptions, notamment sous celle de l’exploitation des mines et métaux (1). C’est encore d’après ces mêmes principes (lue, consultant toujours l’intérêt général, vous avez permis au sieur Brûlé d’ouvrir un canal. Avez-vous entendu que les propriétaires riverains des eaux, dont le cours sera dérangé pour aller dans un lit commun, seraient indemnisés de ta perte de ces eaux, qui ajoutaient à la fertilité ou à l’agrément de leurs champs? Non, sans doute, encore: les eaux seront dérangées de leur cours ancien pour l’intérêt général. Elles n’avaient pas de maîtres particuliers, elles appartenaient à tous, et la natiou a le droit d’en disposer pour l’usage de tous. Ce qu’on dit des eaux, on peut le dire à plus forte raison des mines. Les mines ne sont point le produit de l’industrie, elles ne font point partie des fruits de la superlicie sur laquelle l’homme applique son travail. Elles sont des bienfaits de la nature : tous les hommes y ont un droit égal ; elles ne peuvent donc appartenir qu’à tous, et la nation a le droit d’en disposer, d’en régler l’usage ; et, plus éclairée dans ses opérations que l’intérêt particulier, elle dirige toujours tes richesses publiques vers l’utilité générale. Conservez-lui, Messieurs, ce droit imprescriptible, et vous aurez assuré le bonheur particulier comme celui du corps social. Maintenant il faut que votre attention se porte sur d’autres objets qui ont frappé vos comités. Votre but doit être d’encourager également l’agriculture, le commerce et L’exploitation des mines. Eh bien, Messieurs, vous l’auriez complètement manqué en laissant aux propriétaires de la superficie une liberté indéfinie de les exploiter, puisque l’expérience nous a convaincus de la pénurie de leurs moyens et de l’impossibilité où ils sont d’entreprendre de telles exploitations, d’une manière utile pour la société. Si au contraire vous conservez à la nation la disposition des richesses souterraines qui exigent de grands capitaux pour être extraites avec bénéfice, que vous en concédiez l’exploitation à de riches capitalistes, considérez quels grands avantages il en résultera pour la société : 1° Vous livrez à la circulation des capitaux qui seraient morts pour le commerce ; (1) Une autre exception au principe est relative à l’extraction des mines et métaux. Le bien général l’exige. L’exploitation de mines de fer et les travaux des forges sont un des plus grands efforts de l’industrie de toute société perfectionnée. Arracher le fer des entrailles de la terre, lui créer des formes qui, variées à l’infini, doublent nos forces, protègent les lois et la société, agissent sur tous les arts et servent tous nos besoins, tels sont les heureux effets des mines de fer. Celles de charbon de terre viennent au secours des forêts dont la destruction, accélérée par le luxe des villes et par les forges mêmes, nous fait déjà redouter le moment où la marine et les édifices manqueront de bois de construction, où le pauvre citoyen sera dans l’impuissance de se procurer de ce combustible. Les mines de cuivre sont aussi d’une extrême utilité, et celles d’or et d’argent ont, en outre de leur valeur véritable, un prix politique et conditionnel, encore plus important. Le bien général oblige donc que le propriétaire d’un champ où il se trouve de la mine, de quelque nature qu’elle soit, en souffre l’extraction et l'en-lovement, aux conditions prescrites par la loi. (Page 10 du rapport fait au nom du comité d’agriculture et de commerce, par M. Heurtault-Lamerville.) 