604 [Assemblée nationale.] « Nul autre motif ne l’a conduit; mais votre aveuglement lui a fait repousser la main protectrice qu’il vous tendait, il va bientôt produire la destruction de l’Empire français. (Rires.) « Croyez-moi, Messieurs, le s princes de l’Europe reconnaissent qu'ils sont, ainsi que leurs peuples , menacés par le monstre que vous avez enfanté. Ils sont armés pour le combattre, et bientôt notre malheureuse patrie (car je lui donne encore ce nom) n’offrira plus qu’une scène de dévastation et d’horreur. Je connais mieux que personne les moyens de défense que vous avez à opposer, ils sont nuis. (Rires.) Il n’e:-t plus temps de vous abuser, il ne l’est peut-être plus de désil 1er les yeux du peuple que vous avez criminellement trompé et dont vous serez justement et sévèrement punis. Voire châtiment servira d’exemple mémorable à la postérité, qui vous reprochera éternellement d’avoir assassiné votre patrie, dont vous pouviez prolonger la durée pendant des siècles, dont vous pouviez assurer et embellir la destinée. « C’est ainsi que doit vous parler un homme qui n’a rien à craindre de vous ; auquel vous aviez d’abord inspiré de la pitié, et qui n’a plus, pour vous et pour le peuple antropophage que vous avez enivré de crime, que du mépris, de l’indignation et de l'horreur. >< Au surplus, n’accusez personne de complot et de la conspiration prétendue contre ce que vous appelez la nation et contre votre infernale Constitution. J’ai tout arrangé, tout réglé, tout ordonné; le roi lui-même n’a pas fait les ordres, c’est moi seul. Ceux qui ont dû les exécuter n’ont éié instruits qu’au moment où ils ne pouvaient y désobéir. C’est contre moi seul que doit être dirigée votre fureur sanguinaire (Rires.), que vous devez aiguiser vos poignards et préparer vos poisons. J’ai voulu sauver ma patrie, j’ai voulu sauver le roi, sa famille: voilà mon crime. Vous répondrez de leurs jours, je ne dis pas à moi, mais à tous les rois; et je vous annonce que si on leur ôte un cheveu de la tête, avant peu il ne restera pas pierre sur pierre à Paris. (Rires.) Je connais les chemins, j’y conduirai les armées étrangères, et vous-mêmes en serez responsables sur vos têtes. Cette lettre n’est que l’avant-coureur du manifeste des souverains de l’Europe qui vous instruiront, avec des caractères plus prononcés, de ce que vous avez à faire ou de ce que vous avez à craindre. « Adieu, Messieurs (Murmures ei rires.), je finis sans compliments, mes sentiments vous sont assez connus. « Signé : Marquis de Bouillé. » M. Lanjuinals. Je demande le renvoi au comité des recherches, pour découvrir l’attentat commis contre la nation. M. Prieur. Monsieur le Président, mettez aux voix qu’il a manqué son coup. . M. Caoupilleau. L’adresse du paquet est-elle timbrée de Luxembourg? Car je ne puis supposer que ce soit M. de Bouillé qui ait écrit cela. Je crois que cela a été fait en France. Un membre: Il y a des pièces de M. de Bouillé au comité des recherches; on peut vérifier sa sa signature. M. de Nouilles. C’est sa signature. [30 juin 1191.] M. Rœderer. L’ordre du jour ! Il ne faut pas faire l’honneur à cette lettre de la renvoyer au comité; nous ne pouvons pas faire à cette lettre l’honneur d’un décret, sinon pour passer à l’ordre du jour. (L’Assemblée décrète qu’elle passe à l’ordre du jour.) L’ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret sur les places de guerre et postes militaires (1). M. Bureaux de Pusy, rapporteur. Avant de commencer la discussion* du titre II auquel nous sommes arrivés, je demanderais à l’Assemblée de vouloir bien autoriser une modification à l’article 5 du titre Ier, adopté dans la séance du 24 mai dernier. Je propose de rédiger comme suit cet article : Art. 5. « Les places de guerre et postes militaires seront considérés sous 3 rapports, savoir : dans l'état de paix , dans l'état de guerre et dans l'état de siège. » Ce changement est nécessité par les modifications qu’a éprouvées le projet de décret dans la délibération. (L’Assemblée adopte le nouvel article 5 du titre Ier, et décrète que l’article sera inséré dans ces termes dans le procès-verbal du 24 mai.) M. Bureaux de Pusy soumet à la discussion le litre II du projet de décret. Les articles suivants sont mis aux voix : Titre IL Suppression des états-majors des places , et retraites accordées à ceux qui les composent. Art. 1er. « Tous les emplois d’officiers d’état-major de places do guerre, citadelles, châteaux et autres postes militaires ou villes de l’intérieur, de quelque grade que soient ces officiers, et sous quelque dénomination qu’ils existent, et toutes leurs fonctions en cette qualité, seront et demeureront supprimés, à dater du premier de la présente année. » (Adopté.) Art. 2. « Sont également supprimés et compris dans les dispositions du présent décret, les lieutenants de roi militaires des bailliages. » (Adopté.) Un membre propose d’insérer dans le procès-verbal la disposition suivante : « Les lieutenants de roi de bailliages ne pourront obtenir de traitement de retraite à raison des intérêts de la finance des offices de lieutenant de roi des bailliages dont ils auraient été pourvus. » (L’Assemblée accueille cette demande, et ordonne qu’il en sera fait mention dans le procès-verbal, pour ne laisser aucun doute sur l’intention dans laquelle elle a été décrétée.) Art. 3. « Il sera accordé auxdits officiers des retraites dont la valeur sera déterminée, tant en conséquence du traitement dont ils jouissent que de ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (1) Voy. ci-dessus, séance du 27 juin 1791, page 549.