[A.wmblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 août 1790.] m M. de La Galissonnière. Il y en avait 24 par armée ; et il avait sept armées. M. de Moaflles ( ci-devant le vicomte). Nous ne prétendons pas défendre la proposition du ministre ; nous la soumettons seulement à votre discussion. (On demande quel est l’avis du comité.) M. de îfoailles. J’ai eu l’honneur d’annoncer que le comité s’était borné à examiner si le plan du ministre était contraire aux bases constitutionnelles que vous décrétez. M. de Bonthlllier. J’observerai sur le fait historique que nous avons quatre armées, et qu’en donnant vingt-quatre officiers généraux à chacune, cela ferait le nombre de quatre-vingt-seize. J’ajouterai qu’il y avait alors des brigadiers ; sans doute, le nombre de quatre-vingt-quatorze officiers généraux serait trop considérable si toutes les troupes étaient réunies ; mais il n’en est pas de même quand elles sont répandues sur la surface du royaume. M. Guittard. En temps de guerre, le grand nombre des officiers généraux est très embarrassant ; leurs équipages sont considérables ; on ne sait comment les loger et ils consomment beaucoup de vivres. Prenez-en autant que vous voudrez pendant la paix, ils ne servent à rien; mais du moins ils ne sont pas nuisibles. M. Bonttevllle-Dumetz. Je demande au comité si les officiers généraux sont nécessaires pendant la paix. M. de Wimpfen. Je demande au préopinant ( s’il pense qu’on puisse avoir pendant la guerre de bons officiers généraux, s’ils n’ont servi longtemps pendant la paix ? M. d’Aoust. Combien le roi de Prusse avait-il d’officiers généraux pendant la guerre de sept ans? M. d’Amhly. On faisait marcher les Prussiens avec des coups de plat de sabre; les Français marchent pour l’honneur ; ils ont besoin d’officiers généraux ; sans ces officiers ils' vont avec impétuosité, mais ils reviennent de même ; ce sont les officiers qui ramènent les soldats. M. Guittard. Ce sont les sergents. M. de La Galissonnière. Le roi de Prusse avait depuis 170 jusqu’à 200 officiers généraux. L’article 1er, rédigé par le comité sur le plan du ministre, est adopté ainsi qu’il suit : « Art 1er. L’armée sera composée, à compter du 1er janvier 1791, de 150,848 hommes, tant officiers ue soldats dont 10,137 d’artillerie et du génie. e nombre des officiers généraux employés ne pourra pas excéder 94 ; l’Assemblée nationale se réserve de statuer sur le Dombre des adjudants, sur celui des aides de camp et sur le nombre des commissaires des guerres, qui doivent être en activité pendant l’année 1791. >» M. le Président. J’ai reçu de M. Necker, premier ministre des finances, une lettre et un mémoire contenant des observations sur le décret des pensions. Un de MM. les secrétaires va. vous en donner lecture. « Monsieur le Président, d’après les ordres de Sa Majesté, je vous fais passer un mémoire relatif au décret surles pensions qaeSaMajestéa sanctionné. Gomme elle a cru devoir y faire plusieurs observations qui y sont consignées, je vous prie de la faire lire dans la séance de ce matin. « Je suis, etc. « Signé : NECKER. » MÉMOIRE ADRESSÉ A L’ASSEMBLÉE NATIONALE le 17 août 1790, par le premier ministre des finances (1). Messieurs, le roi est informé qu’une infinité de particuliers vivent dans une cruelle incertitude, en attendant la détermination qui sera prise à l’égard des grâces dont ils jouissent sur le Trésor de l’Etat, et Sa Majesté ne voulant pas prolonger cette situation pénible, en introduisant de nouvelles discussions, s’est déterminée à sanctionner Je décret général que vous lui avez présenté, relatif aux pensions. Elle croit cependant que plusieurs dispositions de cette loi exigeraient une modification de votre part; et conformément aux intentions de Sa Majesté, je vais vous donner connaissance des réflexions qui ont fixé son attention. Sa Majesté est sensiblement affectée des privations auxquelles un grand nombre de citoyens vont être soumis par l’ëffet de vos règlements; mais Elle voit tout ce qu’exigent les circonstances, et pleine de confiance dans vos motifs, Elle a jugé convenable de s’en remettre à votre