332 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 18 L’agent national du district de Dreux, département d’Eure-et-Loir, transmet à la Convention nationale le trait suivant : Le citoyen Lecoq, de la commune de Guainville, sentant le besoin que la République a de charretiers pour son artillerie, quitte ses foyers pour servir sa patrie dans cet emploi; il n’est pas fortuné, mais son bien, dit-il, est dans ses enfans qui servent la cause de la liberté. En partant il dit à sa femme : Je ne t’abandonne que pour te faire jouir en paix des bienfaits de la révolution que nos ennemis s’efforcent d’anéantir et pour participer aux triomphes de la République avec ceux à qui j’ai donné le jour. Mention honorable du trait de dévouement, insertion au bulletin et renvoi au comité d’instruction publique (1). 19 Au nom de la commission de l’examen des papiers des derniers conspirateurs, un membre [GUFFROY] annonce qu’on a trouvé, dans les papiers de Robespierre, plusieurs dons pour la patrie que ce tyran avoit dédaigné de présenter à la Convention (2). GUFFROY a dit : Citoiens, En examinant les papiers des conspirateurs nous avons trouvé parmi les papiers de Robespierre divers dons patriotiques très anciennement adressés et qu’il avait dédaigné de présenter à la Convention. Nous nous empressons de réparer cette injure faite au zèle de nos conci-toiens. Nous apportons sur le bureau 1° 3 assignats démonétisés, et qui probablement avoient une valeur lors de l’envoi; 2 sont de 500 livres, l’autre est de 300 livres; placés avec ceux dont je vais vous parler, aucun papier n’indique l’emploi auquel ils étoient destinés par le citoien qui les a envoiés. 2° Une lettre du 14 ventôse contient 3 assignats de 50 livres chacun. Le citoien qui adresse cette somme ne veut point être connu; il dit seulement qu’il conserve une lettre de la forme de celle qu’il (sic) contient les assignats. Voici cette lettre (3) : L’ami des sans-culottes à Robespierre l’aîné, député à la Convention nationale; s.L, 14 ventôse l’an 2 de la République une et indivisible Liberté, égalité fraternité ou la mort ! Représentant, C’est à toi que l’ami des sans-culottes s’adresse pour te prier de déposer sur le bureau de la Convention nationale les 3 assignats cy joints de 50 livres chacun; je les offre à la patrie que je ne cesserai d’aimer et de servir. Je voudrois que mes moyens me permissent davan-(1) P.-V., XLIV, 39. Reproduit au 5", 4 fructidor. (2) P.-V., XLIV, 39. (3) C 318, pl. 1291, p. 21. tage. C’est là mon seul regret. Puisse mon exemple trouver beaucoup d’imitateurs ! L’amour de la liberté et un désir sincère de voir assurer son triomphe, tels sont les sentiments qui m’animent et qui ne s’éteindront jamais si le moi survit à la dissolution de ses organes. S. et F. ! L’ami des sans-culottes. [Aoia] Je conserve un modèle exact de cette lettre afin d’être un jour en même (sic) de me faire connaître, si l’occasion peut se présenter (1). 3° Un autre assignat de 10 livres présente le don de la généreuse médiocrité; il n’en est que plus touchant, et cependant Robespierre l’avoit méprisé. Une 4e offrande civique et anonime (sic) se trouvoit aussi dans un petit morceau de papier. Ce sont 2 pièces d’or de la valeur de 24 livres que Pierre Collart, ouvrier imprimeur, natif de Bruxelles et françois d’origine, adressoit à la Convention (2). P.J. Collart à Robespierre; s.l.n.d. Je te prie de vouloir bien te charger d’offrir à la Convention nationale 2 louis que tu trouveras dans cette lettre, qui est le seul numéraire que je possédais, et de vouloir bien assurer la Montagne des sentimens de respect et de vénération que j’ai pour ses vertus. Pierre joseph COLLART (ouvrier imprimeur, natif de Bruxelles et français d’origine) (3). Dons négligés par Robespierre : Du mois d’août 13 feuilles ................ 13 liv. 14 journe(sic) 13 feuilles .................. 22 liv. du mois de septembre 16 feuilles .. 16 liv. 11 journe 16 feuilles .......................... 16 liv. 10 s. du mois d’octobre feuille .................. 28 liv. 5 journe ................................................ 7 liv. 10 s. du mois novembre 23 feuille ............ 23 liv. 9 journe ................................................ 13 liv. 10 s. du mois de décembre 20 .................. 20 liv. 10 journe .............................................. 15 liv. Du mois de janvier 1787 70 feuilles de paneaux à 6 s. faite.. 21 liv. Du même mois 7 journées à 1 liv. 10 faite ...................................................... 10 liv. 10 s. Du mois de février 20 feuilles de paneaux fait ........................................ 6 liv. Du même mois 2 journés .................. 30 liv. Du mois de mars 20 feuilles de paneaux ................................................ 6 liv. Du même 30 journées ........................ 45 liv. Du mois d’avril 20 feuilles .............. 6 liv. Du même 20 journées ........................ 30 liv. Du mois de mars 30 feuilles de paneaux ............................................... 9 liv. Du même 18 journées ........................ 27 liv. Du mois de juin pour 30 feuilles de coin ........................................................ 5 liv. Du même 21 journées ........................ 