[Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 juin 1790.) 393 reau des secrétaires, ni dans le milieu de la salle; et les places des trésoriers ne seront jamais remplies que par eux. La barre ne sera occupée que par les personnes auxquelles l’Assemblée aura permis de s’y placer. « Art. 3. La tribune ne sera occupée que par l’opinant; aucun des membres placés sur les bancs voisins ne pourra lui adresser la parole. Les membres de l’Assemblée pourront proposer de simples observations de leurs places, mais ils passeront à la tribune lorsque le président les y invitera. «> Art. 4. Le présidentestexpressémentchargéde veiller à ce que personne ne parle sans avoir obtenu de lui la parole, et à ce que jamais plusieurs membres ne la prennent à la fois. « Art. 5. Lorsque plusieurs membres demanderont la parole, le président l’accordera à celui qui la lui aura demandée le premier. Il fera faire une liste des autres par un secrétaire qui les appellera ensuite suivant l’ordre de leur inscription ; la liste sera double ; elle n’aura d’effet que pour une seule séance, et les opinants parleront alternativement pour et contre. « Art. 6. Si une réclamation s’élevait sur la décision du président concernant l’ordre de la parole, ou sur la liste, l’Assemblée prononcera. » La suite de la discussion est renvoyée à une séance ultérieure. M. Antoine de MVailly de Château-Renaud , suppléant deM. Lezay-Marnésia, démissionnaire, dont les pouvoirs ont été vérifiés et trouvés en règle, est admis comme député d’Aval. M. Martineau propose d’excepter les ambassadeurs et les étrangers de la disposition qui prohibe l’usage des livrées et des armoiries. M. de Hoailles, député deNemours. Jepriel’As-semblée d’observer que le décret rendu hier ne peut concerner les ambassadeurs et le s étrangers. Si cette disposition les renfermait, elle entraînerait beaucoup d’inconvénients qui frappent sans doute tous les esprits, et que je crois inutile de développer. La proposition de M. Martineau est adoptée en ces termes : <« Ne sont compris dans la disposition du présent décret tous les étrangers, lesquels pourront conserver en France leurs livrées et leurs armoiries. » M. Bouche. Je demande que ceux qui portent un nom en vertu d’un acte, don, cession ou autre contrat, soient obligés de le quitter pour prendre celui qu’ils portaient anciennement. M. d’Ambly. Le décret est porté, il faut l’exécuter. Rien n’est plus naturel que de s’appeler Jacques, François ou Paul. Qui est-ce qui perdra à cela? Personne, si ce n’est les usurpateurs de noms. On demande la question préalable sur la motion de M. Bouche. L’Assemblée décide qu’il n’v a pas lieu à délibérer. M. Dumouchel, secrétaire. Dans la séance d’hier soir, vous avez adopté, sauf rédaction, sur la proposition de M. Alexandre de Lameth, un décret concernant les quatre ligures enchaînées qui se trouvent au pied delastatuede LouisXIV. Ce décret a besoin de la sanction définitive dé l’Assemblée. L’auteur de la motion propose une rédaction ainsi conçue : « L’Assemblée nationale considérant qu’à l’approche du grand jour qui va réunir les citoyens de toutes les parties de la France pour la fédération générale, il importe à la gloire de la nation de ne laisser subsister aucun monument qui rappelle des idées d’esclavage, offensantes pour les provinces réunies au royaume ; qu’il est de la dignité d’un peuple libre de ne consacrer que des actions qu’il ait lui-même jugées et reconnues grandes et utiles, « A décrété et décrète que les quatre figures enchaînées au pied de la statue de Louis XIV, à la place des Victoires, seront enlevées avant le 14 juillet prochain, et que le présent décret, après avoir reçu la sanction du roi, sera envoyé à la municipalité de Paris, pour en suivre Fexécu-tion. » (Ce décret est adopté.) M. le Président donne lecture d’une note de M. le garde des sceaux, qui annonce que le roi a donné sa sanction ou acceptation aux décrets suivants : « Le roi a donné sa sanction ou son acceptation : « 1° Au décret de l’Assemblée nationale du 8 de ce mois, qui commet, provisoirement la municipalité de Paris à l’exercice de toutes les fonctions attribuées par le décret du 14 avril, que le roi a sanctionné, aux administrations de département et de district, ou à leur