(Convention nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j 99 Cette Société réclame contré un pareil scan¬ dale. Elle invite la Convention nationale à le faire réprimer par une loi* et que l’effet de cette loi soit rétroactif à l’égard de la veuve Lecomte* indigne des libéralités de son mari. Renvoyé au comité de législation (1). Suit V adresse de la Société populaire d? Auxerre (2). Adresse de, la Soeiétê populaire de la ville d’Auxerre, département de l’Yonne, à la Convention nationale. « Législateurs, « Au moment où la Société, populaire de la ville d’Auxerre était occupée dans le lieu de ses séances à propager de plus en plus l’esprit public, à éclairer le peuple sur ses véritables devoirs, à enflammer le courage des jeunes pa¬ triotes tout prêts à voler à la défense de la patrie, la nouvelle d’une mort tragique est venue frapper ses oreilles et exciter sa sensibilité, en même temps que son indignation. « Elle apprend avec certitude que le noir chagrin et le plus vif désespoir ont précipité, ont englouti dans les eaux un citoyen d’Auxerre, J. -B. Le Comte, négociant, âgé de 45 ans, attaché depuis environ 18 mois par les liens du mariage à la fille Maujot, de Yermenton, déjà sa parente au 3e degré, dont l’éducation semblait lùi promettre la plus douce, la plus heureuse des destinées, mais dont l’union est devenue pour lui une source de privations et d’amertumes. « Aveuglé par la passion qu’il avait conçue pour cette jeune parente, dont l’alliance lui paraissait, sous tous les rapports, bien assortie, le citoyen Le Comte voulut, en captivant le cœur de sa future, s’assurer en même temps sur lui tous les droits de l’estime et de la recon¬ naissance. « Pourvu d’un patrimoine honnête qu’il avait considérablement augmenté par son tra¬ vail et son économie, par son intelligence dans le commerce des vins, unique héritier de ses père et mère décédés, jouissant en un mot de tous ses droits, le citoyen Le Comte versa sans réserve, par son contrat de mariage, entre les mains de la fille Maujot, seulement dotée de 10 à 12,000 livres, la presque universalité de sa fortune évaluée à une somme de 200,000 livres. « La cupidité, empruntant le masque de la reconnaissance, sourit à ce trait de Ebéralité, seul autorisé par le despotisme des coutumes, notamment par la coutume d’Auxerre qui prohibe, hors par contrat de mariage, tous avantages directs ou indirects entre mari et femme; et ce sourire hypocrite et trompeur fut recueilli par le citoyen Le Comte comme le présage certain de son heureuse destinée, tant son cœur était franc et loyal. « Mais, le croiriez-vous, législateurs, à peine le premier nœud de cette union fut-il devenu légitime que la plus froide indifférence s’em¬ para de la fille Maujot à l’égard de son mari, et à cette indifférence succéda tout à coup le mépris, l’aversion et la haine. (1) Procès-verbaux de la Convention, ï. 25, p. 183. (2) Archives nationales, carton Dm 304, dossier Auxerre. « Au bout de quelques semaines d’habita¬ tion dans la maison de son mari, le fille Maujot témoigna un désir empressé d’aller passer quel¬ ques moments à Yermenton, chez ses père et mère. Le citoyen Le Comte, pouvant croire que le sentiment d’indifférence qu’il éprouvait de la part de sa femme était l’effet de sa séparation de la maison paternelle, dont elle avait été l’en¬ fant gâtée, applaudit à sa piété filiale, consentit à son départ pour Vermenton et porta les soins et la complaisance jusqu’à lui souffrir emporter de sa maison les meubles les plus indispensables pour s’établir à Yermenton un domicile séparé. « Ce premier voyage à Vermenton ne fut en effet qu’un prétexte de la fille Maujot pour rompre tout commerce avec son mari, pour ne pas remettre les pieds dans sa maison d’Auxerre, ou, si depuis plus d’un an elle y a reparu quelques jours, ce n’a été que pour donner à son mari de nouvelles marques de mépris et d’aversion-« Le citoyen Le Comte, désolé de vivre séparé de sa femme, qu’il aimait toujours