{Assemblée nationale-l ARCHIVES PARLEMENTAIRES. {12 août 1790.1 741 tion? Ce serait, j’ose le dire, multiplier les incendies. Je conclus à ce que l’Assemblée nationale décrète que le tribunal de cassation sera unique et qu’il sera placé auprès du Corps législatif. (On demande à aller aux voix.) M. Thouret. Il n’est pas de la sagesse de l’Assemblée de fermer si promptement la discussion. Plusieurs membres demandent encore à être entendus, et moi-même je réclame la parole. (L’Assemblée décide que la discussion n’est pas fermée.) M. Defermon. Vous avez constamment suivi des bases uniformes. Les districts sont établis pour surveiller les municipalités, et les départements pour surveiller les districts: le comité part des mêmes bases. Il vous propose des juges de district pour surveiller les juges de paix. Les juges de district se surveilleront les uns les autres. Il est certain que si vous avez besoin de surveiller les discussions, vous devez aussi surveiller les fonctionnaires. La faiblesse humaine et l’intrigue pourraient faire parvenir deshommes indignes de ces fonctions: il faut donc prendre des mesures de prudence: je ne vois dans une cour unique que l’établissement d’une cour plénière. Quand on désire le bien public aussi vivement que vous, on doit redouter un pareil établissement: il renfermerait plus de pouvoirs réels que le Corps législatif. 11 faut de la majesté à ces tribunaux, mais je ne crois pas que ce soit la majesté qui fasse la justice. On a dit que ce tribunal devait être un balancier qui réglât la marche de l’ordre judiciaire et qu’il ne fallait pas sept balanciers: mais ceci n’est qu’un jeu de mots ; il faut plus d’une roue pour faire aller une machine, pour peu qu’elle soit compliquée. M. Duport. Lorsqu’on veut conserver la liberté dans un Empire, il faut donner tous les moyens possibles de former la volonté générale. C’est ce principe qui exige un tribunal decassation. On a dit qu’il ne fallait pas obliger les justiciables à se constituer en frais ; mais puisqu’il faut toujours que le jugement soit rendu à Paris, les dépenses seront toujours au moins aussi considérables. Le point de vue général doit être d’établir toutes les forces dans le centre; c’est par là que la machine peut acquérir un véritable mouvement. (l\1. Duport, après avoir présenté des développements, conclut à ce que le tribunal de cassation ne soit composé que d’une chambre sédentaire à Paris.) M. Thouret. J’ai dit que, quelque parti que l’on adoptât, il présenterait des inconvénients. Si vous n’avez pas un seul tribunal, vous méconnaissez les principes de la cassation: si vous n’avez qu’un seul tribunal auquel on puisse s’adresser, vous perdez l’utilité de la cassation. Il faut donc un moyen terme. Ce moyen, c’est l’établissement de plusieurs chambres d’arrondissement. Il me paraît le meilleur, sous le rapport de l’intérêt politique et de l’intérêt particulier. Vous n’avez aucun officier chargé de dénoncer les contraventions aux lois ; les demandes en cassation étaient autrefois très rares, parce que l’éloignement des lieux faisait qu’on négligeait les poursuites. Le rapport de la justice particulière est inséparable dans la pratique de la cassation, quoiqu’on le sépare dans la théorie. Les petits tribunaux ont nécessairement besoin de surveillance. Nous faisons la Constitution, et la Constitution doit prévoir tous les moyens et réprimer toutes les vexations. Si la prise à partie était soumise à un tribunal unique, vous la rendriez illusoire, et les juges n en redouteraient plus l’effet. Les requêtes civiles ne doivent pas non plus être abandonnées au tribunal qui aurait rendu la sentence contre laquelle la requête civile est invoquée ; ‘l’intérêt de corps et de l’amour-propre feraient redouter de mauvais jugements. J’en dis autant de la récusation ; c’est une amélioration nécessaire de ne pas la porter dans le tribunal du membre que l’on récuse. Tels sont les points de vue que je recommande à votre attention: il me semble qu’ils sont prévalents aux objections faites au plan du comité. M. Merlin. Le préopinant a porté tous les moyens sur la prise à partie; il a presque oublié qu’il s’agit de la cassation. On vous a prouvé invinciblement que l’intérêt général demande un tribunal unique. (La discussion est fermée.) M. Prieur demande la priorité pour la motion de M. Duport. La priorité est accordée à cette motion, rédigée de la manière suivante : « Art. 1er. Le tribunal de cassation sera unique et sédentaire auprès du Corps législatif. » Cet article est décrété à une très grande majorité. M. Thouret. La base du comité étant changée, les articles que nous avions proposés ne peuvent être mis en délibération ; le comité va se livrer à un nouveau travail. (La séance est levée à 2 heures.) FIN DU TOME XVII.