directoire ; « 2° Au décret du 9, relatif aux citadelles, forts, châteaux et autres fortifications qui existent actuellement dans le royaume, et singulièrement à la citadelle de Montpellier; « 3° Au décret du 10, qui autorise la municipalité de Paris à faire évacuer le couvent des récollets du faubourg Saint-Laurent, et celui des dominicains de la rue Saint-Jacques, pour être provisoirement employés à servir, soit de dépôt aux mendiants infirmes, soit d’atelier de travail pour les mendiants valides ; « 4° Au décret du 11, pour la suite et l’accélération des opérations des commissaires du roi chargés de l’établissement des assemblées administratives des départements, et notamment du département de la Corrèze; « 5° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Montrond à imposer dans leurs rôles la somme de 2,400 livres, en prenant pour base de cette imposition le taux des vingtièmes ; « 6° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Salins à imposer la somme de 4,000 livres, en deux ans, sur tous les habitants qui payent 4 livres et au-dessus d’impositions directes; « 7® Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Chevreuse à imposer la somme de 4,000 livres, et par quart, dans le cours de 4 années prochaines, sur tous les contribuables qui payent au-dessus de 5 livres de toute espèce d’impositions ; « 8° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Saint-Yrieux à imposer la somme de 3,000 livres sur tous leurs contribuables ; « 9° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Moissac à imposer la somme de 3,000 livres, au marc la 394 [Assemblée nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 juin 1790] livre de la capitation, sur tous ceux qui étaient imposés pour cet objet à 6 livres et au-dessus ; « 10° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Fontenay-sous-Mailly-le-Château à faire un emprunt de 800 livres ; « 11° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Mur-de-Barrès à toucher entre les mains du correspondant de l’administration provinciale de haute-GuienDe, la somme de 2,000 livres pour la construction d’une fontaine ; « 12° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de la ville de Montpellier à remplacer les droits perçus sur les boucheries, pour une année seulement, par une taxe personnelle en sus du rôle de la capitation ; « 13° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Chalvraines à faire un emprunt de 6,000 livres ; « 14° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Ghapet, district de Saint-Germain-en-Laye, à faire un emprunt de 300 livres ; « 15° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Négrépelisse à faire un emprunt de 2,000 livres -, « 16° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de d'Éscatalens, district de Castel-Sarrasin en Languedoc, à faire un emprunt de 500 livres ; « 17° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Mirepoix à imposer la somme de 2,000 livres sur la capitation ; « 18° Au décret du même jour qui autorise les officiers municipaux de Troux près Chevreuse, à imposer la somme de 500 livres sur tous ceux qui, dans leurs rôles, payent au-dessus de 10 liv. de toutes tailles ; « 19° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux de Valentine, diocèse de Gomminges, à imposer la somme de 500 liv., et à retirer des mains du receveur de la province la somme de 3,383 liv. 4 sols, déposée en vertu d’arrêts du conseil ; « 20° Au décret du 12, qui autorise le sieur Guyard, présenté par le sieur Beaugeard fils et le sieur Douarain, à remplir, sous leur cautionnement et surveillance, les fonctions de trésorier de la province de Bretagne ; « 21° Au décret du même jour, portant qu’une ordonnance du conseil général de la commune de Caen, et un règlement proposé par ce conseil général et par l’état-major de la garde nationale de la même ville, seront provisoirement exécutés jusqu’à l’organisation définitive des gardes nationales, aux conditions énoncées dans ledit décret ; « 22° Au décret du même jour, portant que tous les citoyens actifs qui voudront conserver l’exercice des droits attachés à cette qualité seront tenus d’inscrire leurs noms sur un registre qui sera ouvert à cet effet pour le service des gardes nationales ; « 23° Au décret