[Convention nationale.] de la République, portant suppression des loteries particulières les concerne. « Vous avez sans doute regardé toutes les loteries comme un mal en politique, mais vous n’avez pas pu vouloir porter atteinte à la Constitution, qui proscrit les privilèges, puis-qu’aucun établissement public au profit de la nation n’en a obtenu, tels que le Mont-de-Piété, les messageries et autres de ce genre. Ou, si vous conserviez la loterie nationale ci-devant royale, exclusivement à toute autre, vous consacreriez les privilèges. « Il y a plus : cette préférence contre le vœu de là loi serait réservée à l’établissement le moins digne de cette étrange faveur, puisqu’il est aisé de vous convaincre que, de toutes les loteries, celle établie par le dernier tyran, sous le nom de royale, est la plus vexatoire et la plus onéreuse à la classe nombreuse et respectable des sans-culottes. Elle paraît n’avoir été inven¬ tée par l’esprit fiscal le plus perfide que pour arracher au peuple ce qu’il pouvait sauver, de la rapacité des intendants, des subdélégués, des fermiers généraux, des rats de caves et de toutes les sangsues publiques. « La petite loterie nationale offre à ces mêmes sans-culottes des chances plus favorables, et son succès prodigieux est la seule mesure raison¬ nable du suffrage de la classe qui a opéré la plus glorieuse révolution. Le peuple souverain a un intérêt direct à ce que les législateurs, ses mandataires, ne le sacrifient point à une adminis¬ tration avide, qui, depuis trop longtemps, s’en¬ graisse du plus pur de sa substance. « Quelques voix, au moins suspectes, ont exalté votre décret, en disant que vous aviez pour but de détruire l’agiotage des loteries clan¬ destines et étrangères. Eh bien ! législateurs, pour y réussir, il n’est qu’un moyen, c’est de laisser aux actionnaires des avantages plus grands que ceux que ces loteries font espérer, et c’est justement ce que fait la petite loterie nationale. Il n’est donc pas possible de croire que vous ayez eu l’intention de la supprimer. « Votre décret frappe les bureaux clandestins sur la loterie de France. Or, les bureaux de la petite loterie nationale, loin d’être clandestins, ont toujours eu la plus grande publicité. Jamais une seule plainte n’a été portée à leur sujet devant les autorités constituées et l’admi¬ nistration s’est toujours regardée comme soli¬ daire avec tous les buralistes qu’elle a jugés dignes de sa confiance. « Un seul argument a paru de quelque force. On a dit aux administrateurs de la tontine des sans-culottes que le bénéfice résultant de leur loterie tournait au profit des particuliers et que la nation avait le profit de celle nationale, ci-devant royale. Cet argument était fondé sur l’ignorance des faits. L’administration de la petite loterie nationale, ayant toujours en vue le plus grand avantage des sans-culottes et le bien de la République, a consacré la plus grande partie de son bénéfice au soulagement de la nation, et elle fait l’offre d’en verser les deux tiers à chaque tirage dans le trésor national, l’autre tiers devant nécessairement servir à payer les frais de régie qui deviendront plus considérables, à mesure que la petite loterie nationale sera plus généralement connue. Ce tiers même ne sera pas perdu pour la nation, puisqu’il servira à faire vivre beaucoup de pères de famille et de bons citoyens employés dans V administration. 