30 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] CAHIER Des plaintes , doléances et remontrances des habitants du Plessis-Piquet, par eux dressé et rédigé et unanimement arrêté en l'assemblée générale de ladite paroisse, convoquée au son de la cloche , en la manière accoutumée , et tenue cejourd’hui 15 avril 1789 (1). Pour obéir aux ordres du Roi portés par ses lettres données à Versailles le 24 janvier dernier, et satisfaire aux dispositions du règlement y annexé pour la convocation et tenue des états-généraux de ce royaume, le tout publié et affiché dans la forme qui est prescrite et de nouveau lu et publié en la présente assemblée, lesdits articles ont été réduits aux suivants : Art. 1er. Que tous les impôts soient réduits à un seul. Art. 2. Que le classement des terres soit fixé sur le taux qui déterminait l’impôt de 1676, pour la répartition de la taille, sans considérer la progression qui leur a été donnée depuis, en conséquence des lettres ministérielles. Art. 3. Que l’abonnement de l’impôt soit accordé à chaque province et réparti pour chaque municipalité. Art. 4. Que la taille personnelle continue de subsister, pour la seule classe de citoyens sans propriétés, non assujettis à l’impôt qui les frappera. Art. 5. Que la suppression des capitaineries soit ordonnée, et dans le cas où celle de Saint-Germain en Laye continuerait d’avoir lieu, et que la bête fauve et les lapins qui causent un dégât considérable à cette paroisse, qui est située au milieu des bois, subsisteraient, supplier Sa Majesté de donner des ordres de payer annuellement aux laboureurs et vignerons les frais de clôture qu’ils sont obligés de faire pour garantir leurs récoltes du dommage qu’ils souffrent. Art. 6. Qu’il soit permis de faire le rachat des dimes en un abonnement en argent. Art. 7. Que la destruction des colombiers soit ordonnée. Art. 8. Que l’entrée des prés soit défendue aux troupeaux dès le 1er mars de chaque année et que la liberté des regains soit accueillie, à la charge par les propriétaires de s’enclore. Art. 9. Qu’il soit établi une police invariable sur l’exportation des grains, et qu’il soit pourvu promptement à en diminuer le prix qui est excessif. Art. 10. Que la vente en soit ordonnée au poids. Art. 11. Que tout accaparement, emmagasinage de blés soit prohibé, et les juges des lieux autorisés à constater toutes les contraventions et à statuer sur les peines que la loi infligera aux contrevenants. Art. 12. Que toutes les mesures soient réduites en une seule. Art. 13. Que la suppression des milices soit ordonnée, comme étant ruineuses pour les familles et contraires au bonheur des campagnes. Art. 14. Qu’il soit prononcé sur la suppression de la gabelle, des droits d’aides et du gros manquant. Art. 15. Que tous les baux à ferme, même des biens ecclésiastiques, soient dorénavant pour dix-huit ans, saûs qu’ils puissent être anéantis par leur décès. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l'Empire. Art. 16. Que toutes les maisons d’exploitation, aux gens de la campagne, soient exemptes d’impositions ou du moins très-ménagées, en considération de ce qu’elles ne servent qu’à engranger les productions pour lesquelles Jes occupants payent des charges à l’Etat. Art. 17. Qu’il y a dans cette paroisse un prieuré, dont les revenus ne laissent pas d’être considérables, et une maison centrale autrefois habitée par plusieurs religieux et aujourd’hui réduite à un seul qui dit la messe quand il peut ou quand il veut; que sur le revenu de ce prieuré, il soit pris une somme pour la subsistance d’un vicaire et d’un maître d’école pour la paroisse qui n’en a pas, à cause du revenu modique du curé. Art. 18. Qu’il soit, au surplus, statué sur les autres doléances et représentations des villes, bourgs, villages, communautés du royaume qui auront pour objet l’intérêt de l’Etat, celui de la nation en général et le soulagement du peuple. Et nous avons, conformément aux intentions de Sa Majesté, arrêté le présent cahier en la susdite assemblée, lequel a été signé par ceux des habitants soussignés qui le savent, et les autres ont déclaré ne le savoir, de ce enquis, lesdits jour et an. Signé Moullé syndic ; Chevalier ; Trouvin ; Mégissier; Courtois; Lamboz; Barte; Tessier; Du-breuil ; Joseph Caymet, greffier. CAHIER Des plaintes, doléances et vœux du tiers-état de la paroisse du Plessis-Secqueville , du ressort du châtelet de Paris , délibéré et arrêté en l'assemblée générale dudit tiers-état , convoqué en exécution du règlement de Sa Majesté, du 24 janvier dernier, pour la tenue des Etats généraux du royaume , ladite assemblée présidée par Louis-Didier Ladey, notaire et greffier des bailliage et baronnie dudit lieu du Plessis-Secqueville, faisant pour l'empêchement de M. le bailli, à cause de son indisposition ; contenant les articles qui suivent (1) : Art. 1er. Les habitants de ladite paroisse supplient sa Majesté de supprimer tous les impôts, sous quelque dénomination qu’ils soient établis, et de former la création d’un seul et unique impôt territorial, qui sera réparti également sur tous les biens-fonds indistinctement. Art. 2. La réformation des privilèges, abonnements et exemptions. Art. 3. La suppression de tous les droits des aides sur toutes les boissons, et l’établissement d’un impôt sur tous les arpents de vignes. Art. 4. La suppression des gabelles; le sel rendu marchand, suivant un prix uniforme, et pris dans les salines dont la propriété exclusive appartiendra à sa Majesté. Art. 5. La suppression des milices et de la corvée, si ce n’est pour l’établissement de leurs chemins qui sont impraticables et même n’ont pas la mesure ordinaire. Art. 6. La suppression des offices de juré-pri-seur, et en même temps celle des droits de 4 deniers pour livre. Art. 7. L’uniformité par tout le royaume des poids et mesures. Art. 8. La destruction du gibier et des colombiers qui, depuis plusieurs années, les privent en-(lj Nous publions ce cahier d’après uo manuscrit des Archives de l’Empire. fËtatsgén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors. les murs.] 31 fièrement du tiers de leur récolte par chaque année, tant sur pied que lors de la semence, avec défense à aucun garde d’entrer dans aucun grain, depuis le 15 de mars jusqu’après la récolte, et qu’il soit permis aux propriétaires et cultivateurs de nettoyer leurs grains quand ils le jugeront à propos, comme de faucher leurs herbages aux prairies artificielles quand pareillement ils le désireront, et la destruction des remises. Art. 9. Au surplus, les députés du village dudit Plessis seront et demeureront autorisés à proposer, remontrer, aviser et consentir tout ce qu’ils pourront juger de plus convenable et de plus avantageux au bien général de l’Etat et de la nation, et qui pourrait être employé au cahier général de la généralité de Paris, même contre et outre les articles ci-devant détaillés. Fait, délibéré et arrêté, en l’assemblée générale des habitants du tiers-état de la paroisse du Plessis-Secqueville, anciennement Pâté, tenue ce-jourd’hui 16 avril 1789 , cinq heures de relevée, au banc de l’œuvre, de l’église et dudit lieu, par les habitants nommés ci-dessus. Signé Haudry, syndic; Laurent-Claude, Malherbe; Séjourné; Bidaut; Moreau; Chevallier; Bertier ; David; Cadier; Arnaut; Chevatier; Gar-mija; Delaplace; Lauvain; Ladey. CAHIER Des plaintes , doléances et remontrances des habitants du tiers-état de la ville de Poissy , accepté d'une seule et unanime voix, sauf les restrictions ci-après, après que cette lecture a été faite en l'assemblée indiquée par l'ordonnance de M. le prévôt de Paris du 4 de ce rno.is , les habitants assemblés en l'église des Capucins de cette ville, après la célébration de la messe du Saint-Esprit, pour être par les Etats généraux déposé aux pieds de Sa Majesté , et sur lesquelles les députés feront en l'assemblée les observations que la brièveté du temps n'a pu permettre (1). La ville de Poissy est une des plus anciennes du royaume et des plus mémorables par le séjour des rois et la naissance de saint Louis, par le colloque de Poissy, en 1561, et par leur député au procès-verbal de rédaction de la coutume; elle a perdu, depuis plus de cent cinquante ans, de son faste et de son commerce, époque à laquelle elle est sortie des mains de Sa Majesté, mais elle n’en a pas moins conservé une population de quatre mille âmes, et elle n’a dû son existence qu’à l’industrie de ses habitants et au commerce que lesdits habitants