708 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [29 décembre I790.j M. de Folleville. Vous ne voulez pas d’un cadi absolu. D’après cet article, vous en auriez un qui compromettrait tout à la fois la liberté publique et individuelle. Je demande donc qu’il soit dit dans l’article, ou que l’homme arrêté sera relâché s’il peut fournir caution, ou que dans les vingt-quatre heures Je juge, assisté de ses prud'hommes, sera obligé de statuer si l’homme restera ou non en état d’arrestation. M. Thouret. L’inquiétude de l’opinant vient de ce que l’on confond sans cesse la police avec la justice criminelle. La police est placée avant l’accusation ; c’est une précaution nécessaire à la société pour s’assurer de la personne prévenue : ce qu’elle décide n’est que provisoire; s’il y a un plaignant ou un dénonciateur, leurs droits sont à l’abri; je demande donc que l’article 5 soit mis aux voix. (L’article 5 est décrété sans changement.) L’article 6 est ensuite adopté dans les termes suivants : Art. 6. « Si le prévenu n'a pas détruit les inculpations, il en sera usé à son égard ainsi qu’il sera statué ci-après. » M. Mongins pense que les dispositions renfermées dans le titre V : De la dénonciation du tort personnel ou de la plainte, sontpréinuturét s; il propose que lu discussion de ce titre soit renvoyée après rorgauisation complète de la procédure par jurés. (Cette motion n’est pas adoptée.) Les articles 1 à 7 du titre V sont adoptés comme suit : TITRE V. De la dénonciation du tort personnel ou de la plainte. Art. 1er. « Tout particulier qui se prétendra lésé par le délit d’un autre particulier, pourra porter ses plaintes à la police, devant un juge de paix ou officier de maréchaussée. Art. 2. « La dénonciation du tort personnel, ou la plainte, pourra être rédigée par la partie, ou son fondé de procuration spéciale, ou par l’officier de police, s’il en est requis; laquelle procuration sera annexée à la plainte. Art. 3. « La plainte sera signée à chaque feuillet, et datée par l’officier de police ; elle sera également signée à chaque feuillet, et affirmée par celui qui l’aura faite, ou par son fondé de procuration spéciale. Il sera fait mention expresse de la signature de la partie, ou de sa déclaration de ne pouvoir signer, à peiue de nullité. Art. 4. « Celui qui aura porté plainte, aura vingt-quatre heures pour s’en désister, auquel cas elle sera biffée et anéantie huit jours après, à moins que l’officier de police n’ait jugé convenable de jü prendre pour dénonciation ; ce qu’il sera t nu de faire dans tous les délits qui intéressent le public-1 Art. 5. « L’officier de police, qui aura reçu la plainte, recevra également note de la déclaration sommaire des témoins produits par l’auteur de cette plainte. I! sera tenu aussi d’ordonner que les personnes et les lieux seront visités, et qu’il en sera dressé procès-verbal toutes les fois qu’il s’agira d’un délit dont les traces peuvent être constatées. Art. 6. « Dans le cas où l’officier de police qui a n çu la plainte est celui du lieu du délit, il pourra, d’après les charges, délivrer un maudat d’amener contre le prévenu, pour l’obliger a comparaître, et de lui fournir des éclaircissements sur le fait qu’on lui impute. Art. 7. « Néanmoins, en vertu du mandat d’amener, le prévenu ne pourra être coniraint à venir qu’autant qu’il sera trouvé dans les deux jours de la date du mandat, à quelque distance que ce puisse être ; ou passé les deux jours, s’il est trouvé dans la distance de dix lieues du domicile de l’ofticier qui l’a signé. » La discussion s’engage sur l’article 8 qui est conçu en ces termes : Art. 8. | « Si, après les deux jours, le prévenu est trouvé au delà des dix lieues, il en sera sur-le-champ donné avis à l'officier de police qui a signé le mandat; et suivant l’ordre qui y sera porté, il sera gardé à vue, ou mis en état d’arrestation, en faisant viser le mandat par l’officier public du lieu, jusqu’à ce que le juré ait prononcé s’il y a I lieu, ou non, à accusation à son égard. » M. Hongins observe quedécréter l’article 8 tel qu’il est proposé, c’est préjuger la question importante de savoir si le juré d’accusation aura lieu. M. Populus. Pourquoi biaiser dans une pareille question? Abordons-la de front. Je fais la motion expresse que l’on discute de suite s’il y aura ou non un juré d’accusation. (L’Assemblée adopte la motion de M. Populus à une grande majorité.) M. Remercier dit qu’il ne conçoit pas que la question de savoir si le juré d’accusation aura lieu soit problématique dans l’Assemblée: la nécessité de cet établissement est justifiée par la raison, l’intérêt de la liberté, des décrets constitutionnels et la propre expérieuce de l’Assemblée. L’orateur rappelle la discussion de l’affaire de M. de Lautrec; il observe qu’alors l’As.