sagesse. Cependant Elle vous engage à considérer que la règle de vingt-cinq à trente ans de service, pour avoir droit à une pension, devient sévère quand elle est rétroactive. Les mêmes dispositions ne paraissent pas applicables au passé et à l’avenir ; on se prépare à son sort quand on le connaît à l’avance, et quand on est encore le maître de choisir sa route; mais lorsque la vie est avancée, lorsque la stabilité d’une récompense modique aété la condition d’un établissement, d’un mariage, du genre d’éducation de ses enfants, la destruc-truction totale de cette récompense en raison d’une loi nouvelle, cette destruction qui vous fait déchoir d’un état paisible pour tomber avec ce qu’on aime le plus, dans une grande détresse, devient un genre de malheur digne de toute l’attention de ceux qui sont les représentants des intérêts et des sentiments de la communauté nationale. Vous avez été occupés, Messieurs, de ces considérations lorsque vous avez décrété une distribution de deux millions de pensions, divisées en petites parties depuis cent cinquante livres jusqu’à mille francs; mais Sa Majesté a remarqué que vous n’aviez soumis cette distribution à aucune règle; et quoique le comité des pensions ait adopté des mesures sages pour la division de son travail, il ne résultera pas moins de l’immensité des demandes, qu’un très petit nombre de personnes deviendront le centre de toutes les sollicitations et les dispensateurs véritables du plus grand nombre des grâces. Sa Majesté vous donne à réfléchir si cet ascendant, si ce pouvoir remis à quelques députés de l’A-semblée nationale, n’est pas contraire aux principes généraux et constitutionnels que vous avez adoptés. Indépendamment des fonds dont l’emploi doit être fait en pensions, vous réservez annuellement (1) Le Moniteur ne donne qu’un extrait de ce mémoire. 121 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 août 1790.} une somme de deux millions pour être réparties en gratifications extraordinaires. Cette somme, vous la destinez, et aux récompenses des services rendus, et aux indemnités des dommages soufferts, et au soulagement des personnes qui peuvent être dans le besoin; mais on ne voit pas comment une limite fixe et positive peut être appliquée également et aux actes de justice et aux dispositions de bienfaisance. Vous voulez, de plus, qu’aucune partie des gratifications ne puisse être accordée sans le consentement des législatures; mais une telle condition, établie et maintenue dans toute l’étendue de sa restriction, achèverait d’affaiblir le gouvernement, puisqu’on le verrait dans l’impuissanced’ac-corder de son chef le plus petit encouragement aux agents de tout genre qu’il est obligé d’employer pour le service public. Un article du décret autorise, à la vérité, le pouvoir exécutif à donner provisoirement quelques gratifications dans les cas urgents; mais un encouragement utile et même nécessaire ne peut pas toujours être compris visiblement dans les cas urgents , et ce serait au moins un sujet continuel de doute et de controverse . D’ailleurs, vous ajoutez pour condition, que si les motifs d’une gratification accordée ne sont pas approuvés par la législature, le ministre qui aura contresigné la décision sera tenu d'en verser le môjitant au Trésor public. Une telle condition, qui faitllépendre le bien de l’Etat de la disposition d’un ministre à compromettre sa fortune, présente sûrement des inconvénients; je ne sais même quel homme délicat voudrait accepter une récompense. Il est des biens utiles et raisonnables, il en est d’autres qui arrêtent toute espèce d action, et c’est d’uné juste mesure que dépend le mouvement régulier de l’administration publique. Je croirais donc que sans déroger ni à la loi générale de responsabilité des ministres, ni à la disposition qui oblige de rendre compte de toutes les dépenses sans distinction, une distribution annuelle en gratifications d’une somme précise divisée entre les divers départements, devrait être remise à la sagesse du roi. Toutes les précautions que peut inspirer à l’Assemblée nationale un esprit de prudence, paraîtraient de cette manière