[États gén. 1789. Cahiers. ’J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Ville de Valenciennes.] 99 Lu et approuvé au conseil particulier de ce jour, 9 avril 1789. Signé WaroQUET. CAHIER. Des remontrances plaintes et doléances des habitants de la commune de Valenciennes (1). Liste des commissaires qui ont été nommés pour la rédaction de ce cahier dans l’assemblée générale de la commune de Valenciennes du 7 avril 1780. MM. Moreau père , avocat. Delangle, curé et doyen do Saint-Jacques. Perdrix l’aîné, avocat. Pourtalés, négociant. Nicodème, id. Bar lier, id. Bornicîie, id. j Perdrix cadet, avocat. Prouveur de Pont, conseiller pensionnaire de la ville de Valenciennes. Castillon père, négociant. Grenet , avocat. Jamart, directeur général des domaines du Roi. Le comte d’Espiennes. Le Hardi, chevalier, seigneur de la Loge. Hallemant, curé de Saint-Nicolas. Motel, négociant. Mustellier , doyen des chapitres de Saint-Géry. Discours de MM. les commissaires. « Messieurs, « Les commissaires que vous avez honorés de votre confiance, pour rédiger le cahier des plaintes, remontrances et doléances de la commune de cette ville, vont mettre sous vos yeux le résultat de leur travail. « Pénétrés de l’importance de leur mission, et jaloux de justifier l’honneur de votre choix, ils n’ont rien négligé pour exprimer vos vœux, avec tout le zèle que vous attendiez d’eux. En se livrant à ce travail, Messieurs, ils se sont infiniment élevés au-dessus de toutes considérations personnelles ; ils n’ont vu que vos désirs, vos droits, vos intérêts, et les ont soutenus avec la chaleur et la fermeté qui convenaient à l’importance de l’objet. « Ils présument trop bien de leurs concitoyens pour craindre que ceux dont les intérêts particuliers se trouveraient choqués par quelques-unes des demandes contenus dans ce cahier, puissent leur supposer d’autres vues que le bien général. « S’il se trouvait pourtant quelques personnes qui méconnussent à ce point le devoir du citoyen et l’amour de la patrie , la peine que vos commissaires en ressentiraient se trouverait bientôt effacée par le glorieux avantage d’avoir mérité l’assentiment public et l’approbation générale, récompense à laquelle on ne peut rien comparer. » CAHIER. Les habitants de la commune de Valenciennes supplient très-humblement Sa Majesté d’agréer les assurances respectueuses de leur amour, de leur vive fidélité et de la reconnaissance que (I) Nous publions ce cahier d’après uu manuscrit des Archives de l’Empire. leur inspirent les bontés de leur souverain, qui, en convoquant 1a-nation, leur permet d’envoyer dans son assemblée deux députés pour porter au pied du trône les vœux et plaintes de la commune. Elle ne peut en cette circonstance donner une preuve plus sensible de son attachement à la patrie, qu’en formant ie vœu de voir toujours régner sur la monarchie l’auguste maison de Bourbon et que les vues paternelles d’un roi bon et bienfaisant se trouvent encore longtemps secondées par les efforts et les lumières d’un ministre dont les talents supérieurs et l’austère probité ont captivé l’estime et la confiance des Français , ainsi que l’admiration de l’Europe entière. Valenciennes étant un comté distinct et séparé de celui de Hainaut, les trois ordres se trouvent confondus dans son administration : les habitants de cette commune, pour exposer leurs plaintes et doléances, ont cru devoir adopter un ordre et une division qui leur ont paru sympathiser mieux avec le régime qui jusqu’à ce moment a gouverné cette ville Ce cahier sera donc divisé en deux. La première partie sera divisée en huit sections. La première section traitera des Etats généraux. La seconde des Etats provinciaux. La troisième, de l’administration. La quatrième, du clergé. La cinquième, de la justice. La sixième, de la police. La septième, des finances. La huitième, du commerce en général. La seconde partie recevra trois subdivisions. L’une, relative à l’administration de la ville de Valenciennes. La seconde, à la gestion de ses finances. La troisième comprendrais objets qui intéressent son commerce particulier. PREMIÈRE PARTIE. SECTION PREMIÈRE. Des Etats généraux. (Les articles compris dans cette section ont été séparés en trois classes différentes.) On a rangé dans la première les demandes concernant l’assemblée nationale et son organisation. Dans la seconde, les dispositions provisoires. Et dans la troisième, les notions tendant à établir des lois qui seront réputées fondamentales et autres dispositions permanentes. 