[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. { g ïéœmbre�Æ gands. C’est ainsi que le nouveau corps de troupes a été d’abord dirigé sur Alençon, où il devait recevoir des ordres ultérieurs, combinés par les succès ou les revers de nos troupes. Vous verrez, citoyens, par la suite de ce rap¬ port, comment les mesures militaires se sont tellement accordées avec les circonstances que cette colonne formidable et inattendue devant se présenter en tête devant la borde des bri¬ gands, tandis que l’armée de l’Ouest les harce¬ lait, les exterminait sur les derrières. Voici l’arrêté du 13 : a Le 13 frimaire, l’an II de la République une et indivisible. « Le comité de Salut public, d’après la nou¬ velle marche que paraissent suivre les rebelles échappés de la Vendée, arrête ce qui suit : « 1° Il sera tiré du corps de l’armée [des côtes de Cherbourg, réuni à Avranches, une force suffisante d’hommes qui resteront avec le général Sepher, dans l’arrondissement des côtes de Cherbourg, pour assurer la garde des côtes et la défense des places fortes ; le surplus des troupes se portera, le plus rapidement pos¬ sible, sur Laval, et de là opérera une jonction avec l’armée de l’Ouest, pour y rester sous les ordres du général en chef Tureau ; « 2° Les représentants du peuple qui sont actuellement près de ce corps de troupes, régle¬ ront, en prenant l’avis du général Sepher, quels seront les corps particuliers, tant d’infanterie, que de cavalerie et d’artillerie, qui devront se joindre à l’armée de l’Ouest pour agir contre les brigands, ainsi que les officiers généraux qui seront chargés de les commander; « 3° Le général de l’armée des côtes de Brest restera pareillement dans cet arrondissement pour la sûreté de ce territoire ; mais les troupes déjà détachées de cette armée, pour marcher contre les rebelles, conserveront cette destina¬ tion, et seront entièrement aux ordres du géné¬ ral de l’armée de l’Ouest; 4° Les troupes tirées de l’armée du Nord, et qui doivent être en marche par Rouen, se diri¬ geront sans retard sur Alençon, où on leur fera passer de nouveaux ordres; « 5° Le général en chef Tureau aura pour objet principal de s’opposer à ce que les bri¬ gands repassent la Loire; il se portera en con¬ séquence avec toutes ses forces, partout où il pourra leur barrer ie chemin ou les combattre. « Il fera en sorte aussi de les empêcher de passer la Loire et de garantir de la dévastation le pays qui se trouve compris entre cette rivière et la Loire (sic). « 11 prendra les moyens les plus propres à faûliter sa jonction avec les troupes des côtes de Cherbourg, qui doivent lui arriver par Laval. « 6° Le conseil exécutif provisoire est chargé de l’exécution du présent, de donner en consé¬ quence les ordres les plus précis aux différents généraux ou agents, et d’y ajouter toutes les mesures qui peuvent opérer la plus prompte destruction des brigands. Il rendra compte au comité de Salut public des obstacles qui pour¬ raient survenir. » A cette époque, le comité apprend, par une lettre de Francastel, datée d’Angers le 11 fri¬ maire, les victoires multipliées que Haxo venait de remporter sur les rebelles commandés par Charette. Voici la lettre de Francastel : « J’ai envoyé de suite copie de votre arrêté au général Haxo. Je venais de recevoir les dé-499 tails suivants sur son expédition de Noirmou¬ tiers. Il y a eu à Machecoul trois ou quatre affaires avec les brigands; partout il les a re¬ poussés et battus complètement. Le 8, il leur a tué 800 hommes à la Harnache et s’est em¬ paré du poste. Ses colonnes sont actuellement réunies à celles des Sables et de Paimbœuf. Le général Dutruy, qui commande celle des Sables, avec 1,400 hommes, a mis 7 à 8,000 brigands en déroute près de Challans. Haxo se dispose à marcher sur Noirmoutiers incessamment. Vos intentions lui seront connues cette nuit. » Le comité, avant tout, devait songer à la garde de Nantes, puisqu’il fallait, à tout prix, interdire aux brigands le passage de la Loire, Carrier, représentant du peuple, en nous déve¬ loppant l’expédition de Haxo, et en dévoilant la trame ourdie à Nantes contre la liberté, nous écrit en même temps que Nantes était à l’abri de toute insulte. Aussitôt le comité rend à Haxo la liberté de reprendre le cours de ses avantages, Arrêté du 15 frimaire. « Le comité de Salut public arrête que le gé¬ néral Haxo est autorisé