[Assemblée nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [11 juillet 1791.] Art. 3. « Les commissaires de la trésorerie présenteront à l’Assemblée nationale un plan dont l’objet sera de mettre dans le payement des rentes viagères et perpétuelles, ainsi que des pensions, l’ordre et l’économie nécessaires, d’abréger les retards, de diminuer les frais des parties, d’exclure toute préférence et tout abritaire, et de procurer une entière sûreté au Trésor public. » M. le Président. J’ai reçu une lettre du directoire du département de Paris, relative à la translation des restes de Voltaire et qui est ainsi conçue : « Monsieur le Président, « La crainte que le mauvais temps ne troublât la marche du triomphe de Voltaire nous avait fait renvoyer à demain la cérémonie de la translation de ses restes; mais le temps devenant meilleur, le vœu général est que cette cérémonie ait lieu aujourd’hui. Le cortège partira de la Bastille à midi. « Nous sommes, etc.. . . « Signé : les membres du directoire du département de Paris. » M. de Montmorin, ministre des affaires étrangères, est introduit dans l’Assemblée. M. le Président. Monsieur, l'Assemblée a décrété que vous seriez invité à vous rendre dans son sein pour lui rendre compte des faits et des circonstances qui vous sont connus, relativement à la mission de M. Duveyrier auprès de M. deCondé(l). M. de Ulontmorin, ministre des affaires étrangères. M. le garde des sceaux, qui est en correspondance avec M. Duveyrier, comme l’ayant envoyé en mission, n’a pas eu de nouvelles de lui depuis une lettre du 23 du mois dernier : M. le garde des sceaux a rendu compte, dans le temps, de cette lettre à l’Assemblée. Depuis ce temps, ni le ministre de France à Goblentz, ni le ministre résident à Mayence, auquel nous avons écrit à ce sujet, ne nous ont fait parvenir de nouvelles; mais comme le bruit s’est répandu que M. Duveyrier était détenu, et partageant à cet égard la sollicitude de l’Assemblée, j’ai dépêche hier, à huit heures, un courrier à Mayence et à Goblentz avec ordre aux ministres, dans le cas où M. Duveyrier serait détenu, ce que j’ai peine à croire, de le réclamer avec la plus grande force et de représenter aux cours, près desquelles ils résident, que si on ne le remettait pas sur-le-champ eu liberté, une pareille violation du droit des gens serait regardée par la nation comme un acte d’hostilité et que l’Assemblée nationale se verrait forcée de prendre les mesures nécessaires pour se faire rendre justice de cet attentat. ( Applaudissements .) Je ne crois pas recevoir de réponse avant dix ou douze jours, attendu que j’ai ordonné au courrier de prendre la route qu’a prise M. Duveyrier. M. d'André. Nous nous étions retirés avec quelques membres du comité diplomatique dans un bureau voisin pour proposer précisément à l’Assemblée la mesure que M. le ministre des affaires étrangères a déjà prise et qu’il vient de (1) Voyez ci-dessus, page 115, la décision prise à ce sujet par l'Assemblée. m vous exposer ; nous demandons toutefois qu’il soit de plus expédié un courrier à Bruxelles, attendu que quelques nouvelles qui parviennent de cette ville semblent indiquer que M. Duveyrier aurait passé par le Luxembourg. M. de Montmorin, ministre des affaires étrangères. Je reçois des nouvelles de Bruxelles tous les jours, et il serait impossible, s’il était arrivé quelque chose dans cette ville ou dans le Brabant, que je n’en fusse pas instruit. Ce n’est qu’entre Mayence et Goblentz qu’il aurait pu arriver quelque chose à M. Duveyrier. M. d’André. Nous n’avons rien à ajouter à cela. (M. de Montmorin se retire.) La suite de la discussion du projet de décret sur l'organisation de la trésorerie nationale est reprise. M. Vernier, rapporteur , donne lecture des articles suivants gui sont successivement mis aux voix et adoptés : DE LA COMPTABILITÉ. Titre Ie'. De la comptabilité intérieure de la trésorerie nationale , de celle par année et de celle par exercice. Art. 1er. « La comptabilité de la trésorerie nationale sera de trois espèces. « La première, purement intérieure, ne s’étendra pas au delà des caisses du Trésor public; elle en présentera la situation par jour, par quinzaine, par mois et par année, avec distinction de ce qui appartiendra aux exercices antérieurs. Rien ne devant