1° De l’assemblée nationale et de sa formation. Art. 1er. MM. les députés présenteront leurs cahiers dans la même forme que les deux premiers ordres, et veilleront avec attention et fermeté à ce que l’ordre du tiers reçoive de la part des autres ordres les égards qu’il a droit d’en attendre. Art. ?.. Ils soutiendront sans pouvoir s’en écarter que les voix doivent être comptées par tête et non par ordre. Art. 3. Ils demanderont qu’aucun membre des Etats ne puisse être inquiété ni recherché, pour ce qu’il aura dit ou soutenu dans les Etats généraux. Art. 4. Que les Etats généraux organisent leur constitution de manière que les choix soient libres et que le tiers se trouve toujours en nombre égal à celui des deux autres ordres. °Art. 5. Qu’ils ne puissent établir aucune commis 100 [Étals gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Ville de Valenciennes.] sion intermédiaire pour être en activité après leur tenue. Art. 6. Que le retour périodique des Etats généraux soit fixé. 2° Dispositions provisoires. Art. 7. Quelque grands et importants que soient les objets qui vont fixer l’attention des Etats généraux, ils ne doivent point négliger les besoins du moment, ni surtout les dispositions qui seraient jugées nécessaires pour repousser les attaques des ennemis de l’Etat, toujours attentifs à profiter de nos embarras et des occasions d’accroître leur puissance ; il sera donc demandé que les Etats généraux déterminent provisoirement un emprunt ou un impôt qui sera levé en cas d’une guerre inattendue et inévitable, lequel impôt cessera avec la guerre ou lorsque les Etats généraux y auront pourvu autrement, bien entendu qu’il sera justifié à l’assemblée de la nation de l’emploi des deniers et de leur exacte application. Art. 8. Qu’il n’y ait d’impôt légal que celui consenti dans l’assemblée de la nation, et que tous les impôts soien tk terme, lequel terme n’excédera jamais l’époque de la tenue suivante des Etats généraux. Art. 9. Que les doléances locales et qui ne comportent pas en elles un intérêt général, soient renvoyées aux administrations particulières. 3° Des lois qui seront réputées fondamentales et autres dispositions permanentes. Art. 10. Les députés demanderont que les Etats généraux statuent sur le cas d’une régence et qu’ils décident à qui elle doit appartenir. Art. 11. Que les lois ne puissent être faites ni sanctionnées que dans l’assemblée générale de la nation. Art. 12. Que la dette publique soit constatée et consolidée. Art. 13. Que les transactions et conventions générales du commerce national qui se feront avec les puissances étrangères soient communiquées aux Etats généraux lors de leur assemblée et pendant leurs vacances aux chambres du commerce pour donner leur avis. SECTION II. Etats provinciaux. Art. 1er. Que les Etats provinciaux seront organisés de la même façon que les Etats généraux et toujours dans la même proportion relative au nombre des représentants des trois ordres. Art. 2. Que les règlements généraux relatifs à la police seront faits par les administrations des provinces. SECTION III. De l’administration. Cette section a paru devoir être présentée sous quatre subdivisions qui sont : 1° De l’administration en général; 2° De la puissance royale et des droits de la nation ; 3° Des impôts, améliorations, réformes, économies; . 4° De l’administration intérieure des provinces. 1° De l’administration en général. Art. 1er. MM. les députés insisteront pour que MM. les ministres soient comptables de leurs actions et de leur gestion envers les .Etats généraux. Cette forme ne peut qu’ajouter à la gloire d’un administrateur dont la conduite intègre et éclairée doit mériter l’approbation publique. Art. 2. Ils demanderont et insisteront fortement sur la suppression des intendants de province, en attribuant aux juges ordinaires les parties contentieuses dont ils connaissent, et aux commandants pour le Roi leurs fonctions relatives au militaire. Art. 3. Pour le rétablissement des communes dans le droit naturel de gérer leurs affaires sans aucune entrave. Art. 4. Pour que l’on ne permette plus à l’avenir l’exportation des grains à l’étranger, qu’après avoir pourvu suffisamment à la subsistance des peuples, auquel effet les administrateurs de province s’occuperont d’établir des magasins. Ils veilleront aussi à ce que les matières de première nécessité ne s’exportent des provinces qu’autant qu’il y aura abondance. Art. 5. Pour le reculement des barrières à l’extrême frontière du royaume. Art. 6. Pour que la maréchaussée soit augmentée à cause de la sûreté publique. Art. 7. Abrogation des lieux de franchise privilégiés dans toute l’étendue du royaume ; ces retraites, qui ne servent souvent qu’à mettre un débiteur de mauvaise foi à l’abri des poursuites d’un créancier légitime, ne doivent plus être tolérées. Art. 8. Que les frais de garnison, tels que logements, chauffage et autres émoluments, soient à la charge de tout le royaume, conséquence de l’impôt général et légal. Il en doit être de même de l’entretien des citadelles et fortifications. 2° De lapuissance royale et des droits de la nation. Art. 9. Les députés demanderont la liberté individuelle de chaque sujet et la suppression entière et absolue des lettres de cachet. Art. 10. Que le secret de la poste soit inviola-blement gardé, et qu’il soit défendu de retenir ou d’ouvrir les lettres qui y seront mises. Art. 11. Que tout citoyen puisse voyager par tout le royaume, en sortir, y entrer librement sans être obligé de prendre aucun passe-port. Art. 12. Que ceux qui jugent à propos de se servir de voitures de louage ne soient plus forcés de prendre des permis dans les bureaux des messageries royales. Art. Il Tout droit de propriété sera respecté ; nul ne pourra en être privé, même à raison de l’utilité publique, qu’il n’en soit dédommagé au plus haut prix et sans délai. Art. 14. Demander la suppression de la régie des biens des religionnaires fugitifs, et que lesdits biens soient restitués aux familles protestantes, auxquelles