23/ [États gén. i739. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Douai.] CAHIER Des plaintes , doléances et remontrances pour les habitants de la communauté de Vred, province de Flandre. Pour obcir aux ordres et aux vues bienfaisantes du souverain, les habitants de la communauté de Vred observent, pour l’intérêt et le bien général : 1° Que les impôts forment une surcharge onéreuse aux sujets du Roi, principalement aux membres du tiers-état, seul cotisé ; que le vrai moyen d’alléger cette charge est de répartir les impositions générales sur les trois ordres, par égalité, le clergé et la noblesse eu égard aux biens et à leur valeur sans distinction. 2° Que, pour remédier aux abus causés par la multiplicité des formes et des préposés aux différentes récoltes et administrations, une régie plus simple serait moins onéreuse. On pourrait donc réduire à une somme fixe l’imposition totale de chaque province, en y comprenant tous les droits sans exception, de sorte que ladite province serait abonnée en proportion et chaque paroisse cotisée séparément en raison de ses biens, en mettant toutes les recettes particulières au rabais, lesquelles seraient réversibles dans une caisse provinciale, et-celle-ci au trésor royal directement. 3° Que, pour les biens comme pour les droits de consommation, il n’y ait plus de privilèges, ni d’exemptions, ni de prérogatives dans aucun ordre, en réglant d’ailleurs la capitation selon les facultés et l’industrie de chaque individu. 4° Qu’il soit procédé en conséquence à la rénovation d’un nouveau cadastre ou cahier de tous les biens, afin de procurer une juste égalité nécessaire dans les impositions réelles. 5° Que les droits de consommation soient perçus au lieu de la fabrique, avec une entière liberté pour la vente et le transport dans tout le royaume. 6° Qu’il y ait aussi pleine liberté pour faciliter le commerce et la circulation des denrées, en supprimant tous les droits d’entrée et de sortie à chaque ville et province, en fixant aux frontières les bureaux des douanes. 7° Qu’on supprime tous les droits de corvées, et que tous les ouvrages publics soient mis au rabais, parmi l’extinction des gages et pensions accordées aux différents directeurs et qui forme une surcharge aussi accablante que dispendieuse. 8° Qu’on anéantisse les droits d’amortissement et de franc-fief, et généralement tout ce qui entre dans la régie des cinq grosses fermes, en supprimant tous les receveurs et commis, lesquels forment une troupe frayeuse de gens oisifs qui troublent et inquiètent l’artisan et le cultivateur. 9° Qu’on établisse une loi pour fixer l’unifor-mité dans la perception de la dîme, en réglant les diverses espèces de fruits décimables. 10° Que, pour la conservation de plusieurs de ces fruits, partie précieuse pour l’humanité, il serait à souhaiter qu’il émanât une loi constante et invariablepourles pigeons, dont toutes les terres sont accablées dans les temps de semaison et moisson, qui font manquer une partie des grains de toute espèce, et par là occasionnent un tort réel et irréparable aux pauvres ménagers. 11° Que les églises soient à la charge des déci-mateurs pour leur reconstruction et entretien, conformément à ce qui est statué pour la Flandre maritime. 12° Qu’on simplifie les formes judiciaires, en diminuant les degrés de juridiction, et que la jus-ice soit rendue gratuitement. 13° Que chaque communauté ne soit justiciable que des juges royaux, sans aucun recours aux intendances. 14° Qu’il y ait suppression des droits seigneuriaux du dixième à chaque mutation, droits onéreux qui n’ont pour fondement qu’une possession peu soutenue, une possession abusive et dénuée de titres consécutifs, 15° Que la communauté de Vred soit spécialement admise à rentrer dans le tiers-lot des marais dont elle a toujours joui paisiblement, et que des abbayes d’Auchin et de Marcbiennes ont prélevé sans établir leurs droits ni justifier de leurs titres; suppliant Sa Majesté de vouloir ordonner que le tiers dont il s’agit rentre au plus grand profit de ladite communauté, qui déclare de rester en entier dans ses droits pour les dommages et intérêts qui lui sont dus pour les fonds destinés et propres à faire tourbe que ladite abbaye d’Auchin a enlevés contre les dispositions des lettres patentes de 1777, tandis qu’il était défendu par icelles à ladite communauté de se servir desdits fonds pour faire tourbe et palées, qui étaient d’un grand secours pour la paroisse. 