31 liv. 10 s. Du mois de juillet 2 journez et 2 ter 31 liv. 257 li-(l) C 318, pl. 1291, P. 22. vres. (4) (2) C 318, pl. 1291, p. 21. (3) C 318, pl. 1291, p. 20. (4) C 318, pl. 1291, p. 23. SÉANCE DU 4 FRUCTIDOR AN II (21 AOÛT 1794) - N° 20 333 La Convention s’empressera d’effacer le mépris et l’oubli despotique de Robespierre en ordonnant la mention honnorable au procès-verbal de l’offrande des anonimes, de celles de l’ami des sans-culottes, et de Pierre-Joseph Col-lart, ainsi que l’insertion des lettres et billet au bulletin. A. BENOIT GUFFROY (au nom de la commission de l’examen des papiers des derniers conspirateurs ) (1). [GUFFROY] propose de venger les citoyens qui les ont faits [les dons], en décrétant la mention honorable de l’offrande des anonymes, de celles de l’ami des sans-culottes et de Pierre-Joseph Collart, ainsi que l’insertion au bulletin. Décrété (2). 20 Sur le rapport de [LAKANAL, au nom de] son comité d’instruction publique, la Convention nationale rend le décret suivant : La Convention nationale, ouï le rapport de son comité d’instruction publique, décrète : ARTICLE Ier. En exécution du décret qui ouvre un concours pour la solution de diverses questions relatives au nouveau système horaire, il sera formé un jury composé de 7 membres et de 4 suppléans. ART. II. Les membres du jury sont Ferdinand Berthoud, Lagrange, Lepante l’oncle; Charles, physicien; Lépine, le jeune; Mathieu l’aîné. Les suppléans sont Mabile, Nuré, Laurent et Debelle. ART. III. Si un des membres du jury se présente au concours, il sera remplacé par un suppléant, suivant l’ordre du tableau. ART. IV. Le jury sera convoqué par le comité d’instruction publique. ART. V. Les séances du jury seront publiques. ART. VI. Ses opinions seront imprimées (3). LAKANAL, au nom du comité d’instruction publique : Citoyens, vous avez ouvert un concours pour déterminer l’organisation la plus simple, la plus solide et la moins dispendieuse à donner aux ouvrages d’horlogerie destinés à mesurer ensemble ou séparément les différentes parties du jour, d’après le nouveau système horaire. (1) C 318, pl. 1291, p. 21. (2) P.-V., XLIV, 40. Reproduit au Bin, 6 fruct. (suppl1); Moniteur (réimpr.), XXI, 559; Ann. R. F. , n° 263; J. Fr. , n° 697; Rép., n° 245; F. de la Républ., n°413; J. Perlet, n° 698; J. univ., n° 1 733; J. Mont., n° 114; J. S. -Culotte s , n° 554; J. Paris, n° 559; M.U., XLIII, 74. (3) P.-V., XLIV, 40-41. Minute signée de Lakanal. Décret n° 10 481. Reproduit au B‘n, 6 fruct. (suppl1). Il fallait, pour remplir vos vues, que les artistes qui voudraient concourir déterminassent le nombre le plus convenable de vibrations à faire battre au régulateur, pour imprimer au mouvement une marche uniforme et constante, et atténuer, autant qu’il est possible, les causes des vibrations. L’avancement des arts et l’esprit de vos décrets exigeaient encore que les concurrents cherchassent le moyen de ramener à la division décimale les anciennes montres, pendules et horloges. Il fallait donc que les artistes indiquassent le procédé le plus sûr et le moins coûteux pour leur faire marquer à la fois l’ancienne et la nouvelle division du jour, ou seulement la nouvelle. Un grand nombre de mémoires intéressants et d’ouvrages précieux d’horlogerie ont été offerts au concours. L’émulation a échauffé toutes les âmes. Les artistes étrangers ont entendu la voix de la Convention nationale; car, en quelque lieu qu’il respire l’homme de génie est citoyen français. Nous avons reçu du résident de la République près celle de Genève plusieurs ouvrages de divers artistes célèbres, que le jury associera à la gloire des artistes français en resserrant ainsi les liens qui unissent les âmes fraternelles de tous les peuples libres. Les citoyens qui se sont présentés au concours, ceux en particulier qui ont fourni les vues les plus approfondies, ont gardé l’anonyme; ils se sont oubliés eux-mêmes pour ne servir que la patrie et les arts; la vanité crée des ouvrages brillants et frivoles; mais c’est l’amour sacré du bien public qui enfante les travaux grands et utiles à l’humanité. Il paraît, d’après les divers ouvrages qui nous ont été adressés, qu’il sera facile d’établir un rapport simple et peu coûteux entre la nouvelle et l’ancienne division; il suffira de changer le cadran sans altérer l’organisation et les mouvements. Les horloges à sonnerie marqueront également la division décimale en donnant à la roue de compte une division nouvelle. Quoi qu’il en soit, au jury seul appartient le droit de consacrer par son suffrage le meilleur des systèmes proposés : nous ne préjugeons rien, nous suspendons notre opinion; c’est par le doute que l’on arrive à la vérité. Il s’agissait de fixer le mode de jugement; le comité a pensé que, pour ne pas entraver la marche du jury, il ne fallait lui prescrire que quelques règles simples à observer. La publicité de ses séances, où les artistes pourraient eux-mêmes assister pour être les témoins de ses travaux et de son impartialité, a paru au comité une mesure nécessaire pour imposer silence à la calomnie et hâter les progrès de l’art. Le comité a pensé encore qu’il convenait que chaque membre du jury motivât son jugement, et que l’ensemble de ses observations fût offert au public par la voie de l’impression; c’est un moyen de plus de répandre les lumières conservatrices de la liberté, et de rendre justice aux talents. Libre en sortant des mains de la nature,