ils appartiennent, sauf dans le cas où les ayants droit n’habiteraient pas dansle royaume, à les obliger de mettre lesdits biens hors de leurs mains, dans l’année de leur rentrée en possession. Art. 15. Que les places, charges et bénéfices qui n’ont point été fondés spécialement pour la noblesse, soient conférés indistinctement aux nobles et aux roturiers, et qu’il y en ait toujours la moitié de conférés au tiers-état. 3 0 Des impôts , améliorations, réformes et économies. Art. 16. Que les Etats généraux recherchent le moyen de mettre une taxe sur Je luxe ; elle aura le double avantage de mettre un frein à cette passion déraisonnable, ou de la faire tourner au moins [États gén. 1789. Cahiers.] au soulagement de l’Etat en la rendant productive. Art. 17. Suppression des grand s gouvernemen ts, et que Sa Majesté soit suppliée d’employer moins d’officiers en temps de paix. Art. 18. Que Sa Majesté sera encore suppliée de supprimer les capitaineries et réserves de chasse, dans toute l’étendue du royaume. Art. 1 9. Les députés demanderont la suppression des loteries. Art. 20. Celle du mont-de-piété, et la vente de leurs fonds pour en employer le produit à l’acquit de la dette nationale, en prenant cependant les précautions nécessaires pour suppléer à ces établissements d’une manière moins onéreuse pour les infortunés qui sont dans le cas d’y avoir recours. Art. 21. Insister fortement sur la révision, par les Etats généraux, des échanges et aliénations de domaine faits depuis le règne de Louis XIV, notamment de celle qui a eu pour objet l’échange du comté de Sancerre, dans laquelle se trouve comprise la forêt de Valenciennes, divisée en trois cantons appelés le Bois-le-Prince, le bois de Fresnes et celui des Rouges-Carrières. Demander que cette carrière soit remise provisoirement entre les mains du Roi, attendu la lésion considérable que Sa Majesté a éprouvée dans ce marché, lequel, au surplus, n’est point encore consommé, au moyen de l’opposition formée à l’enrégistrement de lettres patentes, par M. le procureur général de la chambre des comptes. Art. 22. Réforme dans les états-majors des places et villes du royaume. De V administration intérieure des provinces. Art. 23. Publication par la voie des affiches faite annuellement dans chaque province, de la demande à elles respectivement faite, des impôts ; ces mêmes affiches feront connaître la répartition que les administrations desdites provinces en auront faite sur leurs villes, bourgs et villages. Art. 24- Les communautés seront autorisées à racheter sur untaux commun, établi d’après le pro-duitdesdixdernièresannées,lesdroitsdetraversse, vinages, pontenages, péages et tout autre de semblable nature, ainsi que tous les droits seigneuriaux personnels dus sans relation directe au fond. Art. 25. On ne pourra faire aucun dérodements sans le consentement des administrations des provinces. Art. 26. Demander au Roi la paisson dans les bois et taillis défensables. Art. 27. Que le droit de triage, accordé aux seigneurs dans les communes, soit restreint, la portion du tiers paraissant trop forte eu égard à la population actuelle des campagnes. Art. 28. Que la largeur des chemins qui pourront être plantés soit fixée ainsi que la distance que l’on doit laisser d’un arbre à un autre. Art. 29. Que toutes tes fermes soient réduites à trois charrues, excepté pour le propriétaire. - Art. 30. Que les biens possédés ci-devant par des abbayes situées dans les pays bas autrichiens, et supprimés par l’Empereur, soient réunis au domaine, de la couronne, et aliénés, pour employer leur produit à l’acquittement des dettes de l’Etai; demander surtout que l’administration particulière soit autorisée à se faire rendre compte par qui il appartiendra de la gestion et recette desdits biens, et de l’emploi des deniers qui en sont provenus jusqu’à ce jour. Art. 31. Que les administrations des lieux où il existe des corporations soient autorisées à les réu-[Ville de Valenciennes.] 1Q1 nir ou à les diviser selon leur plus grand avantage . Art. 32. Qu’il ne soit plus créé d’offices dans les corporations, et qu’elles soient autorisées à racheter ces offices sur le pied, de leurs finances, lorsqu’ils deviendront vacants. Art. 33. Que les corporations soient obligées de faire des fonds d’amortissement pour la liquidation de leurs dettes. Art. 34. Demander la liberté du commerce et suppression du retrait de marchand à marchand, à quelque titre qu’il puisse être exigé. ; -Art. 35. Qu’il soit avisé au moyen de perfectionner l’éducation. Art. 36. Que les études de droit soient rectifiées et qu’il soit observé la plus grande rigueur dans les examens. Art. 37. Que toutes les maisons de force ou prisons soient surveillées par les juges des lieux . SECTION IV. Du clergé. Cette section a reçu deux subdivisions : La première traite des matières ecclésiastiques. La seconde, des bénéfices. 