[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 décembre 1790.] ici qu’une seule objection: l’administration des ponts et < haussées n’avait pas la même étendue, n’était pas aussi compliquée qu’aujourd’hui. Je réponds que vous avez sagement réduit à un irès petit nombre de fonctions celles du ministère des finances; c’est au ministère de ce département à surveiller les travaux des ponts et chaussées. Un directeur général, étab i à la tète de cette administration, serait un ministre des ponts et chaussées, et je ne vois pas la nécessité de multiplier les ministres; le résultat de cette multiplication d’agents en chef et de surveillants serait d’affaiblir et de rendre illusoire la responsabilité. M. Lebrun, rapporteur. Le préopinant et ceux de son avis paraissent n’avoir pas compris l’objet du plan de votre comité. Il ne s’ag t pas de créer un ministre des ponts et chaussées; mais vous ne pouvez pas empêcher le roi, chef et surveillant de cette administration, d’établir un intermédiaire entre son ministre et les ponts et chaussées. M. Einmery. Je demande que l’Assemblée ajourne la question de la suppression de la place de directeur général des ponts et chaussées jusqu’au moment où elle s’occupera de i’orgauisatiun du ministère. (L’ajournement est prononcé.) M. Bureaux de Pusy. Le projet de décret qui vous est soumis au nom du comité des finance s a évidemment pour objet l’économie, l’harmonie et la perfection des travaux publics. Je pense qu’il est superflu d’insister sur lu nécessité de les coordonner et de les diriger de manière à ce que, procurant les avantages de l'agriculture et du commerce, ils puissent encore concourir à la défense de l’Eiat. De tous les objets d’industrie confiés à la surveillance du corps des ponts et chaussées, il n’en est piesque aucun qui, dans nos provinces frontières, ne puisse réunir ces différentes propriétés; mais, pour atteindre à ce point de periec-tion, il faut que les connaissances mercantiles et agricoles s’allient aux combinaisons militaires et s'entraident mutuellement. C’est faute de cet accord que l’on a vu se multiplier les exemples de tant ue projets connus et exécutés d’une manière si préjudiciable aux tinanees de l’Etat et à la défense de ses frontières, et qu’on les verrait se multiplier encore avec d’autant plus d’abondance et de danger que les moyens d’en arrêter l’abus seraient moins déterminés, moins précis, moins clairement indiques par l’Assemblée nationale. Au nombre des travaux publics les plus importants ou peut compter ceux des ports de mer. Tous les ports sont plus ou moins susceptibles d’être considérés comme postes militaires, et à ce titre le corps du génie pourrait réclamer la surveillance et la direction des travaux qui les concernent. Cependant il faut convenir qu’il en est beaucoup, tels que ceux de Rouen, d’Honfleur, de Nantes, de Bordeaux, où les dispositions militaires ne paraissent qu’eu seconde ligne et ne sont que des accessoires subordonnés aux vues commerciales; d’autres, au contraire, tels que ceux de Toulon, de Gherbuuig, de Dunkerque, compoitent au plus haut degré les préparatifs de la uefense et sont en quelque sorte des des du royaume : d’autres participent également de ces diliérentes propriétés. Or, comme l’artiste militaire auquel sont confiés 477 les travaux de la défense n'a pas d’autres procédés d’exécution, d’autres principes deco'Struction, que l’artiste civil, il peut remplir tes fonctions de ce dernier, et la proposition rétiproque n’existe pas; car la disposition générale de-forteresses, la combinaison, la relation, l’ensemble de leurs parties forment un art particulier entièrement distinct des conceptions de l’architecture civile. H suit de ces vérités incontestables que, dans les travaux dont il s’adt, l’artiste militaire peut toujours suppléer l’artiste civil, sans qu’il y ait réciprocité. Si ce raisonnement no mène pas à conclure que tous les ports devraient, ou du moins pourraient être confiés avec avantage au corps du génie, au moins en résulte-t-il qu’il serait utile et convenable de les distinguer en deux classes : l’une de ports militaires et l’autre de ports civils, et d’en couder les travaux au corps du génie ou à celui des ponts et chaussées, selon leur objet et selon que leur destination se rapporterait plus