16° Que les Etats provinciaux de Flandre soient composés des trois ordres, et que les représentants du tiers soient en même nombre que les députés collectifs du clergé et de la noblesse. 17° Que la commission intermédiaire soit composée moitié des députés du tiers-état, et qu’elle n’ait que l’exécution des délibérations desdits Etats, à qui elle serait comptable chaque année. 18° Qu’ayant égard aux pertes occasionnées dans cette communauté par l’inondation arrivée en 1784, par l’ouragan survenu en 1785, et par les différents incendies qui ont eu lieu successivement, il soit pourvu aux indemnités dues aux habitants victimes de ces malheurs, dont ,les réclamations n’ont pas été accueillies aux Étals ni à l’intendance. Ainsi fait, convenu et arrêté en notre assemblée tenue cejourd’hui en l’hôtel de ville dudit Vred, le 23 dudit mois de mars 1789. Signé à l’original: Louis de Lops ; J.-B. Burier ; Alexandre-Louis L’Espagnol ; G. Desor; Antoine Detuc ; François Foucaud ; A. -J. Martin ; Chrysos-tôme Desor; J.-B. Massingue; H. Legrand; Philippe Durot; G.-F. Martin; Paul Dhumain; B. Massingue; J.-B. Desor; J.-B. Sans; Adrien Jesseur; J.-B. Martin; Claude Langlin; Dieudonné Desor-mayeur ; Gharles-F. Dubray,échevin ; P. Seinglein; P .-A. Broutin; Amoult; Legrand ; Brachelet, greffier; Dieudonné Desor, mayeur. MÉMOIRE Et état de la doléance des habitants du village d'Estrées , comme il suit. 1° Il y a une très-grande quantité de terre qui était tant en marais qu’inculte, appartenant à la communauté, que le seigneur s’en est emparé ; nous demandons d’y rentrer. 2° Il existe une pièce de 15 rasières ci-devant à marais, appartenant à la communauté, nonobstant le cordon que le seigneur a réclamé. 11 perçoit encore un droit de demi-terrage qui est de quatre gerbes du cent; on demande qu’il abandonne l’un ou l’autre. 3° Le chemin qui conduit au marais ci-devant, le seigneur s’en est emparé; nous demandons d’y rentrer. 4° Tous les plantins qui sont sur notre territoire, les arbres sont tout au plus éloignés les uns 232 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Douai.] des autres de 20 pieds, ce qui occasionne les chemins défectueux qui obligent de moment à autre des réparations ; nous demandons que le seigneur les fasse faire à ses dépens. 5° Nous nous plaignons aussi que les levrauts, perdrix et faisans, se multiplient très-fort sur notre terroir, au point que nous en souffrons de grands dommages; nous demandons que le seigneur les fasse détruire, ou qu’il permette à ses vassaux de les détruire eux-mêmes. 6° Quant aux différents impôts que nous sommes obligés de payer aux Etats, nous demandons que les ecclésiastiques et nobles payent comme nous. 7° Dans tous les différents impôts de l’Etat nous demandons de payer comme nos voisins, et pour les vingtièmes royaux et ordinaires, nous demandons que l’on nous taxe à une somme fixe et à chaque rasière de terre. 8° Dans l'étendue de notre territoire nous avons certaines pièces de terre qui doivent dix-huit du vent, d’autres seize et huit ; nous demandons de payer cette dîme en argent, au lieu qu’en nature, attendu qu’il manque de paille pour faire fructifier la terre. Nous demandons aussi de ne plus payer la dîme insolite. 9° Avant que la Flandre fût réunie à la France, elle était gouvernée par de vrais Etats composés du clergé, de la noblesse et du peuple, c’est-à-dire du tiers-état, tandis que présentement qu’il n’y a lus qu’un symbole d’Etats régis par quatre grands aillis, dont’ la forme est aussi insolite qu’inconcevable, nous demandons à ce qu’on nous rende nos anciens Etats, et même en la forme réglée par Sa Majesté pour le Dauphiné et la province, et qu’on y ajoute un quatrième ordre, savoir l’ordre des paysans, comme il se pratique en Suède. Toutes les meilleures lois rentrent dans l'oubli et tombent en désuétude par des défauts de republications ; nous demandons à ce qu’on englobe toutes ces lois dans un code pour la Flandre, et qu’on en fasse la republication une fois au moins tous les trois ans. 10° Outre les rentes seigneuriales que nous payons annuellement au seigneur, il nous impose encore des corvées ; nous demandons encore d’en être déchargés. 11° Quelques personnes qui travaillent à gré, demandent de le prendre au dixième. 