1° Matières ecclésiastiques. Art. 1er. Permettre aux gens de mainmorte d’acquérir des rentes sur particuliers et de bâtir sur leurs fonds sans payer de droits d’amortissement ; leur permettre aussi d’aliéner sans prendre des lettres d’octroi. Art. 2. Suppression des annates. Art. 3. Que les commendes dans les provinces soient abolies et que les maisons religieuses ne soient plus chargées d’autres pensions que de celles qui seront nécessaires et contourneront aux œuvres pies. Art. 4. Que les portions congrues des curés et vicaires et les maisons pastorales et vicariales soient à la charge des décimateurs. Art. 5. Que les réparations et réédifications des églises, chœurs et sacristies soient à la charge des dîmes et biens des'collateurs et décimateurs, les fabriques préalablement épuisées. Art. 6. Concours pour les bénéfices à charge d’âmes dans tout le royaume, et que les bénéfices ne soient accordés qu’aux prêtres des diocèses dans lesquels les titres des bénéfices existent. Art. 7. Qu’il soit établi un concours entre les gradués exclusivement pour les bénéfices à charge d’âme, vacants dans les mois de grade. Art. 8. Que l’université de Douai jouisse du privilège de nommer ses gradués, comme les autres universités du royaume. 2° Des bénéficiers. Art. 9. Que les archevêques, évêques et généralement tous les bénéficiers soient tenus de résider dans leur diocèse et bénéfice, conformément au concile de Trente. Art. 10. Qu’il ne soit permis à aucun ecclésiastique de posséder plusieurs bénéfices, et que chaque bénéficier soit obligé de déclarer dans un mois le choix qu’il en aura fait. Art 11. Que le nombre des bénéfices dans chaque diocèse, les noms et résidence des titulaires, les dates des collations soient affichés aux archevêchés et évêchés, et lesdits bénéfices impétra-bles dans le cas où le titulaire en posséderait deux. Art. 12. Que les curés ne puissent desservir à ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 102 [Etats gen. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Ville de Valenciennes.' la fois deux paroisses ou églises succursales, le binage étant contraire à la décence et à la dignité qui convient aux fonctions ecclésiastiques. section v. De la justice. Cette section contient quatre subdivisions : La première relative aux lois. La seconde, aux tribunaux et juges. La troisième, à la procédure civile. La quatrième, aux crimes et délits. 1° Des lois. Art. 1er. Que les lois civiles et criminelles soient rectiliées. Art. 2. Que toutes les lois fiscales soient supprimées et qu’on y substitue un code si clair et si précis, qu’il ne puisse être éludé. Art 3. Qu’aucune lettre ministérielle ne puisse jamais suffire pour déroger aux ordonnances ou les interpréter. Art. 4. Que les lois relatives aux revendications et droit de suite dans le commerce soient uniformes par tout le royaume. Art. 5. Que les lois et règlements quelconques qui décerneront des peines, les précisent, et que les juges ne puissent s’en écarter. Art. 6. Que les articles des lois, coutumes ou autres qui peuvent s’éluder par d’autres lois et articles, soient abrogés. Art. 7. Que la représentation ait lieu partout en ligne directe à l’infini et en ligne collatérale jusqu’aux cousins issus de germain inclusivement. Art. 8. Que les lois qui accordent quelque pré-ciputmx enfants d’un même mariage, soient abrogées pour les successions des roturiers. Art. 9. Que l’âge pour jouiret aliéner et tester soit fixé pour tout le royaume. Art. 10. Que les personnes à marier ou veuves sans enfants puissent disposer de leurs biens immeubles par testament. Art. il. Qu’il soit accordé un droit de légitime sur les biens de toute espèce à tout enfant et que la hauteur en soit déterminée. 2° Des tribunaux et des juges. Art. 12. Qu’il n’y ait plus à l’avenir et dans tous les cas que deux degrés de juridiction et que les cours souveraines ne puissent connaître d’aucune cause en première instance. Art. 13. Que tous les juges de première instance connaissent de toutes matières réelles, personnelles et mixtes, et que l’usage des révisions ou propositions d’erreur, soit aboli. Art. 14. Que, lorsque les forces de l’Etat le permettront, il soit pourvu au remboursement des offices de judicature, et que ce remboursement se fasse graduellement lors de la vacance des offices et sur pied des évaluations faites en 1771. Art. 15. Que, pour les tribunaux royaux de première instance, les avocats exerçant leur profession dans ces tribunaux, choisissent parmi eux trois sujets qui seront présentés à Sa Majesté, pour choisir l’un d’eux. Art. 16. Qu’à cet effet, il soit fixé la quantité de places qui seront dans les tribunaux d’appel, à la présentation de chaque tribunal inférieur, et que cela soit aussi déterminé d’après la population et l’étendue des lieux soumis à la juridiction de ces sièges inférieurs. Art. 17. Que cependant, et, en attendant la suppression de la vénalité des offices de judicature, il ne soit plus accordé aucune dispense d’âge ou d’incompatibilité pour les exercer, et que personne ne puisse plus remplir deux offices incompatibles. Art. 18. Qu’on ne puisse être pourvu d’office de juge avant l’âge de vingt-sept ans accomplis, et qu’après avoir prouvé qu’on a exercé pendant cinq ans consécutifs la profession d’avocat. Art. 19. Que les seigneurs ne puissent nommer pour juges que des gradués du ressort ayant exercé cinq ans la profession d’avocat. Art._20. Que les juges des seigneurs puissent instruire et juger les causes civiles dans les lieux de leur résidence, pourvu qu’ils demeurent dans la ville la plus prochaine des seigneuries. Art. 21. Qu’il soit établi un procureur du Roi dans toutes les juridictions consulaires à l’instar de la conservation de Lyon. Art. 22. Que la connaissance des faillites et banqueroutes soit donnée irrévocablement aux juridictions consulaires. Art. 23. Que les juridictions consulaires aient la connaissance des billets à ordre entre toutes personnes. Art. 24. Qu’à la réserve des juges et consuls des marchands, les tribunaux d’exception soient supprimés avec réunion de leurs juridictions con-tentieuses aux tribunaux ordinaires, et de leurs administrations à celles des provinces ; que cependant les offices supprimés soient remboursés sur pied de l’évaluation de 1771. 