particulièrement à la guerre ou au commerce. Passant de l’examen des travaux des ports à la généralité des travaux publics qui s’exécutent dans les departements des frontières, j’observe que tous, sans exception, ont une relation inévitable avec les moyens défensifs militaires ; l’établissement d’uu canal, la construction ou l’emplacement d’un pont, le dessèchement d’un marais ou d’uu étang, le percement d’une forêt, la direction d’une route, tous ces moyens, dis-je, seront liés d’une manière plus ou moins immédiate au système défensif adopté pour la partie des frontières où ils s'exécutent; tous peuvent avoir une inlluence directe sur la valeur des forteresses qu’ils avoisinent ; il est donc raisonnable et nécessaire qu’ils ne puissent s’exécuter sans la participation et sans le concours de ceux auxquels la délense de l’Etat est plus immédiatement confiée. Je demanderai donc qu’il soit donné connaissance aux inspecteurs généraux et aux directeuis des fortifications des projets de travaux publics qui devront s’exécuter dans les départements où iis seront employés, afin qu’ils puissent en rendre compte au ministre de la guerre, lui faire connaître ce en quoi ils peuvent servir ou préjudicier à la défense de l’Eut, proposer les modifications capables de la concilier avec les besoins de l’agriculture et du commerce, et entiu qu’ils soient autorisés à vérifier si l’exécution est conforme aux projets convenus. Je demanderai de plus, et toujours par les mêmes motifs de convenance et d’utilité publique, que ceux de ces travaux qui ont la plus grande influence sur les moyens militaires, tels que les canaux et les redressements ou curements des rivières, soient toujours confiés au corps du génie. Les rapports de ces sortes d’ouvrages avec le système des forteresses sont de tous les jours, de tous les moments; et une chose qui paraîtra peut-être extraordinaire, mais qui n’en est pas moins véritable, c’est que dans les pays plats, tels que le département du Nord et 'une partie de celui du Pas-de-Calais, le système hydraulique est combiné avec tant de précision qu’on ne pourrait faire varier de six pouces, en plus ou en moins, les radiers des écluses ou des sas de tel canal, sans que ce léger changement n’in-fluâl, d’une manière essentielle, on sur la culture des terres, ou sur la navigation des canaux, ou sur la délense des places de guerre, qui rassemblent, ou dégorgent, ou paitagent les eaux du pays. Entin, j’ajouterai qu’il n’est aucun de ces ouvrages qui ne puisse remplir le but de la 478 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 décembre 1790.] défense directe, et qui, sans augmentation _ de dépenses, ne puisse être transformé en fortification effective. D’après ces réflexions, je propose les articles additionnels suivants, en forme (l’amendement au projet de décret du comité des finances : Art. 1er. Dans les départements des frontières, tous projets de routes, canaux, ponts, jetées, levées, ports et autres travaux public-, seront communiqués aux directeurs des fortifications desdits départements, pour en être par eux rendu compte aux inspecteurs généraux des fortifications, qui en donneront connaissance au ministre de la guerre, alin de pouvoir toujours concilier les intérêts dr l’agncuhurc et du commerce avec fa défense de i Etat ; et lesdits directeurs seront tenus de vérifier, dans l’étendue de leurs directions respectives, si les projets s’exécutent conformément aux plans arrêtés. Ait. 2. Dans les départements des frontières, les canaux de dessèchement, d’irriga ion ou de navigation, lis redressements et curements de rivières, seront exécutés sous la direction des officiers du corps du génie. Art. 3. Les ports du royaume seront divisés en deux classes : l’une des ports militaires et l’autre des ports de commerce. Les travaux de ceux de la première classe seront cou liés à la surveillance et à la direction des officiers du co�ps du génie; ceux de la st coude classe continueront d’ètre sous la direction des ingénieurs des ponts et chaussées, et l’Ascemblée nationale fixera les époques auxquelles les travaux commencés seront remis par ceux qui en sont actuellement chargés à ceux qui devront dorénavant les diriger. (Ces j roposilions sont renvoyées à l’examen des comités d’agriculture, de commerce et des