[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. j décwnlfreI1793 555 tioulier, en inventant des faits pour les tourner en ridicule. Merlin (de Thionville) ajoute que l’on n’ap¬ prendra pas sans étonnement que ce prétendu envoi de 20,000 fusils par le roi de Danemark n’est sans doute autre chose que la fourberie de quelques malveillants qui, ayant tiré ces fusils de la République, les vont faire rentrer, ne pouvant en disposer autrement, suivant leurs desseins perfides. Bourdon reprend et dit que le fait prétendu a été annoncé à la municipalité de Paris, par un commissaire appelé Boursault, et commis de la municipalité. Il demande que la conduite de ce commis, ainsi que celle de l’auteur de la Sentinelle du Nord, soient examinées par les comités de Salut public et de sûreté générale. Cette proposition est décrétée. Merlin (de Thionville) dénonce ensuite des vexations qu’il dit être commises à Thionville par des agents du conseil exécutif qui, ne consi¬ dérant pas tous les sacrifices que les citoyens de cette place ont fait à la République, se per¬ mettent de les taxer arbitrairement avec menace, s’ils ne paient pas, de les taxer révolutionnaire - ment. Clauzel et un autre membre dénoncent aussi quelques faits semblables qui ont eu lieu à Toulouse et dans le département de l’Ouest. Cambon prend aussi la parole sur cet objet. Il est de mon devoir, dit -il, de vous instruire de l’état des finances relativement à la nature des dénonciations qui vous sont faites. Je dois vous dire ce qui se passe à l’occasion de l’em¬ prunt forcé d’un milliard et de l’emprunt volon¬ taire que vous avez décrétés. Ils s’exécutent parfaitement à Paris, ainsi que dans plusieurs autres départements, où tout ce qui se perçoit pour cet objet vient directement à la trésorerie nationale; mais il n’en est pas ainsi des taxes révolutionnaires; il n’en est pas encore entré un sol dans les caisses de district, ni à la tréso¬ rerie. Il faut sans doute que ceux qui ont voulu entraver la Révolution, que les aristocrates, que les égoïstes soient punis par l’endroit sen¬ sible, l’argent; mais il faut aussi que ceux qui ont été trop imposés trouvent un soulagement s’ils ne sont point aristocrates, il faut surtout que les taxes soient à la chose publique. Je demande que les administrations de dis¬ trict dressent l’état de toutes les taxes révolu¬ tionnaires et que ces diverses sommes aboutis¬ sent au centre commun, à la trésorerie. Après quelques autres débats sur la conduite des commissaires du conseil exécutif et les taxes révolutionnaires, l’assemblée décrète : 1° Que la conduite des agents du conseil exécutif et des délégués des représentants du peuple sera examinée par le comité de Salut public qui en fera son rapport; 2® Que le comité des finances présentera un projet de décret sur les moyens de faire rentrer au Trésor public les taxes révolutionnaires. III. Compte rendu du Mercure universel (1). Bourdon (de VOise) dénonce une feuille in¬ titulée la Sentinelle du Nord. L’auteur, dit-il, avec une apparence de bonhomie flamande, est malin et contre-révolutionnaire. Il dit entre autres choses : « Un bâtiment du roi de Dane¬ mark , chargé de 20,000 fusils pour la Répu¬ blique française, est arrivé. Les conducteurs avaient un double passeport. Ils en présen¬ tèrent un en passant sur les côtes d’Angleterre, en disant que le convoi était destiné pour l’Es¬ pagne, et ils côtoyèrent pour la France. Il faut avouer que ce roi de Danemark a de l’esprit. » Dans un autre passage de ce journal il est dit : « Les représentants du peuple à l’armée du Nord viennent d’être mis en arrestation. » Et je reçois, continue Bourdon, une lettre d’Isoré à l’armée du Nord, dans laquelle il me dit : « Que devien¬ drons-nous si des agents du conseil exécutif, qui rôdent autour de nous, cherchent à nous diffamer et détruisent tout le bien que nous faisons. » Je demande que le comité de sûreté examine cette feuille et la conduite de son au¬ teur. (Décrété.) Merlin (de Thionville). On vous dénonce la Sentinelle du Nord pour avoir inséré la note qu’on vous a lue. Bien d’autres journaux ont répété que la République française avait reçu 20,000 fusils du roi de Danemark. C’est une dénonciation que votre comité de Salut public doit examiner attentivement : Cette nouvelle a été fabriquée par des contre-révolutionnaires, afin de brouiller les puissances neutres avec la France; car je puis vous annon¬ cer que ce prétendu envoi n’est qu’illusoire, et un journaliste qui se permet d’insérer un fait qu’il sait être faux ment à la nation entière et doit être puni. Mais je vais attirer votre attention sur un point non moins important : Thionville qui a rendu des services à la Révolution, Thionville entourée d’une armée de 50,000 hommes qui s’étaient déjà rendus maîtres de Verdun et Longwy, Thionville qui cumula ses forces et sa résistance et sut les repousser, Thionville est persécutée par des agents du conseil exécutif, qui imposent sur les citoyens des taxes arbitrai¬ res. Je tiens plusieurs mandats, dont voici un, et qui en sont la preuve. « Le citoyen... paiera dans trois heures la somme de 1,000 livres, sous peine d’être traité comme suspect. » Il faut enfin que le conseil exécutif rende compte de la conduite de ces hommes qui, hier aristocrates, aujourd’hui forcenés patriotes, imposent des taxes arbitraires pour faire oublier leur ancienne aristocratie. Je demande que le décret qui ordonne le rap¬ pel de ces sangsues soit exécuté. Plusieurs membres citent des faits contre les agents du conseil exécutif. Cambon. L’on se plaint journellement des impositions arbitraires que font les agents du conseil exécutif. Je déclare que je n’ai aucune (1) Mercure universel [27 frimaire an II (mardi 17 décembre 1793), p. 424, col. 2]. 