[Assemblée nationale.] M. PIntevflle de Cernon. Votre comité de Constitution m’a chargé de vous exposer que ta ville de Saint-Denis et le Bourgla-Reine, qui dans l’organisation du département de Paris ne sont que des districts purement administratifs, réclament cependant chacun un tribunal, en s’autorisant du décret qui porte qu’ilen sera placé un dans chaque district, sans prononcer d’exception pour le departement de Paris ; le comité a regardé cette pétition comme contraire à l’esprit du décret sur l’organisation particulière du département de Paris ; cependant, pour concilier autant que possible tous ces intérêts, le comité pense qu’il conviendrait de former à chaque tribunal un arrondissement de section et de municipalité. M. Robespierre. Rien ne s’oppose à la pétition de la ville de Saint-Denis et du Bourg-la-Rnine, elle est autorisée par le décret du 6 août, qui dit qu’il y aura un tribunal dans chaque district, et par celui du 25 sur l’organisation judiciaire du département de Paris, qui ne fait nulle exception à son égard. M. Camus. 11 faut considérer principalement la population et la contribution dans la division des tribunaux de Paris; l’avis des députés du département est que la division en cantons doit être maintenue quant à présent. Je propose, en conséquence, de décréter que le territoire des tribunaux de Paris restera déterminé, quant à présent, suivant ces cantons, sauf au département à faire une nouvelle division des cantons, s’il y a lieu. (Cet amendement est adopté.) M. Voidel propose de placer un des six tribunaux de district à Saint-Denis. M. Pinteville de Cernon, rapporteur . Les amendements présentés, et qui paraissent avoir l’assentiment de l’Assemblée, changent absolument le fond du projet de décret qui ne peut se concilier avec le vote émis; je demande donc que les députés de Paris se rendent ce soir au comité de Constitution pour fixer les arrondissements et les limites des tribunaux. (Cette proposition est adoptée.) M. le Président. L’ordre du jour est un rapport des comités de la marine et des finances concernant les fonds et la comptabilité de lai marine pi). M. de Cnrt, membre du comité de la marine, rapporteur. Messieurs, vous avez renvoyé, le 27 juillet dernier, à vos comités des finances et de la marine, la demande faite par le ministre de ce dernier département, d’un fonds extraordinaire de 7,162,000 livres; quelques difficultés, qui méritaient des éclaircissements non équivoques, ont retardé, jusqu’à ce jour, le rapport que vous aviez ordonné sur cette affaire importante. Vos comités, Messieurs, s’étaient proposé deux questions : Pourquoi le ministre de la marine s’était-il d’abord adressé à celui des finances pour demander un fonds extraordinaire? Sur quels motifs de dépenses réclamait-il ensuite, de l’Assemblée nationale, ce fonds extrait) Le Moniteur se borne à. reproduire le dispositif de ce rapport. [1er septembre 1790.] 4g7 ordinaire refusé par le premier ministre des finances ? Voici, Messieurs, comment s’explique la conduite du ministre de la marine. Dès le commencement de 1789, M. Necker, cherchant à réduire les dépenses au niveau de la recette , avait proposé au conseil du roi de fixer les dépenses de la marine et des colonies à la somme de 40,500,000 livres; mais comme il était plus facile de proposer un plan d’économie, que de l’exécuter fapidement dans un département surtout qui ordonne dans les quatre parties du monde, il fut arrêté, entre les deux ministres, qu’il serait fait annuellement un fonds extraordinaire pour subvenir aux besoins qui excéderaient les 40,500,000 livres, jusqu’au moment heureux où des économies réelles auraient rendu cette somme suffisante. Les fonds extraordinaires, faits en 1789, s’élevèrent à la somme de 8,687,186 livres, mais ceux de 1790, furent réduits, dès le mois de janvier, à 7 millions ; et les deux ministres convinrent entre eux que cette somme, réunie aux 40,500,000 livres de dépenses ordinaires, serait payée à raison d’un douzième par mois, sous la déduction préalable de 1,234,000 livres pour valeur du papier-monnaie, remis