29 s On a dit, législateurs, que votre intention était d’ôter aux sans-culottes les moyens de faire de petites mises et que par là, vous vous flattiez de les dégoûter de tenter la fortune par la voie du sort, mais vous ignoreriez donc que les buralistes de la loterie nationale, ci-devant royale, reçoivent des mises pour les loteries clandestines et étrangères, au profit des ban¬ quiers à eux connus. Pourriez-vous favoriser l’avidité de pareils spéculateurs? Pour tous ces motifs, les administrateurs de la tontine des sans-culottes et de la petite loterie nationale y réunie, en appellent à la justice des représentants du peuple souverain, pour la conservation d’un établissement favo¬ rable, sous tous les rapports, à la classe des sans-culottes et vous ferez justice. « Place de la Victoire nationale, n° 17, Paris, ce 4e jour du 2e mois de Van II de la République une et indivisible. « Les administrateurs de la tontine du pacte social et de la petite loterie nationale y réunie. » II PÉTITION DES CITOYENS TENANT MAISON GARNIE A PARIS (1). Suit le texte de cette pétition d'après un docu¬ ment des Archives nationales (2). Pétition des citoyens tenant maison garnie du faubourg Saint-Germain. Législateurs, Il est de notoriété publique que l’état des locataires des maisons garnies de Paris est, sinon entièrement perdu, du moins évidemment sus¬ pendu jusqu’après la paix. Les mesures de sûreté générale que la Con¬ vention nationale vient de décréter dans sa sagesse à l’égard des étrangers, réduisent ces citoyens à une inaction absolue. Dans ces circonstances, les locataires des maisons garnies du faubourg S aint-Germain prient la Convention nationale de prendre en considération l’impuis¬ sance où ils sont de conserver plus longtemps des établissements purement onéreux, et d’or¬ donner la résiliation des baux et traités qui ne peuvent plus profiter qu’aux bailleurs et causeraient aux preneurs une lésion intolérable. On ne peut se dissimuler que les baux des hôtels garnis ont été portés, même depuis la Révolution, à un prix excessif, et que les pro¬ priétaires des maisons garnies n’ont été si difficiles et si exigeants envers leurs principaux locataires, qu’à raison de l’affluence des étran¬ gers dans la ville de Paris. Une loi sage et fondée sur les bases de la justice vient de rendre désertes les maisons que nous occupons à bail, c’était une mesure indis-(1) Cette pétition n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 8 brumaire an II; mais, en marge du document des Archives, on lit : « Renvoyé au comité de législation, 8 de brumaire, 2e année. Fourcroy, secrétaire. » (2) Archives nationales, carton Dm 251, dossier objets collectifs. ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j Sbrumaire an il ( 29 octobre 1793 30 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I i'octobiriraj'1 pensable de sûreté générale, en vrais républi¬ cains nous y applaudissons, mais en même temps vous réclamons votre justice et votre humanité. Voudriez-vous, législateurs, que nous fussions tenus à payer à des propriétaires un revenu que nous ne touchons pas, ou per¬ mettrez-vous que, pour satisfaire des hommes qui ne connaissent point le prix des sacrifices, nous vendions nos meubles, nos effets, nos vête¬ ments mêmes pour les satisfaire. Alors la mort nous serait préférable, car nous ne pourrions survivre au spectacle déchirant de nos épouses et de nos enfants qui nous demanderaient en vain du pain que nous ne pourrions plus leur donner. Législateurs, nous serons toujours disposés à faire pour la patrie tous les sacrifices qu’exi¬ gent son repos et son bonheur, mais vous ne consentirez jamais que des familles entières périssent pour alimenter l’insatiable cupidité des riches propriétaires. La résiliation de nos baux, voilà le seul espoir qui nous reste, et le seul moyen que votre sagesse puisse déterminer pour ne point réduire à la honte et au cruel désespoir des citoyens que l’honneur guide et que l’amour de la République enflamme. (Suivent 17 signatures.) III. Lettre du représentant Harmand, com¬ missaire DANS LES DÉPARTEMENTS DE LA 14e DIVISION (1). Suit le texte de cette lettre, d’après un document des Archives nationales (2). Le représentant du peuple, député par la Con¬ vention nationale dans les départements de la 14e division, à la Convention nationale. « Angoulème, département de la Cha¬ rente, le 2 du 2 e mois