éperdument, fit de fréquents voyages à Vermenton, employa près de sa femme tout ce qui pouvait la déter¬ miner à revenir auprès de lui, elle demeura inflexible à ses prières et à ses larmes. Le citoyen Le Comte fut forcé de revenir seul dans ses tristes foyers, dévorant dans le fond de son intérieur toute l’amertume de l’ennui et du désespoir. « La loi du divorce semblait lui offrir un moyen de faire repentir cette femme rebelle et trompeuse de tous ses actes de mépris et d’a¬ version dont elle l’avait accablé, mais le senti¬ ment de l’amitié qui, malgré tant de dédain», ne s’était point ralenti dans son cœur, l’empêcha de profiter des dispositions de cette loi; il eût voulu que cette femme les eût fait valoir la première contre lui; il craignait, en y recourant lui-même, que cette femme ingrate ne vienne partager la moitié d’une communauté, le fruit de ses seuls travaux. Enfin, accablé de chagrin, d’impatience et de désespoir, il a terminé ses jours en se précipitant dans la rivière d’Yonne. « Tel a été, législateurs, le dénoûment tra¬ gique de la malheureuse union du citoyen Le Comte avec la fille Maujot, d’après les détails les plus exacts que s’est procurés la Société populaire, à laquelle on a également rendu les témoignages les plus satisfaisants de la conduite. et des procédés du citoyen Le Comte, avant et depuis qu’il eut obtenu, pour son malheur, la main de la fille Maujot. « Vous remarquerez donc, législateurs, dan» la conduite de cette femme, une immoralité qui insulte à la vertu qui est la base de toutjjouver-nemont républicain; le tableau de ses mépris* de son insouciance et de ses aversions, rapproché des prévenances, des sollicitudes, enfin du déses¬ poir de son mari, a révolté tous les vrais répu¬ blicains, et le premier cri delà Société populaire, toujours animée de ce principe, que celui qui n’aime pas ses semblables est un aveugle qui mé¬ connaît la nature, que celui qui pourrait les haïr est un monstre qui l’outrage, a été de solliciter auprès de la Convention nationale une loi répressive qui pût s’appliquer à l’espèce, et empêcher qu’elle ne se reproduise jamais. « La République touche au moment, légis¬ lateurs, de recevoir un nouveau bienfait de vos mains, dont l’objet est infiniment désiré, puis¬ qu’il doit écraser pour jamais ce monstre à trois têtes, le monstre hideux de la chicane qui, depuis si longtemps, dévore la substance des 100 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [ ff brumaire an U . J I 12 novembre 17U3 peuples et voudrait les transformer en véri¬ tables squelettes. « Avant de mettre la dernière main à ce mo¬ nument magnifique de sagesse, de raison et de justice, veuillez inviter votre comité de législa¬ tion à prendre en considération la conduite tenue par la fille Maujot à l’égard de son mari et qu’il vous propose : « Que « quand une femme aura méprisé son mari, ou un mari sa femme, quand la discorde de leur ménage aura scandalisé tous leurs con¬ citoyens, quand le fait sera notoire et reconnu tel par le cri général que le juge de paix du canton sera autorisé à constater, les époux soient l’un ou l’autre déchus non seulement de tous avantges, mais réduit à leur apport effectif et prouvé ». « Hâtez-vous ensuite, législateurs, d’adopter cette loi, qui, en resserrant de plus près le lien de l’époux avec l’épouse, assurera encore mieux dans leur cœur l’empire de la vertu. Donnez en cette loi, et c’est le vœu unanime de la Société populaire, un effet rétroatif à l’égard de la veuve Le Comte, comme devenue indigne des libéralités de son mari. Les plus vifs applaudis¬ sements se feront entendre de tous les coins de la République, mille fois surtout serez-vous bénis, chéris et respectés de la famille pauvre et indigente que laisse après lui le citoyen Le Comte, et pour qui le spectacle de ses biens accumulés dans les mains de sa veuve serait un nouvel outrage à la mémoire de son infortuné mari, et les réduirait eux-mêmes au plus affreux désespoir. « Rousseau, président; Ch