font en bestiaux tous lesjeudis de chaque semaine, puisque du moment fatal où ils ont perdu leurs premières prérogatives, ils ont éprouvé des vexations de tout genre, ainsi qu’ils vont le démontrer dans les présentes doléances. Nous devons d’abord nous occuper des objets qui nous intéressent particulièrement, avant que d’entrer dans ceux qui intéressent le royaume. Nous commencerons donc par nos impositions, v comme faisant un objet d’intérêt d’autant plus important que nous avons toujours été vexés dans la répartition qui en a été faite par le commissaire départi ; nous parlerons ensuite du commerce des bestiaux, et cet ensemble réunira nos doléances particulières. La forme que la communauté des habitants de la ville de Poissy a prise, en 1710, pour acquitter (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l'Empire. les impositions, a servi de prétexte aux commissaires départis , pour la gréver d’impôts énormes dont la réunion forme un capital de 33,429 livres; les mêmes impositions pour la ville de Saint-Germain ne forment qu’un capital de 30,000 livres. 11 est bon d’entrer dans quelque détails pour faire connaître les motifs qui ont déterminé le commissaire départi à surcharger cette ville de doubles impositions sous différentes dénominations. A l’époque dont nous parlons, il a été pris, dans cette ville et dans les hameaux qui en dépendent, des mesures inutiles pour faciliter la levée de la taille. Une première vérité importante consignée dans l’arrêt du conseil du 26 août 1710, est que le parti qu’il s’agissait d’embrasser et qui a été embrassé a eu pour objet non-seulement principal, mais unique, la levée des tailles et autres impositions, et à cet effet, dans le dessein d’obvier aux graves inconvénients, de remédier, pour le service des termes employés par les ancêtres desdits habitants, aux désordres qui détruisaient le commerce et devaient achever indubi-tallement de ruiner la communauté, ceux-ci proposèrent à Sa Majesté de convertir (ce sont encore leurs expressions) l’imposition de la taille et autres impositions comprises dans les commissions de Sa Majesté, en droits d’entrée sur les marchandises que consommeraient les habitants de ladite ville; ces droits ont été expliqués dans un tarif qui a été annexé à la requête sur laquelle est intervenu l’arrêt du conseil susdaté, lequel est intervenu et porte que ces droits étaient et seraient pour tenir lieu de deniers de la tailte, taillons, subvention, quartier d’hiver, 2 sous pour livre et autres droits compris dans les commissions de Sa Majesté pour la levée des tailles. Les lettres patentes intervenues le 14 septembre 1710 et enregistrées le 20 du même mois, ont adopté sans exception ni modification la forme prise par les habitants, et leurs contributions pour cet objet ont été fixées à 8,000 livres, et il a été ordonné, d’après la destination de ces deniers, qu’ils seraient payés entre les mains du receveur des tailles ; il a été ajouté, relativement à une autre espèce d’intêrêt des habitants, que si le produit des droits excédait la somme à laquelle la communauté serait imposée chaque année pour le mandement des tailles, le surplus servirait à ses besoins et affaires. Les habitants étaient bien éloignés de penser que les commissaires départis oublieraient l’origine de ces droits d’entrée, qu’on les confondrait avec les octrois apartenant aux villes, qu’on ferait, d’une part, à ces droits, la fausse application de ce qui peutcouvenir à ceux-ci, et qu’on profiterait des progressions qu’ont éprouvées les tailles pour les surcharger d’une double imposition, à laquelle on a donné le nom d’accessoire de la taille, comme si les taillons, subventions, quartiers d’hiver, 2 sous pour livre et autres droits compris dans les commissions de Sa Majesté, n’étaient pas accessoires de la taille, conme si le nom, la ressemblance, n’étaient pas dans ce cas la même chose. Les tailles ayant été progressivement augmentées, la ville de Poissy a été fixée à 11,000 livres; c’est lors de cette progression subite que les commissaires départis se sont permis de faire comprendre dans le brevet de la taille une nouvelle imposition qui monte aujourd’hui à 5,729 livres et qui est désignée sous le nom d’accessoire,