[Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 novembre 1799.] 481 religion. Que ce silence est affligeant pour elle 1 On s’attendait à y voir une défense générale de composer, imprimer ou colporter ou rendre aucun ouvrage contre le gouvernement, contre la religion et les mœurs, et contre l’honneur des citoyens : voilà qui eût été clair et intelligible. On y a compris à la vérité les mœurs, parce qu’en effet sans les mœurs, il n’y aura jamais ni subordination, ni force, ni bonheur dans un Etat ; mais la religion devait-elle être séparée des mœurs, puisqu’elle en est la sauvegarde? On ne peut guère respecter les mœurs, quand on ne respecte pas la religion. En restreignant la liberté de la presse, ne serait-il pas nécessaire de réprimer encore la liberlé qu’on prend d’exposer publiquement, et quelquefois jusque dans les avenues de la salle nationale, des tableaux, gravures et estampes obscènes et de la plus grande indécence? Les écrits contre les mœurs sont bien moins dangereux pour le peuple : un grand nombre ne sait pas lire, et beaucoup n’en a pas le temps ; au lieu qu’il ne faut ni temps ni science, pour faire passer dans l’âme des images impures qui y causent souvent les plus grands ravages. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. CHASSET. Séance du lundi 15 novembre 1790, au matin (1). La séance est ouverte à dix heures moins un quart du matin. MM. les secrétaires donnent lecture des procès-verbaux de la séance de samedi au soir et de la séance d’hier. Ces procès-verbaux sont adoptés. M. Malès, membre du comité des rapports , rend compte d’une pétition des accusés des troubles dans le département de la Corrèze et propose un projet de décret qui est adopté en ces termes : « L’Assemblée nationale, considérant que, par des motifs d’ordre et de justice, elle a, par son décret du 26 août dernier, sanctionné par le roi, renvoyé devant les officiers municipaux, juges ordinaires en matière criminelle à Bordeaux, tous les procès commencés par le tribunal prévôtal de Tulle, relativement aux troubles du département de la Corrèze, antérieurs au 1er mai dernier, pour en continuer l’instruction jusqu’au jugement définitif, et que partie de ces motifs subsistent encore, et ne permettent point que les accusés soient jugés dans des tribunaux du département de la Corrèze; après avoir entendu sou comité des rapports sur la pétition des accusés : « Décrète qu’attendu la cessation des fonctions judiciaires de la municipalité de Bordeaux, par l’effet des décrets concernant la nouvelle organisation de l’ordre judiciaire, sanctionnés par le roi, l’instruction et le jugement de tous lesdits procès sont renvoyés au tribunal du district de Bordeaux, auquel la connaissance en demeure attribuée de la même manière qu’elle l’avait été (1) Cette séance est incomplète au Moniteur . aux officiers municipaux de celte ville ; à l’effet de quoi les prisonniers seront transférés des prisons de la municipalité, où ils sont détenus, dans celles du tribunal de district, et les minutes de toutes les procédures faites contre eux, transportées au greffe dudit tribunal.» M. de Maubee. Je demande que l’Assemblée veuille bien faire un règlement pour sa police intérieure. Avant d’infliger des punitions, il faut établir des lois fixes. M. de IFolIcville. J’appuie l’opinant parce que, sous prétexte de discipline intérieure on ne doit être puni que pour avoir transgressé un règlement. Cependant voilà déjà plusieurs membres de l’Assemblée contre lesquels on prononce des peines qui ne sont point portées à son règlement. M. Delley. Les circonstances ont commandé la sévérité de l’Assemblée. Un règlement ne peut prévoir tous les cas ; un acte, un propos, devient plus ou moins répréhensible, suivant les circonstances. M. de Foucault. Alors conservons le régime de l’arbitraire et du bon plaisir. Plusieurs membres demandent l’ordre du jour qui est prononcé. M. Hernoux, membre du comité d'agriculture et de commerce , propose et fait adopter le décret suivant sur les troubles et les excès qui ont eu lieu dans la ci-devant province de Roussillon à l’occasion de l'incendie des barrières et du retard du payement du droit de traites : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité de commerce et d’agriculture sur les excès qui ont interrompu la perception des droits de traites, et la garde des frontières et des côtes de la ci-devant province de Roussillon, décrète ce qui suit : Art. 1er. « Les bureaux de perception des douanes nationales seront incessamment rétablis sur toutes les frontières et les côtes de la ci-devant province de Roussillon, dans les endroits où ils étaient au lor juillet de l’année dernière, et dans ceux qui seront ultérieurement indiqués. Art. 2. « Les municipalités seront tenue's de favoriser, par tous les moyens qui seront à leur disposition, le rétablissement de ces bureaux et de protéger les perceptions et les percepteurs, non seulement des douanes nationales, mais encore de toutes les impositions quelconques, directes ou indirectes ; faute de quoi, elles en resteront responsables, aux termes du décret du 23 février dernier. Art. 3. « Les directoires de district et de département veilleront à l’exécution du présent décret. Art. 4. « Le roi sera supplié de donner ordre aux commandants des troupes de ligne des ci-devant provinces du Languedoc et du Roussillon, de prêter raainforte à