2° Vous cessez de porter à l’étranger des sommes énormes, en échange de sou minerai ; 3° Cette branche de richesses nationales n’est point perdue, leur extraction abondante alimente vos manufactures, fournit à tous vos besoins, et bientôt vos voisins, qui vous ont mis dans leur dépendance, deviendront à leur tour tributaires de votre industrie en ce genre ; car, nous vous le répétons avec plaisir, vous êtes plus riches qu’eux. Vos comités sont obligés de vous prévenir que si vous abandonniez l’exploitation des mines à tous les propriétaires indistinctement, vous prononceriez en même temps la ruine totale de leur exploitation, et vous mettriez plus que jamais l’Empire français sous la dépendance des étrangers pour les métaux de première nécessité. Vous entendriez alors les réclamations de beaucoup de départements : toutes les exploitations qui y font vivre des milliers de famille seraient abandonnées, toutes les mines exploitées au nom des propriétaires seraient partout ouvertes, effleurées à la surface ; mais bientôt délaissées, elles tomberaient dans le discrédit ; les entreprises, suffisamment étendues, deviendraient impossibles, les métaux augmenteraient de valeur, les manufactures languiraient, notre industrie serait détruite, notre numéraire passerait chez nos voisins et nous nous apercevrions trop tard de la faute que nous aurions faite, faute qu’il nous serait impossible de réparer. Les mines et minières du royaume doivent donc rester à la disposition de la nation, c’est-à-dire la nation seule a le droit d’accorder la permission de les exploiter et d’en surveiller l’exploitation. La première conséquence de ce principe est qu’aucune mine ne peut être exploitée sans une concession de la nation : mais comment cette concession sera-t-elle demandée et accordée? Aura-t-elle un temps limité? Et quelle pourra être son étendue? Ce principe qui fait la base du projet de décret, qui vous sera proposé par vos comités, servira de réponse à toutes ces questions. Quel est le but qu’on se propose, en déclarant que les mines sont à la disposition de la nation, en demandant qu’elles ne puissent être exploitées que par concession? On veut sans doute assurer les avantages de leurs exploitations, les multiplier et leur donner une activité qu’elles n’ont pas eue jusqu’à présent. Il faut donc qu’il ne suffise pas de demander pour obtenir la concession; il faut que le demandeur justifie des moyens qu’il peut employer; il faut qu’il ait les connaissances requises pour diriger cette opération, ou qu’il se foumette aux conseils des gens de l’art; il faut qu’il ait les facultés nécessaires pour soutenir son entreprise, et surtout qu’il annonce de quel combustible il prétend se servir. Le but du bien public serait manqué sans toutes ces conditions : celui qui les remplira le mieux obtiendra la concession. Mais, comme il faut se défier des ruses de l’intérêt personnel, des illusions, des faiseurs de projets, et des hommes à spéculation, il n’est pas d’autres moyens pour s’assurer de la vérité de ce qu’ils avanceront, que de les soumettre à de certaines formalités propres à rendre leur demande publique, et d’exiger que cette demande soit faite au département qui renfermera la oqine. Par ce moyen, on se mettra à l’abri de tonte espèce de surprise ; les demandeurs et la nature des demaudes seront mieux connus, et d’ailleurs ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |20 mars 1791.] 230 [Assemblée nationale.) chaque département peut seul juger, avec connaissance de cause, non seulement de ia justice et de Futilité des demandes, mais encore de l’étendue que l’on peut donner à une concession, sans nuire au bien public, et du temps pour lequel il convient de l’accorder; aussi vos comités renvoient-ils cet examen aux départements, en se contenant de fixer un maximum, pour le temps et l’étendue de la concession. Mais, Messieurs, en laissant les mines à la disposition de la nation, en décrétant cette loi d’une manière constitutionnelle, s’ensuivra-t-il que les propriétaires de la superficie seront exclus de leur exploitation? Vos comités sont bien loin d’avoir tiré une conséquente si absurde d’un principe aussi juste, ils ont, au contraire, pensé qu’à égalité de moyens ils doivent être préférés. Ils ont même cru qu’il était conforme à vos maximes que, lors d’une concession nouvelle, les propriétaires qui n’auraient point réclamé celte préférence, dussent être consultés pour savoir s’ils la désirent et s’ils peuvent la mériter. C’est par une suite de ce respect pour la propriété particulière, que vos comités se sont occupés des indemnités qui pouvaient être