à reprendre son expé¬ dition projetée contre l’armée de Charette et Noirmoutiers, s’il juge que la ville de Nantes est hors de danger de la part des brigands. Le mi¬ nistre de la guerre est chargé de faire parvenir en conséquence les ordres nécessaires. » On a lu à cette tribune les lettres de Carrier, qui annoncent tous les succès du général Haxo; six fois il a battu les brigands, et les a rejetés dans le marais. L’île de Boin a été reprise, et les dispositions de terre et de mer préparent la prise de Noirmoutiers; mais voici les détails de ce concqflot préparé à Nantes : « Vous ne pouvez pas vous former une idée des progrès rapides qu’a fait ici l’esprit depuis environ trois semaines, vous aurez peine à croire qu’il est à toute la hauteur de la Révolution, partout on n’entend que des cris du plus brû¬ lant civisme ; le drapeau tricolore flotte à toutes les fenêtres; partout des inscriptions civiques; les anciennes églises deviennent des établisse¬ ments publics; tout annonce la mort du fana¬ tisme et de la superstition et le triomphe assuré du patriotisme. L’accident des prêtres qui ont péri sur la Loire réjouit tous les citoyens. Mes collègues à An¬ gers viennent de m’en envoyer cinquante-trois. En échange de ces tisons de guerre civile, j’ai fait passer à Angers cent -trente des plus forts contre-révolutionnaires de Nantes. Mes collè¬ gues me marquent qu’ils ont pris les précautions nécessaires pour les réduire à l’impossibilité absolue d’aller joindre leurs chers brigands. Les autres contre-révolutionnaires restés dans les prisons de Nantes ont ourdi les plus horribles complots, après le départ de leurs compagnons� A l’aide de plusieurs fausses clefs qu’on a saisies et trouvées à Nantes, ils devaient ouvrir toutes les portes des prisons, égorger les concierges, les gardes, incendier les prisons et une grande par¬ tie de Nantes. Six des principaux coupables ont été guillotinés sur-le-champ, une grande mesura va nous délivrer des autres. Les brigands ont attaqué Angers sur tous les points de la rive gauche de la Mayenne, par les routes de la Flèche et de Saumur; l’attaque a été très vive; elle a duré deux jours, et elle 500 [Convention nationale. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j f3 7g3 a été principalement' dirigée sur les portes Saint-Michel et Saint-Aubin. J’avais, avant votre arrêté, invité les géné¬ raux Haxo et Dutruy à suspendre l’ expédition de Noirmoutiers; le général Rossignol avait adopté la même mesure. En recevant ma lettre le général Dutruy se rendit sur-le-champ à Nan¬ tes pour m’engager à lever la suspension; il m’observa qu’ayant remporté avec Haxo cinq victoires successives sur l’armée de Charette, l’ayant mise en déroute, en désordre, et cette bande fugitive n’ayant plus qu’un espace de terrain de huit lieues de surface pour retraite, on ne pouvait pas les arrêter en si beau che¬ min; il m’annonça qu’il avait mis à la réquisi¬ tion du général Vimeux, et à portée de mes ordres, environ 3.000 hommes des postes les plus voisins de Nantes, pour y courir promp¬ tement à la première réquisition. J’adoptai ses dispositions, et sur-le-champ le général Dutruy porta à son camarade Haxo l’autorisation de continuer leurs opérations sur Noirmoutiers; effectivement on a continué à en suivre le plan. A l’instant je reçois une lettre du géné¬ ral Haxo, qui m’apprend qu’il s’est emparé de Beauvoir après y avoir battu les brigands, qui se sont retirés dans les marais qu’üs avaient eu la précaution de couper, et qui leur ont faci¬ lité la retraite en s’opposant à la charge de nos troupes. Il me marque encore qu’il est devant Boin où les brigands se sont jetés, et où ils ont toutes leurs richesses; que l’abord n’en est pas facile, mais qu’il s’occupe des moyens de fran¬ chir les obstacles; la saison semble favoriser nos opérations. Nous pourrons les exterminer dans les marais en les poursuivant, au lieu que si le beau temps n’avait pas continué il nous eût fallu les y noyer. J’avais donné au général Haxo l’ordre très impératif de faire sauter toutes les chaussées, si la saison ne lui permet¬ tait pas d’aborder ce dernier refuge des bri¬ gands. Les brigands exterminés dans les marais de Boin, on se portera sur Noirmoutiers; comme l’attaque \a en être vrve, les forces navales sont très considérables et dans les meilleures dispo¬ sitions; celles ne terre vont on ne peut pas mieux. J’ai fait fraterniser à Nantes les géné¬ raux Haxo et Dutruy. L’accord, la fraternité qui régnent entre eux, sont vraiment admira¬ bles. Qu’il serait à désirer que la même union se trouvât parmi tous les chefs de nos armées ! Comme tout en irait mieux ! Aussi on ne voit pas une seule lâcheté dans les soldats qui mar¬ chent sous les ordres de ces braves généraux; tous combattent avec confiance et intrépidité, et six victoires aujourd’hui les couvrent tous de gloire. Nous avons bien des entraves ailleurs, mais ça va ; ça ira. » Salut et fraternité. 