34 2 {Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. {23 juillet 1790,] palais. Je ne veux pas accuser cette classe d’hommes que je suis accoutumé à estimer; mais je peins les hommes comme ils sont. Je sais que le pauvre n’est pas repoussé par l’avocat célèbre ; mais les moments de ces messieurs sont si bien comptés, qu’il est rare que le pauvre puisse aller jusqu’à l’homme humain, qui l’écouterait. On vous a dit que, dans les petites villes, la prévention est extrêmement facile, que l’opinion y est moins éclairée. Je répondrai sèchement que la prévention est là où l’enthousiasme peut naître, et qu’il ne peut naître que là où il y a de la foule. On vous a dit que tous ces tribunaux, qui s’occuperaient des appels, seraient une source abondante de cassation. Je ne sais sur quel calcul cette objection est établie. Il me semble qu’il y aura toujours le même nombre de jugements infirmés ou confirmés : ainsi le nombre des tribunaux ne multiplie pas celui des cassations. On vous a dit que les citoyens seraient jugés par des juges qu’ils n’auraient pas choisis. Je vous prie de vous rappeler qu’il n’est pas dit dans vos décrets que les juges seraient choisis par le peuple du district, mais par le peuple. Je crois que l’électeur qui nommera dans un département, nommera au nom du peuple français; et votre principe consiste à avoir des juges nommés par le peuple. Il est si vrai que cette observation est uste, que vous décréterez que les juges seront es juges du domicile du défendeur, en matière personnelle, et, en matière réelle, ceux du lieu de l’immeuble, qui fera l’objet de la contestation ; et je m’atfache à ceci. Il arrivera souvent, en matière réelle, que le demandeur et le défendeur n’auront pas leur domicile dans le lieu de l’immeuble, et assurément ils n’auront pas influé sur l’élection des juges. 11 me reste de cette considération que les juges, élus par district ou par département, seront b s juges de la masse du peuple, et que le décret sera exécuté. Dans mon système, le peuple choisira plus réellement ses juges, puisque c’est d’après ces motifs particuliers de confiance qu’on s’adressera à tel tribunal. Je crois que, par ces considérations, je mets de côté le reproche de m’être écarté de la Constitution. Il me reste à m’occuper des moyens d’économie. Dans le plan du comité, il y aura 1,494 juges de district, 498 officiers du ministère public; pour 21 cours supérieures, 168 juges et 21 officiers du ministère public. Je suppose que le traitement de chaque officier du tribunal de district sera de 2r000 livres, cela fait deux millions 988 mille livres et 996 mille livres pour le ministère public; restent les cours supérieures. Le préopinant a dit qu’il fallait payer ces juges avec munificence; qu’ils auraient un territoire étendu ; qu’un homme ne se déplacerait pas, s’il ne trouvait de véritables avantages : le comité proposerait, sans doute, de leur donner trois fois plus qu’aux juges inférieurs ; je ne fais que doubler, ce qui me donne pour les juges des cours supérieures 672,000 livres, pour les officiers du ministère public 84,000 livres ; le total des premières dépenses du pian du comité est de 4,740,000 livres. J’aurai plusieurs objets à y ajouter dans mon plan ; j’ai un juge de plus par tribunal de district; ce qui me fait 2,480 juges à deux mille livres, et une dépense de 4,960,000 livres : elle excède celle du comité de 200,000 livres. Si mon plan est plus avantageux, ce u’est pas une telle somme qui doit arrêter l’Assemblée Dationalede France; mais j’observe qu’il faudra, pourles21 cours supérieures, des bâtiments d’un certain luxe, et que cette dépense sera très considérable; ensuite l’entretien de ces bâtiments, et l’on sait que l’entretien des bâtiments publics est énorme. Je pourrais ajouter encore les frais communs qui se fout dans tous les tribunaux. J’observerai aussi que votre comité ne propose que huit juges par cour supérieure : j’assure que, si une fois vous décrétez ces établissements, il sera aisé de vous prouver qu’elles ne doivent pas être de huit, mais de deux et de trente officiers; voilà quels sont mes calculs; l’excédent de 200,000 livres me semble compensé. Mon projet n’est donc pas plus cher que celui du comité. (Une très grande partie de l’Assemblée applaudit.) (On demande à aller aux voix.) M. de FollevIUe. M. Chabroud ayant donné de grands développements à son plan, “il est naturel que le comité jouisse du même avantage. Une partie de l’Assemblée propose de continuer la discussion à demain. On délibère sur cette proposition. — Une première épreuve est douteuse, une seconde est pour la négative. La discussion est fermée à une grande majorité. La priorité est accordée à la proposition de M. Chabroud. (On demande à proposer des amendements.) M. Chabroud. Je demande la permission d’observer qu’il s’agit uniquement d’arrêter le principe, qui n’est pas susceptible d’amendements ; ils ne peuvent porter que sur les détails qui seront réservés. Le principe est mis aux voix, et décrété en ces termes, à une très grande majorité : « L'Assemblée nationale décrète que les juges de district seront juges d’appel Jes uns à l’égard des autres, suivant les rapports qui seront déterminés ci-après. » M. le Président annonce que les douze membres qui, avec la députation du Cantal, assisteront aux obsèques des deux fédérés noyés dans la Seine, sont : MM. Anthoine. de Talaruc, évêque de Goutances. Melon, député de la Corrèze. l’abbé Bourdon. Gérard. Papin, curé de Mari y. de Broglie. Etienne Chevalier. Stanislas de Clermont-Tonnerre. Cbambors. de Bonnal, évêque de Clermont. Laurendeau. La séance esl levée à 4 heures.