accordées aux propriétaires de la surface, qui ne voudraient ou ne pourraient point exploiter les mines qui se trouveraient sous leurs propriétés. Le mode qu’ils vous proposeront, Messieurs, leur a paru d’autant plus juste qu’il est applicable à tous les pays, et peut épargner aux entrepreneurs et aux propriétaires une foule de procès que faisaient naîtie les modes d’indemnité adoptés jusqu’à présent. Nous ne nous dissimulons pas que, quelque loi qu’on propose à ce sujet, elle aura toujours des contradicteurs, parce que l’intérêt n’est jamais satisfait dès qu’il croit avoir droit à un tribut ; mais nous vous obsérverons que, dans certains pays de la France, la plupart des terres qui renferment les mines sont de peu de rapport, médiocres et même mauvaises, et que vos comités ont adopté un mode d’indemnité tel qu’il représente plus du double du produit des meilleures terres; conséquemment, qu’il est applicable même pour les pays où les mines se trouvent dans des terrains de bonne qualité. Pensez-vous, Messieurs, que vos comités aient borné à ces soins les mesures qu’ils ont prises pour la satisfaction des propriétaires ? Ils sentent trop de quelle importance il est de les encourager et de les protéger dans toutes les circonstances, pour avoir négligé rien de ce qui peut bur être utile, en assurant l’intégrité de leurs possessions et de leur jouissance. Aucun concessionnaire ne pourra établir ses fouilles et ses exploitations dans les enclos murés, cours; jardins, prés et vergers attenant aux habitations ou étant à leur proximité, que du consentement du proprétaire de ces fonds, qui ne pourra être forcé à le donner. On a également prévu le cas où des dégâts quelconques seraient occasionnés, soit par des ouvriers, conducteurs et employés, soit à raison des chemins qu’un concessionnaire se serait frayés, ou de tel autre établissement que ce soit, dépendant de son exploitation. 11 se présente ici une question importante, relative aux anciens concessionnaires : continueront-ils burs exploitations, et leurs droit seront-ils respectés ? Vos comités puiseront leur réponse dans le principe qu’ils ont consacré par le premier article de leur projet de décret, principe appuyé lui-même sur une des bases les plus solides de l’ordre social, le respect pour les propriétés, et le droit imprescriptible qui appartient à tout citoyen, d’entreprendre tout ce qui lui est utile, sans nuire au bien public. Les anciennes concessions peuvent-elles être proscrites d’après ce principe ? Par là même que ce sont des concessions, ne rentrent-elles pas dans l’ordre de celles que vos comités vous proposent. Et s’il est utile, s’il est indispensable d’en accorder de nouvelles, il est utile, il est indispensable, sans doute, de confirmer celles qui existent. En vain dirait-on que les concessionnaires doivent être considérés comme des porteurs de privilège exclusif? En vain voudrait-on confondre ces concessions avec les privilèges supprimés par vos décrets. Qu’est-ce qu’un privilège exclusif? C’est celui qui porte sur des objets qui pourraient être exécutés par tout le monde ; c’est celui qui enchaîne l’industrie générale, pour satisfaire à la cupidité de quelques particuliers: mais les concessionnaires des mines n’ont point de privilège ; ils sont les dépositaires du droit de la Dation, qui le leur a confié pour un temps; ils ont rendu à l’Etat des services dont une liberté indéfinie aurait anéanti l’effet ; ils ont procuré à la société des biens, en raison desquels la société leur doit de la reconnaissance. 