8 igné ; Carrier. « Le général Haxo m’apprend à l’instant qu’il s’est emparé de l’île de Boin; demain, il m’en¬ verra les détails; je les transmettrai à la Con¬ vention. Vive la République. Signé : Carrier. » On a déjà vu que, sur la première nouvelles des -troubles qui naissaient dans le Morbihan, les représentants du peuple à Rennes avaient envoyé le général Tribaut, avec un corps de troupes. Le comité crut devoir y envoyer de nouvelles forces, pour rendre ces mesures plus efficaces.! Arrêté du 15 frimaire. « Le comité de Salut public arrête que le ministre donnera ses ordres pour que le troisième bataillon de la première réquisition du district d’Arras, parte sans délai, pour se rendre à Van¬ nes. » ■ En même temps, le comité destituait le gé¬ néral Sepher, qui témoignait son refus obstiné de conduire contre les brigands les troupes qu’il commandait, et à faire coïncider ses mouve¬ ments avec ceux de l’armée de l’Ouest et des côtes de Brest. Jean-Bon-Saint-André l’a desti¬ tué. Le comité a nommé à sa place le général Vialle pour commander cette division. Nous ne pouvons pas dissimuler que quelques officiers de l’état-major, secondés par des ma¬ nœuvres de l’aristocratie, ont témoigné de la répugnance à servir sous les ordres de Rossi¬ gnol, en répandant sur lui des bruits calom¬ nieux et en affectant de lui contester tout ta¬ lent militaire. On a reproché au comité, dans des écrits dis¬ tribués dans cette enceinte avec profusion, qu’il avait une telle prédilection pour Rossignol, qu’il sacrifiait sans cesse les troupes de la Républi¬ que, en lui conférant le commandement à plu¬ sieurs reprises. h~i Pour apprécier ces reproches avec quelque justice, vous venez d’entendre comment les cir¬ constances les plus urgentes ont amené la né¬ cessité des mesures qu’a prises le comité. En effet, lorsque le comité propose à la Con¬ vention de changer et d’agrandir le territoire de l’armée de l’Ouest, Rossignol fut placé dans une armée qui, loin du théâtre de la guerre, était sans activité et n’exigeait du général qu’une simple surveillance. j£ Qui lui a donc conféré de nouveau le com¬ mandement des troupes? ce sont les hasards de la guerre; c’est la transplantation des brigands à Dol, à Pontorson, à Dinan, et leur projet d’al¬ ler attaquer Rennes. II fallait bien alors que le général Rossignol, placé à Rennes, exerçât son commandement, et qu’à raison de la supério¬ rité de son grade et de son ancienneté, il com¬ mandât dans ces circonstances toutes les forces réunies. Bientôt les brigands, en prenant la route de Laval, et se dispersant vers Angers, changèrent cet état de choses. Qu’a fait le comité que l’on a accusé de tant de prédilections pour Rossi¬ gnol? Il lui a ordonné de demeurer dans le ter¬ ritoire de son commandement des côtes de Brest, pour continuer de le garantir des enne¬ mis du dedans et du dehors. La même me¬ sure a été prise pour le général des armées des côtes de Cherbourg. Nous avons tiré seu¬ lement de ces deux armées les forces néces¬ saires pour donner à l’armée de l’Ouest la masse dont elle avait besoin pour écraser les rebelles. Ici se présente l’occasion de rendre hommage à la vertu républicaine, outragée par la basse jalousie, et par des préjugés aussi invétérés que ridicules. Plusieurs fois le comité a reçu des représen¬ tants du peuple les plus dignes de confiance, le témoignage honorable de leur estime pour Ros¬ signol. Nous ne vanterons pas en lui les talents qui ont distingué dans les armées les Turenne, les Condé ou les Saxe; mais nous dirons à tant d’autres généraux aussi neufs que lui qu’il est brave, qu’il a remporté la victoire du 18, qu’il a mis en déroute les ennemis le 19, et que, lui présent, les troupes de la République n’ont point été battues. Ne serait -il donc permis de louer