aisne au, secrétaire. » Le président du conseil général du départe¬ ment du Cantal adresse à la Convention natio¬ nale la lettre du représentant du peuple envoyé dans ce département, et qui a pour objet d’ins¬ truire la Convention nationale des mouvements contre-révolutionnaires qui se sont manifestés dans les départements de la Lozère et de l’Avey¬ ron. Renvoyé au comité de Salut public (1). Lettre du ministre de la justice, par laquelle il instruit la Convention nationale du danger qu’ont couru les juges patriotes du tribunal révolution¬ naire, lorsqu’un gendarme, après avoir entendu son jugement, a voulu se jeter sur eux après s’être saisi du sabre d’un de ses gardes. Plusieurs sections et plusieurs Sociétés populaires deman¬ dent un décret qui puisse prévenir un pareil attentat. Renvoyé au comité de législation (2). Suit la lettre du ministre de la justice (3) : Au Président de la Convention nationale. « Paris, le 21 brumaire, l’an II. « Citoyen Président, « La Convention a été instruite du danger qu’avaient couru les juges patriotes du tribu¬ nal révolutionnaire lorsqu’un gendarme, après il) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 184. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 184. (3) Archives nationales, carton Dm 323, dossier 2. avoir entendu son jugement, a voulu se jeter sur eux, après s’être saisi du sabre d’un de ses gardes. Plusieurs sections et plusieurs Sociétés populaires demandent un décret qui puisse prévenir un tel attentat. Je joins mes instances aux leurs, et je prie la Convention de prendre, dans sa sagesse, les mesures convenables pour que les accusés ne puissent plus abuser de la loi qui veut qu’ils paraissent à la barre libres et sans fers, et pour garantir les juges de la fureur auxquels ils peuvent être tentés de se livrer. « Le ministre de la justice . « Gohier. » La Société populaire de Blois se plaint de ce qu’on a retiré de son arrondissement pour les subsistances 22 communes du district de Mer» très fertiles en blé, et qui étaient son grenier et leurs ressources. « Les donner au Loiret, ajoute-t-elle, c’est réunir l’abondance à l’abondance. » Renvoyé à la Commission des subsistances (1), Un membre [Sergent (2)], au nom du comité d’inspection et de la Commission des arts, de¬ mande que 9 membres soient adjoints à ces co¬ mités pour aider à classer les objets précieux qu’ils renferment. Il offre à la vue du public une agate du plus grand prix, représentant les por¬ traits d’Agrippine et de Néron, qu’il estime 100,000 livres. Sur cette proposition, la Convention nationale décrète : « Il sera adjoint au comité des inspecteurs de la salle 8 membres qui seront chargés de recevoir avec eux les matières précieuses d’or et d’argent qui seront déposées dans le sein de la Conven¬ tion nationale, provenant des dépouilles de la superstition. « Ces 8 membres seront également chargés avec les commissaires inspecteurs, de remettre à la monnaie ces objets, d’en dresser procès-verbal, d’assister à la vérification de leur poids et d’en donner décharge aux députés des com¬ munes. « La Commission des monuments chargera trois de ses membres de se transporter, soit au comité d’inspection, soit à la monnaie, pour dis¬ traire les objets précieux d’arts qui dépendront de ces matières déposées, et en dresseront pro¬ cès-verbal conjointement avec les commissaire* d’inspection. « Les membres adjoints audit comité sont : Perrin ( des Vosges ), Duval [de P Aude] (Aube),. Boucherol (Bouchereau) (de V Aisne), Chabanon (du Cantal), Finnot (Finot) (de V Yonne), Chédan-nau (Chedaneau) (de la Charente), Hérard (de V Yonne), Jean Debry (de V Aisne) (3). Compte rendu du Moniteur universel (4). Sergent annonce que le comité d’inspection et celui de la Commission des arts étaient en-(1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 184- (2) D’après les divers journaux de l’époque. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 184. (4) Moniteur universel [n° 54 du 24 brumaire