en circulation aux îles de France et de Bourbon, et dont le remboursement esta la charge du département des finances. Restait donc 46,266,000 livres, dont le douzième, montant à 3,855,500 livres, a été exactement payé de mois en mois, jusqu’au 1er juillet dernier inclusivement. A celte époque, le premier ministre des finances, considérant que la dépense de la marine n’avait été portée, dans le compte qu’il vous a rendu, qu’à la somme de 40,500,000 livres, a cru de son devoir, non seulement de suspendre la continuation du payement de 7 millions d’extraordinaire, mais encore d’imputer ce qu’il en avait déjà payé dans les six premiers mois de 1790, surles fonds ordinaires qui restentàpayer pour les six derniers mois du même exercice; de manière qu’au lieu de 23,133,000 livres, réclamés par la marine, la finance ne veut donner que 16,103,000 livres. Vous voyez, Messieurs, par ces détails puisés dans la correspondance des deux ministres, que celui de la marine, en s’adressant aux finances, réclamait l’exécution d’une espèce de traité fait dès le commencement de l’année ; et que celui des finances, en refusant d’y souscrire, cédait à la nécessité de se faire autoriser par un de vos décrets. Dans cet état de choses, le ministre de la marine est venu solliciter ce décret par la lettre du 27 juillet dernier : c’est ici que se place naturellement la question importante des motifs sur lesquels il se fonde pour conserver les fonds extraordinaires dont la finance vient de refuser le payement. H serait difficile, Messieurs, de vous satisfaire pleinement sur cet objet, et j’avoue moi-même que je n’ai jamais entrevu la possibilité de fixer invariablement les dépenses de la marine. Ceux qui connaissent les événements de la mer, tes inconvénients des relâches, les approvisionnements inattendus dans les ports étrangers, ou dans nos possessions des deux Indes, sentiront aisément cette vérité fâcheuse. Mais, s’il n’existe pas de moyen d’apprécier d’avance, avec justesse, ce que la marine doit coûter dans chacune de ses parties, vous pouvez du moins forcer l’exactitude la plus scrupuleuse dans l’emploi des fonds et la reddition descomples, ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 468 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [1er septembre 1790.] par la responsabilité sur toute espèce de dépense. Quoi qu’il en soit, Messieurs, le ministre de la marine demande de conserver 7,162,855 livres pour les dépenses extraordinaires de 1790. Il observe d’abord que plusieurs articles appartiennent à l’ordinaire, et qu’ils n’en ont été distraits que par l’impossibilité de les remplir sur les 40,500,000 livres. Passant ensuite au détail de toutes ces dépenses, il divise en deux parties l’aperçu qu’il en donne. La première concerne la marine, la seconde les colonies. 11 convient d’adopter cette division pour répandre plus de clarté sur le compte que j’ai l’honneur de vous rendre. MARINE. Pour deux frégates en station dans les mers d’Asie, attendues en janvier dernier, et dont le retour, ayant été retardé, a été calculé pour le mois de juillet, ci ........... . .. . 300,000 1. Pour l’armement extraordinaire de frégates envoyées dans les mers du Levant, à cause de la guerre entre les empires d’Allemagne, de Russie et de la Porte, ci .......... 658,548 Pour supplément de la dépense des canonniers-matelots, réduite en 1789, au-dessous de ce qu’elle coûte, ci .............................. 350,000 Pour complément de 900 pièces d’artillerie, nécessaires à l’armement de l’armée navale, ci ....... 700,000 Pour approvisionnement de munitions navales dans les arsenaux, ci. , 1 , 000 , 000 Pour intérêts de 2,800,000 livres, empruntés sous le ministère de M. de Sartine, ci ................. 140,000 Pour la construction faite à Toulon, d’une tartane napolitaine, destinée au transport des bois d’Albanie, et de deux flûtes à Bayonne, ci. 383,000 Pour les travaux les plus pressés à faire au château de Brest, ci. . . . 148,000 Pour la négociation faite avec la régence d’Alger, ci .............. 