de l’an II de la République française, une et indivisible. « L’esprit public avait été livré ici à la fatale oscillation du royalisme et du fédéra¬ lisme, Roux-Fazillac l’a trouvé dans cet état lorsqu’il est arrivé dans cette partie de la République; les habitants des campagnes disaient déjà qu’il valait autant avoir affaire au roi d’Angleterre qu’à un autre, on leur avait persuadé que la Convention ne pouvait plus gouverner ni résister aux ennemis exté¬ rieurs de la France; cette erreur a cessé par les soins de Roux-Fazillac, mais son départ l’empêche de jouir du fruit de ses travaux. « Les Sociétés populaires étaient désertes, (1) La lettre du représentant Harmand n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 8 bru¬ maire an II; mais en marge du document des Archives, on lit : « Insertion au Bulletin et renvoi au comité de Salut public le 8 du 2e mois de l’an II de la République. » (2) Archives nationales, carton AFn 170, pla-auette 1393, pièce 15. Aulard, Recueil des Actes et de la Correspondance du comité de Salut public, t. 7, p. 591. la stupeur avait abattu le courage des patriotes, ils n’osaient plus parler, ou ceux qui l’osaient étaient insultés et menacés; mais aujourd’hui tout a changé, et ils prennent bien leur revan¬ che; la Société populaire est actuellement très nombreuse, et au heu des noms détestables de roi et de fédéralisme, on n’entend plus que les noms chéris de patrie, de République et d’indivisibilité; les représentants du peuple, au heu des injures et des menaces dont on les outra¬ geait, ne reçoivent plus que des bénédictions et des vœux pour la Montagne. « Les comités de surveillance vont bien, l’ad¬ ministration du département est épurée, ainsi que celle des districts et les municipalités ; les tribunaux vont avoir leur tour et partout il n’y aura plus que des vrais patriotes et de bons citoyens. Les fédérahstes, les royalistes, les presbytériens sont aujourd’hui dans l’impuis¬ sance de nuire et leur désespoir fait la consola¬ tion des patriotes; ils sont tous enfermés ici et la Convention nationale peut être assurée que le véritable patriotisme, celui des sans -culottes, a repris dans Angonlème toute sa force et son énergie. « Les accapareurs s’agitent encore, mais, dans le moment où ils s’y attendaient le moins, des Visites domicihaires ont été faites; on a trouvé dans un grenier environ 900 boisseaux de blé, la maison n’était pas occupée, le propriétaire a refusé de reconnaître les blés, il a prétendu qu’on les avait placés là à son insu, personne ne les a réclamés, mais la réclamation du pauvre a été entendue. « Dimanche, la Société populaire a reçu la nouvehe de la mort de la Messahne autrichienne, après les cris de: Vivent la République et la Mon¬ tagne! la Société populaire et le peuple qui assiste contiuellement et en foule à ses séances, sont allés au pied de l’arbre de la liberté rendre actions de grâce à cette divinité qui a délivré la France de cette furie. L’hymne sacré a, été chanté en chœur, et les citoyens dont l’âme était encore oppressée par le poids de l’existence de ce monstre, se sont retirés en chantant des airs d’allégresse dont le refrain a toujours été : Vive la République! Vive la Montagne! « Harmand. » IV Les administrateurs du département de la Dordogne transmettent a la Conven¬ tion UN RAPPORT RELATIF A L’ÉVASION DE Coustin-Bourzolle, prévenu du crime de CONTRE-RÉVOLUTION (1). Suit le texte des pièces transmises par les administrateurs du département de la Dordogne, d’après des documents des Archives nationales (2). (1) Les pièces transmises par les administrateurs de la Dordogne ne sont pas mentionnées au procès-verbal de la séance du 8 brumaire an II; mais en marge de la lettre du citoyen Lalande, on lit : « Renvoyé au comité de sûreté générale le 8 du 2e mois de l’an II de la République. » (2) Archives nationales, carton F7 4613, dossier Bourzolle. -