396 (Assemblée nationale.] ARCHIVES M. Defermon. La cour provisoire établie en Bretagne a rendu les plus grands services, et le peuple bénit chaque jour le décret par lequel vous l’avez créée : j’appuie donc la proposition de M. Arnoult. M. Populus. Dans ma province, qui est du ressort du parlement de Dijon, nous avons un droit particulier et des usages qui ne sont pas même écrits. Je demande, et ma proposition est si juste que M. Arnoult ne s’y opposera vraisemblablement pas, que le présidial de Bourg fournisse quatre juges. M. Martineau. Tous les bailliages pourraient réclamer la même disposition: chacun a ses usages particuliers; les jurisconsultes de Dijon connais-sentces usages, et présenterontà lacour provisoire les instructions nécessaires. Nous n’avons point envie d’accorder de prérogatives sans nécessité. Je demande donc la question préalable sur l’amendement de M. Populus. Cet amendement est rejeté, celui de M. Brillât est décrété, et le décret proposé par M. Arnoult adopté en ces termes : « L’Assembléenationale, instruitede la cessation de l’exercice de la justice souveraine dans le ressort du parlement de Dijon, a décrété et décrète ce qui suit: « Art. 1er. Il sera incessamment, et sans délai, composé un tribunal provisoire à Dijon, pour remplacer la chambre des vacations du parlement de cette ville ; auquel effet, il sera pris deux juges de chacun des présidiaux du ressort, deux de la sénéchaussée de Trévoux, deux jurisconsultes parmi ceux du barreau de Dijon, un jurisconsulte de chaque ville où les présidiaux sont établis, et un jurisconsulte de la ville de Trévoux. Lesdits membres se réuniront et se mettront en activité le plus tôt possible, et commenceront sans délai l’exercice de leurs fonctions. En cas de refus ou d’absence de partie d’entre eux, ils appelleront provisoirement et à leurs choix des avocats pour assesseurs. Ils se diviseront en deux chambres, dont l’une connaîtra de toutes les matières civiles, même de celles d’eaux et forêts, à quelques sommes qu’elles puissent monter; l’autre des matières criminelles : îesdites chambres seront présidées par le plus anciennement admis au serment d’avocat, et le même ordre d’ancienneté réglera la préséance entre eux. « Art. 2. Si parmi les officiers du parlement il s’en trouve qui désirent conserver leurs fonctions, ils seront tenus de le déclarer avant la composition du tribunal provisoire; auquel cas ils ne recevront pas l’honoraire qui sera ci-après fixé, leurs gages leur en tenant lieu, et il sera pris d’autant moins de juriconsultes dans les présidiaux. « Art. 3. La cour supérieure provisoire ainsi formée tiendra ses séances tous les jours, même pendant ceux des fêtes de palais, et sans aucunes vacances. Elle recevra les licenciés en droit au serment d’avocat. « Art. 4. Les gens du roi rempliront les fonctions ordinaires du ministère public, tant à l’audience qu’à la chambre du conseil : en cas d’absence ou d’ empêchement, lesdites fonctions seront remplies par les substituts du procureur général du roi. « Art. 5. Les greffiers, huissiers et autres officiers ministériels attachés au parlement de Bourgogne, continueront leurs fonctions auprès de ladite cour supérieure provisoire. « Art. 6. Les ci-devant juges composant le parlement de Bourgogne remettront au greffe, dans PARLEMENTAIRES. [21 juin 1790]. huit jours après l’entrée en exercice de ladite cour, les procès et pièces qu’ils peuvent avoir; et, faute à eux de le faire, ils seront poursuivis à cet effet à la requête du procureur général du roi ou de l’un des substituts, et condamnés aux dommages et intérêts des parties. >< Art. 7. Leshonoraires des j uges appelés à composer la cour supérieure provisoire seront de 12 livres par jour, à compter, pour ceux des villes du ressort autres que Dijon, du jour de leur départ, et pour ceux de Dijon, du jour de leur entrée en fonctions. Autorise les receveurs des départements du ressort à payer chaque mois lesdits honoraires sur un mandat du président, signé du procureur général ou de l’un de ses substituts : en conséquence, lesdits juges ne percevront aucuns droits ni épices, sous quelque dénomination que ce soit. Les substituts, greffiers et autres officiers ministériels n’étant point compris dans la fixation des honoraires, continueront de recevoir