556 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j ££�*1793 connaissance de toutes ces impositions. L’on nous croit responsables des sommes qui en pro¬ viennent. On pense qu’elles se versent au Trésor public. Eh bien, ni ce Trésor, ni les caisses de district n’ont reçu un seul denier de ces imposi¬ tions arbitraires. Dans toute l’argenterie du culte qu’ont apportée les citoyens à la Conven¬ tion, il y aura aussi un certain déficit, car il s’est fait beaucoup de friponneries. S’il est essentiel de punir les contre-révolu¬ tionnaires, les égoïstes, par des impôts forcés, il est important que nous donnions des secours aux pères et mères indigents des défenseurs de la patrie, et pour cela, il faut de l’économie, il faut de l’ordre, il faut que tout s’organise et vienne au centre commun (à la trésorerie). Je demande que l’état des taxes révolutionnaires soit envoyé à la trésorerie et que l’on s’occupe de déterminer un mode de dépenses révolution¬ naires. D’après les propositions de différents membres, le décret suivant est intervenu. (Suit le texte du décret que nous avons inséré au cours de la séance d'après le procès-verbal.) IV. Compte rendu des Annales patriotiques et littéraires ( 1 ). Bourdon (de l'Oise) dénonce la Sentinelle du Nord, journal dans lequel une nouvelle fausse se trouve insérée. Il y est dit qu’un bâtiment de Danemark nous a apporté 20,000 fusils. Une autre nouvelle, démentie par une lettre du représentant Isoré et insérée dans la même feuille, c’est que les représentants à l’armée du Nord ont été mis en arrestation. Merlin (de TJiionville) . Sans doute c’est une dénonciation que votre comité doit examiner, car un journaliste qui commet un faux ment à la nation entière. Il peut égarer par des me¬ sures dangereuses, et l’on doit sévir contre celui qui ose ainsi mentir au peuple. Le fait dont il s’agit est faux et tend à nous aliéner les puissan¬ ces neutres. Mais j’appelle votre attention sur des faits non moins graves. Thionville, qui a rendu des ser¬ vices importants à la République, Thionville qui tripla son courage et ses forces en présence de l’ennemi; eh bien Thionville voit ses habi¬ tants taxés arbitrairement par des agents du conseil exécutif. Voici plusieurs de leurs mandats ; celui-ci porte : Le citoyen... paiera, dans trois heures, la somme de 1,000 livres, sous peine d’être traité comme suspect. Il faut enfin que le conseil exécutif examine la conduite de ces hommes qui, hier aristocrates, aujourd’hui forcenés patriotes, cherchent ainsi à faire ou¬ blier leurs opinions précédentes. Cambon. L’on se plaint journellement des taxes arbitraires; mais je déclare qu’il n’en est pas encore rentré un sol à la trésorerie nationale. Les caisses de district n’en ont pas reçu un de¬ nier. L’argenterie du culte éprouvera un déficit (1) Annales patriotiques et littéraires [n° 350 du 27 frimaire an II (mardi 17 décembre 1793), p. 1581, col. 2]. très grand, car il s’est fait, à cet égard, bon nombre de friponneries. Il faut enfin y mettre ordre. Je demande que l’état des taxes révolution¬ naires soit envoyé à la trésorerie nationale et que l’on organise le mode des dépenses révolu¬ tionnaires. L’Assemblée décrète qu’elle renvoie au co¬ mité de Salut public l’examen de la conduite des commissaires du conseil exécutif dans la ville de Thionville. Ce comité prendra les me¬ sures les plus efficaces pour en obtenir des comptes. Le comité examinera le fait relatif aux 20,000 fusils prétendus envoyés de Danemark et inséré dans différents journaux. Les propositions de Cambon sont renvoyées au comité des finances. Compte rendu du Journal de la Montagne (1). Bourdon dénonce la Sentinelle du Nord comme ayant cherché à augmenter le nombre de nos ennemis par la manière perfide avec laquelle le rédacteur rapporte que le roi de Danemark, au mépris des lois de la neutralité, nous a fait passer 20,000 fusils. Un membre remarque que le même fait a été répété dans plusieurs autres journaux. Renvoyé au comité de Salut public. Le même comité [celui de Salut public] est chargé d’examiner la conduite des commis¬ saires du conseil exécutif dans la ville de Thion¬ ville et de prendre les mesures les plus efficaces pour en obtenir des comptes. Cambon. Ils ne sont pas les seuls à qui il faut en faire rendre. Il n’est pas encore rentré un sol au Trésor national des taxes révolutionnaires, et l’argenterie des églises, que l’exagération évaluait à des milliards, ne l’a guère plus enri¬ chi jusqu’à présent. Les mesures qu’il propose à ce sujet sont ren¬ voyées au comité de Salut public. CONVENTION NATIONALE Séance du 27 frimaire an II. (Mardi, 17 décembre 1793) La séance est ouverte à 11 heures (2). Les administrateurs du département de l’Aude font hommage à la Convention nationale de plusieurs de leurs arrêtés, et lui demandent de les recevoir comme la preuve de leurs efforts et de leurs succès pour faire triompher les (1) Journal de la Montagne [n° 34 du 27 frimaire an an II (mardi 17 décembre 1793), p. 272, col. 2] et n° 35 du 28 frimaire an II (mercredi 18 décembre 1793), p. 278, col. 2]. (2) �Procès-verbaux de la Convention , t. 27, p. 255