-embiée luisait les fonctions du juré d’accusation, fonctions dont elle n’a eu que lieu de se louer, puisqu'elles l’ont mise dans le cas de faire triompher l'innocence d’un de ses membres; il dit qu’il s’en tiendra à ce seul exemple pour dénoncer l’utilité du juté d’accusation et il couclut à ce que l'article suit décrété tel qu’il est rédigé. M. de Longuève combat l’opinion de M. Le-mercier. M. Criirat l'aîné, lu combat également. (L’assemblée décrété qu’il y aura un juréd’ac- [Assemblée nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. {29 décembre 1790.J 709 cusation et elle adopte l’article 8 sans changement.) M. le Président interrompt la discussion et fait lecture de plusieurs lettres qui annoncent : Que des biens nationaux situés dans le district de Versailles, évalués, d’après le prix des baux, 242,431 1. 10 s., ont été vendus 391,200 livres, ce qui fait un bénéfice sur celte évaluation de 148,768 1. 10 s.; Que d’autres, situés dans le district de Saint-Üizier, département de la Haute-Marne, estimés 129,303 1. 3 s. 4 d., ont été adjugés 236,300 livre s, ce qui donne un bénéfice de 107,000 livres; Que d’autres, situés dans le département de la Marne, district de Reims, estimés 400,000 livres, QHt été vendus 700,000 livres, ce qui produit ®[.000 livres de bénéfice; �Intin, que d’autres, situés dans l’arrondissement du district de Ploermel, département du Morbihan, prisés 36,217 livres, ont été vendus, le 24 de ce mois, 47,979 livres, ce qui présente un bénéfice de 11,762 livres. La discussion est reprise sur le surplus du titre V ; les articles 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16 et 17 qui le complètent, sont décrétés ainsi qu’il suit : Art. 9. « Pour cet effet, quatre jours après la délivrance du mandat d’amener, si le prévenu n’a pas comparu devant l 'officier qui l’a signé, celui-ci enverra copie de la plainte, et la note des déclarations des témoins, au greffe du tribunal de district, pour y être procédé ainsi qu’il sera prescrit ci-après. Art. 10. « Si néanmoins le prévenu est trouvé saisi des effets volés, ou d’instruments servant à faire présumer qu’il est l’auteur du délit, il sera amené sur-le-champ devant l’officier de police qui aura signé le mandat d’amener, quels que soient la distance et le délai dans lesquels il aura été saisi. Art. 11. « Dans le cas où l’officier de police qui a reçu la plainte n’est pas celui du lieu du délit, mais seulement celui de la résidence habituelle ou momentanée du prévenu, il pourra toujours donner un mandat d’amener devant lui ; auprès les quatre jours, si le prévenu n’est pas comparu ou amené, l’affaire, avec toutes les pièces, sera rga ement renvoyee au grel'fedu tribunal de district du lieu du délit. Art. 12. « Enfin, dans le cas où l’officier de police qui a reçu la plainte n’est ni celui du lieu du défit, ni celui de la résidence du prévenu, il sera tenu de renvoyer l’affaire avec toutes les pièces devant le juge de paix du lieu du délit, pour qu’il soit déterminé }>ur celui-ci, s’il y a lieu, ou non, à délivrer le mandat d'amener. Art. 13. « Lorsque le prévenu comparaîtra par-devant l'officier de police, il sera examiné sur-le-champ, ou, au plus lard, dans les vingt-quatre heures; et s’il resuite des éclaircissements qu’il n’y a aucun sujet d’inculpation contre lui, l’officier de police le renverra en liberté. Art. 14. « Lorsquele prévenu ne donnera pas deséclaircissements suffisants pour détruire les inculpations, alors si le délit est de nature à mériter peine afflidive, l’officier de police, soit celui du lieu du délit, soit celui delà résidence du prévenu, délivrera un mandat d’arrêt pour faire conduire à la maison d’arrêt du district du lieu du délit. Art. 15. « Si le délit est de nature à mériter une peine infamante, le prévenu sera également envoyé à la maison d’arrêt, à moins qu’il ne fournisse caution suffisante de se représenter lorsqu’il en sera besoin, auquel cas il sera laissé à la garde de ses amis, qui l’auront cautionné. Art. 16. « Si le délit n’est pas de nature à mériter peine afflictive ni infamante, le prévenu ne pourra être conduit à la maison d’arrêt; mais celui qui a porté plainte à la police sera renvoyé à se pourvoir par la voie civile. L’Assemblée nationale se réserve de régler ce qui concerne les mendiants et vagabonds, et les punitions correctionnelles qui pourront être prononcées par l’officier de police. Art. 17. « Le refus de l’officier de police de délivrer un mandat d’amener ou un mandat d’arrêt contre un prévenu n’étant qu’une décision provisoire de la police, celui qui a porté sa plainte, pourra se pourvoir ultérieurement, ainsi qu’il sera prescrit ci-après. Les articles 1,2, 3, 4, 5, 6, 7 et 8, qui composent le titre VI, sont adoptés, avec quelques amendements, dans la forme suivante : TITRE VI. De la dénonciation civique. Art. 1er. « Tout homme qui aura été témoin d’un attentat, soit contre la liberté et la vie d’un autre homme, soit contre la sûreté publique ou indi-vidutdle, sera tenu d’en donner aussitôt avis à l’officier de police du lieu du délit. Art. 2. « L’officier de police demandera au dénonciateur s’il est prêt ou non à signer et affirmer sa dénonciation, et s’il veut donner caution de la poursuivre. Art. 3. « Si le dénonciateur signe sa dénonciation, l’affirme et donne caution de la poursuivre, le juge sera tenu d’ordonner, aux témoins qu’il indiquera, de venir faire devant lui leur déclaration. Art. 4. « Sur cette déclaration, le dénonciateur pourra demander à l’officier de police un mandat d’amener le prévenu, Art. 5. « Il sera observé à l’égard de la dénonciation