les émoluments qui leur seront attribués par le titre de leurs offices ou par les règlements. « Art. 8. L’Assemblée nationale charge son président de porter le présent décret dans le jour à la sanction du roi. » M. Cfaassei, rapporteur du comité des dîmes. Je vais avoir l’honneur de vous proposer d’ajouter deux articles additionnels au décret du 18 juin concernant les dîmes et champarts. Ils sont ainsi conçus : « L’Assemblée nationale, instruite qu’il s’élève des difficultés sur la jouissance des bénéficiers, corps et communautés étrangers, des biens qu’ils possèdent en France, décrète ce qui suit : « Art. 1er. Les bénéficiers, corps et communautés étrangers, ainsi que les propriétaires laïcs des dîmes inféodées, également étrangers, continueront de jouir, la présente année, comme par le passé, des biens et dîmes qu’ils possèdent en France : en conséquence, les assemblées administratives, de même que les municipalités, s’abstiendront, à l’égard des biens et dîmes, de toute administration ou régie prescrite par les précédents décrets. L’Assemblée nationale déclare n ulles et comme non-avenues, toutes délibérations prises par les municipalités, qui seraient contraires à la teneur tant du présent décret, que de ceux des 14 et 20 avril dernier, et 18 de ce mois. « Art. 2. Quant aux dîmes et biens possédés dans l’étranger par des bénéficiers, corps et communautés français, ceux qui sont en usage de les fairé valoir par eux-mêmes continueront de les exploiter la présente année, à la charge de rendre compte des produits aux directoires des districts où se trouvera le manoir du bénéfice, ou le chef-lieu de l’établissement; sinon les mêmes directoires, et, en attendant qu’ils soient formés, les municipalités des chefs-lieux des districts feront ladite exploitation. « Lesdits directoires ou municipalités feront pareillement la recette des prix de ferme de ceux des biens en question qui sont affermés; ils en acquitteront les dépenses; le tout par eux-mêmes ou par des préposés qu’ils pourront établir où bon leur semblera. « Seront tenus les bénificiers, corps et communautés français, de faire aux directoires des districts, ou aux municipalités des chefs-lieux de ceux qui ne seront pas formés, la déclaration des biens, dîmes et droits qu’ils possèdent dans l’étranger. « Le roi sera supplié de se concerter avec les puissances étrangères pour l’entière exécution du [Assemblée natioûaIe,l ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 juin 1790.) 397 présent décret, qui sera présenté sans délai à la sanction de Sa Majesté. » (Ces articles sont mis aux voix et adoptés sans discussion.) M. l’ernier, rapporteur du comité des finances, propose un projet de décret concernant l’hôpital de la ville de Bourges , qui est adopté ainsi qu’il suit : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, sur les délibérations prises par les administrateurs du bureau de l’hôpital de Bourges, les 17 décembre 1789 et 1er juin 1790 ; lesdites délibérations confirmées et approuvées par les officiers municipaux de ladite ville, autorise lesdits administrateurs à faire l’emprunt d’une somme de 30,000 livres, qui sera acquittée par les deniers à provenir des 60,000 livres léguées audit hôpital par feu M. Phelippeau, archevêque de Bourges, lequel legs demeurera spécialement affecté et délégué audit remboursement, à charge d’éteindre, par ce nouvel emprunt, ceux de 12,000 livres et 6,000 livres, déjà faits en vertu des délibérations ci-dessus énoncées. Un membre demande et obtient la parole pour rendre compte des troubles près de s’élever entre les habitants de la vallée d’Aran et ceux de Com-minges. M. Roger, député de Comminges. La discorde se répand entre une province de France et une province d’Espagne. La vallée d’Aran menace le Comminges d’une incursion ; ces Espagnols se préparent à venir les armes à la main, pour y chercher des denrées de première nécessité. J’ai déjà exposé quelle était la position géographique de la vallée d’Aran : elle est séparée de l’Espagne par une chaîne de montagnes impraticables ; cette vallée est attachée au Gomminges depuis plusieurs siècles par des sentiments de paix et de fraternité. Depuis lesdécretsquidéfendentl’expor-tation des grains, les habitants du Comminges, fidèles observateurs de vos décrets, ont