du même jour, qui autorise la ville de Yezelay à employer en atelier de charité la somme de 2,000 livres, qui a été perçue sur les habitants de cette ville pour la construction d’une route ; « 24 Au décret du même jour, qui autorise la municipalité de la commune de Valay, département de la Haute-Saône, à employer en achats de grains la somme de 2,000 livres ; « 25° Au décret du même jour, portant que, dans l’île de Corse, les impôts continueront d’être perçus en nature comme par le passé, jusqu’à ce qu’il ait été prononcé sur le mode de perception dans ce département ; « 26° Au décret du 13, portant que les deniers des dons patriotiques continueront à être versés aux payeurs des rentes de l’Hôtel-de-Yille de Paris, et détermine les payements auxquels ils pourront être employés ; « 27° Au décret du même jour, qui autorise les officiers municipaux du Bourg-de-Mouton, en Auvergne, à faire un emprunt de 6,000 livres ; « 28° Au décret du même jour, qui abolit les retraits de bourgeoisie, d’habitation ou local, d'éclesche, de société, frareuseté, convenance ou bienséance, et porte que les procès non jugés concernant ces retraits demeureront comme non-avenus ; « 29° Au décret du 14, pour la suspension des procédures relatives aux dédommagements dus à raison des dégâts sur les terrains afféagés et marais desséchés, et commettre les directoires de district pour régler ces dédommagements ; « 30° Au décret du même jour, qui autorise les électeurs du département du Haut-Rhin à continuer leurs opérations, nonobstant le décret du premier de ce mois, relatif aux assemblées primaires de Colmar ; « 31° Au décret du 15, portant que le siège de l’administration du septième district du département de Saône-et-Loire, demeure fixé en la ville de Marcigny ; » 32° Au décret du même jour, portant que le droit du demi-doublement du pied fourchu, établi en faveur de l’hôpital général de Rouen, ainsi que tous autres droits d’octroi, appartenant à cet hôpital, continueront à être perçus provisoirement ; » 33° Au décret du même jour, qui déclare que le décret du 28 janvier dernier, sanctionné par le roi, doit être exécuté selon sa forme et teneur ; qu'il n’y a été nullement dérogé par l’article 12 du titre II de celui du 15 mars, et porte que la ci-devant province du Hainaut demeurera assujettie aux droits qui s’y perçoivent au profit du Trésor public ; « 34° Au décret du 17, concernant le maire de la ville de Perpignan ; « 35° Au décret du même jour, pour la députation à la fédération générale des gardes nationales et des troupes du royaume de quelques corps qui n’ont pas été compris dans le décret des 8 et 9; « 36° Au décret du 18, concernant M. de Mirabeau le jeune ; « 37° Enfin, Sa Majesté a donné des ordres pour l’exécution de deux autres décrets des 12 et 13 de ce mois : « L’un autorise le ministre de la guerre à payer aux commissaires des guerres, prévôts aumôniers, secrétaires et autres personnes attachées à l’ancien régiment des' gardes françaises, les quatre derniers mois et leurs appointements de 1789; Et l’autre, porte qu’il sera délivré au ministre de la marine la somme de 3 millions, acompte sur les dépenses destinées au service de la ma- [Assemblée nationale.] rine, pour être employée aux dépenses qu’exige l’armement extraordinaire ordonné par le roi. » Signé : CHAMPION BE ClCÉ, ARCHEVÊQUE DE BORDEAUX. Paris, le 20 juin 1790. M. le Président. L’Assemblée va se retirer dans ses bureaux pour procéder à la nomina tion de son président. La séance est levée à trois heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. LE PÈLLETIER. Séance du lundi 21 juin 1790 (1). La séance est ouverte à 9 heures du matin. M. de Mailly de Château-Renaud, admis dans la séance en remplacement d’hier de M. Lezay-Marnésia, démissionnaire, prête son serment civique. M. de Pardieu, secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier qui est adopté. M. de Jessé, secrétaire, lit le procès-verbal-de la séance du 18 juin au matin. Après quelques observations faites sur la rédaction du refus de M. l’abbé Maury de déposer sur le bureau le discours prononcé par lui, ce procès-verbal est également adopté sans changement. M-Lebrun, rapporteur du comité des finances, propose une addition aux quatre articles, adoptés