314 (Convention nationale.] ARCHEES PARLEMENTAIRES, j S6: brumaire an II Le citoyen Cauchin-Latour, ancien employé à la recette générale des finances, fait don à la patrie d’une pension de 1,500 livres, obtenue comme retraite après quarante ans de service, et en Temet le brevet sur le bureau. La Convention nationale ordonne la mention honorable et l’insertion au « Bulletin » de ce don patriotique (1). » Suit la lettre du citoyen Cauchin-Latour (2). Citoyen Président, « Après 40 ans d’emplois, tant à la recette générale des finances qu’à la caisse des arrérages et des amortissements, dont j’ai été commis aux exercices, j’avais, comme premier commis, obtenu un brevet de 1,500 livres de pension sans retenue, dont les intérêts courent du 21 août 1793, jour auquel j’ai présenté le dernier des comptes dont j’étais chargé, depuis et compris l’exercice 1770, jusques et compris l’exercice 1787, opéra¬ tion que j’ai successivement terminée en quatre années, comptes composés de plus de trois millions 600 mille pièces de formalités et de plus de 700 millions de recettes et autant de dépenses dont le résultat rend la succession de Darras, dernier trésorier, créancière de la Répu-blique de 75,470 liv. 16 s. 10 d. » J’avais d’abord été flatté d’obtenir une retraite parce que j’étais peu fortuné et chef d’une famille indigente ; mais le dernier trésorier de la caisse d’amortissement m’a mis au-dessus du besoin, et à portée d’offrir à ma patrie cette pension, ainsi que ce qui en est échu. Elle sera mieux employée à récompenser nos infortunés frères d’armes mutilés par la rage des despotes qui nous combattent sans espoir de jamais vain¬ cre un peuple libre, surtout si la Montagne ne nous abandonne pas. « J’attends à la barre avec respect, citoyen Président, le moment heureux où mon offrande sera accueillie par la Convention nationale. « Cauchin-Latour. » Guillaume-Joseph Yvart, citoyen de la com¬ mune d’Aumale, district de Neuîchâtel, départe¬ ment de la Seine-Inférieure, dépose sur l’autel de la patrie 273 liv. 15 s., pour remplir l’engage¬ ment qu’il a contracté de solder un volontaire qu’il a fourni à ce département. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (3). La commune de Torigny (Thorigny), district de Meaux, en applaudissant aux travaux de la Convention nationale, l’invite à rester à son poste, et dépose une décoration militaire. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (4). Suit V adresse de la commune de Thorigny (5). « Législateurs, « Je viens, au nom du conseil général de la commune de Thorigny, district de Meaux, (1) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 25, p. 253. (2) Archives nationales, carton C 278, dossier 754. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, y*. 253. (4) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 25, p. 253. (5) Archives nationales, carton C 278, dossier 742. applaudir à vos heureux travaux. Fidèles à vos principes, fidèles à vos serments, restez cons¬ tamment au poste où vous appelle la confiance du peuple français; conservez le dépôt de la constitution républicaine que vous nous avez donnée; ce n’est pas au moment de la tempête que le pilote expérimenté peut abandonner le gouvernail ; décrétez que vous ne vous séparerez pas que tous les tyrans n’aient mis bas les armes et reconnu la République; que l’aristo¬ cratie l’apprenne, qu’elle en frémisse et qu’elle expire dans les convulsions du désespoir. « Vous avez dit : « Que tous les signes du des¬ potisme et de la féodalité disparaissent » et déjà ils ne sont plus. Je vous remets une croix qui a été déposée à la municipalité par le citoyen Louis-François-Ignace de Billaud. « Voilà, nous a dit ce vieux militaire, blanchi dans la carrière des armes et recommandable par ses vertus civiques, voilàla récompense que m’avait accordée l’ancien