SÉANCE DU 27 FRUCTIDOR AN II (13 SEPTEMBRE 1794) - Nos 14-15 139 plis actuellement m’a rapproché. Je prie la Convention nationale de m’accorder un congé de trois décades. Salut et fraternité. Ch. POTTIER. 14 Il existe dans le district de Maudidier, [sic pour Montdidier] la commune d’Hourges qui n’est composée que de six maisons. Les habitans demandent leur réunion à celle de Domart. L’administration du département croit cette réunion indispensable. La commission des administrations civiles, police et tribunaux vous demande un décret qui l’ordonne. Votre comité de Division à qui vous avez renvoyé l’examen de cette affaire ne voit dans la réunion demandée qu’un but d’utilité publique. Il vous propose de l’ordonner. Voici le projet de décret (37) : Sur le rapport [de Hourier-Eloy, au nom] du comité de Division relativement à la commune d’Hourges, département de la Somme, la Convention nationale prend le décret suivant. La Convention nationale après avoir entendu le rapport de son comité de Division, décrète : Article premier. - La commune d’Hourges, district de Montdidier, département de la Somme, est réunie à celle de Domart, pour ne former qu’une seule et même municipalité, dont Domart sera le chef-lieu. Art. II. - Le présent décret ne sera point imprimé. Il en sera remis copie manuscrite à la commission des administrations civiles, qui demeure chargée de le faire exécuter (38). 15 Une pétition est présentée de la part de plusieurs citoyens accusés de l’assassinat de Louis Cousin, ci-devant garde-général de la forêt de Brothonne; elle est appuyée et la Convention rend sur cette pétition le décret qui suit : La Convention nationale décrète qu’il est sursis à l’exécution de tout jugement rendu contre les particuliers accusés de l’assassinat de Louis Cousin, ci-devant garde-général de la forêt de Brothonne, et charge son comité de Législation de lui (37) C 318, pl. 1286, p. 1. (38) P.-V, XLV, 237. C 318, pl. 1286, p. 1. Décret n° 10 858 de la main de Hourier-Eloy, rapporteur. faire un rapport sous les trois jours sur cette affaire (39). La guillotine a dit DU ROY, n’est suspendue que par un fil sur la tête de 16 patriotes du département de l’Eure, condamnés à la peine de mort pour avoir assassiné un nommé Cousin, garde général de la forêt de Brotonne. Ce Cousin n’est point tombé sous les coups de quelques vils assassins; mais il a été la victime de sa barbarie et de sa férocité envers les patriotes de plusieurs communes des environs, qui ne se sont portés à cette extrémité que parce que les autorités constituées, le tribunal criminel ont refusé de leur rendre justice, et de mettre sous la bâche de la loi, un scélérat qui, depuis plusieurs années, exerçoit la tyrannie la plus odieuse contre les agriculteurs du canton (40). Sous l’ancien régime Cousin [fort de l'impunité que l’horreur de la féodalité lui accor-doit] (41) avoit fait couler mille fois sous sa main barbare, le sang de nombre de citoyens, [avoit exercé contre les habitans les vexations les plus cruelles, et sous prétexte de défendre les propriétés du maître dont il étoit le valet, plus d’une fois il a, sinon assassiné, au moins blessé et mutilé divers citoyens] (42). L’impunité l’enhardissait à de nouveaux forfaits. Sous le régime républicain, Cousin conservé dans sa place, s’y est comporté comme par le passé, il a mis le comble à ses anciens forfaits. [Il a été saisi la main dans le sang d’un malheureux qu’il alloit égorger et qu’il a fait trai-ner à la queue d’un cheval] (43). DU ROY cite plusieurs faits. Il ajoute que dans une insurrection qui a eu lieu à Groutot, 2 000 personnes au moins se portèrent à la maison de Cousin qui a péri des suites de cette insurrection provoquée par l’impunité des crimes de Cousin. Pourquoi faut-il que sur deux milles hommes qui ont contribué à la mort de Cousin, 17 seulement soient recherchés. Je demande que l’Assemblée suspende l’exécution de la procédure [et du jugement jusqu’à ce que les pièces en soient renvoyées au comité de Législation qui en fera son rapport] (44). Cette proposition est appuyée par BAR. Si les faits énoncés contre Cousin sont vrais, il n’y pas de doute dit-il que non seulement la procédure doit être suspendue, mais annullée. Je demande donc le renvoi au comité de Législation pour les examiner. Thomas LINDET appuie les faits énoncés par DU ROY (45). La situation terrible de ces patriotes a tellement intéressé la sensibilité et la justice de (39) P.-V., XLV, 238. C 318, pl. 1286, p. 2. Décret n° 10 859 de la main de R. Lindet, rapporteur. (40) Mess. Soir, n“ 756; J. Fr., n° 719. M. U., XLIII, 1281, 445. (41) Ann. R. F., n° 286. (42) Rép., n° 268. (43) Rép., n° 268. (44) J. Paris, n° 622. (45) M. U., XLIII, 445. 