1,800,000 Total des fonds extraordinaires pour ce qui concerne la partie de la marine ....................... 5,479,548 1. colonies. Le ministre observe, à ce chapitre, que les dépenses des colonies, qui s’élevaient, en 1788, à 13,866,614 livres, furent réduites, en 1789, d’après le plau d’économie projeté entre lui et le ministre des finances, à 10,500,000 livres. Cette réduction était motivée : 1° Par l’évacuation des forces militaires des comptoirs de l’Inde ; 2° La réforme du régiment de l’île de Bourbon, dont l’incorporation ne devrait se faire que successivement dans les régiments de Pondichéry et de Plie de France ; 3° La suppression absolue des dépenses du Sénégal, mises à la charge d’une compagnie qui avait obtenu le commerce exclusif de cette rivière. Mais comme ces réductions ne pouvaient s’opérer qu’au bout de dix-huit mois, il fut fait, en 1789, un fonds extraordinaire de 3,366,614, liv.; et c’est pour remplir les six premiers mois de cette année, que le ministre demande une somme de ..................... 1,683,307 1. Il résulte, Messieurs, de ce projet de dépense pour 1790, que l’extraordinaire de la marine et des colonies exige une somme de ......... . .................. 7,162,855 Quoique vos comités, Messieurs, ne puissent rien préjuger sur l’exactitude de ce projet de dépenses, ils sont d’avis néanmoins que vous devez en faire continuer le payement; et voici les raisons sur lesquelles ils se fondent. Ce n’est point un projet de dépenses pour l’avenir qui vous est proposé; ce sont des dépenses convenues, dès le mois de janvier dernier, et qui se trouvent faites ou ordonnées : il faut donc les payer. Chaque jour augmente la nécessité d’en faire les fonds, pour acquitter les lettres de change qui arrivent des deux Indes. Le moindre retard occasionnerait un discrédit funeste à la chose publique et pourrait suspendre le service, dans le moment où son activité est devenue de la plus grande importance. Mais en vous invitant, Messieurs, à décréter que la finance continuera à fournir le fonds extraordinaire, réclamé par la marine, ainsi qu’il a été payé jusqu’au premier juillet, vos comités ont pensé qu’il serait utile d’assurer l’emploi légitime de tous les fonds qui lui sont accordés et de vous faire connaître, à chaque mois, la situation exacte de la caisse de ce département. Vos comités, Messieurs, regardent aussi comme un point important, la reddition des comptes de la marine, depuis le dernier apurement, jusqu’à l’époque du 1er janvier 1790: ils tiennent d’autant plus à la célérité de cette opération, qu’ils ont remarqué, en examinant les états qui leur ont été soumis, que sur les 40,000,000 livres de fonds ordinaires, accordés pour cette année, 16,200,000 liv. appartiennent à l’acquittement de l’ordinaire de 1789 : de manière qu’au dernier décembre prochain, vous n’aurez payé réellement que 24,300,000 liv. sur l’ordinaire de 1790. On ne peut imputer au ministre de la marine cet enchevêtrement d’exercice. La faute vient de loin, et c’est à vous de mettre un terme à tous les inconvénients qui ont si fort embrouillé la comptabilité de la marine. Il ne me sera pas impossible, Messieurs, lorsqu’il en sera temps, de vous en indiquer les moyens. Quelque expérience dans l’administration, un désir sincère du bien public, m’ont appris qu’il suffit d’une volonté déterminée pour réduire les abus à ce point inperceptible sur lequel la vigilance de la loi commence à perdre son action ; c’est tout ce qu’on peut espérer dans les institutions humaines. En attendant que vous puissiez vous occuper de cette partie essentielle de la dépense publique, je dois soumettre à votre examen le projet de décret que vos comités de la marine et des finances m’ont chargé de vous présenter. PROJET DE DÉCRET. « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport fait au nom de ses comités de la marine et des finances, a décrété et décrète : « Art. l8r. A compter du 1er septembre présent mois, le ministre de la marine sera tenu de rendre compte, mois par mois, des dépenses faites dans les ports et arsenaux, de manière qu’il n’y ait jamais qu’un mois d’arriéré.