277 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 juin 1791.] En conséquence, relativement à la seconde partie de l’article qui dit que, quand un individu se portera jusqu’à frapper un fonctionnaire dans ses fonctions, il sera puni de la peine de 2 années de prison; je suis d’avis d’aggraver la peine, ainsi que M. Garat l’a proposé, parce que, à la vérité, rien ne peut excuser un homme qui frappe un juge. Relativement à la première partie qui porte que, quand un individu aura outragé un fonctionnaire, verbalement ou par geste, il sera puni de la dégradation civique, je suis d’avis que ce n’est pas le cas d’aggraver la peine et que ce délit ne doit être puni que par forme de police correctionnelle. M. Garat l'aîné. J’adopte. M. lue Pelletier-Saint-Fargeau, rapporteur. L’article, comme vous voyez, comprend deux parties : Quant à la première, il vous a paru peut-être sévère, d’après les observations de M. Duport, de prononcer la peine de la dégradation civique contre quiconque se serait permis une injure contre un juge. Or, le membre du comité de Constitution, qui est chargé de la rédaction du Gode de la poli e correctionnelle, m’a montré un article dans ce Code, qui punit par des peines graduelles des injures légères. Ainsi, je crois qu’on peut retrancher pour le moment cette première partie de l’article et la renvoyer à la police correctionnelle. En ce qui concerne la seconde partie, j’adopte l’aggravation proposée par les préopinants et je propose pour l’article la rédaction suivante : Art. 6. « Quiconque aura frappé un fonctionnaire public au moment où il exerce ses fonctions sera puni de la peine de 4 années de gêne. » (Get article est mis aux voix et adopté.) M. Fe Pelletier-Saint-Fargeau, rapporteur. Voici les articles 7, 8 et 9 : « Art. 7. Quiconque, par force, aura délivré ou tenté de délivrer des personnes détenues légalement ; quiconque les aura délivrées par adresse, sera condamné à la peine de la prison pendant deux années. « Art. 8. Si ladite violence est exercée avec un attroupement ou avec armes, les auteurs, instigateurs et complices dudit attroupement ou les-dites personnes armées seront punies de 4 années de prison. « Art. 9. Si ladite tentative est exercée avec attroupement et armes, la peine sera de 6 années de gêne. » M. Prieur. Je ne trouve pas que votre article soit juste, car il inflige la même peine à la force et à l’adresse. La force peut occasionner de très grands malheurs et je ne l’emploierai que parce qu’il y aura résistance et choc des deux côtés ; mais si je n’emploie, pour entrer dans la prison, que l’adresse, qui ne peut nuire à personne, qui ne peut occasionner aucun meurtre, je ne suis pas aussi coupable que dans le premier cas. M. Fe Pelletier-Saint-Fargeau, rapporteur. Je propose de renvoyer ce dernier cas à la police correctionnelle. M. Prieur. C’est ce que j’ai voulu proposer. M. Fréteau-Saint-Just. Je ne suis pas du tout d’accord avec les deux préopinants. 11 me semble qu’un homme qui, par adresse, enlève un prisonnier d’Etat, doit être puni d’une manière plus grave que celui qui enlève un prisonnier accusé d’un crime ordinaire et qui ne va pas à la mort. Je crois donc qu’il faut réserver une peine plus grave pour le premier crime dont j’ai parlé. M. de Folle ville. En général, je trouve les peines infligées pour la violation des prisons beaucoup trop légères ; car les prisons sont véritablement les sauvegardes do la liberté. Ge n’est pas un paradoxe ; je ne le dis que d’après Jean-Jacques Rousseau, qui observe que l’inscription la plus vraie et la plus significative qu’on puisse mettre au-dessus des gênes et des prisons est le mot libertas. En effet, ce sont là les vrais attentats contre la liberté : toutes violations de prisons sont des crimes essentiellement dirigés contre la sûreté publique, contre la Constitution. En résumant ce que j’ai dit, je demanderais que la peine pour la violation de prisons commise par un seul individu fût au moins de deux années de gêne ; pour violation commise par attroupement en armes, de 6 années; et qu’enfiu on punît de mort ceux qui se permettraient d’attenter contre cette sauvegarde de la liberté. Voilà mon amendement sur les articles. M. Fréteau-Saint-Just. 11 faut renvoyer cette discussion à la séance de demain, car if y a une nuance qui n’a encore frappé personne et qui est de la plus grande importance. Si l’attroupement est un peu considérable et que, sous prétexte de délivrer un prisonnier auquel je m’intéresse, j’ai effectivement ouvert la porte à un grand nombre de prisonniers, certainement mon délit prend, aux yeux de la loi, un caractère bien autrement important que si je n’eusse enlevé qu’un simple particulier. Je demande donc le renvoi à demain. (Assentiment.) (L’Assemblée décrète le renvoi de la discussion à la séance de demain.) M. le Président annonce l’ordre du jour de la séance de ce soir. La séance est levée à trois heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. TREILHARD, EX-PRÉSIDENT. Séance du jeudi 16 juin 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures du soir. Un de MM. les secrélaires fait lecture des adresses suivantes ; Adresse de l'assemblée primaire du canton ae Dammartin , département de Seine-et-Marne, formée pour l’élection de ceux qui doivent nommer les députés à la prochaine législature. Cette adresse est ainsi conçue : « Messieurs, « La Constitution a commencé le bonheur de la France, c’est à elle de l’achever. Il ne peut (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.