140 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE la Convention, que sans vouloir entendre l’évêque Lindet qui se préparoit à faire usage de ses talens oratoires pour défendre leur cause, elle a décrété le sursis de l’exécution de tout jugement rendu contre tous les citoyens prévenus ou accusés de l’assassinat de Louis Cousin, garde général de la forêt de Brotone, et a chargé son comité de Législation, de lui faire, sous trois jours un rapport sur cette affaire (46). 16 On [Bentabole] lit une lettre du citoyen Dentzel, qui réclame son indemnité pendant sa détention, et qu’il soit fait à son sujet un prompt rapport. La Convention nationale rend, sur cette affaire les deux décrets suivans. a Sur la pétition du citoyen Dentzel, convertie en motion par un membre [Rühl], la Convention nationale décrète que le citoyen Dentzel, mis en état d’arrestation, touchera l'indemnité de représentant du peuple pendant sa détention, et jusqu’à ce que la Convention ait prononcé à son égard, d’après le rapport qui doit en être fait par les comités qui en sont chargés. b Un membre [Monnel] a demandé que le comité des Décrets fût tenu de faire un rapport dans trois jours sur la question de savoir si Dentzel étoit étranger. Un autre membre [Reubell] a observé que cette question tenoit à celle des réunions; qu’il ne croyoit pas que ce fût le moment de la traiter; qu’ainsi il deman-doit le renvoi de la proposition du préopinant au comité de Salut public, qui sauroit la présenter quand il en sera temps. Le renvoi au comité de Salut public a été adopté (47). BENTABOLE, secrétaire, fait lecture d’une lettre de Dentzel, [ancien représentant du peuple] (48) mis en état d’arrestation [depuis le mois de nivôse] (49) et qui réclame les indemnités qu’il dit lui être dues en sa qualité de (46) Mess. Soir, n° 756; M. U., XLIII, 445; J. Fr., n° 719; J. Perlet, n° 721; J. Mont., n° 137; F. de la Républ., n° 434; Ann. R. F., n° 286; J. Paris, n° 622; Rép., 268; Gazette Fr., n° 987. (47) P. V., XLV, 238. C 318, pl. 1286, p. 3 et 4. Décrets n° 10 860 et n° 10 861. Le premier est de la main de Bentabole, rapporteur; le second de la main de Reubell, rapporteur. (48) J. Paris, n° 622. (49) Mess. Soir, n° 756; 26 nivôse selon Gazette Fr., n° 987. représentant du peuple [(et) que le comité des Inspecteurs du Palais National s’obstine à lui refuser] (50). Il expose qu’il n’a été mis en arrestation que comme étranger et que cette qualité ne doit point lui être appliquée, vu dit-il, qu’il est domicilié en France depuis onze ans, qu’il a épousé une française, et que le pays qui l’a vu naître, a été réuni à la France. RÜHL [a converti cette demande en motion, en observant que le pays dans lequel Dentzel est né, ayant été momentanément réuni à la France, il falloit examiner si cette circonstance pouvoit, ou non, le faire regarder comme Français mais que le moment n’étant pas encore venu de prononcer sur la question des réunions, il étoit juste que jusqu’à ce moment, Dentzel fut traité comme les autres] (51). (Il) demande que l’indemnité réclamée soit payée, jusqu’à ce que la question de savoir si Dentzel doit être considéré comme étranger, soit décidée. C Décrété ) MONNEL a essayé de justifier la rigueur dont on avoit usé envers ce député, en disant que le comité des Décrets ayant été consulté par celui des Inspecteurs du Palais National, pour savoir ce qu’il devoit faire dans le cas, les casuistes du premier de ces comités avoient été d’avis que la Convention ayant décrété que les étrangers ne pourroient siéger dans son sein, et ayant ensuite mis Dentzel en état d’arrestation, comme étranger, il étoit clair qu’on ne lui devoit rien (52). GARNIER (de Saintes) déclare que Dentzel n’a point été mis en arrestation en sa quabté d’étranger, mais bien pour sa conduite tenue à Landau pendant le siège [et que par conséquent on ne peut lui refuser le traitement de représentant du peuple, que la question de savoir s’il est étranger ou non, ne peut être décidée qu’après le rapport des comités qui en sont chargés] (53). Il demande en conséquence que le rapport sur cet objet soit fait incessamment. REUBELL [dit qu’effectivement Dentzel est né étranger, mais que sa commune a été réunie à la République Française. Il ajoute qu’elle est retombée au pouvoir de l’ennemi, mais il pense qu’on n’a pas encore décidé que Dentzel n’est plus Représentant du peuple] (54). (Il) pense que ces diverses questions, vu le rapport politique à cause de la réunion, doivent être renvoyées au comité de Salut public qui en fera son rapport au moment qu’il croira favorable ( Décrété ) (55). (50) Mess. Soir, n° 756. (51) Mess. Soir, n° 756. (52) Mess. Soir, n° 756. (53) J. Paris, n° 622. (54) J. Perlet, n° 721. (55) M.U., XLIII, 445-446; Mess. Soir, n° 756; J. Paris, n° 622; Rép., n° 268; J. Perlet, n° 721; Ann. R.F., n° 285; J. Fr., n° 719; J. Mont., n° 137 ; F. de la Républ., n° 434; Gazette Fr., n° 987.