11 peut, à la vérité, y avoir des abus dans le mode de la concession, soit pour son étendue, soit pour sa durée, soit enfin par la manière dont les concessionnaires en ont usé. Corrigeons les abus, mais ne détruisons pas la chose qui est juste et utile en elle-même; rappelons les anciennes concessions aux limites que nous prescrivons pour les nouvelles; assurons l’avantage général, en forçant les anciens concessionnaires à entretenir une exploitation active dans chaque arrondissement de l’étendue déterminée, et qui sera renfermé dans leur concession; assujettissons-les à la loi qui annule une concession dont on n’aura pas usé activement pendant un temps fixé. Par ces moyens nous réunirons le bien public et le bien particulier; nous serons justes envers les concessionnaires, en même temps que nous aurons pris la mesure la plus avantageuse pour la société. Les concessionnaires ont en leur faveur des titres valables, leurs travaux et leurs dépenses; et c’est sous la foi d’un trailé solennel qu’ils ont mis en activité les mines qui leur ont é é concédées. Ce n’est que d’après des avances très considérables qu’ils ont commencé à en tirer quelque avantage. Il en est même plusieurs qui ne jouissent pas encore du fruit de ces avances. Pourrions-nous donc penser à anéantir de tels établissements, qui ont rassemblé dans le même lieu, et après un aussi long temps, tant de moyens et un si grand nombre de citoyens utiles, qui ont diminué si sensiblement les tributs que la France aurait payés aux nations étrangères, si ces travaux n’avaient pas été en activité? Et pourrions-nous calculer, sans frémir, les dédommagements immenses que la nation serait tenue de payer, sous peine d être accusée par tous> les peuples de l’Europe, si elle prenait le parti d’annuler des contrats aussi sacrés, de tuiner en même temps des milliers de citoyens, de les abandonner au désespoir et à la misère, en se privant elle-même des ressources les plus précieuses ? Sauvons, Messieurs, ce résultat funeste et destructeur de l’industrie française; conservons des [Assemblée nationale. | ARCHIVES PARLEMENTAIRES. {20 mars 1791.] 231 établissements précieux à la nation ; et, pour produire ce grand avantage, il nous suffit d’être justes. Après vous avoir exposé leurs idées sur la propriété et la concession des mines en général ; après vous avoir prouvé que les substances fossiles ne peuvent être exceptées des lois qu’ils vous proposent; après vous avoir enfin démontré les droits des anciens concessionnaires, vos comités doivent vous entretenir des mines superficielles de transport ou d’alluvion, qui leur ont paru exiger un litre particulier. On appelle mines superficielles toutes celles qui, existant à la surface du globe, et disséminées même dans la terre végétale, exigent, pour leur extraction, le bouleversement du terrain qui les renferme. L'exploitation de ces mines est très différente de celle des autres; elle n’exige ni approfondissement de puits, ni percement de galeries; tous les propriétaires de terrain ont des moyens suffisants pour l’entreprendre avec avantage et sans préjudice pour la société. 11 existe des mines superficielles de toute espèce de métaux; mais les plus abondantes, surtout en France, sont les mines de fer, et le plus communément elles sont extraites à 10, 15, 20 ou 30 pieds, et pre-que jamais au delà. C’est ce qui en rend par conséquent l’exploitation beaucoup plus facile, et à la portée de presque tous les propriétaires territoriaux. 11 a paru juste à vos comités de leur en abandonner dès à présent la libre disposition, avec la précaution cependant qu’ils ne puissent en user au préjudice de la société. Vos comités ont donc pensé, qu’en laissant aux propriétaires le droit d’extraire et de vendre ce minerai aux maîtres de forges, ces derniers devaient être autorisés à faire des sondes pour les découvrir; à le dénoncer aux propriétaires, pour qu’ils en fissent l’extraction dans un certain délai; et enfin, pour qu’en cas de refus ou d’interruption de leur part, les maîtres de forges pussent eux-mêmes faire procéder à cette extraction, sous la condition, néanmoins, de la plus juste indemnité envers les propriétaires. Vos comités n’ont pas cru devoir proposer qu’il fût fixé un prix aux mines de fer extraites. Une loi générale à cet égard serait sujette à une multitude d’inconvénients. Il serait difficile d’en concilier l’uniformité avec tes variations et les différences qu’en présentent les localités. D’ailleurs, la concurrence entre les différents propriétaires et les maîtres de forges aura bientôt déterminé le prix