3° De la procédure civile. Art. 25. Que les juges royaux de première instance puissent juger en dernier ressort, jusqu’à 300 livres de France en capital et 15 livres de rente, et toutes les matières d’injures. Art. 26. Que les appels ne puissent être reçus qu’en donnant caution suffisante, tant pour le principal que pour les dépens; que cependant les pauvres soient dispensés de ce cautionnement moyennant un avis des jurisconsultes préposés dans chaque ville par l’ordre des avocats y résidant, pour consulter sur les demandes et procédures desdits pauvres et pour les défendre. Art. 27. Que toutes les causes au-dessous de 200 livres tournois soient jugées sommairement à l’audience, sans être tenu de se servir du ministère d’avocats ou procureurs, et sans épices, soit pour la partie publique, soit pour les juges. Art. 28. Qu’il n’y ait de préférence entre les jugements que celle de la priorité de date. Art. 29. Qu’il soit fait un tarif uniforme pour les frais de procédure. Art. 30. Que les seuls juges présents soient payés à raison du temps qu’ils emploiront, et jamais à l’importance du sujet. Art. 31. Que toutes attributions, évocations, committimus ou arrêts de défense, soient abrogés. 4° Des crimes et délits. Art. 32. Qu’il soit pris de nouvelles précautions contre les faillites ét banqueroutes, et qu’il soit veillé à ce que les peines, mieux proportionnées, qui seront prononcées à cet égard ne soient point illusoires. Art. 33. Que les affaires des insolvables soient examinées sans frais par les parties publiques, qui devront poursuivre la punition des banqueroutiers. Art. 34. Que quand il apparaîtra des fraudes ou des dépenses exorbitantes et peu proportionnées à l’état des personnes, les débiteurs seront 103 [Etats gén. 1789. Cahiers.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Ville de Valenciennes.) déclarés ne pouvoir plus faire le commerce directement et notés d’infamie. Art. 35. Qu’après le jugement qui ordonnera le récolement et la confrontation, les procédures criminelles seront communiquées aux accusés, et qu’il leur sera donné un conseil, à leur choix, aux dépens provisoires du propriétaire de la juridiction. Art. 36. Que l’usage de la sellette soit aboli. Art. 37. Que les prévôts des maréchaux de France ne puissent plus qu’informer et décréter, et qu’ils soient tenus de renvoyer ensuite l’accusé, avec les pièces de procédures, aux juges royaux. Art. 38. Que les peines soient proportionnées au délit. Art. 39. Que les peines corporelles soient uniformes, sans distinction de rang ni de condition. Art. 40. Que les bannissements soient convertis en réclusion dans des maisons où le travail des condamnés puisse contourner aux besoius de l’Etat. Art. 41. Que la torture n’ait plus lieu dans aucun cas. SECTION VI. De la police. Art. 1er. Que tes juges veilleront à ce qu’il ne soit perçu aucun impôt que ceux consentis parla nation aux Etats généraux. Art. 2. Que tous ceux qui voudront faire le commerce de grains seront tenus de se faire enregistrer au greffe des juridictions royales de leur résidence, en indiquant les lieux de leurs magasins, sous peine de confiscation, au profit des pauvres, des grains qui se trouveraient déposés ailleurs. Art. 3. Qu’il ne sera plus accordé de lettres de répit ni arrêts de surséance qu’aux débiteurs en état de donner caution à l’apaisement des créanciers. Art. 4. Que l’exécution des lois pour la chasse, sera exactement surveillée, et qu’il sera pris les précautions nécessaires pour empêcher la trop grande abondance de gibier ; que les lois relatives aux colombiers et volets à pigeons seront exécutées. Art. 5. Que toute visite domiciliaire sous prétexte de présomption de fraude, sera supprimée. Art. 6. Que les portes des villes de guerre resteront toujours ouvertes en temps de paix. Art. 7. Que les armes des sentinelles ne seront pas chargées en temps de paix pour éviter les accidents. Art. 8. Que la liberté de la presse sera accordée sous les modifications qui seront arrêtées par les Etats généraux. SECTION VII. Des finanees. Art. 1er. Que les impositions soient simplifiées et rendues uniformes par tout le royaume. Art. 2. Qu’elles soient divisées également et par proportion géométrique. Art. 3. Que toute exemption pécuniaire d’impôts ou d’octrois, à quel titre et pour quelque cause que ce soit, demeure supprimée. Art. 4. Que les octrois des villes soient supprimés. Art. 5. Que le montant des impositions soit versé directement dans la caisse royale. Art. 6. Suppression des receveurs généraux des finances et fermiers généraux et des employés intermédiaires. Art. 7. Que