exactement remplies, en même temps que la dignité d’une loi nationale serait parfaitement conservée. En général, Messieurs, oserais-je le dire? vous laissez le roi trop à l’écart dans la distribution des récompenses. Sans doute, celles décernées à Marlborough et à Ghatham par les représentants du peuple anglais, reçurent de ce vœu national un plus grand éclat; car une munificence rare et splendide, dont chaque siècle donne à peine un ou deux exemples, est une pompe de plus ajoutée aux grandes actions; mais de modiques gratifications accordées le plus souvent à des travaux obscurs, et néanmoins utiles, ne doivent pas être dispensées par une assemblée nombreuse ; car les récompenses attribuées à de pareils services, ne peuvent jamais être déterminées par un mouvement général, et dès que leur distribution devrait être constamment précédée d’une discussion publique, d’une discussion qui, dans son libre cours, atteint également et les actions et les personnes, ceux qui auraient droit à ces récompenses hésiteraient peut-être à les rechercher; cependant, il faut qu’il existe des encouragements, il faut qu'on la désire, et il importe à l’Etat que leur concession soit réglée de la manière la plus propre à en maintenir la valeur ; et peut-être que, par ce motif, il est des grâces dont la nation doit confier la distribution à son représentant héréditaire, à celui qui par sa haute dignité, son rang unique et son élévation suprême, ajoute un prix d’opinion aux moindres dons pécuniaires, quand il en est le dispensateur. Cette dernière idée que je viens de tracer, ce n’est point au nom du roi que je la présente; mais Sa Majesté m’a ordonné expressément de vous faire connaître qu’elle a éprouvé un moment de peine, en voyant réunie, dans un même article de votre décret, l’interdiction aux pensionnaires de l’Etat de recevoir une pension des puissances étrangères et la défense d’en recevoir aucune sur la liste civile (1). Ce rapprochement aura sûrement échappé à votre attention, car votre sentiment vous dira toujours que c’est avec les bienfaits de la patrie que ceux du roi doivent être confondus. Enfin, Messieurs, le roi n’a pas vu avec indifférence, qu’après l’avoir engagé à fixer lui-même les fonds nécessaires à la dépense de sa maison, après avoir donné à sa proposition un acquiescement de tout ce qui pouvait le rendre affectueux et touchant, vous mettiez cependant à la charge de la liste civile une somme considérable d’anciennes pensions. Le roi se bornera toujours dans tout ce qui lui est personnel à l’expression d’un simple sentiment : ainsi j’obéis aux ordres de Sa Majesté, en n’insistant pas sur l’observation que je viens de faire; mais elle m’a autorisé à vous informer ou à vous rappeler qu’une grande partie des pensions dont jouissent les personnes qui ont rempli des places dans sa maison, ou dans celle de son aïeul, ont été accordées pour des services politiques ou militaires, et pour d’autres encore rendus en qualité de commandants des provinces, ou de commissaires aux assemblées des pays d’Etats; ainsi même dans la rigueur du principe" établi par votre décret, et en rejetant sur la liste civile toutes les pensions inscrites sous le titre de Maison du roi , il y aurait encore un examen à faire et de justes distinctions à déterminer. Le roi, Messieurs, vous invite à prendre en considération les diverses réflexions contenues dans ce mémoire. Divers membres demandent à passer à l’ordre du jour. M. l�e Déist de Botidoux. Rien n’oblige à entendre ces insolences ministérielles. M. le Président. L’Assemblée doit toujours entendre les mémoires des ministres du roi. M. Gaultier de Biauzat. Ce mémoire n’est pas signé, il doit être renvoyé à celui qui l’a adressé à l’Assemblée. M. le Président. La lettre d’envoi et le mémoire lui -môme portent la signature du premier ministre des finances. M. lie Déist de Botidoux. 11 faut le renvoyer au ministre, pour qu’il sépare ses observations particulières de celles qu’il présente au nom du roi. (1) Article 12. Un pensionnaire de l’Etat ne pourra recevoir de pension, ni sur la liste civile, ni d’aucune puissance étrangère.