de ce minerai, et les juges de paix en seront au besoin des arbitres. Vos comités ont cependant pensé, Messieurs, qu’il serait également dangereux, et pour l’agriculture, et pour le commerce, que le prix de celte matière première, dont le surhaussement entraînerait la ruine de nos usines, fût trop dépendant de l’estimation des experts. Pour quoi ils proposeront un maximum au delà duquel ce minerai ne pourra être taxé. C'est d’après un calcul très exact qu’ils ont pensé que le prix du minerai lavé ne doit pas être porté au delà de 2 s. 6 d. par tonneau du poids de 20U livres, lorsque l’extraction en aura été faite par le maitre de forges, qui sera tenu de le faire laver, et de payer en outre aux propriétaires toute indemnité résultant, soit de la non-jouissance, soit des dégâts faits à la superficie. On pourrait peut-être penser que le prix du minerai ainsi réglé serait trop à l’avantage du maître de forges; mais on sera bientôt revenu de cette erreur, si l’on veut faire attention que, pour alimenter un haut fourneau projetant annuellement 1,200,000 livres de fonte, il faut 12 millions pesant de gangue ou minerai brut, qui, après l’épreuve du lavage, est réduit à 4 millions pesant, ou 8,000 tonneaux du poids de 500 livres, lesquels, à 2 s. 6 d., coûtent au maître d’usines une somme de 1,000 livres, indépendamment des frais d’extraction, de lavage, de transport, et des indemnités pour les non-jouissances et dégâts. Au surplus, les articles contenus au titre second du projet de décret que vos comités vous soumettront sont fondés sur les mêmes principes de justice et d’utilité pub ique qu’ils ont déjà eu l’honneur de vous développer; et la dernière partie de ce décret ne renferme en quelque sorte que des modifications du titre Ier. Vos comités auraient encore à vous exposer leur travail sur une partie bien essentielle de l’administration des mines : celle qui concerne les moyens d’en diriger l’exploitation. Vous sentirez aisément, Messieurs, combien il importe d’avoir des hommes instruits et sûrs, en état de bien diriger les exploitations dans les différents départements, de surveiller les mines concédées, d’éclairer les concessionnaires, et d’écarter surtout Ie3 tentatives et les propositions insidieuses des charlatans, qui ont nui d’une manière effrayante et incalculable à l’exploitation des mines en France. Vous verrez avec satisfaction, Messieurs, que vous pourrez employer utilement, pour l’intérêt public, des hommes éclairés et instruits qui faisaient partie de l’ancienne administration. Vos comités se plaisent à leur rendre cette justice : c’est à eux qu’ils doivent principalement tous les renseignements qui leur sont parvenus sur l’exploitation dos mines : mais vos comités ont pensé que cotte partie d’administration, relative à l’instruction et aux moyens de réunir en quelque sorte les exploitations, en faisant tendre leur activité commune au bien général des arts et du commerce, devait faire l’objet d’un rapport particulier, concerté avec les comités de Constitution et des finances, conformément à votre décret du 15.aoùt dernier. Ce rapport vous sera présenté incessamment. Vos comités se bornent donc aujourd’hui à vous proposer le projet de décret suivant : PROJET DE DÉCRET. « L’Assemblée nationale, considérant combien il est important d’assurer à la nation le produit des richesses souterraines que le sol de la France renferme dans son sein, et de faire cesser les tributs qu’elle paye à ses voisins, pour des métaux et des combust bles de première nécessité, qui ne sont devenus rares pour elle que par leur mauvaise exploitation, suite inévitable des variations et de l’incertitude de la législation française sur cette partie si essentielle d’administration, également fuite pour rétablir la prospérité de l’agriculture et du commerce, et donner une nouvelle perfection aux arts et à l’industrie; après avoir ouï le rapport qui lui a été fait au nom de ses comités réunis de Constitution, des finances, d’agriculture et de commerce, des domaines et des impositions, décrète ce qui suit :