le compte des finances de l’Etat sera chaque année rendu public par la voie de l’impression, et qu’il en sera de même pour ceux des Etats provinciaux. Art. 8. Qu’aucun emprunt ne puisse ôfre fait qu’en assurant les moyens de le rembourser et le terme de remboursement. Art. 9. Que tout impôt personnel soit assis et acquitté au lieu du domicile. Art. 10. Que les dépenses de construction et entretien des canaux soient supportés par tout le royaume. Art. 11. Que le droit de traverse, vinage, pon-tenage, péages et tous les autres de semblable nature, levés au profit de Sa Majesté, soient supprimés. SECTION VIII. Du commerce. Art. 1er. Que les poids et mesures du commerce soient uniformes par tout le royaume. Art. 2. Que le bureau des députés du commerce ne pourra présenter aucune délibération au conseil royal, sans avoir préalablement l’avis des chambres de commerce que la question intéresse. Art. 3. Que tous privilèges exclusifs seront supprimés à moins qu’ils ne soient le prix d’une découverte confiée sous le secret au gouvernement. Art. 4. Que les échéances des lettres de change et billets à ordre seront uniformes, et qu’on ne jouira d’aucun jour de grâce. Art. 5. Qu’il soit accordé la liberté indéfinie de faire revenir sans droits les marchandises nationales expédiées en pays étrangers. Art. 6. Que toutes matières premières puissent entrer librement et sans droits dans le royaume. Art. 7. Que tout droit perçu sur les marchandises de fabrique nationale soit restitué lors de l’exportation à l’étranger. SECONDE PARTIE. SECTION PREMIÈRE. Administration de la ville de Valenciennes. Art. 1er. Que la commune rentre dans le droit d’administrer seule et librement ses affaires. Art. 2. Diviser la ville en vingt-cinq quartiers, dont les habitants bourgeois payant les impositions, mariés ou âgés de vingt-cinq ans, choisiront dans leur quartier respectif huit représentants, soit ecclésiastiques, nobles ou roturiers, lesquels représentants formeront seuls le grand conseil d’administration et notamment les prévôts, jurés, échevins, à charge de choisir sept gradués en droit, et que la nomination sera approuvée par Sa Majesté. Que lesdits prévôts, jurés et échevins soient renouvelés par tiers chaque année, de manière qu’au troisième renouvellement le prévôt soit aussi changé. Art. 3. Personne ne pourra être du grand conseil en vertu de ses charges et offices. Art. 4. Que tous les ans cinq quartiers renouvellent alternativement leurs représentants, de sorte qu’en cinq ans tout le grand conseil sera renouvelé. Art. 5. Qu’il soit cependant libre à chaque quartier de continuer ses représentants oü quelques-uns d’eux. Art. 6. Que les prévôts, jurés, échevins, juges des administrations, ne puissent être du grand ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Ville de Valenciennes.] 104 [États gén. 1789. Cahiers.] conseil, ni d’aucun corps d’administration, tant qu’ils seront dudit Etat. Art. 7. Le grand conseil sera présidé par le corps du magistrat. Art. 8. Qu’il n’y aura d’autres fonctions que de maintenir la police sans aucune voix ni influence dans l’assemblée , sauf qu’au cas de partage d’opinion, ledit corps aura une voix pour départager. Art. 9. Que le grand conseil puisse seul délibérer des affaires majeures telles qu’emprunts, constructions dont la dépense excéderait 3,000 li-livres, démolition de monuments publics, aliénations et de toutes dépenses excédant ladite somme. Art. 10. Il nommera les commissaires aux travaux, logements, agents, receveurs et autres dont les charges n’ont pas été créées en titre d’office et fixera leurs gages et émoluments. Art. 11. Le grand conseil choisira parmi ses membres trente personnes qui composeront le conseil particulier et géreront toutes les affaires non réservées au grand conseil. Art. 12. Le conseil particulier choisira quinze personnes qui procéderont sans frais à la répartition des impositions. Art. 13. Que le grand conseil s’assemble tous les ans pour renouveler le tiers du conseil particulier et choisisse par la voie du scrutin neuf représentants tirés de son corps, à l’effet d’ouïr les comptes de la ville, les clore et arrêter, le tout gratuitement. Art. 14. Les représentants ne pourront être pris parmi ceux qui étaient du conseil particulier ou chargés de commission pendant l’année dont le compte sera rendu. Art. 15. Que le trésorier formera tous les mois un bordereau de recette et dépense, sous le contrôle de deux commissaires du conseil particulier, lequel bordereau sera remis au greffe du grand conseil, libre à tous les membres d’en prendre communication, ainsi que des comptes. Art. 16. Que le magistrat convoquera les assemblées du grand conseil et conseil particulier. Art. 17. Qu'il sera tenu d’assembler le grand conseil quand il en sera requis par le conseil particulier, et d’assembler le conseil particulier quand il en sera requis par six membres de ce dernier corps. Art. 18. L’officier du bureau du magistrat qui sera choisi par le grand conseil pour tenir la correspondance, pourra aussi requérir la convocation du conseil particulier. Art. 19. Que si, contre le vœu et le droit de la commune de Valenciennes, sa constitution ne pouvait être ainsi régénérée, elle vote son union aux Etats du Hainaut et leur