toutes les municipalités et directoires de district ou de département qui les en requerront; et, au cas que ces troupes ne fussent 432 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 novembre 1190.1 pas assez nombreuses, le roi sera supplié d’ordonner qu’elles soient portées à un nombre suffisant pour assurer la garde des frontières contre les versements frauduleux. Art. 5. « Le roi sera également supplié de donner des ordres pour faire croiser sur ces côtes quelques bâtiments légers, afin d’en écarter les navires chargés de contrebande. Art. 6. « L’Assemblée nationale charge son président d’écrire au directoire du district de Prades, pour lui témoigner la satisfaction qu’elle éprouve pour la manière dont il s’est conduit pour maintenir et rétablir le bon ordre, et de se retirer incessamment par-devers le roi pour demander la sanction du présent décret. » M. le Président. L’ordre du jour est la suite de la discussion sur les articles proposés par le comité ecclésiastique pour l'exécution du décret sur la constitution civile du clergé. L’assemblée, dans sa séauce d’hier, a adopté les articles 1 à 5 compris. (Voir p. 426.) M. Martineau, rapporteur , donne lecture de l’article 6. M. Mougins de Roquefort. Je propose de remplacer les mots : le faire juger, par ceux-ci: le mettre en état d’étrejugé. (Get amendement est adopté.) M. Muguet. J’ai un autre amendement à vous soumettre : il consiste à ajouter que la déchéance sera encourue par le seul laps de temps sans qu’il soit besoin de jugement qui la prononce. M. Martineau. Get amendement ne peut être adopté parce que, sous le nouveau régime, la disposition dont il s’agit ne saurait plus passer pour comminatoire. M. Muguet retire, son amendement. L’article 6 est ensuite adopté en ces termes : Art. 6. « L’élu sera tenu d’interjeter son appel comme d’abus, au plus tard dans le délai d’un mois, à compter de la date du procès-verbal qui constatera le refus des évêques de l’arrondissement, et de le mettre en état d’être jugé dans le mois ensuivant, à peine de déchéance. » M. Martineau, rapporteur , fait une nouvelle lecture des articles 7, 8, 9, 10, 11, 12 et 13. Ils sont adoptés, sans débat, en ces termes : Art. 7. <' Il ne sera intimé, sur l’appel comme d’abus, d’autre partie que le commissaire du roi près du tribunal de district; et cependant les évêques, dont le refus aura donné lieu à l’appel comme d’abus, auront la faculté d’intervenir sur l’appel pour justifier le refus, mais sans que l’interven-tioD puisse, en aucun cas, retarder le jugement de l’appel, ni qu’ils puissent former opposition au jugement qui serait intervenu, sous prétexte qu’ils n’y auraient pas été parties. Art. 8. « Si le tribunal de district déclare qu’il n'y a pas d’abus dans le refus, il ordonnera que son jugement sera, à la requête du commissaire du roi, signifié au procureur général syndic du département, pour, par lui, convoquer incessamment l’assemblée électorale, à l’effet de procéder à une nouvelle élection de l’évêque. Art. 9. « Si le tribunal de district déclare qu’il y a abus dans le refus, il enverra l’élu en possession du temporel, et nommera l’évêque auquel il sera tenu de se présenter pour le supplier de lui accorder la confirmation canonique. Art. 10. « Lorsque, sur le refus du métropolitain et des autres évêques de l’arrondissement, l’élu aura été obligé de se retirer devers un évêque d’un autre arrondissement pour avoir la confirmation canonique, la consécration pourra se faire par l’évêque qui lui aura accordé ladite confirmation canonique. Art. 11. « Pareillement, lorsque le siège de l’évêque consécrateur sera d’un autre arrondissement que celui de l’élu, la consécration pourra se faire dans l’église cathédrale de l’évêque consécrateur, ou dans telle autre église qu’il jugera à propos. Art. 12. « Les directoires de districts procéderont sans retard à la nouvelle formation et circonscription des paroisses, conformément au titre premier du décret du 12 juillet dernier. Ils s’occuperont d’abord de la formation et circonscription de la paroisse cathédrale, puis des paroisses des villes et bourgs, et ensuite des paroisses de campagne. Art. 13. « L’évêque diocésain sera invité et même requis par le directoire, de concourir, par lui-même ou par son fondé de procuration, aux travaux préparatoires des suppressions et unions; mais son absence ou son refus d’y prendre part, ne pourra, en aucun cas, retarder les opérations des directoires. » M. Martineau, rapporteur , relit l’article 14. M. Mougins de Roquefort. Je propose de remplacer les mots : possibilité des suppressions et unions , par ceux-ci : convenance des suppressions et unions. Get amendement est adopté et l’article est décrété ainsi qu’il suit : Art. 14. * Pour accélérer leur travail, les directoires de districts chargeront les municipalités des villes et bourgs de chaque canton de leur envoyer toutes les instructions et tous les éclaircissements nécessaires sur la convenance des suppressions et unious à faire dans leur territoire et aux environs. » M. Goupil. Je dois faire remarquer à l’Assemblée, à propos de l’article 15, que le décret sur la constitution civile du clergé porte que le Corps législatif seul a le droit de prononcer sur la conservation, suppression ou érection des paroisses; que les corps administratifs ne peuvent, sur ce sujet, que proposer leurs avis et leurs motifs; en