dans la séance du 19, concernant la régie des postes. Cette addition est décrétée ainsi qu’il suit : « Il sera statué sur le traitement de l’intendant des postes, et sur le conseil des postes, après le rapport qui sera fait samedi prochain sur le régime de cette partie; et cependant l’intendant des postes et le conseil des postes continueront leurs fonctions comme par le passé. » M. le Président Sieyès annonce que M. Le Pelletier de Saint-Fargeau a obtenu la majorité requise pour être président, et il l’invite à occuper immédiatement le fauteuil. M. Le Pelletier en remplaçant M. l’abbé Sieyès au fauteuil, dit : «‘Messieurs, j’ai fait à peine quelques pas dans ma carrière, et déjà vous avez daigné m’accorder la plus belle récompense de toute la vie d’un bon citoyen. « Présider l’Assemblée nationale, succéder à M. l’abbé Sieyès, c’est un double honneur fort au-dessus de mon âge, de mon talent et de mes espérances. « Vos bontés, en m’y appelant, m’imposent de grands devoirs; et, si j’ose le dire, il me semble (I)Cette séance est incomplète au Moniteur. 395 qu’en ce moment vous me dévouez tout entier à la cause de la patrie et de la liberté... Souffrez, Messieurs, que ma bouche et mon cœur ratifient cette honorable consécration. » (L’Assemblée vote ensuite des remerciements à M. l’abbé Sieyès.) M. Arnoult, député de Dijon. Les citoyens actifs de Dijon, ensuite l’administration du‘ département, vous ont présenté une pétition pour demander qu’il fût apporté remède au défaut d’administration de la justice dans le département de la Côte-d’Or. Ce n’est pas mauvaise volonté de la part des magistrats, c’est une impossibilité physique. La Chambre des vacations est composée d’un président, dont le père, octogénaire, est depuis trois mois à la dernières extrémité. Ce magistrat donne tous ses soins et tous son temps à son père, et l’on ne peut lui en faire un crime. Trois autres sont passés dans l’étranger ; à cela il n’y a pas encore de remède ; l’on ne guérit pas de la peur. Deux conseillers-clercs ne peuvent pas être juges en matière criminelle. Ainsi il reste sept juges, dont le plus ancien n’a pas vingt-sept ans. Depuis le Ier mars, ce tribunal est sans activité; les prisons regorgent d’accusés. Les députés du ressort du parlement de Dijon se sont assemblés pour aviser au moyen d’établir un autre tribunal à l’instar de celui de Rennes. Ils ont vu M. le garde des sceaux, qui approuve ces dispositions, et qui en rendra compte au roi : ce tribunal sera composé , ainsi que celui de Rennes, de juges et jurisconsultes pris dans chacun des présidiaux du ressort; le plus anciennement admis au serment d’avocat présidera. La cour supérieure provisoire tiendra ses séances tous les jours, même pendant les fêtes de palais qui ne sont pas gardées par l’Eglise : les gens du roi continueront à faire les fonctions du ministère public, etc., etc. (Suivent d’autres dispositions absolument calquées sur celles du décret relatif au parlement de Rennes.) M. Rrillat-Savarin. Je demande qu’on ajoute à la disposition qui règle la compétence de ce tribunal, qu’il sera autorisé à admettre les gradués au serment d’avocat. M. d’André. Il y a dans ce tribunal quelques membres qui n’ont pas refusé de continuer leur service; il y aurait de l’injustice à les traiter comme ceux du parlement de Rennes, qui avaient désobéi aux décrets. Je demandé qu’il soit fait une exception pour les membres qui sont restés à Dijon. M. Mougins de Roquefort. Tous les tribunaux sont dans une espèce d’agonie, et on ne doit pas attendre beaucoup d’un agonisant. Dans ma province, il y a aussi des tribunaux qui refusent de rendre la justice. Je demande qu’il soit décrété qu’on s’occupera incessamment de l’organisation de la justice. M. Arnoult. Une faut pas nous flatter que les nouveaux tribunaux soient en exercice avant deux ou trois mois; puisqu’il faut le dire, ce n’est pas que les magistrats de Dijon ne puissent pas rendre la justice, c’est qu’ils ne veulent pas. M. le garde des sceaux leur a écrit dix lettres pour les engager à reprendre leurs fonctions, et ils n’en ont rien fait.M. d’André, dont la perspicacité est connue, aurait dû rendre plus de justice à mon honnêteté. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 juin 1790.]