gouvernement pour trente-cinq années de ser¬ vices; plût au ciel qu’il m’eût été donné de verser pour l’affermissement de la souveraineté du peuple tout le sang que j’ai répandu pour soutenir l’autorité des rois. » « Fait et arrêté par nous, officiers municipaux et le conseil général de la commune de Thorigny, canton de Lagny, district de Meaux, département de Seine-et -�Marne, séance permanente, le cin¬ quième jour de la troisième décade de brumaire de l’an second de la République française, une et indivisible, et avons signé avec notre secré¬ taire greffier. (Suivent 12 signatures.) Un anonyme envoie 10 pièces d’or, 2 couverts d’argent, des épaulettes, galon et frange de housse. Insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre de cet anonyme (2). Au Président de la Convention nationale. « Ges dix pièces d’or ont échappé aux Autri¬ chiens qui m’ont pris jusqu’aux lettres de mes amis, parce qu’elles respiraient l’amour de la liberté et de la République. Je dépose cet or sur l’autel de la patrie. J’y joins deux couverts d’argent, des épaulettes, galons et franges de housse. « Donnons à la patrie tout ce que nous pou¬ vons, nos bras, nos moyens, nos efforts, nos volontés. Plus d’intérêts privés, isolés comme sous le despotisme; que tout se rallie, se con¬ fonde dans l’intérêt de la grande famille. Soyons de vrais républicains. « Vive la République, impérissable puisqu’elle est défanatisée ! » La Société républicaine de Franciade rappelle à la Convention qu’elle lui a présenté le duodi 22 brumaire les deux cavaliers jacobins qu’elle a montés, armés et équipés à ses frais; elle annonce que cet exemple est suivi par un grand nombre de Sociétés populaires, et prie la Con-(1) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 25, p. 253. (2) Archives nationales, carton C 278, dossier 742; Supplément au Bulletin de la Convention du 26 bru¬ maire an II (samedi 16 novembre 1793). [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, I 26 brumaire. .an; II 315 } IG novembre 1793 vention de fixer un point de réunion pour la cava¬ lerie jacobine, et de régler son uniforme : elle propose d’inscrire sur le bouton Cavalerie Jaco¬ bine, et sur la plaque du casque, Mort aux des¬ potes. Renvoyé au comité de la guerre (1). Guillemardet, représentant du peuple, commis¬ saire pour la levée des chevaux, annonce que, dans la 18e division dont il est chargé, la levée de chevaux s’exécute avec le plus grand succès; qu’avant quinze jours il aura de quoi monter 15 escadrons, outre 600 chevaux de charrois; que les équipages arrivent aussi, grâce au zèle des sans-culottes qu’il en a chargés, et que si ses 19 collègues obtiennent le même succès, la cavalerie de la République sera augmentée sous peu de 300 escadrons. « La Convention nationale, ajoute Guillemardet, peut compter que ça ira et au grand galop. » Insertion au « Bulletin » (2). Suit la lettre du représentant Guillemardet (3). Guillemardet, représentant du peuple, commissaire pour la levée extraordinaire des chevaux dans la 18e division, au Président de la Convention nationale. « Versailles, 25 brumaire l’an II. « Pour assurer le triomphe de la liberté, la Convention a requis la jeunesse française de marcher à l’ennemi, et plus de neuf cent mille hommes vont dépasser nos frontières. Chaque jour, la raison remporte des victoires sur le fanatisme et les préjugés. L’aristocratie terras¬ sée est enchaînée par le génie révolutionnaire. Le luxe des riches et la pompe sacerdotale vien¬ nent se purifier dans le creuset national et se convertir en millions de numéraire. Il ne man¬ quait plus au succès des armes de la République qu’une cavalerie formidable. La Convention vient d’y pourvoir par son décret du 17 du mois dernier, qui ordonne une levée extraor¬ dinaire de chevaux. « Ce décret s’exécute avec la plus grande rapi¬ dité dans