finances.) Les articles 2, 3, 4 et 5 du projet de décret sont adoptés eians la forme suivante : Art. 2. « Il y aura un premier ingénieur garde des plans, projets et mouèl s; huit inspecteurs généraux ; un premier commis et le nombre de commis nécessaire. » (La première partie de cet article dans le projet imprimé, portant ces mots : qu'à la tôle sera un directeur général, a été ajournée.) Art. 3. <( L’assemblée des ponts et chaussées sera formée du premier ingénieur, de huit inspecteurs généraux, des ingénieurs en chef des departements et des sous -ingénieurs qui seront à Paris ; les sous-ingénieurs n’auront que voix consultative. » (Sur cet article, un membre avait demandé que fe nombre de huit inspecteurs lût réduit à quatre; mais la question préalable ayant été demandée et mise aux voix, il a été décidé qu’il n’y avait pas lieu à délibérer.) (ün a répété sur cet article l’ajournement prononcé sur ce qui pouvait a\oir rapport au directeur général dans le projet imprimé en tête de i’aiticie premier.) Art. 4. « Cette assemblée sera chargée de l’examen de tous les projets généraux de routes dans les différents départements, ainsiquede ceux d’ouvrages d’art en dépendant, de ceux des canaux de navigation, construction, entretiens et réparations des ports de commerce. » (Un membre a proposé quatre autres articles additionnels, dont il demandait !e renvoi aux comités des finances, d’agncuüure et de commerce, pour y être examinés. Cette proposition mise aux voix, l’Assemblée a décidé qu’il n’y avait pas lieu au renvoi.) Art. 5. « Cette assemblée, durant les sessions do Corps législatif, se tien ira sous les yeux du comité de l’Assemblée nationale, chargé des ponts et chaus-sées, lorsqu’il le jugera convenable ». Une députation de MM. les électeurs de Paris est annoncée et admise à la barre. M. liersaiul, président des électeurs. L’assemblée électorale nous dépuLe vers vous; elle voudrait se présenter tout entière : impatiente d’une démarche que lui commun iait de, mis longtemps son amour pour nos nouvelles lois, sa reconnaissance pour les régénérateurs de l’E npire, elle ne se la permet cependant qu après avoir accompli le plus pressant, le plus saint de ses devoirs : les lois ont des minisire-, l’innocence un appui, le peuple des magistrais; les juges composant les tribunaux du département de Paris sont élus. C’est après avoir répondu à ce premier de vos vœux, que l’Assemblée a pen-é que vous lui permettriez de vous exprimer le sien. Un de nos collègues va vous faire lecture de son adresse. M. Larivc, acteur du Théâtre-Français, orateur de la députation. Messieurs, en restituant au peuple 'français, dans leur intégrité primordiale», les titres originels qu’il avait perdus dans les siècles de l’ignorance, et qu’il a reconquis dans l’âge dos lumières, vous lui avez rendu le premier droit du souverain, celui d'élire les magistrats qui doivent le gouverner. Ces magistrats ne seront plus les mendiants de la fortune : ils seront les nobles concurrents de l’est. me ou les clients honorables de la renommée. Appelés par le peuple du département qui est le premier à recevoir, à écouler vos lois ; appelés pour choisir ceux qui doivent les détendre et les exécuter, nous nous {-réparions à remplir la mission électorale qui nous a élé confiée. Un decret, appuyé sur des convenmces trompeuses, divisa une assemblée qui, par sa nature, devait former un seul corps. L’esprit public s’alarma et travailla so idain à la réunir. Un nouveau décret, digue de votre sagesse, se bâta de rassembler les urnes éparses dans lesquelles l’intrigue espérait glissur son suffrage. Le jour de la réunion fut pour nous un jour de triomphe, et notre premier mouvement a été un vœu de reconnaissance pour les créateurs de la liberté française. Ce vœu sacré, ce vœu unanime, nous venons l’accomplir. Députés de l’assemblee électorale, représentants des assemblées primaires, nous venons jurer au nom du département de Paris, nous venons jurer, à l’exemple de la monarchie entière, que nous adhérons irrévocablement, que nous obéirons religieusement à l’immortelle Constitution, qui est le fondement inébianlable de noire liberté. Paris a fait connaître qu’il ne comptait pour rien la fortune, au prix de la liberté ; mais plus elle nous a coûté de sacrifices, et plus nous ché-