organisation conforme à celle des autres Etats du royaume. Art. 20. Qu’en conséquence les Etats du Hainaut tels qu’ils existent actuellement étant inconstitutionnels, soient regardés comme non avenus, ainsi que les charges, nominations et fixations de gages et émoluments par eux faits. Intérêts communs généraux. Art. 21. Que les biens du collège que les Jésuites desservaient en cette ville' et l’administration desdits biens, soient remis à la commune, suivant le traité fait avec eux lors de leur admission en date des 17 avril et 19 octobre 1592. Art. 22. Que ces revenus soient employés à l’enseignement, même des arts libéraux. Art. 23. La liberté de la navigation sur l’Escaut et suppression des corps des bateliers. Art. 24. Passage de la navigation dans la ville de Valenciennes. Art. 25. Que les rivières et canaux qui passent dans la ville ne soient plus curés aux frais des riverains, mais à ceux de la commune. SECTION II. Gestion des finances de la ville. Art. 1er. Qu’on accorde la suppression des droits imposés sur les charbons de terre venant de l’étranger. Art. 2. La suppression de l’impôt de 2 liards au pot de bière. Art. 3. Que les comptes de cette imposition, ainsi que ceux de celle de 25 sous tournois, mis sur partie des prairies des environs de cette ville pour le canal dit du Jarre, soient rendus tous les ans à l’administration de fa province, et ceux qui peuvent en avoir été rendus présentés à ladite administration pour y être révisés. Art. 4. Que les offices et droits de jurés brasseurs soient supprimés. Art. 5. Que s’il doit exister des octrois, que ceux perçus sur les vins et bières soient les mêmes dans toute la province. Art. 6. Que le droit exclusif de fournir des eaux-de-vie soit supprimé et qu’il soit libre à un chacun d’en faire venir. Art. 7. Qu’on supprime les charges et offices des mesureurs de grains, de bois, de charbon, de francs-poissonniers, de porte-sacs et autres semblables. Art. 8. Que dans tous les cas, les grains et autres denrées, entrent et sortent de la ville librement et sans frais. SECTION III. Commerce particulier de la ville. Art. 1er. Qu’on réunisse à la juridiction consulaire de Valenciennes le Gambrésis, Mortagne, Saint-Amand et dépendances, avec augmentation d’attributions. Art. 2. Qu’il soit accordé aux négociants de Valenciennes de concourir à la nomination du député du commerce de la province, cette ville supportant une partie du payement de ce député. Art. 3. Qu’il soit déclaré que les fabricants de toile, batiste et linon, ne pourront les faire que de la largeur et longueur qui sera réglée. Art. 4. Qu’on accorde aux juges-consuls la nomination des courtiers de toilettes. Les députés seront chargés en outre de réclamer particulièrement contre les arrêts des 17 août 1686 et 14 mars 1789, relatifs à l’administration des biens de la ville, rendus au conseil d’Etat sans avoir ouï parties compétentes; de représenter que ce dernier arrêt blesse' toutes les règles et droits de propriété, détruit absolument le reste d’administration laissée à la commune en son grand conseil, et rend les intendants de la province ou commissaires départis seuls maîtres et administrateurs des biens et affaires de ladite commune; et attendu que, suivant le règlement du 28 mars 16 15, le grand conseil doit être convoqué tous les trois mois, que ce terme est plus qu’écoulé depuis la dernière assemblée et qu’il est urgent de s’occuper des affaires confiées à son administration, Messieurs du magistrat sont priés par la commune d’assembler incessamment le grand conseil, et M. le prévôt Le Comte, spécialement chargé de veiller à l’exécution du règlement de 1615, est aussi prié d’y tenir la main, et dans le cas où, malgré la réquisition de cet officier, 105 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Ville de Valenciennes.] le grand conseil ne serait pas convoqué, les députés aux Etats généraux emporteront leurs plaintes à la nation assemblée, et demanderont la prompte convocation du grand conseil de cette ville. Ils seront encore chargés de requérir de l’assemblée des Etats généraux de n’admettre aucun autre cahier de doléances pour ladite ville, que le présent, et de rejeter sans lecture les cahiers qui pourraient être faits et envoyés à l’insu de la commune, ce qui pourrait présenter des contrastes et détruire le vœu de la majorité. Fait par nous, soussignés, commissaires dénommés par la commune dans son assemblée du 7 de ce mois, à Valenciennes, ce 12 d’avril 1789. Signé Moreau ; Lehardy de la Loge ; le comte d’Epiennes ; Prouveur de Pont ; Delangle, curé et doyen de Saint-Jacques!; Castillon; Perdrix; Pour-talés, A. -Grenet; E. Barrier; Borniche ; Jamart; Joseph Morel ; J. -T. Perdrix le cadet ; Nicodème ; Mustellier, doyen du chapitre de Saint-Géry et J.