la dix-huitième division confiée à mes soins. J’aurai, avant quinze jours, de quoi mon¬ ter au moins quinze escadrons au grand complet, sans compter environ six cents chevaux propres aux charrois ou à l’artillerie. « Les équipages des chevaux, les bottes et les armes des cavaliers arrivent aussi, grâce au zèle des sans-culottes que j’ai engagés partout à la plus exacte surveillance. « Tous les agents qui composent l’administra¬ tion du dépôt que j’ai formé ont été choisis par le département révolutionnaire, sur une liste de candidats présentés par les Sociétés populaires. Aussi voit -on partout zèle, activité et probité dans les opérations qui leur sont confiées. « Si mes dix-neuf collègues obtiennent le même succès dans leurs divisions, notre cava¬ lerie sera augmentée sous peu de trois cents escadrons, qui contribueront efficacement à arrêter les brigandages des cruels esclaves des tyrans, et à rompre le cours des succès éphémè-(1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 254. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 254. (3) Archives nationales, carton C 278, dossier 737. res qu’ils n’ont dû, jusqu’ici, qu’à leur cavalerie nombreuse et à la trahison de nos généraux. « Presque tous les chevaux que je reçois au dépôt seront vigoureux, accoutumés à la fatigue et en état de servir sur-le-champ. Lors¬ qu’ils seront montés par des hommes libres, la Convention nationale peut compter que ça ira, et au grand galop (1). « Guillemardet, représentant du peuple. » La citoyenne Huguin, ci-devant religieuse à Soissons et maintenant épouse du républicain Plocq, greffier du tribunal de Soissons, annonce qu’elle est mère, qu’elle est heureuse, et fait pas¬ ser le. contrat odieux de sa renonciation à elle-même. Insertion au « Bulletin » (2). Suit la lettre de la citoyenne Huguin (3). « Soissons, 25 brumaire, l’an II. « Citoyens représentants, « Jeune et sans expérience, je cherchais le bonheur. Des fanatiques me trompèrent et j’épousai Jésus-Christ. J’ai bientôt reconnu mon erreur, j’ai divorcé pour passer dans les bras d’un républicain. Je suis mère, je suis heureuse, il ne me reste de mon premier état que le contrat odieux de ma renonciation à moi-même, titre encore si terrible que peu de reli¬ gieuses ont osé imiter l’exemple que j’ai été une des premières à leur donner. « Je vous adresse ce titre, citoyens représen¬ tants, je le traduis au tribunal de la raison, et j’en demande une justice éclatante; je demande que vous vous fassiez remettre tous ces monu¬ ments d’esclavage, tous les registres de vêture, ils ne doivent point souiller davantage le sol de la liberté; je demande que vous obligiez ceux qui sont restés dans le célibat, à une abju¬ ration solennelle de leurs vœux, le jour de la fête de la raison, c’est le seul moyen de tirer de la voie du mensonge et de l’égarement., des hommes et surtout des femmes qui doivent des citoyens à la patrie, et qui se doivent eux-mêmes à la liberté. Alors, plus d’espoir, plus de désir de voir renaître l’ancien régime; intéressés comme moi à la stabilité de la République, ils feront comme moi retentir l’air des cris de Vive la liberté! Vive la Montagne (4) ! « La républicaine Huguin, femme du sans-culotte Plocq, greffier du tribunal de Soissons. » A cte de renonciation ( 5 ) . « Au nom de N otre-Seigneur Jésus-Christ, amen. « Ce jour d’hui, deux septembre mil sept cent quatre-vingt-huit, je, sœur Marie-Françoise (1) Applaudissements, d’après le Mercure univer¬ sel [27 brumaire an II (dimanche 17 novembre 1793), p. 270, col. 2]. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 254. (3) Archives nationales, carton G 281, dossier 772. (4) Applaudissements, d’après le Moniteur uni¬ versel [n° 58 du 28 brumaire an II (lundi 18 no vembre 1793), ;p. 235, col. 1]. (5) Archives nationales, carton G 281,. dossier 772.