[Assemblée nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 juin 1791. J inégalité très réelle entre la charge du fonds et celle de la prestation; en effet, les 10 gerbes sur 100 que perçoit le propriétaire de la dernière sont un véritable produit net qui ne sera diminué par aucun des frais antérieurs à la récolte, tandis que les 90 gerbes qui restent au propriétaire du fonds doivent servir en partie à payer les semences et la culture, et que le produit net de ce dernier ne sera que la quantité de gerbes restées après avoir prélevé ces frais. Votre comité vous proposera donc, pour les prestations en quotité de fruits, de fixer la retenue au cinquième du montant de la prestation, comme pour celles en rentes fixes. Mais comment cette retenue se percevra-t-elle? Sera-ce en argent, sera-ce en denrées ? Votre comité pense que la retenue se faisant sur la prestation au moment où on l’acquitte, elle doit porter sur la chose même que le débiteur délivre, et qu’ainsi elle doit être en argent sur ce qui se paye en argent, et en denrées sur ce qui se paye en denrées : cette méthode est à la fois la plus simple, la plus juste et la moins sujette à contestations. Au moment où j’acquilte une rente en blé, il est possible que celui à qui je livre mon grain n’ait pas sur lui d’argent à me donner en échange, mais le blé est là, et nous pouvons toujours le partager dans la proportion prescrite; il en est de même de toutes les autres denrées, excepté de quelques-unes, comme les poules, etc. ; mais presque partout les rentes de cette espèce s’acquittent en argent, et les différentes coutumes ou l’usage en ayant fixé l’évaluation, il ne peut résulter aucune discussion. Mais il n’en serait pas de même s’il fallait, chaque fois que l’on acquitte une prestation en denrées, en déterminer le prix, pour que celui qui la reçoit remboursât en argent le cinquième de ce prix. Il est une autre objection qui a été faite, et qui le sera peut-être encore, c’est que le propriétaire de la prestation payera la contribution en nature, mode qui a été réprouvé par l’Assemblée nationale, cela est vrai; maispourquoi l’Assemblée nationale a-t-elle réprouvé ce mode de contribution? Parce que, portant sur le produit brut et non pas sur le produit net, il est nécessairement inégal, puisque les frais exigés pour telle ou telle culture, ne sont pas les mêmes, au lieu que, dans la prestation, tout est produit net; les frais de celui à qui on la paye se bornent à la recevoir, ou tout au plus à la faire transporter. Ce mode de contribution n’amène pas non plus dans son champ un étranger qui, comme le décimuteur ou le percepteur de contribution, viendrait troubler sa récolte. On lui doit une certaine quantité de denrées, et c’est en les lui livrant que la retenue s’opère; il est donc convenable que la perception de la retenue se fasse dans la même nature que le payement; ce mode n’aura dans ce cas aucun des inconvénients de la perception en nature pour la contribution générale, et c’est celui que prescrit l’article proposé. Quant aux rentes qui ne sont ni ci-devant seigneuriales, ni foncières, mais qui sont l’intérêt d’un argent emprunté, et pour lesquelles l’exemption des impositions royales n’a point été stipulée, elles étaient assujetties à une retenue proportionnelle aux vingtièmes; lors donc qu’au lieu de deux vingtièmes le gouvernement en établissait trois, les débiteurs étaient autorisés à retenir trois vingtièmes sur le montant de la rente : voilà la condition reconnue, sous laquelle. les contrats ont été passés. Nous avons examiné déjà cette question dans le rapport que le comité 45 a eu l’honneur de vous faire au mois de septembre dernier. Ces rentes seront relativement aux deux contributions directes, dans le même cas que les précédentes; votre comité vous proposera de fixer pour elles le même taux de retenue, et il n’est pas injuste; car si vous aviez établi une contribution de quotité, elles y auraient été assujetties d’après leur titre même; d’ailleurs, la baisse qui se prépare dans le taux d’intérêt de l’argent, amènera bientôt le lemboursement, et la liberté que vous avez rendue aux conventions pécuniaires y rétablira, sous peu de temps, l’équilibre. La disposition particulière aux rentes ou pensions viagères que nous vous proposons, est conforme à celle de l’article 8 du titre II de la loi du lor décembre 1790. Le montant de ces rentes ou pensions est beaucoup plus fort que l’intérêt que produirait leur capital constitué en perpétuel, et il détruit chaque année une portion de ce capital; ce serait donc les traiter injustement que de les soumettre à une taxe égale à celle que supporterait l’intérêt ordinaire d’une somme beaucoup plus considérable : ainsi, comme vous l’avez prescrit, lorsque le capital sera connu, la retenue se fera sur le revenu que ce capital produirait au denier vingt. Il a fallu fixer le denier, et votre comité a pris le denier vingt, non pas comme taux légal , puisque vous avez renoncé à ces fixations de taux aussi impolitiques qu’injustes, mais comme celui qui est encore le plus ordinaire. Quand le capital ne sera pas connu, la retenue sera du dixième au lieu du cinquième, ce qui est le calcul moyen pour les rentes viagères. Votre comité a cru aussi devoir vous proposer de décréter que le taux de ces retenues demeurera le même pendant tout le temps durant lequel la contribution foncière restera dans les proportions fixées pour l’année 1791. Voici le projet de décret qu’il a l’honneur de vous présenter : « L’Assemblée nationale décrète ce qui suit : « Art. 1er. Les débiteurs autorisés, par les articles 6 et 7 du titre II de la loi du 1er décembre 1790, à faire une retenue sur les rentes ci-devant seigneuriales, foncières ou constituées en perpétuel, soit en argent, soit en denrées, et de prestations en quotité de fruits, à raison de la contribution foncière, la feront au cinquième du montant desdites rentes ou prestations pour l’année 1791, et pour tout le temps pendaut lequel la contribution foncière restera dans les proportions fixées pour ladite année. « Art. 2. Quant aux rentes ou pensions viagères sujettes à la retenue, les débiteurs la feront aussi au cinquième, mais seulement sur le revenu que le capital, s’il est connu, produirait au denier vingt; et dans le cas où le capital ne serait pas connu, la retenue ne se fera qu’au dixième du montant de la rente ou pension viagère, conformément à l’article 8 de la loi du 1er décembre 1790; ces proportions demeureront les mêmes pour tout le temps déterminé par l’article précédent. p Art. 3. Le débiteur fera la retenue au moment où il acquittera la rente ou prestation; elle sera faite en argent sur celles en argent, et en nature sur les renies en denrées et sur les prestations en quotité de fruits. » (La discussion est ouverte sur ce projet de décret.) M. de Bréinond d’Ars. Les propriétaires de