12° Les bouteurs de Douai, qu’on charge dans la ville de Douai, font tort à toute la populace, qui demande de vendre son grain elle-même. 13° Nous demandons que le droit de franc-fief soit aboli. Nous demandons aussi que le Roi ne souffre point de magasins de blé dans son royaume. 14° Nous nous plaignons aussi desavoir si la dîme est bien juste et s'il y a titre. 15° Nous demandons que les habitants des villages puissent procéder à la nomination de la moitié de la justice avec le seigneur. 16° Nous demandons à Sa'Majesté qu’il lui plaise arrêter le prix des vivres propres à fabriquer du pain, à environ 9 à 10 francs; de cette manière il ne se trouverait pas tant de brigands. 17° Nous nous plaignons que, dans notre territoire, on a travaillé à l’extraction des grains depuis un temps immémorial ; il a donné un grand produit et une grande facilité dans le royaume, et a fait la fortune des quatre grands baillis en les faisant passer dans des royaumes étrangers, et que les terres sont si défectuées, qu’on n'y peut presque dépouiller. Signé Jacques-Etienne Le Nestre; Pierre-Joseph Pinchon; Jean-Louis Richer; Nicolas Dellebart; Guillain L’Evêque; Etienne-Joseph Charles ; Ignace Dellebart; Guillain-Joseph Baveux; Charles-Joseph Fa vaux ; Philippe-Joseph Bayeux ; Jean-Philippe-André Vinois; Joseph Yerdières; Jean-Charles Mouchiers ; Jean Briet ; Guillain-Joseph Boyer; Pierre-Joseph-Dellebart ; Toussaint Ri-quart; Guillain Drade; Michel Beaucourt; Pierre-Laurent Beauduin ; Charles-Joseph Dauphin ; Antoine Aimé; Jean-Baptiste de l’Illé; André Chevalier ; Adrien Hardelain ; Jacques de Lebast ; Roch Lefors; J.-B. Faveau; Nicolas de Sains; Etienne Badaut; André Patrice; Charles d’Abricourt; Guil-lejnot, bailly; Dellebart, échevin, Gillon, échevin. DOLÉANCES Plaintes et remontrances de la commune d'Hamelle. 1° La communauté d’Hamelle jouissait d’une partie de marais indivise avec la communauté d’Arleux, sur environ 200 rasières limitées par le clocher de Cour-Saint-Quentin et au bois du Sart, tant pour tomber que pour faucher, fossoyer et paître, moyennant 7 sous et demi au ménage, à Mme de Bergle, et y coucher au château dudit Arleux, tous les ans, la veille de la Saint-Rémi. En 1787, le vicomte d’Arleux a fait paraître et rendre un arrêt à la cour du parlement de Flandre, pour avoir la transaction faite entre lui et la communauté d’Hamelle au Molaquier, pour sûreté de ses droits contre ladite communauté d’Hamelle; cette transaction avait été faite en 1609. Cependant la princesse de Bergle, il y a neuf ans, nous a fait passer une requête tendant à ce que nous ayons consenti au partage; pour ne point ruiner notre communauté, nous avons été obligés à tout ce qu’elle a voulu et jouir de ce qu’elle a bien voulu nous donner. Nous demandons d’y rentrer et de jouir des droits de nos prédécesseurs. 2° La communauté dudit Hamelle a un marais en propriété, sans que le seigneur d’Hamelle y ait jamais perçu aucun droit; ladite communauté d’Hamelle a essuyé un procès contre la communauté de l’Ecluse, pour avoir une limite à son propre et privé nom ; quelque temps après le seigneur a fait planter le cordon sous promesse verbale qu’il aurait fait mettre deux cloches dans le clocher dudit Hamelle. Il n’a jamais exécuté sa promesse; ensuite, par les lettres patentes de Î777, le même seigneur a forcé la communauté dudit Hamelle pour le partage, et il a pris le tiers à lui. Nous demandons d’y rentrer et de le mettre à l’usage qu’il était ci-devant, et comme nos prédécesseurs en ont joui à notre plus grand profit. 3° Tant pour l’une que pour l’autre partie de marais, que la communauté d’Hamelle jouit, il serait très-nécessaire de le remettre dans leur premier état ; c'est la perte et la ruine de toutes les communautés qui avoisinent celle d’Hamelle. Premièrement, la feuille manque et coûte le triple double ; les terres ne peuvent plus fructifier à cause qu’il faut consommer des charbons ; on n’a plus de cendres pour les amender, plus de pâture, moins de bétail ; on ne peut plus faire d’élèves en bêtes à cornes ni en poulains ; le beurre vaut une fois le double, le lait s’ensuit, de sorte que le pauvre fermier, et tout le monde, quand il faut qu’il achète un bétail de l’une ou de l’autre espèce, il est extraordinairement cher ; de là provient pour ainsi dire tout le mal et la mi-