retarder les résultats de cette comptabilité, elle sera tenue à jour; et les bordereaux de la veille seront mis régulièrement, tous les matins, sous les yeux du comité de trésorerie. Art. 2. « Le bordereau de fin d’année de celte première comptabilité présentera le compte de toutes les recettes et dépenses faites par les caisses du Trésor public, depuis le 1er janvier jusqu’au dernier décembre de l’année expirée, avec distinction d’exercices ; il sera toujours formé pour le 10 janvier, au plus tard, de chaque année. Art. 3. « La seconde comptabilité embrassera toutes les caisses des receveurs de districts et des payeurs particuliers; elle présentera la totalité de ce qu’ils auront reçu ou dépensé par mois et par année, avec distinction d’exercices.Les états relatifs à cette comptabilité ne seront retardés qu’autant qu’il sera nécessaire pour le rassemblement et le dépouillement des bordereaux des comptables. Celui de fin d’année de cette seconde comptabilité présentera le tableau général de tout ce qui aura été reçu ou dépensé dans toute l’étendue du royaume par les caisses dépendant du Trésor public, depuis le 1er janvier jusqu’au dernier décembre de l’année expirée. Ce bordereau ou compte général sera formé et remis sous les yeux du comité de trésorerie, au plus tard, pour le 15 mars de chaque année. 122 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [H juillet 1791.] Art. 4. « Pour ne point retarder la présentation et l’arrêté des états de fin d’année, les envois de fonds faits aux payeurs particuliers de la marine établis dans les colonies, dans l’Inde et aux îles de France et de Bourbon, seront regardés provisoirement comme dépenses réelles, d’après les pièces qui établiront la réalité de l’envoi. Il en sera usé de même pour les opérations qui pourraient être faites hors du royaume, par les ministres de la guerre et de la marine. Art. 5. <. La première et la seconde espèce de comptabilité n’avant pour objet que de présenter la totalité des 'recettes et dépenses nationales faites depuis le 1er janvier jusqu’au dernier décembre de chaque année, il restera à classer ces mêmes recettes et dépenses pour chacun des exercices auxquels elles appartiennent, à quelque époque et pendant quelque année que ces recettes et dépenses aient été faites : ce sera l’objet d’une troisième comptabilité, qui sera définitive, et dont les opérations seront toujours faciles, au moyen des distinctions d’exercices faites dans les comptes par année. Art. 6. « La troisième comptabilité sera définitive : à cette comptabilité demeureront annexées les pièces justificatives de la dépense; et néanmoins le payeur principal, à mesure que les pièces et acquits lui sefoüt envoyés par les payeurs particuliers, en fera la vérification ; il les rapprochera des articles de dépense portés dans les bordereaux, et les classera dans l’ordre des chapitres du compte. Art. 7. « L’Assemblée nationale déterminera la forme et le mode de vérification des comptes définitifs et par exercices, le délai dans lequel ils seront rendus, et les dispositions qui seront faites pour les objets qui se trouveront encore en retard au moment de la reddition desdits comptes. Art. 8. « Les livres en parties doubles des payeurs principaux, dont la tenue a été ordonnée par l’ariicle 4 du titre II de la dépense, seront montés de manière à pouvoir présenter les comptes ouverts avec les différents comptables, par année, et avec “distinction d’exercices ; et lesdits payeurs fourniront au bureau central, dont il va être question dans le titre suivant, tous les résultats et éléments nécessaires pour satisfaire aux opérations dont il sera chargé. Titre II. Du bureau central pour la tenue des registres en parties doubles et pour la formation des bordereaux. Art. 1er. « En conformité de l’article 12 du décret du 10 mars 1791, il sera établi un bureau central de comptabilité, qui sera chargé de la formation de tous les bordereaux et comptes généraux, à l’exception de ceux de comptabilité définitive par exercices, dont l’Assemblée nationale s’est réservé de régler le mode par l’article 7 du titre précédent. Art. 2. « Il sera tenu dans ce bureau : « 1° Un journal à parties doubles, en tête duquel seront enregistrés les fonds et les effets du portefeuille, qui se trouveront dans