-J. Lallemand, curé de Saint-Nicolas. Prévôt, jurés et échevins certifions que le présent cahier a été lu, approuvé et arrêté par l’assemblée de la commune de la ville de Valenciennes, du 13 avril 1789, dont acte. Signé Pujol; Grendal fils ; Legros; Lelong de Meaulx ; Moreau de Bellainge ; Proveur ; Bouchelet de Planty; Lussigny ; G. Serret ; Renvorsé, et Denize. Nota. Les rédacteurs n’ont pas cru devoir insérer dans ce cahier les demandes et plaintes qui n’avaient pour but que les intérêts particuliers ; mais les députés à qui tous les cahiers seront remis en copie sous inventaire, auront soin de faire valoir ces demandes autant qu’elles pourront entrer dans les discussions dont on s’occupera aux Etats généraux. MÉMOIRE Ou cahier particulier de la communauté de Donnain. L’assemblée nationale, que Sa Majesté bienfaisante vient d’accorder à nos vœux, autorise Pierre-Joseph Le Roy, fermier, cultivateur du village de Donnain près Valenciennes, de mettre sous ses yeux les objets importants à sa commune; il a l’honneur de représenter très-humblement qu’il ne trouve pas les terres moins bien cultivées, les grains moins bons (en voulant tirer partie de tout), que dans les environs de Lille en Flandre. Plusieurs petits censiers font avec peu d’occupation un grand prolit de leurs terres ; les grosses fermes ne peuvent en faire autant. On se plaint dans les villages où il y a de grosses fermes qu’il se trouve trop de monde pour les occuper ; il prouvera le contraire, d’autant mieux qu’en remettant toutes les fermes à raison de 150 mencaudées chacune, au lieu de 1,050, qu’elles occupent maintenant, et qu’étant divisées à sept particuliers, elles donneront une double production de bestiaux, feront vivre le double d’ouvriers et produiront en même temps en grains et denrées de toute espèce un tiers de plus ; et comme on a grand besoin de bestiaux en France, où il se trouve trente chevaux dans une seule ferme, iL y en aura soixante lorsqu’elles seront divisées en sept particuliers, observant cependant qu’il est de toute nécessité de remettre des terres occupées par lesdits fermiers aux particuliers, pour leur facilité et la production de toutes espèces de bestiaux. Il se trouvera certainement des difficultés dans les paroisses sur ce qu’un particulier voudra avoir 10 mencaudées, tandis qu’il ne lui en sera dû que 5. L’autre petit fermier prétendra aussi être augmenté, et il est possible qu’il le soit; mais pour éviter toutes difficultés entre eux, il serait à propos d’avoir un inspecteur qui s’informerait de la paroisse, et dirigerait les terres aux fermiers et particuliers; au cas que les nouveaux fermiers manqueraient de maison, le propriétaire permettra qu’ils bâtissent sur les terres, et dans le cas où le fermier quitterait la ferme, le propriétaire le dédommagerait à sa sortie, par estimation juridique. Art. 1er. Qu’il soit permis à ceux qui n’ont point de prairies, de faire des vergers pour y promener leurs bestiaux. Art. 2. Tous les fermiers devront s’assembler pour labourer les terres des particuliers qui n’ont point de chevaux, en payant le prix qu’on devra fixer, et la terre taxée suivant les cordages. Art. 3. L’inspecteur veillera sur les terres des, particuliers, de même qù’à celles des censiers, pour voir si elles sont en bonne laboure, pour ne pas les laisser incultes comme on les voit aux particuliers, attendu qu’ils ne vont labourer celles de ces derniers qu’après avoir labouré les leurs, ou par des temps contraires, afin d’empêcher la production dont ils devraient jouir, ce qui fait que la dépouille d’une mencaudée ne leur produit qu’un louis au lieu de deux, et la terre se trouve gâtée de 10 écus. Art. 4. Que cet inspecteur soit préposé par Sa Majesté pour autant de villages qu’elle Je voudra; l’inspecteur serait chargé d’écouter les plaintes des fermiers et particuliers, apaiserait leurs querelles et ferait ensuite la visite des campagnes, granges et greniers ; il en résulterait que, d’après le rapport des inspecteurs de tout le royaume, on connaîtrait sa richesse en grains, fourrages, etc., et qu’on ne pourrait plus tromper le souverain, par des disettes inventées pour la facilité des monopoleurs. Art. 5. On pourrait partager les prairies selon les communautés, et mettre pour le bien de la commune des écluses aux rivières joignant certaines prairies, pour les inonder au besoin, attendu qu’une prairie inondée produit plus de foin que deux. Art. 6. Que pour les villages et campagnes susceptibles d'inondations comme terres, maisons et granges, on devra faire des enclos de terre pour contenir les eaux , afin qu’elles n’y séjournent pas, et mettre des écluses dans les canaux pour donner de l’eau à volonté. Art. 7. Qu’aucune prairie ne soit occupée par des étrangers, excepté celle qui leur appartiendrait. Art. 8. Que, pour la facilité de la subsistance des bestiaux, il soit permis aux particuliers de les mener dans les bois après cinq ans de taille, à continuer jusqu’à ce qu’ils soient retaillés. Art. 9. La terre étantl’unique objet qui produit la nourriture de l’homme, payera au Roi tout ce qui lui est dû par chaque communauté; pour lors il ne sera plus nécessaire d’entretenir des employés qui deviendront cultivateurs, et les anciens militaires seraient payés à raison de 20 sous par jour, pour veiller aux entrées et sorties des choses contraires aux intérêts de Sa Majesté. Art. 10. Qu’en cas qu’il y ait trop de blé en France, pour ne pas le laisser gâter, Sa Majesté pourrait en faire l’acquisition et le faire vendre, sans qu’aucun marchand du royaume puisse en procurer à l’étranger. Art. 11. Que c’est un grand abus que de passer des baux aux fermiers et particuliers, puisqu’on ne peut savoir à quel prix seront les denrées; on