cessé d’en fournir à la vallée d’Aran. Dans les années les plus fertiles, cette contrée, si elle était abandonnée à elle-même, serait privée de subsistances. Dans ce moment-ci, elle est dans une affreuse misère, et la famine oblige ses habitants à venir enlever des grains sur une terre étrangère. Si vous le voulez, je vais vous faire lecture d’une adresse des membres composant le bureau intermédiaire du pays du Comminges. (Cette lecture est faite.) On demande la lecture du décret. M. Roger le lit : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu la lecture d’une adresse des membres composant le bureau intermédiaire du pays de Comminges, a décrété et décrète que les habitants de la vallée d’Aran continueront de s’approvisionner dans le Comminges de grains et autres denrées nécessaires à leur subsistance, et que l’exportation sera libre de l’une à l’autre des deux provinces. » M. Rewbell. Je demande que l’on mette provisoirement, parce que cette province quine trouve pas actuellement le chemin de l’Espagne, le trouverait bien dans un autre temps. M. Frétean. Je demande qu’il soit ajouté par amendement que l’assemblée administrative sera chargée de surveiller l’exportation de manière que, sous prétexte de l’approvisionnement de la vallée d’Aran , il ne soit point fait d’enlèvement capable de faire manquer les grains nécessaires au Comminges. L’amendement de M. Fréteau et l’article de M. Roger sont successivement décrétés. Le décret est rendu ainsi qu’il suit : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu la lecture d’une adresse des membres composant le bureau intermédiaire du pays de Comminges, a décrété et décrète que les habitants de la vallée d’Aran continueront provisoirement de s’approvisionner, dans le Comminges, de grains et autres denrées nécessaires à leur subsistance, et que l’exportation et l’importation sera libre de l’une à l’autre de ces deux contrées. « Elle charge, en outre, l’assemblée administrative de surveiller ladite exportation, de manière que, sous prétexte de l’approvisionnement de la vallée d’Aran, il ne soit point fait d’enlèvement capable de faire manquer les grains nécessaires au Comminges. » M. Camus présente la rédaction du décret qu’il avait proposé dans la séance de samedi 19 juin pour obtenir de nouveaux états du ministre des finances . Le décret est adopté sans opposition dans les termes ci-dessous : « L’Assemblée nationale a décrété et décrète; « 1° Que le premier ministre des fiuances remettra, le 15 juillet prochain au plus tard, le compte détaillé des recettes et dépenses du Trésor public, depuis le premier mai 1789, jusqu’au premier mai de l’année présente ; « 2° Qu’il sera remis dans la huitaine un état détaillé et précis des dépenses auxquelles sont destinés tant les 30 millions accordés par le décret du 19 de ce mois, que les revenus provenant des autres recettes, et, dans le cours du mois prochain, l’état détaillé de l’emploi desdites sommes. « 3° Qu’il en sera usé de même, de mois en mois, jusqu’à ce que l’Assemblée nationale ait déterminé le nouvel ordre qu’elle se propose d’établir dans la comptabilité du Trésor public et qu’en conséquence, lorsqu’il sera fait une demande de fonds, l’état des dépenses auxquelles ils seront destinés sera joint à la demande; « 4° Qu’il sera remis tous les mois au comité des finances un relevé, article par article, du registre des ordonnances qui sont expédiées chaque semaine, et du registre journal du bureau du grand comptant ; « 5° Que le comité des finances sera tenu de faire imprimer le rapport sommaire des états qui auront été fournis à ses commissaires, et des vérifications qu’ils auront faites, pour être distribués chaque mois aux membres de l’Assemblée. » M. de Sabran, évêque de Laon, député de Ver-mandois, demande un congé de six semaines, pour motif de santé. M. Duhart, député de Soûle, sollicite l’autorisation de s’absenter pouraffaires et pour un temps indéfini. Ces congés sont accordés. L’Assemblée passe à son ordre du jour qui est la suite de la discussion sur les articles concernan t la constitution civile du clergé . M. le Président. Dans la séance du 18 juin, l’Assemblée a rejeté les articles 9 et 10 du titre III du projet de décret; l’article 8 a été rejeté dans la séance du 17 juin; l’article 7 a été ajourné