la caisse générale le jour où les commissaires entreront en exercice, et dans lequel seront inscrites, jour par jour, toutes les recettes et dépenses des différentes caisses divisées par exercices ; « 2° Un grand livre à parties doubles, où seront rapportés à leurs comptes respectifs tous les articles du journal. Ce grand livre aura des comptes ouverts pour chaque section de la trésorerie, dans lesquels ils seront débités, jour par jour, des sommes qui leur seront versées en masse, et crédités dans le plus grand détail de leurs payements. « Il contiendra aussi deux comptes pour la caisse de l’extraordinaire ; l’un relatif aux sommes qu’elle pourra verser au Trésor national, comme secours, en exécution des décrets rendus par l’Assemblée nationale; l’autre relatif aux sommes que ladite caisse de l’extraordinaire sera tenue, aux termes des décrets, de remplacer au Trésor public. Ces livres seront à jour, au plus tard, le surlendemain des dernières recettes et dépenses ; « 3° Un registre qui présentera chaque jour la balance générale de toutes les opérations, et la situation du Trésor national ; « 4° Un grand livre auxiliaire, correspondant par des renvois avec le grand livre général, Il contiendra les divisions des comptes principaux qui en seront susceptibles. Art. 3. « Pour rétablissement des registres ci-dessus, il sera fourni par la caisse générale, par la caisse journalière des recettes, et par celles des payeurs des quatre départements, des feuilles journalières, qui présenteront en détail toutes leurs recettes et leurs dépenses. * « Ges feuilles certifiées seront remises chaque jour au bureau central avant 6 heures du soir, afin que la balance ou situation générale du Trésor public puisse être rédigée dans la même soirée. Art. 4. « Il sera tenu un registre intitulé Registre de prospectus, dans lequel seront inscrites toutes les dépenses à faire d’après les décrets de l’Assemblée nationale. Ce registre sera préparé tous les ans à l’avance pour l’année suivante, et à commencer de l’année 1792. Chaque département aura son compte ouvert, dans lequel il sera crédité des sommes qui lui seront assignées par les décrets de l’Assemblée nationale, et débité de celles qui lui seront versées, d’après les états généraux et particuliers de distribution, qui seront expédiés dans ce bureau, et arrêtés par les commissaires de la trésorerie. Art. 5. « Indépendamment des écritures prescrites ci-dessus, dont l’objet est d’établir l’ordre intérieur de la trésorerie nationale, et la situation de ses caisses, il sera tenu un second journal et grand livre à parties doubles, qui correspondra par des renvois au grand livre principal ; il contiendra les comptes sommaires des divers comptables. tant de Paris que des départements : ils y seront; débités des fonds qui leur seront versés et crédités de l’emploi qu’ils en auront fait. Art. 6. « Chaque année, le 15 mars au plus tard, il [Assemblée nationale*] ARCHIVES PARLEMENTAIRES» 1 11 juillet 1791.] sera remis aux commissaires de la trésorerie un résultat général de la comptabilité énoncée dans l’article précédent : tous les comptables de la trésorerie nationale ÿ seront compris en débit et en crédit en une seule ligne, et ces résultats généraux devront cadrer avec ceux obtenus en détail par les comptes ouverts et en parties doubles, établis, soit dans les bureaux de la recette, soit dans ceux des payeurs principaux ; ces mêmes résultats généraux Feront le contrôle et la sûreté de tout le Trésor public. Art. 7. « Il sera établi sur un registre un tableau général de comparaison, qui embrassera un intervalle de 10 années consécutives, sur lequel seront inscrites, à la fin de chacune, toutes les recettes et les dépenses par totaux, de manière qu’on puisse embrasser d’un même coup d’œil les variations qui pourront survenir dans les recettes comme dans les dépenses, et remonter aux causes qui les auront occasionnées. Pour la possibilité des comparaisons, les recettes et les dépenses de même nature seront classées sous les mêmes dénominations ; les commissaires de la trésorerie en présenteront incessamment les divisions qui seront décrétées par l’Assemblée nationale. Art. 8. « G’est dans le bureau central de comptabilité que se prépareront les calculs nécessaires pour les travaux du comité de trésorerie. Titre III. Des cautionnements. Art. 1er. « Il ne sera point fourni de cautionnement en argent, mais seulement en immeubles ou contrats, libres de toute hypothèque, et dont le capital sera évalué sur le pied du denier vingt du revenu. Art. 2. « Seront également admis pour cautionnements les effets publics au porteur portant intérêts, et le capital en sera également évalué sur le pied du denier vingt dü revenu. Lesdits effets seront déposés dans la caisse générale, et les coupons en seront détachés et remis aux comptables, aüx époques des payements. Art. 3. « Les cautionnements seront provisoirement fixés ainsi qu’il suit : « Pour le caissier général 500,000 livres. « Pour chacun des payeurs principaux 200,000 livres. » M. le Président fait donner lecture d’une lettre du ministre de l'intérieur, ainsi conçue : « Messieurs, « Les commissaires de la trésorerie nationale demandent à être autorisés provisoirement à faire remettre au commis de la recette générale de Lyon une somme de 127,026 livres 8 sols dont M. d’Ainval, ci-devant receveur général des finances de cette ville paraît être redevable. Ils sollicitent ce remboursement avec la plus vive instance. Je ne pense pas devoir l’ordonner, m qu’autant que l’Assemblée nationale m’y aura autorisé par un décret spécial. « Je vous prie en conséquence, Monsieur le Président, de vouloir bien mettre cet objet sous les yeux de l’Assemblée et me faire part de ses intentions à cet égard. « Je suis avec respect, etc... » Signé : DE LESSART. » (L’Assemblée ordonne le renvoi de cette lettre au comité des finances.) L’ordre du jour est un rapport du comité des monnaies relativement à la fabrication de menue monnaie d'argent. M. Bèlïals-Courménil, au nom du comité des monnaies. Messieurs, vous avez demandé à votre comité des monnaies un projet d’exécution ou de modification de votre décret dü 11 janvier, concernant une émission de menue monnaie; l’Assemblée parut désirer qu’il lui fût offert dès mardi, et je me présentai mardi au nom du comité, pour satisfaire son empressement; d’autres travaux ont éloigné celui-ci. Le décret dtl 1 1 janvier ordonne une fabrication de 15,000,000, en pièces de 30 et 15 sous au même titre que les écus. Le prix excessif des matières d’argent n’a pas permis de hâter l'exécution de cette loi, et lorsqu’il vous a été rendu compte de la suspension momentanée, vous ne l’avez pas désapprouvée ; vous avez senti combien il serait impolitique de livrer celte monnaie aux spéculations des fondeurs. Cependant le besoin d’une menue monnaie se fait sentir de plus en plus ; heureusement qu’il naît en grande partie de l’activité de nos manufactures, et cette circonstance est d’un heureux présage. Il est pressant, Messieurs, de satisfaire ce besoin, mais il faut le faire d’une manière durable; il faut fixer dans le royaume la monnaie que l’on fabriquera, il faut eu faire une pour nous et non pour nos voisins ou nos ennemis; enfin il faut déjouer, s’il est possible, les spéculations des fondeurs puisqu’au milieu de tant de vertus qui honorent aujourd’hui la France, elles subsistent malgré l’excès de leur immoralité. Cette vue a principalement fixé l’attention de votre comité, mais la crainte de retarder la fabrication lui a fait examiner d’abord s’il ne devait pas vous proposer, au moins provisoirement, une émission de pièces de 24, 12 et 6 sous, avec les anciennes empreintes. Cet examen était nécessaire ; car, pour les personnes qui ne se donnent pas la peine de réfléchir, ce projet a quelque chose de séduisant, et semble, au premier coup d’œil, devoir accélérer l’exécution de votre décret. Cependant il n'aurait pas même cet unique avantage, et il est susceptible de très grands inconvénients. D’abord, la fonte de ces nouvelles espèces est effrayante, et l’on doit s’y attendre, puisqu’elle offre un profit considérable et certain à la cupidité des fondeurs. Or, comment s'arrêter à un plan qui ne présente que l’efficacité trompeuse du moment, pour nous mieux faire sentir ensuite notre pénurie et nos besoins? En second lieu, répandre dans la circulation une quantité considérable de pièces neuves en concurrence avec des pièces dégradées qui, pourtant, servent journellement à nos échanges, ce serait paralyser la circulation, lorsque notre ob-